Johann Heinrich von Schmitt
Heinrich Sebastian von Schmitt, né le à Pest en Hongrie et mort le à Dürnstein, fut un officier général autrichien au service de la monarchie des Habsbourg. Il se forgea une solide réputation de géomètre, de cartographe et de stratège lors des guerres menées par l'Autriche contre l'Empire ottoman. Participant à la guerre de la Première Coalition au sein de l'état-major, puis en tant que feld-maréchal-lieutenant, il fut l'un des plus proches conseillers de l'archiduc Charles pendant la campagne de celui-ci au sud-ouest de l'Allemagne dans le cadre de la Deuxième Coalition.
Heinrich Sebastian von Schmitt | ||
Le général Heinrich Sebastian von Schmitt. Gravure sur cuivre de Blasius Höfel (1792-1863). | ||
Naissance | Pest, Hongrie |
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Décès | 11 novembre 1805 (à 62 ans) Dürenstein, Autriche Mort au combat |
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Allégeance | Monarchie de Habsbourg | |
Grade | Feldmarschall-Leutnant | |
Années de service | 1761 – 1805 | |
Conflits | Guerre de Succession de Bavière Guerres austro-turques Guerres de la Révolution française Guerres napoléoniennes |
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En 1799, sa renommée fut ternie par l'assassinat des plénipotentiaires français au congrès de Rastatt, dans lequel son implication reste toutefois à prouver. Il fut mis à la retraite l'année suivante en raison de sa mésentente avec le nouveau commandant en chef de l'armée impériale. Lorsque la guerre reprit à nouveau en 1805, Schmitt fut rappelé à l'armée et affecté aux forces austro-russes regroupées sur le Danube ; il fut tué le à la bataille de Dürenstein, probablement par un tir ami.
Biographie
Famille et éducation
Heinrich Sebastian von Schmitt naquit le à Pest en Hongrie, selon le dictionnaire de référence de Karl Friedrich von Enzenthal[1]. D'autres sources le font naître en 1743 dans l'électorat de Bavière[2] - [3], tandis qu'Oleg Sokolov le dit « originaire de la ville de Krems »[4]. Il était le fils de Johann Sebastian von Schmitt, Rittmeister (équivalent de capitaine de cavalerie) dans le régiment de cuirassiers autrichiens Comte Cordova[2], et de son épouse Elisabeth[1]. En 1742, le régiment de son père prit part à la bataille de Sahay puis au siège de Prague, avant de servir en Bavière et en Rhénanie pendant l'année 1743[5]. Orphelin de père en 1752, il entra le à l'École impériale d'ingénierie de Gumpendorf, où il reçut une éducation et une formation technique approfondies[6].
À sa sortie de l'école, Schmitt fut affecté comme Fähnrich (enseigne) au régiment d'infanterie no 15 Pallavicini le [1]. Au sein de cette unité, il participa à la guerre de Sept Ans sur le théâtre de Bohême, de 1763 à 1765[6]. L'absence de cartes précises avait obéré la conduite des opérations lors de ce conflit et Schmitt fit partie en 1764 d'une commission chargée d'améliorer la cartographie militaire. La nécessité de disposer de militaires formés aux spécificités de la guerre incita les autorités impériales à consacrer davantage de moyens à la formation et à l'éducation des officiers, qui comprit désormais une initiation à la cartographie[7]. Ayant révélé ses capacités en la matière, Schmitt fut promu au grade de lieutenant le et fut transféré à l'état-major du quartier-maître général, tout juste réorganisé[2] - [3].
Carrière militaire
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De 1769 à 1778, Schmitt fut employé à la frontière turque et fut particulièrement actif à Temesvar, dans le Banat. Nommé capitaine en 1778, il fut mobilisé durant la courte guerre de Succession de Bavière avant d'être transféré dans les Balkans, où il demeura jusqu'en 1782. Sa très bonne connaissance du pays lui permit de réaliser toute une série de cartes et d'effectuer des missions de renseignement en Bosnie, alors occupée par les Ottomans, afin de recueillir des informations en vue d'une nouvelle guerre avec la Sublime Porte. Il communiqua notamment des documents sur la situation militaire des Turcs et son évaluation des effectifs turcs présents à Osijek et Alt Gradiska fut appréciée par ses supérieurs[6].
Lorsque la guerre éclata officiellement en 1787, Schmitt fut affecté à l'état-major général du corps de Slavonie. Il participa à la prise de la forteresse de Šabac en Serbie, le ; à la suite de ce fait d'armes, il fut promu au grade de major le par l'empereur Joseph II. L'année suivante, il fut présent au siège de Belgrade et fut fait lieutenant-colonel le . Il fut transféré en Bohême au mois de mars, sous les ordres du feld-maréchal Ernst Gideon von Laudon, dans le cadre d'une guerre préventive contre le royaume de Prusse. Le conflit ayant finalement été évité, Schmitt fut envoyé dans les Pays-Bas autrichiens en 1791 pour aider à réprimer une révolte locale[6].
