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Jonchée (rituel)

Une jonchée est constituée de joncs (ce qui donne l'étymologie du mot), de fleurs, de feuilles, de branchages, d'herbes, disposés sur le sol sur le trajet d'une procession religieuse, à l'entrée d'une église, etc., à l'occasion de fêtes ou de grandes cérémonies.

Par extension, le terme de jonchée (et le verbe associé, joncher) désigne des objets de toute nature étalés sur le sol et sur le passage de quelqu'un. Il désigne également la coutume dans les châteaux de couvrir le sol des salles d'une épaisseur de joncs coupés (ou d'autres herbages) à une époque où le tapis de sol était encore sinon ignoré, du moins trop coûteux même pour la plupart des gens riches[1].

Rituel de cérémonie

À l'occasion des fêtes religieuses et des processions, la jonchée était généralement réalisée spontanément par les fidèles.

Dans certaines rĂ©gions[2], la jonchĂ©e Ă©tait rĂ©alisĂ©e Ă  l'occasion d'un mariage et elle se faisait entre les maisons des futurs Ă©poux (en Gascogne, par les donzelons, garçons d'honneur), et de lĂ  vers l'Ă©glise. On en trouve l'Ă©vocation dans le Cant nobiau (« Chant nuptial Â») du poète Pey de Garros (1567) :

Tornatz gojatas de bon'hora
Qui la juncada vatz culhi
Portatz pleas descas
De verduras phrescas (…)

(Revenez de bonne heure, jouvencelles qui allez cueillir la jonchée, portez de pleins paniers de verdures fraîches)[3]

Sanction sociale

La jonchĂ©e est aussi une pratique utilisĂ©e Ă  des fins malveillantes, pour dĂ©noncer des relations adultères entre deux personnes non mariĂ©es : parodie de la jonchĂ©e nuptiale « officielle Â», cette jonchĂ©e se faisait la nuit, entre les domiciles respectifs des personnes concernĂ©es, et les instigateurs avaient alors soin de ne pas se montrer. « La jonchĂ©e nuptiale Ă©tait remplacĂ©e par une jonchĂ©e de haricots et de plumes entre les maisons de deux personnes ayant des relations hors mariage, ou encore lorsque des divorcĂ©s ou des veufs se remariaient[4] Â». Cette pratique, qui n'est pas attestĂ©e en Gascogne avant la RĂ©volution, tend Ă  se substituer au charivari, qui lui Ă©tait bruyant et collectif, souvent dĂ©gĂ©nĂ©rant en conflits incessants et rĂ©primĂ© par les autoritĂ©s. Au contraire, la jonchĂ©e assure l'anonymat de ses instigateurs, tout en exprimant la rĂ©probation de la communautĂ©. Elle n'en revĂŞt pas moins des formes très Ă©laborĂ©es. Si souvent elle est identique Ă  la jonchĂ©e officielle, de branchages et de fleurs, elle se permet plus de variations. En BĂ©arn, elle se fait avec des branchages, des fleurs, du foin, de la paille, des haricots… Ă€ Nay, on la fait avec des vieilles chaussures. Vers Salies-de-BĂ©arn, elle fut mĂŞme plus durablement faite de ciment et de plâtre. Ă€ plusieurs reprises les relations entre un prĂŞtre et une femme furent ainsi matĂ©rialisĂ©es et stigmatisĂ©es. Dans les Hautes-PyrĂ©nĂ©es, la coutume est sensiblement la mĂŞme : herbes diverses entremĂŞlĂ©es de ronces ; très souvent la jonchĂ©e consiste en haricots ou plumes semĂ©es sur le trajet parcouru[5].

Notes et références

  1. Eugène Muller, Curiosités historiques et littéraires, Hachette Livre, , p. 87.
  2. Notamment en Gascogne (juncada)
  3. André Berry, Les Églogues de Pey de Garros, Toulouse, Privat, 1953
  4. Christian-Pierre Bedel, Pays de Lomagne, PaĂ­s, 2004
  5. Norbert Rosapelly, Traditions et coutumes des Hautes-Pyrénées, p. 47

Articles connexes

Bibliographie

  • Christian Desplat, Charivaris en Gascogne, Territoires, Berger-Levrault, 1982
  • Norbert Rosapelly, Traditions et coutumes des Hautes-PyrĂ©nĂ©es, SociĂ©tĂ© acadĂ©mique des Hautes-PyrĂ©nĂ©es, Tarbes, 1990
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