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Entreprise de services du numérique

Une entreprise de services du numérique (ESN), anciennement société de services en ingénierie informatique[1] (SSII ou SS2I), est une société de services experte dans le domaine des nouvelles technologies et de l’informatique. Elle peut englober plusieurs métiers (conseil, conception et réalisation d’outils, maintenance ou encore formation) et a pour objectif principal d’accompagner une société cliente dans la réalisation d’un projet.

Elle se distingue du métier d'éditeur de logiciel et de celui de la société de conseil en technologie spécialisée en maîtrise d'ouvrage, ces trois activités formant le secteur des activités informatiques.

Évolution de l'appellation

L’appellation « SSII » a succédé au début des années 1980 à celle de « SSCI » (société de services et de conseils en informatique). Les SSII ont élargi leur gamme d'activités et le terme « ingénierie » remplace le terme « conseil » jugé à l'époque comme trop associé à de petits cabinets. L'ingénierie recouvre en effet les différents métiers du conseil, des études, de l'ingénierie de systèmes, de l'intégration de systèmes, de l'assistance technique et des progiciels[2].

En 2013, Syntec Numérique, premier syndicat professionnel du secteur, a proposé de changer le nom des « SSII » par entreprises de services du numérique (« ESN »)[3]. Ce changement de nom ne fait toutefois pas l'unanimité, car il a été décidé par le syndicat patronal et certaines sociétés du secteur sans consultation des partenaires sociaux de la branche des Bureaux d'études techniques (notamment l'autre chambre patronale CINOV-IT) ni de la commission générale de terminologie et de néologie.

Généralités

Une ESN est une entreprise spécialisée en services numériques répondant aux besoins d'externalisation des expertises, des services et des projets informatiques des directions informatiques des entreprises.

L'ESN peut par exemple réaliser un logiciel, un site web ou l'exploitation d'une infrastructure informatique.

L'ESN apporte de la valeur ajoutée à ses clients essentiellement à travers le savoir-faire et l'expertise numérique de ses salariés. Il s'agit donc d'une entreprise de services, financièrement faiblement capitalisée, mais dont la valeur est générée par son capital immatériel.

Une ESN est donc une société « à forte valeur ajoutée » : elle ne transforme pas de matières premières ni n’assemble d’éléments afin de vendre sa production. Par son absence d'outillage industriel, l'ESN possède un modèle économique différent de l'industrie. Elle possède des charges fixes et des charges d’approvisionnement plus limitées. Sa marge se calcule comme la différence entre ses coûts fixes+de masse salariale, et les chiffres d'affaires de ses prestations. Pour développer ce chiffre d'affaires, l'ESN doit principalement attirer et recruter des compétences spécialisées (par rapport à l'industrie où il faut fabriquer plus de marchandises), ou de façon secondaire, augmenter ses niveaux de prix en faisant croître la valeur ajoutée de sa masse salariale (amélioration des savoir-faire par la formation professionnelle, augmentation de l'ancienneté et de l'expérience, voir indice Syntec, recrutement d'experts ou de talents reconnus, développement des marchés à plus forte valeur ajoutée, management de la connaissance…).

Au sens le plus large, les ESN proposent les prestations suivantes :

Les ESN se distinguent notamment par le degré d'intégration du travail individuel de chaque employé ou de l'entreprise dans le service qu'elle rend à chacun de ses clients.

La réalisation d'une prestation

  • dans le pays du client est appelĂ©e onshore
  • dans un pays proche est appelĂ©e nearshore
  • dans un pays Ă©loignĂ© gĂ©nĂ©ralement Ă  bas coĂ»t est appelĂ©e offshore (nĂ©cessite la mise en place de structures de suivi et de coordinations importantes)

Le choix de la localisation du lieu de réalisation de la prestation est laissé au client. La plupart des grandes ESN emploient une marque qu'elles ont créée pour désigner le choix laissé au client (Xshore, rightshore, Global Service Delivery, Farshore, MultiShore, N-Shore, Dualshore, Bestshore…)

ESN en France

Comme les autres entreprises de services, les ESN sont rattachées au secteur tertiaire dans la comptabilité nationale française.