Parcours durant les guerres de la Révolution française
À l'époque de la Première Coalition contre la France révolutionnaire en , Schmitt servait comme officier d'état-major au sein de l'armée impériale stationnée dans les Pays-Bas autrichiens. Il se distingua lors de la défense du col de la Croix-aux-Bois () et à la bataille de Raismes le . Élevé au grade de colonel le suivant, il fut placé sous les ordres du prince de Saxe-Cobourg-Saalfeld. À l'automne 1794, Schmitt organisa la retraite du gros des forces impériales, désormais commandées par le successeur de Cobourg, le comte de Clerfayt, depuis leur position devenue intenable dans les Pays-Bas autrichiens jusqu'à l'est du Rhin[2] - [3]. Il fit la campagne de 1795 aux côtés de Clerfayt avant d'être incorporé en à l'état-major de l'archiduc Charles par l'empereur François II. Assisté de son adjoint Anton Mayer von Heldensfeld, Schmitt planifia en grande partie la campagne de 1796 qui fut marquée par des victoires impériales à la bataille d'Amberg le et à la bataille de Wurtzbourg le , ce qui lui valut les épaulettes de général-major le 6 de ce mois[6].
La faveur dont Schmitt jouissait auprès de l'archiduc se détériora brièvement en 1799 lorsqu'il fut soupçonné d'être à l'origine de l'assassinat des plénipotentiaires français au second congrès de Rastatt le . La commission officielle chargée d'enquêter sur ce crime exerça une pression considérable sur Schmitt, à tel point que celui-ci démissionna temporairement de ses fonctions de chef d'état-major auprès de l'archiduc Charles ; il fut finalement réintégré peu après. Le , Schmitt fut élevé au grade de Feldmarschall-Leutnant. L'archiduc Charles fut remplacé quelque temps plus tard par le maréchal Kray et Schmitt, bien que maintenu à l'état-major de Kray, sollicita de nouveau sa mise à la retraite, se disant fatigué et incapable d'assumer les exigences de son poste. Les relations tendues qu'il entretenait avec le quartier-maître général de Kray, le général Jean-Gabriel du Chasteler, pesèrent toutefois certainement dans sa décision. Sa démission fut refusée une première fois mais Kray se fit insistant et il fut officiellement relevé de ses fonctions par l'empereur François II le . Schmitt se retira alors à Kremsier, près de Brno[6].
Remise en activité et mort au combat
Schmitt fut rappelé à l'armée durant la guerre de la Troisième Coalition en 1805. Muni d'une lettre de recommandation de l'empereur au général en chef russe Mikhaïl Koutouzov, Schmitt arriva au quartier-général russe et fut nommé chef d'état-major de l'armée alliée. Réunis à l'abbaye de Melk, sur le Danube, lui et les autres commandants élaborèrent une stratégie visant à encercler les troupes françaises du maréchal Édouard Mortier près de Dürenstein. Pour ce faire, ils eurent recours aux services d'un capitaine originaire de la région dont la connaissance de la géographie locale devait se révéler précieuse dans l'exécution du plan[8].
Venu de Linz et de Passau, le maréchal Mortier progressait en direction de Vienne sur la rive nord du Danube. Ses trois divisions étaient étirées sur un front de 56 km le long du fleuve, entre Marbach et Dürenstein. La trop grande distance entre les unités françaises rendaient ces dernières vulnérables à une attaque venant du nord, ce que Napoléon n'avait pas manqué de faire remarquer à son lieutenant. Schmitt mit à profit cette erreur d'appréciation de son adversaire pour porter un contrecoup : le , l'armée de Koutouzov attaqua la division d'infanterie du général Honoré Théodore Maxime Gazan, attachée au corps de Mortier. Le commandant français crut tout d'abord n'avoir affaire qu'à un petit contingent, mais les Russes encerclèrent sa position avec deux colonnes dans la plaine alluviale de Dürenstein. Sans possibilité d'avance ou de retraite, Gazan était pris au piège. C'est alors que surgit en milieu d'après-midi une deuxième division française qui tomba sur le flanc des Russes, avant d'être elle-même prise à partie par Schmitt qui s'était aventuré dans les montagnes à la tête d'une autre colonne[9].
La bataille se prolongea une bonne partie de la nuit mais les Français profitèrent de la suspension des combats pour retraverser le Danube sur des barques[10]. La division Gazan perdit plus de 40 % de son effectif ainsi que plusieurs canons et drapeaux[11]. Dans la confusion et l'obscurité, Schmitt périt, probablement victime du feu ami, dans un champ entre Wadstein et Heudürrgraben[6]. Wilhelm von Kotzebue, un Allemand servant dans l'armée russe, raconte que la colonne de Schmitt fut prise dans un échange de tirs croisés entre le corps russe de Dokhtourov et un parti de cavalerie français au bord du Danube, et que c'est alors que Schmitt aurait été mortellement atteint. Le général autrichien fut enterré sur le champ de bataille avec les morts de la colonne russe qu'il commandait. L'emplacement exact de sa sépulture est inconnu mais un monument à sa mémoire fut érigé dans un parc à proximité de Krems en 1811[12].
