L'orgue de salon
    
Le Comte Christian de Bertier de Sauvigny est nĂ© le 10 avril 1864. Issu d’une ancienne famille d’origine bourguignonne, il Ă©tudia l’orgue auprès de M. Wakanthaler, organiste de la cathĂ©drale de Dijon, puis Ă  Paris auprès d’Eugène Gigout et de Henri Dallier. Il fut l’organiste adjoint des Ă©glises de St Eustache et de La Madeleine, il fut ensuite titulaire de l'orgue de l'Ă©glise Saint Antoine des Quinze-Vingts dans le 12e arrondissement, de 1909 Ă  sa mort en 1939. En 1904, le Comte Bertier fait construire un orgue par la maison Merklin[1] pour son hĂ´tel particulier situĂ© au 14 rue Legendre dans le 17e arrondissement(14 rue Georges Berger depuis 1912). L'orgue sera placĂ© dans le spacieux atelier d’artiste d'une hauteur de 6 mètres, situĂ© au 2e Ă©tage de l'hĂ´tel. L’orgue est inaugurĂ© le jeudi  par Eugène Gigout, organiste de l'Ă©glise Saint Augustin Ă  Paris, et par Henri Dallier, organiste de l'Ă©glise Saint Eustache Ă  Paris. Au programme de cette inauguration, des Ĺ“uvres de Bach, Saint-Saens, Dubois, BoĂ«llmann, Gigout et Dallier. L’instrument est moderne pour l'Ă©poque, il est dotĂ© du système de transmission pneumatique tubulaire inventĂ© par Merklin. Il possède alors 28 jeux, rĂ©partis sur trois claviers de 56 notes, dont 2 expressifs, et un pĂ©dalier de 30 notes. De nombreux concerts d’orgue eurent lieu chez le Comte Bertier. D’après Les archives bibliographiques contemporaines, annĂ©es 1906-1917, le comte organisait chaque annĂ©e, chez lui, « des auditions d’orgue très suivies en l’honneur des laurĂ©ats du Conservatoire National de Musique ».

L'orgue de salon
Au dĂ©but des annĂ©es 1920, le Comte Bertier et son Ă©pouse quittèrent l'hĂ´tel de la rue Legendre pour s’installer dans un hĂ´tel particulier plus spacieux au 7 de la rue de Poitiers. Cependant, l’orgue Merklin ne semble trouver sa place dans aucune des pièces de cet hĂ´tel. D’après les plans de ce dernier, la hauteur sous plafond des pièces de rĂ©ception est de 3,80 m alors que la hauteur de l’orgue s’élève Ă  5 mètres. Le , le Comte Bertier dĂ©posa un permis de construire, il s’agit de la construction d’une annexe, dans la cour de son hĂ´tel, entre le bâtiment principal et des dĂ©pendances. Les plans de l’architecte dĂ©taillent la construction d’une « galerie Â» contenant un orgue. La façade du buffet de l'orgue fut lĂ©gèrement remaniĂ©e et adaptĂ©e aux dimensions de la nouvelle salle et la composition fut augmentĂ©e de 3 nouveaux jeux : un clairon de 4', un nasard et une flĂ»te douce 4'. Au niveau des accouplements, de nouvelles octaves graves et aiguĂ«s furent ajoutĂ©es. Ces transformations ont Ă©tĂ© effectuĂ©es par Joseph et Gaston Gutschenritter (père et fils), succession J. Merklin & Cie.
Ă€ cette nouvelle adresse, de nombreux concerts eurent Ă©galement lieu. Une soirĂ©e y fut organisĂ©e le , en l'honneur de la promotion de l'organiste Louis Vierne Ă  la LĂ©gion d’Honneur. Lors de cette soirĂ©e AndrĂ© Marchal, AndrĂ© Fleury et Maurice DuruflĂ© ont jouĂ© des Ĺ“uvres du cĂ©lèbre organiste de Notre-Dame de Paris, en la prĂ©sence du maĂ®tre. Marcel DuprĂ©, AndrĂ© Fleury et Maurice DuruflĂ© ont donnĂ© plusieurs rĂ©citals dans la nouvelle salle d'orgue du Comte Bertier. Gaston Litaize y donna un concert en mai 1932 en prĂ©sence du cĂ©lèbre organiste de l'Ă©glise Saint-Sulpice Charles-Marie Widor.
 
    L'orgue d'église

La console de l'orgue de l'église Saint-Dominique de Paris
 
Le Comte Bertier meurt le 29 août 1939, son épouse décédera 5 ans plus tard, en avril 1944. Les héritiers cédèrent généreusement l’orgue à la paroisse Saint Dominique. L'instrument fut installé dans l'église en 1944 par Jules Isambart, facteur d'orgue, et Jean Perroux, harmoniste, tous deux anciens ouvriers du grand facteur d'orgue français du 19e siècle : Aristide Cavaillé-Coll. L'harmonisation de l'orgue a été entièrement refaite par Jean Perroux qui l'a adapté aux caractéristiques sonores de l'église. L'orgue est inauguré le  par Marcel Dupré et Louise Tallon, élève de Dupré et titulaire de l'orgue.
Le 21 octobre 1962, l'organiste titulaire de Notre-Dame de Paris, Pierre Cochereau, inaugure l'orgue à la suite d'une restauration importante effectuée par la Société des anciens établissements Gaston Gutschenritter. Lors de cette restauration l'instrument fut électrifié et augmenté. La majorité des tuyaux d'origine a été conservée cependant, les pleins-jeux ont été recomposés, une clarinette, une voix humaine, un octavin, un salicional et une gambe de Merklin ont été sacrifiés pour être remplacés par un cromorne, une quinte 2' 2/3, une doublette, une quarte 2', une tierce et une nouvelle fourniture au positif.
Le meuble de la console fut conservé mais déplacé sur le côté droit de la tribune permettant à l'organiste d'entendre l'orgue avec plus de recul et d'avoir une meilleure visibilité sur le chœur de l'église. Un bloc de claviers neuf fut installé et les tirants de jeux furent remplacés par des dominos. Des combinaisons fixes et des accouplements en 16' et en 4' furent ajoutés.
En 2003, Marc Hedelin restaure l'instrument, effectue un dépoussiérage, restaure les soufflets et les sommiers à cases électro-pneumatiques, la console est réinstallée à son emplacement d'origine, au centre, devant le buffet.

Cartouche J. Merklin & Cie, Paris