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Extraction par sorption dans l'espace de tĂŞte

En chimie analytique, l'extraction par sorption dans l'espace de tête ou en anglais head space sorptive extraction (HSSE) est une technique de microextraction sur phase solide développée dans les années 1970 afin d'identifier les composés odorants présents dans l'air environnant divers objets (environnement appelé headspace, « espace de tête »). Habituellement, les objets odorants d'intérêt sont des plantes, des fleurs, des aliments et leurs emballages (le headspace d'une bouteille désigne plus particulièrement l'espace entre le liquide et le bouchon). Des techniques similaires sont également utilisées pour analyser les odeurs intéressantes de lieux et d'environnements tels que les magasins de thé, les scieries. Une fois les données analysées, les parfums peuvent alors être reconstitués par un parfumeur. Cette technique est notamment utilisée lorsque les odeurs naturelles et agréables d'une fleur sont impossibles à obtenir sous forme d'huiles essentielles grâce aux techniques d'extraction.

Chromatographe en phase gazeuse (GC) analysant des composés odorants.

DĂ©finition

Le headspace (espace de tête) est l'espace de gaz au-dessus de l'échantillon liquide ou solide, dans un flacon. Les composants volatils de l'échantillon diffusent dans la phase gazeuse, formant le gaz d'espace de tête. L'analyse de l'espace de tête est donc l'analyse des composants présents dans ce gaz. Elle est généralement définie comme une extraction en phase vapeur, impliquant la séparation des analytes entre un liquide non volatil ou d'une phase solide et la phase vapeur au-dessus du liquide ou solide. Cette analyse est souvent réalisée en couplant la microextraction sur phase solide (SPME) par espace de tête avec un chromatographe en phase gazeuse (GC).

Historique

Le headspace est une technique développée par Roman Kaiser (en), expert olfactif, botaniste et chimiste né en Suisse en 1945 et travaillant pour la société Givaudan.

À la base, son travail consistait à analyser et reconstituer les senteurs naturelles. Un des projets pour lequel il a utilisé la technique du headspace est pour mesurer et caractériser les senteurs de la forêt tropicale.

Développée dans les années 1970, elle était utilisée pour reconstituer l’odeur naturelle des fleurs. Cette technique est privilégiée afin de reproduire une odeur équivalente à la fleur vivante sur le plan olfactif. On parle d'ailleurs souvent de technologie des fleurs vivantes.

En général, la fleur vivante ou coupée est introduite dans une cloche en verre où circule un gaz vecteur qui entraine les molécules odorantes avant que celles-ci soient concentrées sur un absorbant (charbon activé, polymère). Elles sont ensuite désorbées et analysées par chromatographie en phase gazeuse. Le headspace est une technique permettant l’introduction d’un échantillon gazeux directement dans le chromatographe.

Application

L’échantillonnage d'espace de tête est utilisé pour l'analyse qualitative ou quantitative de substances volatiles dans les échantillons d'une matrice liquide ou solide. C’est aussi une technique pour l'analyse d'échantillons où la totalité de l'échantillon ne doit pas être injectée dans l'instrument de GC, par exemple lorsqu’elle présente des impuretés. L’échantillonnage d'espace de tête est particulièrement favorable pour l'analyse des traces. Les analyses couramment effectuées sont entre autres pour les composés organiques volatils provenant des eaux usées et des échantillons de terre contaminés, pour les solvants résiduels dans les emballages et les produits pharmaceutiques, pour le dépistage d'alcoolémie et de la toxicologie, pour les composants aromatiques des aliments et boissons ainsi que pour l’analyse de gaz à partir d'huiles.

Appareillage

Exemple de flacons utilisés dans la technique de headspace.

Un espace de tĂŞte est constituĂ© des Ă©lĂ©ments suivants : un plateau d'Ă©chantillon, une ligne de transfert, un rĂ©gulateur de pression et de dĂ©bit, l’entrĂ©e du gaz porteur et la mise sous pression du flacon. Aux conditions initiales, la valve de pressurisation est ouverte. Le gaz auxiliaire vide la valve d'Ă©chantillonnage, la boucle d'Ă©chantillon et l'aiguille de prĂ©lèvement. Le gaz porteur s’écoule dans l’injecteur du GC Ă  travers la vanne d'Ă©chantillonnage. Ă€ la mise sous pression du flacon sous pression, Ă  la fin du temps de mise en Ă©quilibre, l'agitation s’arrĂŞte. Les flacons se dĂ©placent en ligne avec la sonde de prĂ©lèvement et la tige mĂ©canique soulève le flacon sur la sonde de prĂ©lèvement. La soupape de surpression se ferme. La sonde de prĂ©lèvement perce le septum du vial. La soupape de surpression s’ouvre Ă  nouveau, permettant au gaz d'entrer dans le flacon pendant le temps de pressurisation. La valve se referme. Pour le remplissage de la boucle d'Ă©chantillonnage, le purgeur s’ouvre et le gaz de l'espace libre remplit la boucle d'Ă©chantillon. On Ă©vacue ensuite la pression atmosphĂ©rique Ă  travers la sortie de ventilation. Un court temps de remplissage de la boucle (2 Ă  5 secondes) peut laisser de la pression dans la boucle Ă©quilibrĂ©e pour permettre Ă  plus d’analyte d’être injectĂ©. Un plus long temps de remplissage (10 Ă  15 secondes) Ă©quilibre la pression de la boucle Ă  la pression atmosphĂ©rique. Pour ce qui est de l’injection de l'Ă©chantillon, la valve d’échantillon amène la boucle d'Ă©chantillon en ligne avec l'Ă©coulement de gaz porteur. Le gaz porteur s’écoule dans la boucle d'Ă©chantillon et dans la ligne de transfert dans l'orifice d'entrĂ©e de GC. Ceci balaie l'Ă©chantillon dans le GC. Ă€ la fin du cycle et Ă  la rĂ©cupĂ©ration du flacon, le flacon contenant l’échantillon retourne dans le carrousel. Ce dernier tourne et soulève le flacon dans le plateau de dĂ©part. La valve de purge s’ouvre et l'Ă©chantillonneur retourne Ă  la configuration de dĂ©part.

