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MĂ©thode de Debye-Scherrer

La mĂ©thode de Debye-Scherrer est une technique d’analyse cristallographique basĂ©e sur la diffraction des rayons X et qui est utilisĂ©e pour la caractĂ©risation d’échantillons poudreux de matĂ©riaux cristallins.

Historique de la méthode

Chambre de Debye-Scherrer

La chambre de Debye-Scherrer fut inventĂ©e en 1916 par les physiciens Peter Debye et Paul Scherrer. C’est Ă  Göttingen en Allemagne que la collaboration des deux physiciens commença et mena, entre autres, Ă  la publication de leur article sur le comportement des domaines de diffraction des rayons X pour des particules dont l’orientation est alĂ©atoire[1]. C’est dans cet article qu’ils Ă©noncent les principes de base de la mĂ©thode d’analyse de diffraction par l'utilisation d'une chambre de Debye-Scherrer. Cette mĂ©thode a radicalement changĂ© la façon d’analyser la structure des cristaux Ă  trĂšs haut degrĂ© de symĂ©trie et a ouvert la porte vers des mĂ©thodes qui ont permis l’analyse des mĂ©taux et des polycristaux. C’est aussi grĂące Ă  cette mĂ©thode que, deux ans plus tard, ils pourront dĂ©finir le facteur de structure atomique.

Champs d’applications

MĂȘme si elle est de moins en moins utilisĂ©e par les physiciens depuis l’essor des technologies de l’informatique, la mĂ©thode de Debye-Scherrer est une technique d’analyse par diffractomĂ©trie de rayons X qui a l’avantage d’exiger une instrumentation moins onĂ©reuse que la plupart des autres techniques alternatives, comme le diffractomĂštre de poudres automatisĂ© par exemple. Exclusivement conçue pour l’étude des Ă©chantillons poudreux ou polycristallins, la mĂ©thode de Debye-Scherrer permet entre autres de dĂ©terminer le paramĂštre de maille ainsi que la structure cristalline du matĂ©riau Ă©tudiĂ©.

Description de la méthode

Théorie

La mĂ©thode de Debye-Scherrer consiste Ă  sonder un Ă©chantillon cristallin poudreux en dirigeant sur celui-ci un faisceau monochromatique de rayons X. Les microcristaux, dont la taille peut varier entre 0,01 et 0,001 mm, sont orientĂ©s de façon alĂ©atoire Ă  l’intĂ©rieur de l’échantillon et, pour un Ă©chantillon contenant entre et microcristaux, il en existe toujours une grande quantitĂ© pour lesquels l’orientation des plans rĂ©ticulaires avec l’angle d’incidence du faisceau satisfait la loi de Bragg[2] :

oĂč :

Ainsi, chaque microcristal orientĂ© favorablement crĂ©era un rayon diffractĂ© formant un angle de avec l’axe d’émission du faisceau incident. L’ensemble des faisceaux rĂ©flĂ©chis pour une mĂȘme distance interrĂ©ticulaire Ă  l’intĂ©rieur des diffĂ©rents microcristaux formera alors un cĂŽne d’ouverture centrĂ© sur le faisceau de rayons X d’origine.

Représentation des anneaux de diffraction

L’intersection de ces cĂŽnes de diffraction avec un film plan dĂ©posĂ© circulairement aux alentours de l’échantillon crĂ©era des anneaux circulaires centrĂ©s sur les orifices d’entrĂ©e et de sortie du faisceau incident. Par contre, si le nombre de microcristaux Ă  l’intĂ©rieur de l’échantillon est insuffisant, les anneaux de diffraction apparaĂźtront comme une sĂ©rie de points placĂ©s circulairement[2]. Puisque chaque cĂŽne de diffraction est imputable Ă  une distance interrĂ©ticulaire prĂ©cise, l’étude de la distance angulaire sĂ©parant deux anneaux diffractĂ©s sur le film permet alors de dĂ©finir :

Il est important de souligner que les deux derniers paramĂštres mentionnĂ©s ci-haut ne peuvent ĂȘtre obtenus Ă  l’aide de la mĂ©thode de Debye-Scherrer que si l’on connaĂźt dĂ©jĂ  le systĂšme cristallin de la poudre Ă©tudiĂ©e.

Techniquement, la mĂ©thode pourrait aussi servir Ă  obtenir de l’information sur la taille des grains Ă  l’intĂ©rieur de la poudre, inversement proportionnelle Ă  la largeur des anneaux, ainsi que sur l’intensitĂ© du faisceau diffractĂ© qui correspond Ă  la teinte des anneaux[3]. Toutefois, l’incertitude sur les mesures nĂ©cessaires Ă  l’évaluation de ces deux paramĂštres est si importante face Ă  celle qui est obtenue avec les diffractomĂštres automatisĂ©s que la mĂ©thode de Debye-Scherrer n'est Ă  toutes fins pratiques jamais utilisĂ©e Ă  cet effet.

