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Lucia de Brouckère

Lucia, Florence, Charlotte de Brouckère, née le à Saint-Gilles (Belgique) et décédée à Ixelles (Belgique), le (à 78 ans) est une chimiste, professeure à l’ULB et militante laïque belge[1].

Lucia de Brouckère
Naissance
Saint-Gilles (Belgique)
DĂ©cès (Ă  78 ans)
Ixelles (Belgique)
Nationalité belge
Famille Louis De Brouckère (père) / Gertrude Guïnsbourg (mère)
Domaines chimiste / professeur à l'Université libre de Bruxelles
Institutions Université libre de Bruxelles
Distinctions Prix Wetrems / Prix Stas de l'Académie de Belgique

Biographie

Jeunesse et Ă©tudes

Lucia de Brouckère est la fille de Gertrude Guïnsbourg et de Louis de Brouckère, célèbre politicien socialiste du XIXe siècle et principal porte-parole de la gauche du POB[2]. Elle voue à son père une admiration sans borne qui l’a influencé fortement par son militantisme. En conséquence de quoi, elle poursuit ces engagements toute sa vie durant[3].

NĂ©e en Belgique, elle y passe une partie de son enfance et y commence son parcours scolaire.

Durant la Première Guerre mondiale, elle poursuit ses études primaires et secondaires en Angleterre. Elle en garde un seul souvenir, celui d’y avoir souffert du froid.

Ce n’est qu’en 1918, qu’elle revient en Belgique. En 1923, Lucia s’inscrit à l’Université libre de Bruxelles où elle choisit d’étudier la science et plus en particulier la chimie. D’après Brigitte Van Tiggelen, elle fait ce choix car elle était inspirée par Daisy Verhoogen, chef de travaux, qu’elle considère comme un modèle[4]. À cette époque, être chef de travaux est la fonction académique la plus haute que puisse occuper une femme.

En 1927, Lucia obtient son doctorat en chimie ; sa thèse portant le titre « L’absorption des électrolytes par les surfaces cristallines » est primée du prix Stas de l’Académie royale de Belgique[4].

Carrière professionnelle

Fin 1927, elle devient assistante du professeur Jean Timmermans dans le service de chimie physique. Elle fait de mĂŞme dans le laboratoire de chimie analytique du professeur Alexandre Pinkus.

En 1933, elle obtient son diplôme d’agrégation en chimie.

Elle est chargée de cours à Gand de 1930 à 1932 et devient la première femme à enseigner dans une Faculté des Sciences en Belgique. De 1937 à 1940, elle enseigne le cours « d’Éléments de chimie générale »à l'Université libre de Bruxelles.

En 1941, à la suite de la décision prise par l’Université libre de Bruxelles de suspendre l’enseignement dû à l’éclatement de la Seconde Guerre mondiale, Lucia de Brouckère regagne Londres. Elle y participe à la recherche appliquée à l’effort de guerre. En 1944, elle prend la direction de la Section des Industries chimiques au Ministère des Affaires économiques du gouvernement belge en exil à Londres. Cette expérience liée à cette fonction importante lui permet d’espérer une promotion à son retour en Belgique.

En , quand l’Université libre de Bruxelles ouvre à nouveau ses portes, Lucia de Brouckère devient alors professeur ordinaire. Elle est progressivement titulaire des grands cours de chimie générale, chimie analytique et chimie physique. Elle s’attelle à réorganiser le département de chimie de l’université pour en faire une section de chimie moderne avec un environnement propice à l’enseignement et à la recherche et donner une formation plus orientée vers les travaux pratiques. Elle invite également de jeunes professeurs formés à l’étranger afin de développer un esprit nouveau. À l’époque, selon elle, l’enseignement catholique était totalitaire qui cherchait donc à modeler les étudiants en fonction d’une idéologie établie.

Le grand prestige qui s’attache à sa personnalité pousse de nombreux étudiants à faire leurs recherches sous sa direction.

Lucia de Brouckère va collaborer avec Ilya Prigogine. Ils vont se consacrer à la thermodynamique et à la phase liquide dont Lucia assume la partie expérimentale.

En 1951, elle prend la tête du laboratoire de minéralogie et d’analyse. Ses recherches lui valent le prix Wetrems en 1953.

Parallèlement à ses fonctions académiques, elle participe à la gestion de la faculté en tant que vice-présidente (1959-1960) puis présidente (1960-1962)[5].

À partir de 1965, elle intègre le Conseil d’Administration en charge de la gestion et de la coordination des Instituts Internationaux de Physique et de Chimie Solvay[6].

Afin de susciter la naissance de vocations auprès des jeunes, elle participe à la création des Jeunesses scientifiques et du centre universitaire du film scientifique. Elle accepte la présidence du comité central de l’Extension de l’Université libre de Bruxelles[7].