Pour l'INSEE, dans la nomenclature des activités et des produits le groupe 62.0 (nomenclature NAF rév. 2) l' intitulé "programmation, conseil et autres activités informatiques"[4] se subdivise en activités de programmation informatique (poste 6201), conseil informatique (poste 6202), gestion d’installation informatique (6203) et aux autres activités informatiques (6209). L'édition de logiciels standards (poste 5829) de même que les activités de conseil hors informatique n’en font pas partie.

Cette branche est également appelée branche « logiciels et services informatiques » ou encore branche Syntec informatique du nom de la chambre patronale qui regroupe environ les deux tiers des effectifs de la branche[5] en France. La plupart des SSII sont associées à la catégorie Conseil en systèmes informatiques qui englobe un vaste univers d'activités allant du développement de logiciel à la demande, à la fourniture d'ingénieurs en régie.

Dans le rĂ©gime de l’« assistance technique » (ou « rĂ©gie »), l'ESN recrute des personnes disposant de compĂ©tences pour revendre leur travail Ă  la journĂ©e, selon un taux journalier convenu. Un indicateur souvent utilisĂ© est le taux journalier moyen (TJM), c'est-Ă -dire le ratio F/J oĂą F est le montant facturĂ© par l'ESN Ă  son ou ses clients pendant une pĂ©riode donnĂ©e, et J le nombre de jours-hommes fournis Ă  ce ou ces clients pendant cette mĂŞme pĂ©riode. Ce système, qui concerne 150 000 salariĂ©s, est parfois critiquĂ© pour son manquement au droit du travail, en effet, le prĂŞt exclusif de main d'Ĺ“uvre est rĂ©servĂ© en thĂ©orie aux seules sociĂ©tĂ©s d’intĂ©rim, faute de quoi est commis un prĂŞt illicite de main-d'Ĺ“uvre (voire un dĂ©lit de marchandage dès lors qu’un prĂ©judice existe pour les salariĂ©s). Ainsi, pour les congĂ©s par exemple, c’est le supĂ©rieur hiĂ©rarchique qui est supposĂ© valider les demandes du salariĂ©, mais en pratique celles-ci sont souvent nĂ©gociĂ©es avec le client[6]. Cependant, ce mode de fonctionnement correspond Ă  une très large demande des grandes entreprises de tous secteurs et des administrations publiques qui, pour des raisons structurelles, n'ont pas la possibilitĂ© d'embaucher les profils correspondant Ă  leurs besoins. Pour tenter de rĂ©duire les incertitudes juridiques inhĂ©rentes Ă  cette pratique, certaines entreprises rĂ©digent les contrats de prestation d'assistance technique dans des termes qui mettent en avant les idĂ©es de contenu livrable et d'engagement de rĂ©sultat. Toutefois, malgrĂ© cette prĂ©caution formelle, de nombreux informaticiens salariĂ©s d'ESN sont en rĂ©alitĂ© des collaborateurs Ă  plein temps des entreprises clientes, et ce pour des pĂ©riodes pouvant aller de quelques mois Ă  quelques annĂ©es. De plus, malgrĂ© l'usage de l'expression « assistance technique », certains collaborateurs d'ESN en dĂ©tachement exercent chez leurs clients des fonctions non essentiellement techniques, telles que l'encadrement de projets ou l'assistance aux maĂ®trises d'ouvrage.

Dans les contrats au forfait, l'ESN vend à son client un service convenu, mesuré par des indicateurs de niveau de service, en mettant en œuvre des ressources notamment humaines dont elle reste seule maître : c'est une prestation à engagement de résultat, et assortie de pénalités en cas de non atteinte des valeurs cibles des indicateurs. On pourrait comparer ce type de prestation à la fourniture d'un service clé en main. La quasi-totalité des activités d'infogérance se font au forfait.