Chambre de Debye-Scherrer

La chambre de Debye-Scherrer est un dispositif relativement simple, qui consiste en une chambre de forme cylindrique, un porte échantillon positionné en son centre et une source monochromatique.

Représentation de l'intérieur de la chambre

La source monochromatique produit des rayons incidents qui traversent un collimateur qui sert Ă  limiter le faisceau incident Ă  son entrĂ©e dans l’appareil. Les rayons, une fois collimatĂ©s, frappent l’échantillon de poudre et sont diffractĂ©s sous la forme de cĂŽnes. Les cĂŽnes formĂ©s par les rayons diffractĂ©s forment des anneaux elliptiques sur le clichĂ©.

Une pellicule de film est placĂ©e sur les parois de la chambre et sert Ă  photographier les anneaux de diffraction. Pour faciliter la lecture du clichĂ©, la chambre est par convention, construite de façon que sa circonfĂ©rence soit Ă©gale Ă  360 millimĂštres ou Ă  180 millimĂštres. De cette façon, la mesure en millimĂštre des distances entre les anneaux de diffraction et le centre de la pellicule peut facilement ĂȘtre convertie en une valeur d’angle de diffraction. Le faisceau primaire est donc recueilli dans un puits. La collecte du faisceau primaire influence la qualitĂ© du clichĂ© puisque la prĂ©cision des donnĂ©es dĂ©pend du contraste entre les anneaux de diffraction et le reste du film. La chambre n’étant pas isolĂ©e, il y aura diffusion des rayons X par les molĂ©cules d’air et en plus de la crĂ©ation d’un voile par rayonnement parasite. Il est donc important de recueillir le rayonnement primaire le plus prĂšs possible de l’échantillon[2].

L'utilisation d'une source de rayons X quasi-monochromatique prĂ©sente gĂ©nĂ©ralement les radiations et . Cela a pour effet de dĂ©doubler certains anneaux de diffractions sur le clichĂ©. Il est possible de distinguer clairement des anneaux pour des angles supĂ©rieurs Ă  15°. Le traitement des doublets va dĂ©pendre de si les doublets sont rĂ©solus, c'est-Ă -dire s’il est facile de les distinguer l’un de l’autre ou non. Si les doublets sont rĂ©solus, il est conseillĂ© d’associer l’anneau extĂ©rieur Ă  et l’angle intĂ©rieur Ă  Si les doublets sont non rĂ©solus, il est prĂ©fĂ©rable d’utiliser le centre de la raie et de lui associer une longueur d’onde correspondant Ă  1/3 * (2* + ). De cette façon, le calcul tient compte de la diffĂ©rence d'intensitĂ© thĂ©orique plus grande de que de [4].

Analyse du cliché de diffraction

DĂ©termination des angles et des plans de diffraction

La longueur d’arc S d’un cĂŽne de diffraction peut s’écrire comme , oĂč x et x’ reprĂ©sentent les positions respectives des deux intersections du cĂŽne Ă©tudiĂ© avec le film plan.

SchĂ©ma d’un clichĂ© par la mĂ©thode de Debye-Scherrer

La position de la premiÚre perforation par laquelle le faisceau entre, à gauche, est alors située en .

En prenant la moyenne pour chaque cĂŽne de diffraction autour de cette perforation, il est alors possible de trouver la position relative du premier orifice par rapport Ă  l’extrĂ©mitĂ© du film. Cette Ă©tape doit ensuite ĂȘtre rĂ©pĂ©tĂ©e pour le deuxiĂšme trou de notre film dont la position entre deux franges d’un mĂȘme cĂŽne est donnĂ©e par .

Afin de faciliter l’extrapolation des donnĂ©es, les chambres de Debye-Scherrer ont usuellement un diamĂštre qui permettra de convertir une distance mĂ©trique sur le plan en une valeur angulaire dans la chambre aisĂ©ment. Ainsi, pour un clichĂ© de camĂ©ra de diamĂštre de (Ă©quivalent Ă  , on trouverait thĂ©oriquement (ou pour une camĂ©ra de diamĂštre (Ă©quivalent Ă  .

Toutefois, il est possible que l’ñge de la pellicule ou encore une contraction de celle-ci lors du dĂ©veloppement, fasse en sorte que la valeur expĂ©rimentale diffĂšre de la valeur thĂ©oriquement attendue. Dans un tel cas, il est nĂ©cessaire d’appliquer un facteur de correction que l’on obtient avec :

.

Dans le cas oĂč l’on a Ă  appliquer ce facteur, la longueur d’arc corrigĂ©e est dĂ©finie par . Sachant que la longueur d’arc , on trouve la relation suivante en degrĂ©s.

De lĂ , pour trouver la valeur de l’angle de diffraction en fonction de la longueur d’arc S mesurĂ©e sur le clichĂ©, il suffit d’utiliser la relation suivante : pour un diamĂštre de camĂ©ra de ou pour un diamĂštre de .

