Accueil🇫🇷Chercher

Le Concile d'amour

Le Concile d'amour. Une tragédie céleste en cinq actes est l'œuvre majeure d'Oskar Panizza, publiée en 1894. Il s'agit d'une tragédie satirique et grotesque radicalement anti-catholique. Cette pièce provoqua un scandale à sa parution, et Panizza fut condamné à un an de prison pour blasphème. Il dut ensuite s'exiler en Suisse. Longtemps interdite en Allemagne, cette pièce ne parut pour la première fois en français qu'en 1964.

Le Concile d'amour
Image illustrative de l’article Le Concile d'amour
Couverture de la troisième édition (1897) par Jakob Schabelitz, Zürich. Dessin : Max Hagen.

Auteur Oskar Panizza
Pays Drapeau de l'Allemagne Allemagne
Genre tragédie satirique
Date de parution 1894

Résumé

La pièce se déroule en 1495 dans trois lieux différents : le Ciel, l'Enfer et la cour du Pape Alexandre VI, né Rodrigo Borgia. Dieu le Père, un vieillard sénile et fragile, Jésus le simple d'esprit et Vierge Marie sont informés de la situation scandaleuse sur la Terre, en particulier à Naples, et des orgies à la cour du Pape. À Pâques, ils inspectent eux-mêmes le Vatican et sont alors témoins des jeux et intrigues obscènes des courtisans. Cela les convainc de conclure un accord avec le Diable : celui-ci doit inventer une peine terrible qui survienne immédiatement après les péchés charnels sans pour autant priver les hommes de la rédemption. La force de création de Dieu est en effet épuisée ; il ne peut plus créer d'être humain, et dépend donc de ceux existant. En retour, le Diable exige un portail magnifique pour l'enfer délabré, le droit à des entretiens inopinés avec Dieu et surtout la liberté de répandre ses idées, car

« quand quelqu'un pense, et n'a pas le droit de faire part de ses idées à d'autres personnes, c'est là la plus horrible de toutes les tortures. »

La peine inventĂ©e par le Diable est la syphilis. Pour l'apporter sur la Terre, il engendre avec SalomĂ© (la personne la plus rusĂ©e de l'enfer) « l'Épouse Â», une femme irrĂ©sistiblement belle, qui contamine d'abord le Pape, puis les cardinaux, puis les Ă©vĂŞques et enfin le reste de la hiĂ©rarchie de l'Église. La maladie touche alors très vite l'humanitĂ© tout entière.

Le procès du Concile d'amour

Manuscrit du Concile d'amour (1893).

Cette satire anti-catholique provoqua le plus grand scandale littéraire de la décennie 1890. Le Concile d'amour fut publié en 1894 par Jakob Schabelitz à Zürich. Panizza envoya des exemplaires de sa pièce à des journalistes et à ses amis, de telle sorte que le livre était déjà un sujet largement débattu avant même son arrivée sur le marché. Theodor Fontane, Detlev von Liliencron, Otto Julius Bierbaum (en) et d'autres se montrèrent enthousiastes devant cette œuvre spectaculaire.

Le Concile d'amour ne fut disponible que quelques semaines dans les librairies : Le , après une critique dans la Allgemeine Zeitung, la police saisit tous les exemplaires encore en vente en Allemagne, et Panizza fut accusé de blasphème.

L'affaire traversa la presse allemande. Panizza trouva des sympathisants chez les journalistes libéraux et socio-démocrates ; il rencontra à l'inverse une violente hostilité dans les journaux conservateurs. Même Thomas Mann, que Panizza avait connu personnellement quand ils étaient étudiants à Munich, approuva cette poursuite en justice pour "absence de goût" blasphématoire. Il est cependant vraisemblable qu'il n'avait lui-même pas lu le livre, comme beaucoup d'autres critiques.

L'affaire Panizza se transforma en un procès hautement politique Ă  l'encontre des « Modernes Â». Le , pendant le procès qui se dĂ©roulait Ă  Munich, Panizza endossa le rĂ´le du dĂ©fenseur de la libertĂ© de la littĂ©rature moderne, et se prĂ©senta en martyr, conscient pourtant des risques qu'impliquait une telle position. Allant contre l'avis de ses amis qui lui avaient conseillĂ© de fuir Ă  l'Ă©tranger, il rechercha ardemment le conflit avec l'État. Il refusa mĂŞme de nier que ses livres Ă©ditĂ©s en Suisse Ă©taient destinĂ©s Ă  l'Allemagne - ce qui Ă©tait l'unique chance d'Ă©chapper Ă  la condamnation.

Son discours sur la liberté artistique convainc à peine les jurés que la justice choisissait au hasard, et dont le niveau de culture était généralement assez bas. Sa phrase « Je reconnais que je suis athée » suffit à le faire condamner. Face à un tel comportement, l'un de ses principaux soutiens, Michael Georg Conrad (en), reste bouleversé devant le tribunal et peut à peine cacher ses doutes quant à la santé mentale de Panizza. Le procès s'acheve donc par une condamnation d'Oskar Panizza. Aucun écrivain de l'Empire allemand n'a jamais été jugé avec une telle sévérité : il écope d'une peine d'un an de prison ferme, et doit payer le coût de procédure ainsi que son séjour en prison.

Adaptation au Théâtre

Adaptation cinématographique

Le réalisateur Werner Schroeter filme la pièce de théâtre en lui rajoutant un prologue et un épilogue en 1981, le film sort en Allemagne le [1]. Le film transcrit la mise en scène d'Antonio Salines au Teatro Belli qui fit grand bruit en Italie[1]. Le doublage fut réalisé par des acteurs allemands pour les besoins de sa diffusion, on peut noter que le réalisateur Werner Shroeter avait la double nationalité allemande et italienne[1].

Le procès devant la Cour Européenne

Le , L'Institut Otto Preminger perd son procès dans l'affaire Otto Preminger contre l'Autriche dans l'arrêt de la Cour Européenne des Droits de l'Homme. L'association se voit interdite de diffuser le film en Autriche, qui était l'adaptation de la pièce du Concile d'amour, pour la raison du maintien de l'ordre public. La Cour Européenne de Droits de l'Homme a considéré que la censure effectuée par l'État Autrichien à la demande de l'évêque catholique d'Innsbruck avait respecté la Convention Européenne, puisque la critique, dite à titre gratuit, d'une religion ne participe en aucune manière au débat sur la place des religions dans l'Europe dans laquelle les États sont seuls garants de la paix sociale, fut-elle considérée dans un espace public laïc.

Éditions en français

  • Oskar Panizza, Le Concile d'Amour, traduit de l'Allemand par Jean BrĂ©joux, prĂ©face d'AndrĂ© Breton, ed. Jean-Jacques Pauvert, coll. LibertĂ©s no 13, Utrecht, 1964.
  • Oskar Panizza, Le Concile d’amour. Une tragĂ©die cĂ©leste en cinq actes, traduction de l’allemand de Jean BrĂ©joux revue et augmentĂ©e par Pierre Gallissaires, prĂ©face d'AndrĂ© Breton, coĂ©dition Agone & Éditions Cent Pages, 2008.

Voir aussi

Sources

Références

  1. « Liebeskonzil (Le concile d'amour) - La critique », sur Critiques et news films, BD, musique (consulté le )

Liens externes

Cet article est issu de wikipedia. Text licence: CC BY-SA 4.0, Des conditions supplémentaires peuvent s’appliquer aux fichiers multimédias.