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Gary Kildall

Gary Kildall (né le à Seattle, mort le à Monterey) est l'un des grands pionniers de la micro-informatique. Il a créé le système d'exploitation Control Program/Monitor (CP/M) ; paru en 1974 pour les ordinateurs 8 bits, il a plus tard été porté sur des ordinateurs 16 bits (CP/M-86). Plusieurs des autres caractéristiques qui sont parties intégrantes d'un ordinateur personnel aujourd'hui doivent leur origine ou l'une de leurs premières réalisations à Gary Kildall.

Gary Kildall
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Biographie
Naissance
Décès
Nationalité
Formation
Université de Washington
Queen Anne High School (en)
Activités
Période d'activité
Ă  partir de
Conjoint
Dorothy McEwen Kildall (en)
Autres informations
A travaillé pour
Ĺ’uvres principales
signature de Gary Kildall
Signature

Biographie

Harold, Joe et moi

Harold, le grand-père de Gary Kildall, d'origine norvégienne, est marin sur la ligne de Seattle à Singapour[1]. Son père, Joseph, est capitaine ; un de ses rêves est d'une machine où on entrerait les données de navigation, hop ! un tour de manivelle, et la machine sort la position du navire[2]. Le grand-père, le père et Gary se retrouveront plusieurs fois à travailler ensemble.

Sa mère s'appelle Emma, et sa mère à elle est née en Suède. Venu au monde dans une famille qui exploite l'école de marine fondée par son grand-père, il aura toute sa vie l'amour de la mer et de l'aventure[3].

DĂ©veloppement de CP/M

Étudiant plutôt faible, déjà « héritier présomptif[2] » de l'école, Kildall se sent néanmoins la vocation de professeur de mathématiques[3]. Il part étudier à l'université de Washington, y obtient une maîtrise, puis, après un retour aux études, un doctorat en informatique en 1972. Il a ensuite le choix d'aller se battre au Vietnam ou d'enseigner[4] à la Naval Postgraduate School de la marine américaine à Monterey en Californie. Il avait l'enseignement dans le sang et continuera d'y enseigner longtemps après avoir obtenu l'aisance financière.

Kildall est l'un des premiers à voir dans les micro-ordinateurs autre chose que des machines servant à contrôler d'autres machines ; ils sont pour lui des ordinateurs à part entière. En 1974, il sort le système d'exploitation CP/M pour les processeurs Intel 8008 et 8080. CP/M est une révolution : dans le monde naissant des micro-ordinateurs, c'est le tout premier système d'exploitation qui n'est pas destiné à une marque ou un modèle particuliers ; compatible avec des ordinateurs de microprocesseurs différents, il fonctionne sur Intel 80xx, sur Zilog Z80 et sur Motorola (68xx et 69xx)[5]. CP/M se vendra à un quart de million d'exemplaires[6] - [7].

En 1976, lui et sa femme Dorothy (es) créent leur propre société, Digital Research Inc. (DRI)[8], première d'un nouveau modèle d'affaires[9].

La diversité des ordinateurs conduit à normalisation ; et Kildall introduit le concept de BIOS.

Échec du « contrat du siècle » avec IBM

En 1980, Digital Research rate ce qui est considéré comme le « contrat du siècle » avec IBM. 1981 est en effet la date de sortie de l'IBM PC, un ordinateur personnel. IBM, convaincu que ce type d'ordinateur serait un échec commercial, décide d'acheter un système d'exploitation plutôt que de le développer. CP/M étant le système d'exploitation alors le plus répandu pour les micro-ordinateurs, on approche Digital Research pour rencontrer Gary Kildall.

Les pourparlers entre Kildall et les représentants d'IBM n'aboutiront pas, ce qui offrira à Bill Gates (de Microsoft) l'occasion de remporter ce marché. Kildall, pour sa part, restera stigmatisé comme celui qui a raté le contrat du siècle.

Il circule plusieurs versions de l'histoire.