Ensuite, la loi de Bragg permet de déterminer les distances interréticulaires correspondantes à chaque valeur de déviation avec :

Finalement, si le systĂšme cristallin du matĂ©riau Ă©tudiĂ© est connu, deux mĂ©thodes permettent ensuite de dĂ©terminer le paramĂštres de maille de la poudre, soit l’étude avec l’analyseur cubique et l’indexation des plans.

Analyseur cubique

Lorsque le systĂšme cristallin de la poudre Ă©tudiĂ©e est connu, et que celui-ci s’avĂšre d’ĂȘtre cubique, la mĂ©thode graphique de l’analyseur cubique permet d’indexer rapidement les anneaux de diffraction tout en donnant une idĂ©e relativement prĂ©cise du paramĂštre de maille de la poudre analysĂ©e. La technique consiste Ă  tracer les droites du paramĂštres de maille en fonction de pour plusieurs indices de plans sur le mĂȘme graphique. AprĂšs avoir tracĂ© des lignes horizontales pour chaque distance interrĂ©ticulaire ayant diffractĂ© dans la chambre de Debye-Scherrer, il est possible de dĂ©terminer approximativement la valeur du paramĂštre de maille recherchĂ© en trouvant la valeur de pour laquelle chaque ligne verticale intercepte une droite de l’analyseur[5].

Indexation des plans pour une maille cubique

L’indexation des plans est une mĂ©thode pour identifier les plans qui correspondent aux angles de Bragg des diffĂ©rents anneaux de diffraction. À partir des valeurs de obtenues en analysant le film de diffraction et en connaissant le systĂšme cristallin de l’échantillon, il est possible de dĂ©terminer les indices (hkl) correspondants Ă  ces valeurs avec la mĂ©thode d’indexation des plans.

La mĂ©thode peut ĂȘtre rĂ©sumĂ©e Ă  l’aide du tableau suivant, oĂč les Ă©tapes vont chronologiquement de gauche Ă  droite :

Angle de BraggDistance interréticulaireCoefficient CEntier NIndices du planParamÚtre de maille
ou

Pour une maille cubique, le paramÚtre de maille suit la relation . La relation étant généralement plus compliquée pour les autres familles cristallines, la méthode exprimée ici ne serait pas appropriée pour indexer des plans dans ces réseaux de Bravais.

Ainsi, pour une maille cubique, on peut remarquer que la somme est proportionnelle Ă  . Pour chaque distance interrĂ©ticulaire trouvĂ©e, il faut alors Ă©valuer la valeur d’un coefficient . De lĂ , il faut ensuite normaliser les rĂ©sultats obtenus selon la plus petite valeur, c’est-Ă -dire de diviser chaque valeur de par la plus petite. Il en rĂ©sulte alors un ensemble de valeurs de normalisation supĂ©rieures ou Ă©gales Ă  1. En multipliant celles-ci par un facteur de multiplication , il faut ensuite tenter d’obtenir des valeurs le plus prĂšs possible d’un nombre entier. On peut simplement Ă©valuer ce facteur par essais erreurs, en sachant justement que celui-ci est gĂ©nĂ©ralement proche de 1, soit 1, 2, 3, 4, etc. Toutefois, si une valeur normalisĂ©e donne le nombre 7, il est important de multiplier d’un facteur 2 l'ensemble des valeurs, car il est mathĂ©matiquement impossible d’obtenir cette somme en additionnant trois carrĂ©s de nombre naturels.

À partir de lĂ , il est possible d’indexer chaque valeur entiĂšre N obtenue Ă  un plan de diffraction puisqu’elles sont la somme des carrĂ©s des indices de Miller associĂ©s Ă  ce plan. Finalement, en Ă©tudiant ces valeurs entiĂšres, il est Ă©galement possible de reconnaĂźtre le mode du rĂ©seau cristallin cubique du matĂ©riau grĂące aux extinctions systĂ©matiques associĂ©es Ă  chaque mode, c’est-Ă -dire en remarquant les valeurs de N manquantes. Enfin, le paramĂštre de maille de la poudre Ă©tudiĂ©e est obtenu par :

Références

  1. « Qui était Paul Scherrer? », sur Paul Scherrer Institue (consulté le )
  2. Jean-Jacques Rousseau et Alain Guibaud, Cristallographie géométrique et radiocristallographie : Cours et exercices corrigés, Paris, Dunod, , 3e éd., 384 p.
  3. (en) J.M. Cowley, Diffraction Physics, Amsterdam, North Holland, , 481 p.
  4. (en) B. D. Cullity, Elements of X-ray diffraction, Prentice Hall, , 3e Ă©d., 664 p.
  5. (en) Laboratory Experiments in X-Ray Crystallography ; L.V. Azaroff, R.J. Donahue ; Mc Graw Hill (1969), p. 67-71

Articles connexes

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