Le centre de service est à mi-chemin entre la régie et le forfait, et est souvent proposé par les grandes ESN du fait de leur organisation. Ce type d'organisation permet à l'ESN d'industrialiser ses prestations en diminuant les coûts (utilisation des ressources humaines, logicielles, matérielles et des compétences internes à l'ESN sur plusieurs projets) et au client de partager, encadrer, fixer les responsabilités (maîtrise d’œuvre, maîtrise d'ouvrage…) et les délais pour différentes parties selon des accords définis entre le prestataire et le client. Ce type d'organisation et de délégation plus ou moins complète d'activités nécessite une implication du client bien plus importante que dans le cadre du forfait. La plupart des salariés des centres de services travaillent au sein des locaux de l'ESN. Toutefois, des collaborateurs peuvent être détachés en assistance technique chez le client ou être amenés à fournir de manière ponctuelle, des prestations de conseils et d'expertises chez le client. Les centres de services des ESN sont souvent des structures régionales (voire nationale) et spécialisés dans une technologie, un domaine d'activité particulier (Java, Technologies Web, CRM, Banque, Telecoms…) ou un client pour lequel il assure la sous-traitance de tout ou partie de son activité informatique. Le caractère industriel de ce genre de structure pourrait être assimilé à des usines de développement.

L'ESN embauche le consultant en CDI et met ses compétences à disposition des entreprises clientes. C'est donc l'ESN qui prend en charge le processus de recrutement et s'occupe de trouver des missions auprès des entreprises clientes[7]. Le salarié de l'ESN peut être amené à travailler quotidiennement ou par épisodes dans les locaux de l’entreprise cliente dès lors que la mission à laquelle il est assigné l'exige : c'est le cas pour les contrats en régie, mais également pour certains forfaits nécessitant une étroite collaboration avec les équipes du client. Lorsqu'il a terminé une mission et que l'ESN ne lui a pas encore trouvé une autre mission, il est en « intercontrat », il continue à être payé, mais n'a pas d’activités. Il arrive que les ESN mettent à profit ces périodes pour donner une formation à leurs employés (les formateurs pouvant eux-mêmes être des employés de l'ESN) ou pour développer des projets internes à l'ESN[2]. La forte présence des ESN en France est liée à l'externalisation des risques liés à la gestion des ressources humaines spécialisées sur des technologies évolutives[8].

Évolution du secteur

En 2016, le secteur de la programmation, du conseil et des autres activitĂ©s informatiques sur mesure (hors Ă©dition de logiciels) emploie 370 000 salariĂ©s et dĂ©gage un chiffre d’affaires de 61,7 milliards d’euros[9].

Entre 2000 et 2016, la valeur ajoutée s’accroît fortement (+ 3,6 % par an en valeur) dans un contexte de stabilité des prix.

Les deux tiers du chiffre d’affaires du secteur sont réalisés par des unités spécialisées dans le conseil informatique et le tiers restant dans des unités liées à la programmation ou la gestion d’installations informatiques.

Le taux de marge du secteur est relativement bas : 15 %, contre 24 % pour l’ensemble du secteur tertiaire marchand non financier.

Le montant de la sous-traitance confiée s’élève à 13,1 milliards d’euros, soit 23 % du chiffre d’affaires du secteur (9 % pour le tertiaire marchand non financier).

L’activité exportatrice se concentre sur peu d’unités : 12 % d’entre elles exportent en 2016 Les exportations atteignent 8,9 milliards d’euros en 2016, soit 37 % de plus qu’en 2011.

Les groupes jouent un rĂ´le prĂ©pondĂ©rant puisque leurs 5 300 filiales informatiques reprĂ©sentent 84 % du chiffre d’affaires et 81 % des effectifs du secteur des services informatiques.

Principales ESN

En France

Les premières SSII (elles n'étaient pas des ESN à l'époque) sur le marché français sont les suivantes, par ordre de chiffre d'affaires décroissant.