Elle est admise à l’honorariat en .

En dehors de la sphère universitaire

En dehors de l’Université libre de Bruxelles, depuis 1945, de Brouckère siège au conseil d’administration de l’Institut de la Recherche Scientifique dans l’Industrie et l’Agriculture.

En 1952, elle commence à siéger au sein de la quatrième commission de chimie-physique du Fonds national de la Recherche Scientifique.

Ă€ partir de 1955, elle est membre de la Fondation universitaire .

Elle préside la Société belge de Chimie dès 1958 et obtient la fonction de vice-présidente du comité consultatif du Centre nucléaire de Mol.

Intervention dans le domaine public

Lucia de Brouckère s'est montrée tout le long de sa vie comme une défendeuse des libertés, de la pensée démocratique et des droits des femmes. Elle est très engagée dans la défense du libre examen et de la démocratie.

  • En 1934, elle est Ă©lue comme première femme prĂ©sidente du ComitĂ© mondial des femmes contre la guerre et le fascisme qui est une association fĂ©minine Ă  sympathie fĂ©ministe[8].
  • Elle a fait partie de la « fondation pour l’assistance morale aux dĂ©tenues ».
  • En 1936, elle se bat pour la dĂ©fense de l’Espagne rĂ©publicaine.
  • Elle a Ă©tĂ© membre du Centre d'action laĂŻque dont la prĂ©occupation première est de dĂ©pĂ©naliser l’avortement peu après la Seconde Guerre mondiale. C’est ainsi qu’en 1962, elle fera partie des fondateurs du planning familial « La Famille heureuse ».
  • Peu après les manifestations des Ă©tudiants de , elle dirige l’AssemblĂ©e constituante chargĂ©e d’élaborer les rĂ©formes mettant en place les nouveaux statuts de l’UniversitĂ©.

Elle décède à Ixelles le , à l’âge de 78 ans.

Citation

« Ce qui m’a frappée au cours de mes recherches, c’est l’extraordinaire cohérence interne des théories dont l’expérience a démontré de façon inéluctable quelles étaient inexactes. Ceci doit nous inciter à la prudence et à la modestie. Les sciences dites exactes et naturelles ne nous révèlent aucune Vérité absolue, définitive, clichée, immuable, aucune Vérité existant en dehors du temps et de l’espace, qu’il suffirait de cueillir comme la fameuse pomme ! Les sciences nous proposent des vérités partielles qu’il faut constamment, non seulement corriger, mais revoir dans leurs fondements mêmes. Elles exigent l’application constante du principe du libre examen qui est à la base de notre morale laïque ».

Ĺ’uvres

  • Chimie gĂ©nĂ©rale, Presses universitaires de Bruxelles, 1963.
  • Évolution de la pensĂ©e scientifique : Ă©volution des notions d’atomes et d’élĂ©ment, FĂ©dĂ©ration des amis de la morale laĂŻque, 1982.
  • Le principe du libre examen et son prolongement : la laĂŻcitĂ©, U.A.E, 1979.

Hommages

  • En 1974, le fonds Lucia de Brouckère est crĂ©Ă© pour aider les jeunes chercheurs en chimie afin de financer leurs voyages d’études[9].
  • La « Maison de la LaĂŻcitĂ© » de Bruxelles porte dĂ©sormais son nom.
  • En 1993, une sĂ©rie de ses Ă©crits ont Ă©tĂ© repris dans l’ouvrage : « Science et libre examen. Un hommage Ă  Lucia de Brouckère ».
  • En , la FacultĂ© des Sciences de l’UniversitĂ© libre de Bruxelles a inaugurĂ© au forum du campus de la Plaine, le « square Lucia de Brouckère ».
  • Elle est choisie pour parrainer la Haute Ă©cole Lucia de Brouckère qui vit le jour le . Cet Ă©tablissement est composĂ© de la fusion de 5 enseignements : L’institut Haulot, l’institut Meurice, l’institut supĂ©rieur Ă©conomique, l’institut supĂ©rieur pĂ©dagogique et Ă©conomique ainsi que le site Ferry[10].
  • En , la FacultĂ© des Sciences de l’UniversitĂ© libre de Bruxelles rend un hommage Ă  cette chercheuse en crĂ©ant la « Fondation Lucia de Brouckère ». Elle a essentiellement pour but de contribuer d’une manière gĂ©nĂ©rale Ă  la diffusion des sciences et d’encourager celle-ci par tous les moyens appropriĂ©s. Cette fondation a notamment organisĂ© des cycles de confĂ©rences et a collaborĂ© Ă  la semaine des expositions prĂ©parĂ©e par les Ă©tudiants de la FacultĂ©. Elle a aussi assurĂ© la publication de chacune de ces confĂ©rences dans la collection Connaissance du RĂ©el et pris en charge l’édition d’une brochure pĂ©dagogique qui accompagne les expositions des Ă©tudiants[11].

