Inspecteur général de l'administration en mission extraordinaire
Les inspecteurs généraux de l'administration en mission extraordinaire (acronyme IGAME) étaient entre 1948 et 1964 des hauts fonctionnaires français de l'Inspection générale de l'administration, prédécesseurs des préfets de région (qui avaient été instaurés sous le régime de Vichy, puis démis de leurs fonctions à la Libération sans être remplacés, et enfin réinstitués en 1964 en lieu et place des IGAMEs).
Contexte
L'IGAME est créé par Jules Moch, ministre de l'Intérieur, dans le contexte des troubles communistes et des grèves massives des années 1947-1948 (grèves de 1947 et grève des mineurs de 1948). Le point d'orgue des troubles se situe dans la nuit du 2 au où des militants communistes provoquent le déraillement du train Paris-Tourcoing qui fait 16 morts et de nombreux blessés[1]. Il fait également écho au coup de Prague de qui provoque de vives inquiétudes et fait craindre des événements comparables en France[1]. Jules Moch montre une grande fermeté pour assurer le maintien de l'ordre et dans un souci de rationaliser son dispositif, crée ces nouveaux mandataires détenteurs de pouvoirs exceptionnels[1]. L'IGAME est le produit de la guerre froide dans un moment où le pouvoir est convaincu des agissements subversifs du Parti communiste[1].
Ils sont créés par la loi du [2], précisée par le décret du [3] - [4], ayant en général autorité sur plusieurs départements. Le général de région militaire, les CRS et la gendarmerie lui étaient subordonnés, ainsi que les préfets départementaux, ce qui lui donnait une grande autorité.
Circonscriptions
Leur circonscriptions appelée Igamies regroupaient plusieurs départements. Les igamies correspondaient alors aux régions militaires et leur chef-lieu était le même que celui de la région militaire. Les igamies disparaîtront en 1964, les IGAME étant alors remplacés par les préfets de région.
Les igamies concernaient alors tout le territoire départementalisé de la France : France métropolitaine et Algérie française (jusqu'à l'indépendance de l'Algérie en 1962).
Algérie
- Alger (départements : Alger, Médéa, Orléansville, Tizi-Ouzou) ;
- Constantine (départements : Batna, Bône, Constantine, Sétif) ;
- Oran (départements : Mostaganem, Oran, Saïda, Tiaret, Tlemcen).
Métropole
- Bordeaux ;
- Dijon ;
- Lille ;
- Lyon ;
- Marseille ;
- Metz ;
- Paris (à partir de 1951 et à l'exclusion du département de la Seine) ;
- Rennes ;
- Toulouse ;
- Tours.
Les igamies de Lille, Bordeaux, Marseille et Dijon sont administrées par un « IGAME volant » (résidant à Paris) de 1948 à 1949, qui est remplacé par la suite par un « IGAME » (résidant au chef lieu du département et cumulant la fonction de préfet) comme dans les autres igamies.
Notes et références
- Arnaud Benedetti, « 1947. L'État face à l'impératif du maintien de l'ordre », La Nouvelle Revue d'histoire, no 84, , p. 27-30.
- Loi no 48-471 du 21 mars 1948 portant autorisation de dépenses sur l'exercice 1948 et majoration de droit, JORF no 73 du 24 mars 1948, p. 2876, sur Légifrance : « Article 3 — Sont créés, à compter du 1er avril 1948, à l'inspection générale de l'administration au ministère de l'intérieur, huit emplois d'inspecteur général en mission extraordinaire. Ces hauts fonctionnaires ont rang, prérogatives et traitement de préfet hors classe. ».
- Décret no 51-611 du 24 mai 1951 portant règlement d'administration publique relatif à l'utilisation et aux attributions des inspecteurs généraux de l'administration du ministère de l'intérieur en mission extraordinaire, JORF no du 26 mai 1951, p. 5524, sur Légifrance.
- Lemasurier 1954, p. 378.
Sources
- Guy Michaud (avec Georges Hacquard, ill. R. Bouwens), Guide France, manuel de civilisation française, Paris, Hachette, 1964, p. 92–93
- Luc Rouban, « Les préfets entre 1947 et 1958 ou les limites de la république administrative », Revue française d'administration publique, ENA, no 108 « Administrer la IVe République », , p. 551–564 (DOI 10.3917/rfap.108.0551)
- Jeanne Lemasurier, « Les Inspecteurs Généraux de l'Administration en Mission Extraordinaire », La Revue administrative, Presses universitaires de France, vol. 7, no 40, , p. 377–382 (JSTOR 40777221)
- Jean-Louis Quermonne, « Vers un régionalisme « fonctionnel » », Revue française de science politique, vol. 13, no 4, , p. 849-876 (DOI 10.3406/rfsp.1963.392745)
- Jean-Louis Masson, Provinces, départements, régions : L'organisation administrative de la France, d'hier à demain, Paris, Fernand Lanore, , 698 p. (ISBN 2-85157-003-X, lire en ligne)