  • 2014 et 2015[10] :
  • Les chiffres d'affaires sont des estimations PAC.
  • 2008, 2007 et 2006[11] :
  • Le chiffre d'affaires inclut les licences, la maintenance, le conseil, l'assistance technique, l'intĂ©gration de systèmes, la formation, l'infogĂ©rance, la TMA, le conseil en management et les reventes de matĂ©riels ; les chiffres marquĂ©s * sont des estimations PAC.
  • 2009 et 2010[12] :
  • Le chiffre d'affaires France Services inclut : conseil informatique, assistance technique, projets au forfait, formation, externalisation (incl. InfogĂ©rance et TMA), maintenance matĂ©riel, conseil en management, service associĂ© aux logiciels.
  • Le chiffre d'affaires France Services n'inclut pas : licences logiciels, vente et revente de matĂ©riel et logiciels, R&D externalisĂ©e, financement, leasing.
  • Les chiffres d'affaires entre parenthèses incluent les licences, la maintenance, le conseil, l'assistance technique, l'intĂ©gration de systèmes, la formation, l'infogĂ©rance, la TMA, le conseil en management et les reventes de matĂ©riels.

Classement des 10 premières ESN en France, par chiffre d'affaires (en millions d'euros)[13] :

RangSociétés CA France
Services informatiques
2020 (M€)
CA France
Services informatiques
2019 (M€)
CA France
Services informatiques
2016 (M€)
CA France
Services informatiques
2015 (M€)
CA France
Services informatiques
2014 (M€)
CA France
Services informatiques
2012 (M€)
1 Capgemini 3 069 2 700 2 297 1 992
2 Sopra Steria 1 699 1 675 1 486 1 325
3IBM 2 140 1 763 1 800 1 900 2 500
4 Atos 2 101 1 814 1 800 1 721 1 512
5 Accenture 1 773 1 132 1 042 984 1 230
6 SCC
7 Econocom 1 406 622 581 546
8 Orange Business Services 2 312 1 190 1 155 1 134
9 CGI 1 132 946 879 885 1 114
10 Alten

En 2016, le top 10 représente 44 % du marché des services numériques en France[13].

Dans le monde

ESN mondiales classées par chiffre d'affaires (en milliards de dollars) (chiffres de 2008)[14] :

RangSociétésCA Mondial
2007 (G$)
Part de marché
1IBM Global Services54,1487,2 %
2EDS = HP Enterprise Services22,133,0 %
3Accenture20,6162,8 %
4Fujitsu18,622,5 %
5HP17,2522,3 %
6CSC16,3062,2 %
7Cognizant14,8102 %[15]
8Autres598,95378 %
Total759,231100 %

En Asie

Avec 8 milliards de dollars environ en 2010, le marché chinois des services informatiques est déjà supérieur aux quelque 6 milliards du marché indien[16]. Voici la liste des principales ESN asiatiques :

En Europe

Le cabinet PAC estime en 2020 que le marché EMEA représente 67,7 milliards d'euros de chiffre d'affaires. Les principales ESN classées par chiffre d'affaires (en millions d'euros):

Classement Nom Chiffre d'affaires EMEA Effectifs (Monde)
1 Accenture 12,431 624 000
2 IBM 12,422 383 000
3 Capgemini 8,824 290 000
4 Atos 7,079 105 000
5 DXC 6,673 134 000


Liste des principales ESN européennes en 2017 :

NomSiègeEffectif
CapgeminiFrance180 639
AtosFrance91 322
T-SystemsAllemagne52 000
Sopra SteriaFrance44 000
Indra SistemasEspagne35 730
Inetum (ex Gfi Informatique)France27 000 [17]
TietoEnatorFinlande13 720[18]
ComputacenterRoyaume-Uni12 600

Notes et références

Bibliographie

  • Anne ScottĂ©, Bienvenue dans un monde d'esclaves. La face cachĂ©e des Entreprises de Services du NumĂ©rique, Éditions du Sextant, 2014 (ISBN 978-2-84978-045-9)

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