Notes et références

  1. Jacqueline Aubenas, Jeanne Vercheval-Vervoort et Suzanne van Rokeghem, Des femmes dans l'histoire en Belgique, depuis 1830, Bruxelles, Éditions Luc Pire, 2006, p. 144.   
  2. Jacqueline Aubenas, Jeanne Vercheval-Vervoort et Suzanne van Rokeghem, Des femmes dans l'histoire en Belgique, depuis 1830, Bruxelles, Éditions Luc Pire, 2006, p. 144.
  3. Eliane Gubin, Catherine Jacques, Valérie Piette, Jean Puissant, Dictionnaire des femmes belges : XIXe et XXe siècles, Bruxelles, Racine, 2006, p. 140.
  4. « De Brouckère, Lucia (1904-1982) », sur bestor.be, (consulté le )
  5. Eliane Gubin, Catherine Jacques, Valérie Piette, Jean Puissant, Dictionnaire des femmes belges : XIXe et XXe siècles, Bruxelles, Racine, 2006, p. 138.
  6. http://www.solvayinstitutes.be/html/solvayconf_chemistry.html
  7. Eliane Gubin, Catherine Jacques, Valérie Piette, Jean Puissant, Dictionnaire des femmes belges : XIXe et XXe siècles, Bruxelles, Racine, 2006, p. 139.
  8. Catherine Jacques, Les féministes belges et les luttes pour l’égalité politique et économique 1918-1968, Bruxelles, Académie Royale des Sciences, des Lettres et des Beaux-Arts de Belgique, 2013, p. 246.
  9. Pol Defosse, Jean-Michel Dufays, Martine Goldenberg, Dictionnaire historique de la laïcité en Belgique, Bruxelles, Fondation Rationaliste et les Éditions Luc Pire, 2005, p. 82.
  10. « Historique », sur heldb.be (consulté le )
  11. Gisèle Van de Vyver et Jacques Lemaire, Science et libre examen, un hommage à Lucia de Brouckère, Bruxelles, Espace de Libertés et Centre d'action laïque, 1993, pp. 8 à 10.

Bibliographie

  • Anne-Sophie Dervise-Marchant et al., Les 175 ans de l’ULB, Bruxelles, Masson et Thomas-Lemoine, 2010, p. 23.
  • Bestor, « De Brouckère, Lucia (1904-1982) Â», bestor.be (page consultĂ©e le 18/10/2017).
  • Brigitte Van Tiggelen, « Lucia de Brouckère (1904-1982) Â», European Women in Chemistry, Jan Apotheker en Livia Simon Sarka, Weinheim, Wiley-VCH, 2011, pp. 88-89. 
  • Catherine Jacques, Les fĂ©ministes belges et les luttes pour l’égalitĂ© politique et Ă©conomique 1918-1968, Bruxelles, AcadĂ©mie Royale des Sciences, des Lettres et des Beaux-Arts de Belgique, 2013, p. 246. 
  • Eliane Gubin, Catherine Jacques, ValĂ©rie Piette, Jean Puissant, Dictionnaire des femmes belges : XIXe et XXe siècles, Bruxelles, Racine, 2006, pp. 138-139. 
  • Gisèle Van de Vyver et Jacques Lemaire, Science et libre examen, un hommage Ă  Lucia de Brouckère, Bruxelles, Espace de LibertĂ©s et Centre d'action LaĂŻque, 1993, pp. 6-159.
  • Haute École Lucia de Brouckère, http://www.heldb.be/fr/haute-ecole-bruxelles/historique, (consultĂ© le 16/10/2017). 
  • HervĂ© Hasquin (dir.), Dictionnaire d'Histoire de Belgique : Vingt siècles d'institutions, les hommes, les faits, Bruxelles, Didier Hatier, , 1re Ă©d., 524 p. [dĂ©tail des Ă©ditions] (ISBN 9782870886267)
  • Jacqueline Aubenas, Jeanne Vercheval-Vervoort et Suzanne van Rokeghem, Des femmes dans l'histoire en Belgique, depuis 1830, Bruxelles, Éditions Luc Pire, 2006, pp. 144-145.
  • Philippe Roberts-Jones et al., Nouvelle biographie nationale, vol. 9., Bruxelles, AcadĂ©mie royale des Sciences, des Lettres et des Beaux-Arts de Belgique, 2007, pp. 111-114. 
  • Pol Defosse, Jean-Michel Dufays, Martine Goldenberg, Dictionnaire historique de la laĂŻcitĂ© en Belgique, Bruxelles, Fondation Rationaliste et les Éditions Luc Pire, 2005, p. 82.  

Voir Aussi

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