  • Bill Gates reçoit d'abord les reprĂ©sentants d'IBM. Pour le système d'exploitation, il les aiguille vers Digital Research, la sociĂ©tĂ© de Gary Kildall, ne pensant qu'Ă  fournir ce qui est la spĂ©cialitĂ© de sa sociĂ©tĂ©, les langages de programmation et notamment le BASIC[10].
  • Kildall, passionnĂ© d'aviation, aurait fait attendre les reprĂ©sentants d'IBM plusieurs heures (il pilotait alors son avion personnel)[11]. Cette version a Ă©tĂ© dĂ©mentie en 2007 par le journaliste britannique Andrew Orlowski[12].
  • Ce serait Dorothy, la femme de Kildall, qui aurait reçu les reprĂ©sentants d'IBM. Ceux-ci, avant de commencer la discussion, auraient exigĂ© que DRI signe un accord de non-divulgation interdisant de rĂ©vĂ©ler quoi que ce soit de leur entretien. Dorothy, avocate, aurait refusĂ© de signer le document.
  • Gary Kildall et Tom Rolander (en) ont effectivement pris l'avion privĂ© de Kildall pour livrer de la documentation CP/M Ă  un client du cĂ´tĂ© de la baie de San Francisco. Ils sont cependant revenus Ă  temps pour participer Ă  la rĂ©union avec IBM. Selon Rolander, la rĂ©union s'engage mal. Tout d'abord, IBM veut faire signer un accord de non-divulgation : toute information communiquĂ©e par IBM Ă  Digital Research doit ĂŞtre tenue secrète, au point que Digital Research aurait Ă  nier l'existence mĂŞme de la rĂ©union. Par contre, les informations communiquĂ©es par DRI Ă  IBM tombent dans le domaine public. De plus, IBM veut acheter CP/M Ă  Digital Research pour un prix fixe, quel que soit le nombre d'exemplaires vendus, alors que Digital Research prĂ©fère de loin toucher des redevances pour chaque exemplaire. Finalement IBM ne veut en aucun cas garder le nom de CP/M pour son système d'exploitation, insistant pour l'appeler PC-DOS (mĂŞme s'il est entièrement Ă©crit par Digital Research). Tous ces Ă©lĂ©ments dĂ©plaisent fortement Ă  Kildall[13].

Les principales pierres d'achoppement sur lesquelles on s'accorde sont l'accord de confidentialité et la question des redevances.

Constatant le mécontentement des envoyés d'IBM envers Gary Kildall et Digital Research, et voyant l'occasion de pénétrer le marché des systèmes d'exploitation, Bill Gates se ravise et propose à IBM de fournir un système d'exploitation ; il ira pour sa part le chercher (sans raconter toute l'histoire) dans une société qui a adapté CP/M sous le nom de 86-DOS[14] - [15] - [9] - [16].

Après la sortie de l'IBM PC, Kildall examine MS-DOS et considère que c'est un plagiat de CP/M. Il menace IBM d'un procès. IBM (qui avait probablement Ă©tĂ© dans l'ignorance de toutes ces manĹ“uvres[9]) trouve l'accord suivant : l'acheteur de l'IBM PC pourra choisir d'installer soit MS-DOS (sous le nom de PC-DOS) soit CP/M. Mais PC-DOS est vendu Ă  40 $ alors que CP/M l'est Ă  240 $ : le choix de l'utilisateur est vite fait[17].

Ce n'étaient pas les derniers déboires de Kildall dus à une jurisprudence absente ou imprécise. DRI dut volontairement mutiler gravement une de ses créations, Graphical Environment Manager (GEM), parce qu'Apple, qui considérait avoir un copyright sur l'icône de la poubelle par exemple, pouvait intenter des procès sur beaucoup d'autres points.

