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Inondation du Midwest américain de 1993

L'inondation du Midwest amĂ©ricain de 1993 s'est produite entre avril et octobre 1993 dans le bassin du fleuve Mississippi et de ses affluents, dont la rivière Missouri, Ă  la suite de pluies soutenues dĂ©butant l'automne prĂ©cĂ©dent. L'inondation de la rĂ©gion du Midwest est l'une des plus dĂ©vastatrices et des plus coĂ»teuses de l'histoire des États-Unis, causant pour plus de 15 milliards $US (1993) de dĂ©gâts et la mort de 50 personnes[1]. Elle a affectĂ© une bonne partie des États du Dakota du Nord, du Dakota du Sud, de l'Illinois, de l'Iowa, du Kansas, du Minnesota, du Missouri, du Nebraska et du Wisconsin, une zone de 1 200 kilomètres de long sur 700 kilomètres de large. La superficie inondĂ©e[2] sur ce territoire fut de 80 000 km2. C'est la plus importante inondation depuis celle de 1927 en termes de durĂ©e, de surface inondĂ©e, de personnes dĂ©placĂ©es, de dommages aux rĂ©coltes et Ă  la propriĂ©tĂ©, ainsi que de dĂ©passement du niveau des eaux. L'inondation de 1993 a mĂŞme dĂ©passĂ© celle de 1927 dans certains domaines.

Inondation du Midwest américain de 1993
Carte des États-Unis et bassin versant (cyan) affecté
Localisation
Pays
Régions affectées
Coordonnées
38° 49′ N, 90° 07′ O
Caractéristiques
Type
Superficie inondée
80 000 km2 (1 200 kilomètres de long sur 700 kilomètres de large)
Date de formation
Date de dissipation
Conséquences
Nombre de morts
50
Coût
Plus de 15 milliards $US (1993)
Carte

Causes

Photos satellites de la jonction du Mississippi et des rivières Missouri et Illinois près de Saint-Louis (Missouri). L'eau en bleu et le sol en vert tels qu'ils étaient avant (en haut) et pendant (en bas) l'inondation de 1993
Le Missouri en crue près de Jefferson City (Missouri), en 1993. Remarquez en particulier les habitations et l'autoroute sous les eaux à gauche.

En 1991, la longue éruption du volcan Pinatubo a dispersé dans l'atmosphère de grandes quantités de poussières qui se sont répandues autour du globe. Ces dernières pouvant servir de noyaux de condensation pour la production de précipitations, il a été suggéré que cet apport inhabituel a augmenté les quantités de pluies durant l'année 1992, en particulier durant l'automne dans le Midwest[3]. De plus, l'hiver 1992-93 sur cette région a été particulièrement enneigé. Les sols se sont alors saturés en eau et les réservoirs ont atteint leur niveau maximal dans le bassin du système Mississippi-Missouri.

Durant le printemps 1993, la circulation atmosphĂ©rique a suivi un schĂ©ma très stable et rĂ©pĂ©titif amenant des dĂ©pressions chargĂ©es de pluies sur la zone menacĂ©e. Ceci contrastait avec le temps sec qui donnait des conditions de sècheresse dans le sud-est des États-Unis[1]. Ă€ la fin du printemps et au dĂ©but de l'Ă©tĂ©, la saison des orages a commencĂ©. La prĂ©sence persistante d'une dĂ©pression d'altitude sur l'ouest des États-Unis et d'un anticyclone de surface sur le sud-est permirent d'amener de grandes quantitĂ©s d'humiditĂ© sur les Grandes Plaines depuis le Golfe du Mexique. Ces conditions favorables menèrent Ă  la formation de complexes convectifs de mĂ©so-Ă©chelle Ă  rĂ©pĂ©tition qui arrosèrent encore davantage le bassin[4]. Entre le 1er avril et le 31 aoĂ»t, la partie du centre-est de l'Iowa a reçu jusqu'Ă  1 250 millimètres et le centre-nord des Grandes Plaines amĂ©ricaines, de 400 Ă  750 % des prĂ©cipitations normales[1].