Principe de base

De façon gĂ©nĂ©rale, un Ă©chantillon d'espace de tĂŞte est normalement prĂ©parĂ© dans un flacon contenant l'Ă©chantillon, le solvant de dilution, un modificateur de matrice et l'espace de tĂŞte. Un Ă©chantillon de gaz dans l'espace de tĂŞte est injectĂ© dans un système de GC pour la sĂ©paration de tous les composants volatils. Afin d’augmenter la volatilitĂ© des composĂ©s, des rĂ©actifs de dĂ©rivation peuvent ĂŞtre utilisĂ©s. Ces composĂ©s augmentent aussi la sensibilitĂ© et la performance de la chromatographie. En effet, des composĂ©s tels que des acides, des alcools et des amines sont difficiles Ă  analyser en raison de la prĂ©sence d'atomes d'hydrogène rĂ©actifs. Ils peuvent rĂ©agir avec la surface de l'orifice d'injection ou de la colonne d'analyse et entraĂ®ner des pointes de dĂ©cantation et une faible rĂ©ponse. Ils peuvent aussi ĂŞtre très solubles dans l’échantillon, provoquant une mauvaise rĂ©partition dans l’espace de tĂŞte, menant Ă  une faible rĂ©ponse. Les techniques de dĂ©rivation les plus courantes sont les suivantes : l’estĂ©rification, l’acĂ©tylation, la silylation et l’alkylation.

La tendance pour un composĂ© de passer en phase gazeuse est dĂ©terminĂ©e par la constante de partage K :

K = Cc/Cg

avec :

  • Cc, la concentration de l’analyte dans la phase condensĂ©e (la matrice de l’échantillon) ;
  • Cg, la concentration dans la phase gazeuse (l’espace de tĂŞte).

Plus K est petit, plus le composĂ© se retrouve dans la phase gazeuse et meilleure est l’analyse. Il est possible de diminuer K et d’amĂ©liorer la sensibilitĂ© de diffĂ©rentes façons :

  • en ajoutant des sels comme le chlorure de sodium (NaCl) et le sulfate de sodium (Na2SO4) Ă  la matrice si celle-ci est en phase aqueuse (salting out) ;
  • en ajoutant un autre liquide Ă  la matrice ;
  • en augmentant la tempĂ©rature.

Pour ce qui est de l’augmentation de température, plus on chauffe plus il y aura de l’analyte dans la phase gazeuse. Par contre, à long terme, cela peut entrainer la dégradation de l’échantillon ou la surpression du flacon pouvant le bloquer dans l’appareil.

Techniques utilisées

Microextraction sur phase solide

La microextraction sur phase solide par espace de tĂŞte (solid phase micro extraction headspace ou SPME headspace) est une technique de sĂ©paration et de concentration des composĂ©s volatils et semi-volatils. Cette technique prĂ©paratoire ne nĂ©cessite pas l’ajout de solvant pour Ă©luer les solutĂ©s, mais simplement une fibre microporeuse pour adsorber les composĂ©s d’intĂ©rĂŞt. Il a Ă©tĂ© Ă©tabli que la fibre polyacrylate est plus appropriĂ©e pour l'analyse des composĂ©s plus polaires, tandis que les fibres de polydimĂ©thylsiloxane sont recommandĂ©es pour les constituants non polaires. Introduite au dĂ©but des annĂ©es 1990, la SPME espace de tĂŞte sert surtout pour les analyses de produits naturels (parfums, odeurs), environnementaux, biologiques, alimentaires, pharmaceutiques. Le principe de base repose sur un Ă©quilibre entre les phases aqueuses ou solides de la matrice et la phase vapeur contenant les analytes. Le processus est considĂ©rĂ© comme complet lorsque la concentration de l'analyte a atteint l'Ă©quilibre entre la matrice et le revĂŞtement de la fibre. Les analytes organiques sont extraits et concentrĂ©s dans la fibre microporeuse. Un des avantages de la SPME espace de tĂŞte est qu’elle peut ĂŞtre utilisĂ©e Ă  tempĂ©rature pièce, par contre, le temps de rĂ©colte peut ĂŞtre assez long pour les composĂ©s peu volatils. De plus, le temps d’extraction est Ă©levĂ© lorsque le revĂŞtement est saturĂ© d’analyte. Un autre point limitant de cette technique est que ce procĂ©dĂ© est non sĂ©lectif pour les composĂ©s en phase gazeuse. Le dĂ©tecteur majoritairement utilisĂ© pour cette technique est le spectromètre de masse par trappe ionique. La SPME headspace est une technique très efficace pour l’analyse des composĂ©s organiques, car ils ont gĂ©nĂ©ralement des constantes de Henry (en) Ă©levĂ©es.