Un homme défait

Kildall aurait préféré jeter l'éponge, et n'avoir d'image que celle d'un développeur, mais il se trouvait sans cesse comparé à Bill Gates, et le souvenir de ses contributions s’effaçait au fil des années. Il était las de devoir démentir la rumeur selon laquelle il aurait manqué le rendez-vous avec IBM pour des raisons de convenance personnelle[10] ; mais l'humiliation suprême fut pour lui une invitation de l'université de Washington, à l'occasion du jubilé de son département d'informatique, d'assister à une conférence de Bill Gates (un étudiant qui avait renoncé à terminer sa licence de mathématiques à Harvard). Pour toute réponse, Kildall entreprit de rédiger ses mémoires, Computer connections[18], dont il remit des exemplaires à quelques proches. Il y déplore le manque de reconnaissance envers les développeurs de logiciel[19], et décrit ainsi Bill Gates : « Il divise ; il est manipulateur, c'est un profiteur. Il a beaucoup emprunté, à l'industrie informatique et à moi-même[20]. » Dans une annexe, il qualifie le système DOS de « vol pur et simple », et indique en forme de démonstration que les 26 appels système accomplissent exactement les mêmes traitements que ceux de CP/M[20] - [21]. Il y accuse d’ailleurs IBM d'avoir gonflé le prix de CP/M-86 pour favoriser DOS.

Sir Harold Evans s'est servi de nombreux souvenirs inédits pour le chapitre qu'il consacre à Kildall dans son essai de 2004 They made America, où il estime qu'en effet Microsoft a pillé les inventions de Kildall[10]. Cet exposé a été dénoncé depuis, par d'anciens développeurs d'IBM, comme « partial et de parti-pris[18] ». Par contre, en 2007, un tribunal, considérant que les faits étaient décrits correctement, n'a pas retenu l'accusation de diffamation portée contre Sir Harold[9].

Fin de vie

De 1983 à 1990, Kildall coprésente, avec Stewart Cheifet, l'émission Computer Chronicles ; il cesse d'être un inconnu pour le grand public.

De plus, la vente de Digital Research à Novell fait de Kildall un homme riche : il déménage dans la banlieue de West Lake Hills à Austin. Sa maison, avec un garage pour ses voitures de course et un studio vidéo au rez-de-chaussée, donne sur le lac. Il a un jet privé, et un yacht pour naviguer sur le lac. Philanthrope, il s'engage dans l'aide aux enfants atteints du sida. Il possède en outre, non loin du siège social de Digital Research, un manoir à Pebble Beach en Californie avec vue panoramique sur l’océan.

Gary Kildall meurt le des suites d'un incident non élucidé survenu trois jours auparavant dans un bar de motards de Monterey en Californie.

Ses enfants, Scott (en) et Kristen, écriront, en publiant sur le Web la première partie de ses mémoires : « Notre père incarnait une définition du succès qui peut être une leçon pour nous tous : elle met les inventions, les idées et l'amour de la vie comme but ultime, avant les profits[22] - [23]. »

Contributions

  • Kildall[24] a conçu et dĂ©boguĂ© le code grâce auquel l'industrie des micro-ordinateurs s'est dĂ©ployĂ©e. Plein d'entregent, sĂ»r que les ordinateurs devaient ĂŞtre accessibles Ă  tous, il partageait largement son expĂ©rience et son enthousiasme.
  • Il a fondĂ©, en 1976, Digital Research Inc., qui :
  • Il a dĂ©fini le premier langage et Ă©crit le premier compilateur pour microprocesseurs (PL/M).
  • Il a Ă©crit le premier système d'exploitation pour microprocesseur (CP/M).
  • Il a dĂ©veloppĂ© un des premiers jeux d'arcade et la première interface informatique pour disques optiques, qui allait rendre possible le multimĂ©dia. Il a pavĂ© la voie Ă  la première encyclopĂ©die Ă  usage gĂ©nĂ©ral sur cĂ©dĂ©rom grâce Ă  son dĂ©veloppement d'un système de fichiers et celui de structures de donnĂ©es.
  • La première architecture Ă  système ouvert lui est due. En isolant les appels au matĂ©riel grâce au concept de BIOS, il a rendu possibles les applications indĂ©pendantes du matĂ©riel, et par consĂ©quent l'industrie des applications tierces.

Ĺ’uvres

Les œuvres données ici ne comprennent pas les créations informatiques.