À Saint-Louis (Missouri), le National Weather Service (service météorologique américain) a enregistré une montée des eaux dans le bassin du Mississippi/Missouri qui dépassait le niveau d'inondation dans trente-six lieux de l'est du Missouri et du sud-ouest de l'Illinois. Vingt des niveaux atteints ont d'ailleurs dépassé les records précédents établis par les inondations de 1973 sur le Mississippi et de 1951 sur la rivière Missouri.

Les digues, Ă©tablies le long des rivières pour en contrĂ´ler le cours depuis les catastrophes prĂ©cĂ©dentes, ont cĂ©dĂ© en un millier d'endroits. Certaines ont Ă©galement Ă©tĂ© coupĂ©s intentionnellement afin de sauver des villes importantes au prix d'inondation de large portions de terres agricoles. En Illinois, un homme a Ă©tĂ© reconnu coupable d'avoir causĂ© l'inondation catastrophique d'une superficie de 57 km2, en enlevant des sacs de sable qui renforçaient la digue, Ă  seule fin d'empĂŞcher le retour de son Ă©pouse de l'autre cĂ´tĂ© de la rivière et de pouvoir ainsi continuer Ă  faire la fĂŞte[5] - [6].

Chronologie

Avril, mai et juin

Inondation du fleuve Mississippi Ă  Festus (Missouri).

En avril, le Mississippi atteignit une cote de 2 à 3 mètres supérieur au niveau d'inondation puis une légère décrue s'amorça. En mai, le fleuve était à nouveau en proie à une crue similaire puis au début de juin, une nouvelle décrue le ramena sous la cote d'alerte. De sérieuses inondations avaient été dues à la rivière Redwood au Minnesota dès le mois de mai[7]. Le 22 de ce même mois, Sioux Falls (Dakota du Sud) reçut 192 millimètres de pluie en trois heures seulement. Durant la période de mai à juillet, 575 millimètres tombèrent ce qui en fait la période de trois mois la plus pluvieuse de l'histoire de cette ville[8].

Il est tombé de 25 millimètres à Kansas City (Missouri) à 100 millimètres à Springfield (Missouri) de plus que la normale en juin et les eaux du Mississippi s'approchèrent à nouveau du seuil critique à partir de la deuxième semaine sur la grande partie de son cours. La rivière Black au Wisconsin ainsi que les rivières Missouri et Kansas commençaient à déborder localement[7]. Dès le , certaines digues cédèrent ou furent submergées. Ces débordements retardèrent la survenue de la cote maximale du niveau des rivières alors que l'eau envahissait les terres agricoles plus basses, pendant ce temps la pluie continuait.

Juillet

Les pluies torrentielles persistaient en juillet sur les bassins de la rivière Missouri et le haut Mississippi dans les États d'Iowa, du Kansas, du Nebraska, des deux Dakota, de l'Illinois et du Minnesota. Les accumulations locales sous les complexes convectifs de méso-échelle étaient souvent de l'ordre de 125 à 175 millimètres en 24 heures. Ceci donna des accumulations mensuelles qui allaient de 25 millimètres de plus que la normale à Saint-Louis et Springfield au Missouri jusqu'à 175 millimètres de plus que celle-ci à Columbia (Missouri) et Kansas City. Les niveaux de ces rivières dépassèrent donc les records et causèrent même des problèmes aux instruments de mesure non prévus pour de tels dépassements.

Du au 22, l'usine de traitement des eaux de Des Moines (Iowa) fut inondée par la rivière Raccoon et dut cesser son fonctionnement ce qui priva la population d'eau potable. L'Army National Guard (milice américaine) et la Croix-Rouge durent mettre sur pied des points de distribution d'eau et l'embouteilleur local de la bière Anheuser-Busch distribua des paquets de six bouteilles d'eau au logo de la compagnie. Après la remise en marche de l'usine, la pression était faible et l'eau n'était plus potable jusqu'au , on ne pouvait l'utiliser que pour le bain et la toilette. Tout revint en ordre au mois d'août.