En conclusion, la SPME headspace combine l’extraction, la concentration et le transfert des composés directement dans l’injecteur du GC.

Échantillonnage dynamique

Cette technique, aussi connue sous le nom de purge and trap, est basée sur l’accumulation des composés volatils dans une trappe. Elle implique le passage du gaz porteur à travers un échantillon liquide, le piégeage des analytes volatils sur un sorbant et la désorption sur un GC. Dans ce procédé, l’équilibre entre les phases n’est jamais atteint. C’est une méthode de choix pour l’analyse de composés organiques volatils de très faibles concentrations (ppb et ppt) dans les matrices aqueuses. L’espace de tête dynamique est souvent utilisé lorsqu’un degré élevé de concentration de l’analyte est nécessaire.

Échantillonnage statique

L’échantillonnage statique est la mĂ©thode classique et la plus simple pour analyser l’espace de tĂŞte pour la première fois. Il suffit de placer l’échantillon dans un flacon Ă©tanche au gaz et de sceller le flacon Ă  l’aide d’un septum. Une seringue est utilisĂ©e pour prĂ©lever les vapeurs Ă  l’intĂ©rieur du vial. Contrairement Ă  l’échantillonnage dynamique, les composĂ©s vont atteindre l’équilibre. L’échantillonnage d'espace de tĂŞte statique est principalement utilisĂ© pour des applications dans des intervalles de concentration Ă©levĂ©es.  Son excellente sensibilitĂ©, sa reproductibilitĂ© et sa stabilitĂ© font d’elle une mĂ©thode de choix en analyse mĂ©dico-lĂ©gale.

MĂ©thode d'extraction du gaz

Simple (Single)

Cette méthode consiste à faire une seule extraction qui sera transférée au chromatographe gazeux. Le traitement des données est identique au GC traditionnel. Cette méthode est utilisée lorsque les effets de la matrice sont nuls ou négligeables (pas la même matrice dans le standard que dans l’échantillon) ou si les effets de la matrice sont importants et qu’il est possible de préparer des standards dans la même matrice que l’échantillon.

Extraction d'espace de tĂŞte multiple (Multiple headspace extraction ou MHE)

Cette mĂ©thode consiste Ă  faire plusieurs extractions successivement prĂ©levĂ©es puis transfĂ©rĂ©es au GC, ce qui donnera plusieurs signaux correspondant Ă  chaque Ă©chantillon. Le traitement de donnĂ©es est plus complexe que pour l’extraction simple. Cette mĂ©thode est utilisĂ©e lorsque les effets de la matrice sont importants et qu’il est impossible de prĂ©parer des standards dans la mĂŞme matrice que l’échantillon. Finalement, l’analyse devient totalement indĂ©pendante de la matrice.

Avantages et inconvénients

Avantages

Un des avantages de cette méthode est que comme aucun solvant n’est ajouté, l’échantillon n’est pas abimé; ce qui réduit les coûts d’utilisation. Ainsi, cette méthode est beaucoup plus environnementale, car il n’y a pas de solvant organique à éliminer. À la fin des analyses, le produit de départ est intact. De plus, c’est une technique intéressante au niveau du transport. En effet, l’extraction du gaz d’espace de tête peut se faire en dehors du laboratoire puisqu’elle nécessite peu de matériel. Il suffit ensuite que de rapporter l’échantillon au laboratoire pour la désorption de l’analyte et l’injection dans le GC. Aussi, cette technique nécessitant aucune préparation de l’échantillon et se fait à la température de la pièce.

Inconvénients

Cette méthode est très sensible sur le temps d’exposition entre la fibre et la phase gazeuse. L’équilibre dans la phase gazeuse peut être long à atteindre pour les composés peu volatils. Pour un simple échantillonnage de fleur, le temps d’analyse varie entre trente minutes et deux heures d’acquisition. Cependant, une surexposition de la fibre aux analytes volatils entraîne une saturation et ne permettrait pas la reproductibilité de l’analyse.

Bibliographie

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