Bibliographie

  • « 1995 SPA Lifetime Achievement Award Winner », site de DRI, 1995
  • « Bill Gates, business titan vs Gary Kildall, innovator », sur attitudemedia.com
  • Paul Andrews, « A career spent in Gates' shadow — Computer pioneer dies at 52 », Seattle Times,‎ (lire en ligne)
  • Arthur A. Cruz, « Gary Kildall », dans Arthur A. Cruz, Death conspiracy theories, Death Conspiracy Theories, (ISBN 9781365826436, lire en ligne), p. 147–152 Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • John Daintith, « Kildall, Gary », dans Biographical encyclopedia of scientists, 3e Ă©d., CRC Press, 2008, p. 412[25]
  • Susan Lammers, « Gary Kildall », dans Programmers at work — First series — Interviews, Redmond, Microsoft Press, p. 56–70
  • John Markoff, « Gary Kildall, 52, crucial player in computer development, dies », dans New York Times,
  • Andrew Orlowski, « MS-DOS paternity suit resolved », The Register,‎ (lire en ligne)
    « The oft-told story of Kildall spurning IBM to fly his plane is deeply misleading. It was IBM's distribution and pricing of CP/M, which in the end was one of three operating systems offered with the first IBM PC, that ensured MS-DOS captured the market… »
  • Andrew Orlowski, « Bill Gates, Harry Evans and the smearing of a computer legend », The Register,‎ (lire en ligne)

Compléments

Notes et références

  1. K1994, p. 9.
  2. K1994, p. 11.
  3. Cruz 2017, p. 147.
  4. Daintith.
  5. CP/M a aussi tourné sur Apple II grâce à la Z-80 SoftCard de Microsoft.
  6. Lifetime Achievement.
  7. Daintith dit environ 200 000.
  8. D'abord appelé Intergalactic Digital Research. Rien ne résistait aux pionniers qui voyaient alors Star Trek (il faut dire que le nom Digital Research était alors pris). Aussi : K1994, p. 71.
  9. Orlowski 2012.
  10. D’après Harold Evans, Gail Buckland et David Lefer, They made America : From the steam engine to the search engine : Two centuries of innovators, Little, Brown and Co., , 496 p. (ISBN 0-316-27766-5).
  11. Cette version est assez répandue, et c'est également celle rapportée par Bill Gates.
  12. Orlowski 2007.
  13. Rapporté par Tom Rolander, qui a assisté à l'entretien entre IBM et Digital Research.
  14. Cruz 2017, p. 148.
  15. 86-DOS était appelé, durant sa phase de développement, QDOS (Quick and Dirty OS).
  16. De nombreux clones de CP/M existaient alors. La loi était encore imprécise à cet égard.
  17. Retranscrit dans l'article « IBM PC : The complete history, part 2 », sur Ars Technica UK (consulté le ).
  18. D’après Steve Hamm et Jay Greene, « The man who could have been Bill Gates », BusinessWeek, no du 25 octobre,‎ .
  19. D’après Tom Rolander, « Eulogy », sur Tom Rolander's website and album, (consulté le ).
  20. Andrews 1994.
  21. Tim Paterson, l'auteur de QDOS, « admet sans ambages qu'il a ouvert son manuel de référence de CP/M et a repris chacun des appels au système ». On n'est pas aujourd'hui accusé de plagiat pour cela. Ironie du sort, quelques-unes des ressemblances qu'il a introduites entre CP/M et MS-DOS l'étaient à la demande même d'IBM. Voir : Jimmy Maher, « The complete history of the IBM PC, part two: The DOS empire strikes », site arstechnica, , consulté le . Autre ironie : c'est le principe même des degrés d'architecture, dont Kildall était partisan, qui a rendu son malheur possible.
  22. Tekla S. Perry, « CP/M creator Gary Kildall’s memoirs released as free download », 2016. Ses enfants ajoutent que la seconde partie des mémoires de leur père ne sera pas publiée, car elle reflète surtout sa lutte contre l'alcoolisme. C'est dans cette partie qu'on trouverait sa version des événements principaux de sa carrière.
  23. Plus crument, ceux qui n'ont pas d'attaches familiales avec Gary Kildall disent que Gates était un homme d'affaires et Kildall un créateur.
  24. D'après Lifetime Achievement.
  25. Extrait dans Google Livres.

Voir aussi

Liens externes

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