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Guerre des mines (1914-1918)

Le premier conflit mondial voit, avec la stabilisation des fronts et la guerre des tranchées, apparaître ou, plutôt, ré-apparaître la guerre souterraine par creusement de galeries souterraines pour faire exploser des mines sous les positions adverses.

Explosion de mine, dans la Somme, le .

La situation au début du conflit

Si la guerre des mines avait été utilisée lors du siège de Sébastopol[note 1] - [1] et de la guerre de Sécession, c'est la guerre russo-japonaise qui ravive l'intérêt des états-majors européens sur ces techniques[1] - [note 2].

Les techniques

Diagramme (1923) montrant l'organisation des travaux dans une guerre des mines[note 3].
Établissement d'une mine sous une tranchée ennemie, vue d'artiste.

Offensives

Les explosifs utilisés
Au début du conflit, l'explosif le plus utilisé est la poudre noire. Rapidement, seront utilisés des explosifs produits par l'industrie chimique. C'est ainsi que les Anglais utiliseront de préférence l'ammonal, les Français, la cheddite ou la mélinite et les Allemands, la westfalite[2].
Le fourneau de mine (combien : le cube de la distance en mètres du fourneau à la surface du sol, multiplié par un coefficient lié à la nature du sous-sol[note 4], donne le nombre de kilos d'explosif à utiliser).
Les types de tunnels
La forme et la taille des tunnels varient selon les armées. Ainsi, dans la Somme, les Britanniques qui reprendront une partie du front précédemment tenue par les Français estimeront que leurs tunnels doivent être élargis[3]. Les Australiens, eux, critiqueront la petite taille des galeries britanniques.
Les premiers tunnels sont creusés en commençant en arrière du front; Ils sont connectés transversalement pour reproduire un front souterrain. De là partent des tunnels d’attaque, eux-mêmes prolongés par des "rameaux de combat" de moindres dimensions[note 5]. Au bout des rameaux sont creusées des chambres (fourneaux de mines) où seront entassés les explosifs.
Le Manuel de fortification de Legrand-Girarde et Plessix (1909) donne les dimensions suivantes[4] :
TypeHauteurLargeur
galerie majeure2,002,10
grande galerie1,80 / 2,001,00
demi galerie1,30 / 1,501,00
grand rameau1,000,80
petit rameau0,800,65
rameau de combat0,700,60
dimensions en mètres
Les Britanniques adopteront une taille standard de 4 pieds 10 pouces en hauteur et 2 pieds 9 pouces en largeur pour les tunnels forés dans la craie compacte[3].
Les méthodes de percement
Là encore, on observe des différences selon les belligérants. Pour les Allemands, le creusement se fait au pic et à la pioche, mais aussi en installant des perforateurs à air comprimé. Les Français resteront aux outils manuels, tandis que les Britanniques utiliseront une méthode ayant fait ses preuves lors du creusement des tunnels du métro de Londres, le "clay kicking". Cette dernière technique cumulant vitesse et discrétion mais requérant de travailler dans des couches argileuses.
Discrétion
Pour tenter d'éviter les contre-mesures de l'ennemi, diverses techniques sont utilisées. En premier lieu, limiter le bruit du creusement. Cela peut être obtenu, par exemple, en évitant les marteaux-piqueurs, en utilisant les méthodes les moins bruyantes comme le "clay kicking". En deuxième lieu, en évitant le bruit associé à l'évacuation des déblais. Cela peut aller de l'utilisation de wagonnets avec des roues caoutchoutées à un épandage discret et éloigné des galeries de débris crayeux[note 6]. En dernier lieu, de masquer les bruits de creusement de la galerie d'attaque, profonde, par ceux d'une galerie plus près de la surface. La fin des travaux, indiquant que le fourneau est en train d'être chargé, peut être masquée par des travaux bruyants continués sur la galerie destinée à masquer.