La rivière Missouri rejoint le Mississippi juste en amont de Saint-Louis. Le niveau maximum du Mississippi stagna au niveau de l'inondation de 1973 quelque temps mais la crue de la Missouri atteignit le confluent au bout de deux jours. Les deux flux combinĂ©s (se rejoignant dans le Mississippi en aval) menacèrent Saint-Louis (Missouri) et Chester (Illinois). Plus de 1 000 avis et avertissements mĂ©tĂ©orologiques avaient Ă©tĂ© envoyĂ©s pour prĂ©venir les rĂ©sidents et les autoritĂ©s locales de l'avancĂ©e de la crue, cinq fois la normale. En prĂ©vision de cette montĂ©e des eaux, une grande quantitĂ© de sacs de sable avaient Ă©tĂ© placĂ©s le long des berges et des digues de la partie sud de la rivière Missouri, de la rivière des Pères Ă  Saint-Louis, du Mississippi et de divers affluents. Certains de ces travaux ont permis d'Ă©viter l'inondation mais de nombreuses digues ont quand mĂŞme Ă©tĂ© submergĂ©es causant l'Ă©vacuation des rĂ©sidents vers des terres plus Ă©levĂ©es et des dĂ©gâts matĂ©riels importants.

Ă€ Saint-Louis, le niveau du fleuve avait atteint six mètres au-dessus du seuil critique le 1er aoĂ»t[9], son plus haut niveau depuis 228 ans[10]. Le mur de retenue des crues autour de la ville, haut de seize mètres et construit pour contenir une crue identique Ă  celle de l'inondation de 1844, parvint Ă  Ă©viter le dĂ©bordement de justesse. L'eau Ă©tait parvenue Ă  seulement 0,6 mètre de son sommet. La crĂŞte de l'onde se dirige ensuite vers le confluent de la rivière Ohio Ă  Cairo (Illinois). Seuls des dĂ©bordements mineurs ont Ă©tĂ© signalĂ©s plus loin car l'Ohio, situĂ© Ă  l'est des États-Unis, n'avait pas subi de fortes prĂ©cipitations et se trouvait mĂŞme en Ă©tat de sècheresse. Si l'Ohio avait apportĂ© des quantitĂ©s d'eau importantes, l'inondation aurait alors probablement Ă©tĂ© plus dĂ©vastatrice que celle de 1927 sur le bas Mississippi.

Août

Le 1er aoĂ»t, le dĂ©bit du Mississippi Ă©tait de 30 600 m3/s, de quoi remplir chaque seconde plus de 10 piscines olympiques[9]. Les digues cĂ©dèrent alors près de Columbia (Illinois), inondant une rĂ©gion de 190 km2 dont les villes de Valmeyer (Illinois) et Fults (Illinois). Le flot sur les basses terres s'Ă©coulait parallèlement au fleuve et approcha les digues protĂ©geant les sites historiques de Prairie du Rocher et de Fort de Chartres. Le , les autoritĂ©s dĂ©cidèrent de crĂ©er une brèche dans la digue en amont de ces points afin de permettre de rĂ©orienter les flots vers le fleuve. Le plan s'avĂ©ra bon et le rĂ©sultat fut un succès.

Conséquences

Zoom du bassin versant (ligne cyan) dans lequel on retrouve les 80 000 km2 inondĂ©s (en marine)

On estime que sept cents digues privées construites sur le long du Missouri, pour les besoins agricoles, ont été submergées ou détruites. À la suite de ces dégâts, certaines zones le long du Mississippi furent inondés pendant près de deux cents jours (195 jours à Grafton (Illinois), 186 jours à Clarksville (Missouri), 183 jours à Winfield (Missouri), 174 jours à Hannibal (Missouri) et 152 jours à Quincy (Illinois)) alors que sur le Missouri, l'inondation dura jusqu'à presque cent jours (62 jours à Jefferson City (Missouri), 77 jours à Hermann (Missouri) et 94 jours à Saint Charles (Missouri) dans la région métropolitaine de Saint-Louis[1]).