Considérations
Schmitt était célibataire[3]. Réputé pour sa vive intelligence, son sang-froid et son courage naturel, il était reconnu en son temps comme l'un des officiers les plus distingués et les plus capables de l'armée impériale autrichienne[6]. David Hollins le considère même comme l'« un des plus grands chefs d'état-major de l'histoire »[13]. L'historien militaire Digby Smith émet pour sa part l'hypothèse que la présence de Schmitt à la bataille d'Austerlitz en tant que chef d'état-major des Coalisés, en lieu et place de Franz von Weyrother, aurait pu fortement influencer l'issue des combats[11]. Au lieu de cela, Weyrother, un des architectes de la défaite autrichienne à Hohenlinden[14], fut à l'origine du désastreux plan de bataille de l'armée austro-russe à Austerlitz[4].
Cependant, l'historien russe Oleg Sokolov estime que la réputation de Schmitt a été surévaluée dans l'historiographie et que les ordres transmis la veille de la bataille de Dürenstein « semblent confirmer un jugement peu flatteur sur les capacités de cet homme »[4]. Il ajoute : « la disposition de Schmidt […] était extrêmement compliquée et ne prenait absolument pas en compte des considérations aussi élémentaires que les embarras possibles dans la marche des colonnes, la mauvaise qualité des routes, la difficulté engendrée par l'absence de moyens de communication efficaces […] pour diriger les unités dispersées »[15]. Dans ses mémoires, le général Jean-Baptiste Crossard émet sur Schmitt le jugement suivant : « homme né avec le génie de la guerre, d'un sang-froid imperturbable, d'une bravoure calme, incapable de dissimulation, d'un excellent conseil ; mais peu jaloux de le faire valoir, s'il était combattu »[16].
Bibliographie
- Karl Friedrich von Enzenthal, Dictionnaire biographique des généraux autrichiens sous la Révolution et l'Empire : 1792-1815, vol. 2, Paris, Librairie historique Teissèdre, , 1143 p..
- Oleg Sokolov (préf. général Robert Bresse), Austerlitz : Napoléon, l'Europe et la Russie, Saint-Germain-en-Laye, Commios, , 541 p. (ISBN 2-9518364-3-0).
- (de) Ranier Egger, Das Gefecht bei Dürnstein-Loiben 1805, Bundesverlag, .
- (en) Robert Goetz, 1805 : Austerlitz, the Destruction of the Third Coalition, Mechanicsburg, Stackpole Books, , 368 p. (ISBN 1-85367-644-6).
Notes et références
- (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Johann Heinrich von Schmitt » (voir la liste des auteurs).
- Enzenthal 2013, p. 638.
- Egger 1986, p. 28.
- (en) Digby Smith et Leopold Kudrna, « Biographical Dictionary of all Austrian Generals during the French Revolutionary and Napoleonic Wars, 1792-1815 », sur napoleon-series.org (consulté le ).
- Sokolov 2006, p. 258.
- (de) Alphons Wrede, Geschichte der K.u.K. Wehrmacht, vol. 3, Vienne, Seidel u. Sohn, , p. 154.
- (de) Jens-Florian Ebert, « Feldmarschall-Leutnant von Schmitt », sur napoleon-online.de (consulté le ).
- (en) Erik Lund, War for the every day : generals, knowledge and warfare in early modern Europe, Westport, Greenwood Press, , 242 p. (ISBN 978-0-313-31041-6, lire en ligne), p. 152 à 154.
- Goetz 2005, p. 76 et 77.
- Goetz 2005, p. 77.
- Sokolov 2006, p. 268.
- (en) Digby Smith, The Greenhill Napoleonic Wars Data Book : Actions and Losses in Personnel, Standards, Colours and Artillery, 1792-1815, Londres, Greenhill, , 582 p. (ISBN 1-85367-276-9), p. 213.
- Egger 1986, p. 28 et 29.
- (en) David Hollins (ill. Christopher Rothero), Austrian Commanders of the Napoleonic Wars, 1792-1815, Osprey Publishing, coll. « Osprey / Elite » (no 101), , 64 p. (ISBN 1-84176-664-X), p. 52.
- (en) James R. Arnold, Marengo & Hohenlinden : Napoleon's Rise to Power, Barnsley, Pen & Sword, , 301 p. (ISBN 1-84415-279-0), p. 222 ; 253 à 255.
- Sokolov 2006, p. 260.
- Enzenthal 2013, p. 639.