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Mal de caribou

Le mal de caribou, appelé aussi jeûne du lapin ou intoxication protéinée, est une forme de malnutrition aiguë causée par la consommation excessive de toute viande maigre (dont notamment le caribou et le lapin) associée à une absence des sources habituelles de nutriments, plus d'autres facteurs de stress comme un environnement sec ou un froid sévère. Les symptômes incluent la diarrhée, des maux de tête, une grande fatigue, une baisse de la pression artérielle, un rythme cardiaque ralenti, et une sensation de malaise et de faim (très similaire à une envie de nourriture) qui ne peut être satisfaite que par la consommation de matières grasses ou de glucides.

Mécanismes envisagés

Il a Ă©tĂ© observĂ© que le foie humain ne peut pas mĂ©taboliser sans danger plus de 285 Ă  365 g de protĂ©ines par jour (pour une personne de 80 kg), mĂŞme chose pour les reins humains qui sont limitĂ©s dans leur capacitĂ© Ă  Ă©liminer l'urĂ©e (un sous-produit du catabolisme des protĂ©ines) de la circulation sanguine. DĂ©passer ces seuils crĂ©e dans l'organisme des niveaux excessifs d'acides aminĂ©s, d'ammoniac (hyperammoniĂ©mie), et / ou d'urĂ©e dans le sang, avec des consĂ©quences potentiellement mortelles[1], surtout si la personne adopte de façon subite un rĂ©gime riche en protĂ©ines sans donner le temps Ă  ses enzymes hĂ©patiques de rĂ©guler leurs niveaux Ă  la hausse. Étant donnĂ© qu'une protĂ©ine contient 4 kcal/g, et qu'un adulte type a besoin d'au moins 1900 kcal pour assurer ses besoins Ă©nergĂ©tiques, on peut dĂ©passer la dose recommandĂ©e de protĂ©ines si on suit un rĂ©gime riche en protĂ©ines avec peu ou pas de graisse ou de glucides. Toutefois, Ă©tant donnĂ© le manque de donnĂ©es scientifiques sur les effets des rĂ©gimes riches en protĂ©ines, et la capacitĂ© observĂ©e du foie de compenser en quelques jours un changement dans l'apport en protĂ©ines, le Food and Nutrition Board amĂ©ricain n'a pas fixĂ© de niveau maximal recommandĂ© d'apport en protĂ©ines ni de fourchette supĂ©rieure acceptable de macronutriments concernant les protĂ©ines[2]. En outre, des sources mĂ©dicales telles qu'UpToDate[3] ne listent rien sur ce sujet.

Observations

Les observations de Stefansson

L'explorateur de l'Arctique Vilhjalmur Stefansson a Ă©crit ce qui suit :

« Les groupes qui se nourrissent d'animaux à viande grasse sont les plus chanceux parmi ceux qui vivent de la chasse car ils ne souffrent jamais de problème lié à un déficit en graisse. Ce problème est particulièrement important, en ce qui concerne l'Amérique du Nord, chez les Indiens qui vivent en forêt et dont la survie dépend parfois des lapins, l'animal le plus maigre que l'on puisse trouver dans le Nord, et qui développent un déficit en graisse extrême connu sous le nom de diète du lapin. Les mangeurs de lapin qui n'ingèrent pas de graisse provenant d'une autre source (castor, orignal, poisson) ont de la diarrhée dans la semaine qui suit, ainsi que des maux de tête, une grande fatigue et une sensation de malaise. S'il y a assez de lapins, les gens vont en manger jusqu'à ce que leurs estomacs soient pleins, mais quelle que soit la quantité ingérée, ils restent sur leur faim. Certains pensent qu'un homme meurt plus vite s'il mange en permanence de la viande maigre que s'il ne mange rien mais on n'a pas rassemblé de preuves suffisantes dans le Nord pour étayer cette théorie. Les décès liés à la diète du lapin ou à d'autres viandes maigres sont rares car tout le monde connait le problème et adopte naturellement des mesures préventives[4]. »

À propos de l'expédition de la baie Lady Franklin 1881-1884, une terrible expérience pour les 25 membres de l'expédition, dont 19 sont morts, Stefansson explique que "c'est le mal du caribou qui est pour moi la clé du problème Greely", et ce pourquoi "seulement six personnes en sont revenues ». Il conclut que l'une des raisons des nombreux décès était le cannibalisme de la chair maigre des membres de l'expédition déjà morts. Stefansson compare cela à la diète de lapin, qu'il explique un peu comme dans l'observation ci-dessus.

Les observations de Darwin

Charles Darwin, dans Le Voyage du Beagle, a Ă©crit :

« Nous étions ici en mesure d'acheter des biscuits. Cela faisait maintenant plusieurs jours que je n'avais rien mangé d'autre que de la viande. Ce nouveau régime ne me déplaisait pas mais j'avais l'impression qu'il m'aurait convenu pour des travaux ardus. J'ai entendu dire que des patients en Angleterre, qui voulaient se limiter à une alimentation exclusivement animale, même avec l'espoir de vivre, n'ont à peine pu s'y tenir. Pourtant, les Gaucho dans la Pampa, pendant des mois, ne mangent rien d'autre que de la viande bovine. Mais ils mangent, j'observe, une très grande proportion de graisse, ce qui est d'une nature moins animale; et ils détestent particulièrement la viande sèche, comme celle de l'Agouti. De même, le Dr Richardson a remarqué «que lorsque les gens se sont nourris pendant longtemps uniquement de viande maigre, le désir de graisse devient si insatiable, qu'ils peuvent consommer une grande quantité de graisse pure même huileuse sans nausée» ce qui me semble un fait physiologique curieux. C'est peut-être dû à leur régime à base de viande que les Gauchos, comme les autres animaux carnivores, peuvent rester longtemps sans manger. On m'a dit qu’à Tandil, des soldats ont volontairement poursuivi un groupe d'Indiens pendant trois jours, sans boire ni manger[5]. »

Notes

  1. S. Bilsborough et N. Mann, « A review of issues of dietary protein intake in humans », International Journal of Sport Nutrition and Exercise Metabolism, vol. 16, no 2,‎ , p. 129–152 (PMID 16779921)
  2. US Food and Nutrition Board, « Dietary Reference Intakes for Energy, Carbohydrate, Fiber, Fat, Fatty Acids, Cholesterol, Protein, and Amino Acids (Macronutrients) », The National Academies Press (consulté le )
  3. « UpToDate » (consulté le )
  4. « Rabbit Starvation » (consulté le )
  5. « Foods to Embrace - Caveman Power - fit, healthy, energetic, mentally sharp, emotionally potent and wonderfully creative », Caveman Power (consulté le )

Bibliographie

  • Bilsborough S, Mann N, « A review of issues of dietary protein intake in humans. », Int J Sport Nutr Exerc Metab, vol. 16, no 2,‎ , p. 129–152 (PMID 16779921)
  • (en) John D. Speth (dir.), The Paleoanthropology and Archaeology of Big-Game Hunting : Protein, Fat, or Politics?, New York, Springer, coll. « Interdisciplinary Contributions to Archaeology », , 233 p. (ISBN 978-1-4419-6732-9, DOI 10.1007/978-1-4419-6733-6, lire en ligne)
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