DĂ©fensives

Écoute
La première méthode de défense contre la guerre des mines est de détecter les travaux souterrains de l'ennemi. Pour ce faire, des rameux de combat sont creusés pour servir de postes d'écoute. Là, un guetteur va essayer de discerner les bruits indiquant le percement d'un tunnel. L'écoute se fait d'abord à l'oreille nue ; puis avec l'aide de dispositifs improvisés destinés à amplifier les sons, comme une jarre remplie d'eau à la surface de laquelle le guetteur pose son oreille. Ensuite apparaîtront des écouteurs ressemblant aux premiers des stéthoscopes.
La propagation des sons permet une détection à quelques dizaines de mètres ; cette distance étant dépendante de la nature du sol et de la technique utilisée par les sapeurs ennemis.
Contre-mines (camouflets)
Une fois la galerie ennemie détectée, en direction et en profondeur, la méthode la plus utilisée par les différents belligérants est de faire jouer une contre-mine. Le but est autant de faire s'effondrer la galerie visée que de rendre instable cette partie du sous-sol, interdisant de continuer à creuser.
Un camouflet est une contre-mine de petite puissance. L'explosif étant placé, par exemple, au fond du trou percé par une tarière.

Les acteurs

Français

Au dĂ©but du conflit, l'armĂ©e française aligne 21 bataillons du GĂ©nie, un par corps d'armĂ©e. Ces unitĂ©s Ă©clatent pour fournir une compagnie de sapeurs Ă  chaque division et deux autres compagnies Ă  chaque corps d'armĂ©e. Une compagnie de sapeurs-mineurs comprend 233 hommes et 4 officiers.

Allemands

Les Allemands disposent de "bataillons de forteresse", au début du conflit[5]. Ils devraient, entre autres, prendre en charge les travaux de sape et minage mais ne sont pas spécialisés dans ce domaine[5]. Il n'existe pas non plus de doctrine officielle. Le premier manuel consacré à la guerre des mines ne sera diffusé qu'en 1916[5].

Au dĂ©but des hostilitĂ©s, chaque corps d'armĂ©e dispose d'un bataillon du GĂ©nie, de trois compagnies Ă  250 hommes[5] - [6]. Quand les travaux souterrains s'avèrent nĂ©cessaires, les spĂ©cialistes (mineurs, charpentiers, etc.) sont recherchĂ©s au sein des unitĂ©s[5]. Ces compagnies seront frĂ©quemment dĂ©doublĂ©es pour faire apparĂ®tre de nouvelles unitĂ©s. Ainsi, le 16e bataillon donnera naissance tout au long du conflit, Ă  59 unitĂ©s du GĂ©nie diffĂ©rentes[7].

En 1915, les deux premières compagnies de sapeurs-mineurs sont organisées[5], et par l'armée bavaroise[5]. En 1916, 6 autres compagnies bavaroises sont organisées[8], pendant que 28 autres voient le jour dans le reste de l'armée allemande[8]. En , il y a 46 compagnies de mineurs constituées[9].

Britanniques

Les Britanniques ne disposent pas d'unités spécialisées au début du conflit. Les grandes unités mettront elles-mêmes sur pied leurs unités de mineurs. C'est ainsi que la première mine jouée par les Anglais sera l’œuvre des sapeurs de la 28e division, le contre le point coté 60 ("Hill 60", à proximité d'Ypres).

Les premières unités spécialisées dans la guerre des mines sont établies en . Elles sont dénommées "Tunnelling companies" et regroupent 269 sapeurs et 5 officiers. À ce nombre il faut ajouter à peu près autant de personnels auxiliaires pour les tâches courantes d'assistance aux sapeurs, comme l'évacuation des déblais.

Huit compagnies sont levées en premier lieu. Elles font appel à des mineurs professionnels, en particulier issus de l'industrie charbonnière. Toujours en 1915, 12 autres compagnies verront le jour. Une dernière en 1916.

Les contingents du Commonwealth fourniront aussi des unités pour la guerre des mines. En , les canadiens organisent une compagnie, bientôt suivie par deux autres. La Nouvelle-Zélande en fournit une et les australiens trois de plus.

À la fin du conflit, l'armée britannique dispose de 30 compagnies, que la guerre de mouvement confine à la réalisation de travaux type casernements souterrains.