Ce n'est que le que le niveau du fleuve est revenu sous le niveau critique Ă  Saint-Louis. Approximativement 10 000 rĂ©sidences furent dĂ©truites par les flots et 60 000 km2 de terres agricoles furent submergĂ©es. Soixante-quinze villes et villages furent inondĂ©s dont les villes de Valmeyer et Rhineland (Missouri). Ces dernières furent abandonnĂ©es dĂ©finitivement et reconstruites sur des terres plus Ă©levĂ©es[1].

La navigation sur le Missouri et le Mississippi avait été interrompue à partir de juillet pour une durée d'environ deux mois, amenant des pertes économiques de 2 millions $US par jour (1993). Il y a eu officiellement trente-deux décès mais on estime à près de cinquante le nombre probable de victimes. Les pertes matérielles sont estimées entre 15 et 20 milliards $US (1993)[1].

Comparaisons

Plaques de la US Geological Survey montrant les niveaux atteints, de haut en bas, lors des inondations de 1993, 1844 et 1951 à Westport Landing (Kansas City) sur la rivière Missouri

La construction de digues pour canaliser le tracé des rivières dans le MidWest et éviter les inondations a eu des effets divers lors de situation critiques. Voici une comparaison des trois plus importantes inondations rapportées :

  • L'inondation de 1844 est la plus importante des annales amĂ©ricaines dans la rĂ©gion de Kansas City. On estime que le dĂ©bit Ă  Westport Landing Ă©tait de 17 700 m3/s mais le niveau maximal atteint par la rivière Missouri le Ă©tait infĂ©rieur de 0,3 mètre Ă  celui de l'inondation de 1993.
  • L'inondation de 1951, la seconde en importance, donna un dĂ©bit de 16 200 m3/s et une crĂŞte des eaux le infĂ©rieure de 0,6 mètre Ă  celui de 1993. Elle fut cependant la plus dĂ©vastatrice dans cette rĂ©gion parce que le système de digues cĂ©da, n'Ă©tant pas conçu pour un tel niveau, dĂ©truisant le parc Ă  bestiaux qui faisait la rĂ©putation de Kansas City. L'aĂ©roport international de Kansas City fut construit par la suite Ă  un endroit Ă©loignĂ© de la rivière pour remplacer l'aĂ©roport Fairfax alors lourdement endommagĂ©.
  • L'inondation de 1993 se caractĂ©risa par de plus hauts niveaux mais un dĂ©bit plus faible, Ă  15 300 m3/s. Les digues reconstruites après 1951 selon des normes plus exigeantes ont tenu et l'impact a Ă©tĂ© moindre.

Annexes

Articles connexes

Liens externes

Différents résumés des événements par les autorités américaines:

Notes et références

  1. (en) Larson, Lee W., « The Great USA Flood of 1993 », National Weather Service, 24-28 juillet 1996
  2. (en) « High Water: Building A Global Flood Atlas », NASA Earth Observatory (consulté le )
  3. (en) Clayton L. Sneed, « Mount Pinatubo », Emporia State University, (consulté le )
  4. (en) NWS office, Topeka (Kansas), « Great Flood of 1993 », National Weather Service, (consulté le )
  5. (en) Milestones, Time Magazine,
  6. (en) Scapegoat, Illinois Times,
  7. (en) Lott, Neal, « The Summer of 1993: Flooding in the Midwest and Drought in the Southeast, Technical Report 93-04 », National Climatic Data Center, NOAA, (consulté le )
  8. (en) NWS Office de Sioux Falls, Dakota du Sud, « Big Weather Events of the 20th Century at Sioux Falls, SD », National Weather Service, (consulté le )]
  9. (en) « The Mississippi River Flood Of 1993 », Weather.com (consulté le )
  10. (en) Missouri Historical Society, « The Founding of St. Louis », National Park Service (consulté le )
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