Utilisation tactique

  • Destruction de parties du dispositif adverse.
  • IntĂ©gration dans des offensives

Sites concernés

Front français

Flandres
Chemin des Dames
Champagne
Argonne
Vosges
Picardie (Oise et Somme)

Front italien

Dolomites
Ce n'est qu'à compter de 1916 que les mines sont utilisées sur ce front[10]. La première, austro-hongroise, explose le . 33 autres suivront[12]. Particularité, 3 des mines italiennes auront été creusées sous le glacier Marmolada[13].
Isonzo
Sur le front de l'Isonzo, des activités liées à la guerre des mines peuvent aussi être notées[13].

Front oriental

La documentation disponible est faible mais Dierk Willig indique que les austro-hongrois font jouer leur première mine le dans la région de Manilova[10]. Il indique que près de 50 explosions de mines peuvent être comptées sur ce front[10].

Vestiges

Butte de Vauquois.
Vestige d'un tunnel, secteur de Vimy.

Notes & références

Notes

  1. 125 mines seront mises Ă  feu lors du siège et 7 kilomètres de sapes creusĂ©es.
  2. Lors du siège de Port-Arthur, les japonais creuseront près de 30 kilomètres de sapes, et feront jouer une douzaine de mines. Les russes estimaient le sous-sol trop dur pour ĂŞtre creusĂ©.
  3. Ce diagramme est, à l'origine, axé sur les problèmes de ventilation des galeries. Ce qui explique les annotations très orientées.
  4. Varigny donne comme exemple un coefficient de 2,25 pour une mine creusĂ©e dans la « gaize Â» d'Argonne (page 58).
  5. Selon le manuel français, "Manuel complet de fortification" (1909), ils devraient avoir 70 centimètres de haut pour 60 centimètres de large (citĂ© par Jones, page 21).
  6. Des dépôts de craie blanche pourraient facilement être repérées par des reconnaissances aériennes, trahissant le début des galeries et les désignant aux tirs d'artillerie.

Références

  1. Anthony Byledbal 2015, p. 16-17
  2. jones, p. 171.
  3. S. Jones, 2010, page 166.
  4. Plessix 1909, p. 664.
  5. Anthony Byledbal 2015, p. 42
  6. Anthony Byledbal 2015, p. 62.
  7. Anthony Byledbal 2015, p. 63.
  8. Anthony Byledbal 2015, p. 43
  9. Anthony Byledbal 2015, p. 44
  10. Anthony Byledbal 2015, p. 39.
  11. Anthony Byledbal 2015, p. 39-40.
  12. Soit 14 austro-hongroises et 20 italiennes[11]
  13. Anthony Byledbal 2015, p. 40.

Sources & Bibliographie

Les ouvrages utilisés comme source pour le présent article sont signalés par Document utilisé pour la rédaction de l’article

Articles

  • (fr) GĂ©nĂ©ral de Fontclare, "A travers la Grande Guerre, la cote 108 près de Berry-au-Bac et la guerre de mines (1915)", Revue des Questions Historiques, no 1866, , pages 60-80.
  • (en) Iain Banks, "Digging in the dark : The underground war on the Western Front in World War I", Journal of Conflict Archeology, 9/3, Pages 156-177.
  • Revue 14-18, no 19, 2004, SOTECA, pages 6-29, dossier " La guerre des mines".

Livres

  • (en) Alexander Barrie, War Underground, Londres, frederick Muller, , 272 p. Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • Anthony Byledbal (dir.), Les taupes de la Grande Guerre : combats et combattants souterrains., Arras, Artois Presses UniversitĂ©, coll. « Histoire », , 168 p. (ISBN 978-2-848-32219-3, OCLC 958035042) Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • (en) Simon Jones, Underground warfare, 1914-1918, Barnsley, Pen & sword military, , 288 p. (ISBN 978-1473823044) Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • Henri de Varigny, Mines et TranchĂ©es, Paris, Librairie Militaire Berger-Levrault, , 81 p. Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • E. Legrande-Girarde et H. Plessix, Manuel complet de fortification : rĂ©digĂ© conformĂ©ment au programme d'admission A L’ÉCOLE SUPÉRIEURE DE GUERRE, Paris, Nancy, Berger-Levrault, , 927 p. (lire en ligne), partie 4 Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article

Voir aussi

Liens internes (articles connexes)

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