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Enregistrement pirate

Un enregistrement pirate ou bootleg (anglicisme) est un enregistrement d'un concert depuis le public ou récupéré sur la table de mixage voire un enregistrement studio dérobé, et cela sans aucune autorisation. La personne qui procède à ce type d'action est appelée un « taper », l'enregistrement effectué ou récupéré est considéré illégal car la législation sur le droit d'auteur n'est pas respectée. Les copies de l’enregistrement pirate seront produites sur disque ou cassette par un ou des « bootleggers » et distribuées par des circuits parallèles. L’enregistrement pirate peut ainsi contenir des chansons écartées d'un projet et inédites, des démos, et même des interviews radio.

Dans de rares cas, des enregistrements pirates acquièrent un tel succès au fil des années que des maisons de disques décident de les commercialiser officiellement. Ce fut le cas par exemple en 2006 avec l'album Spunk des Sex Pistols ; ce pirate a vu le jour à la fin de l'année 1977 et a connu un grand succès à travers le temps, à tel point qu'il a été refabriqué à maintes reprises par des bootleggers différents, avec des pochettes différentes, avant qu'un disque officiel ne soit publié en 2006.

Origines du terme

Le terme « bootlegger » servait au départ à désigner durant la prohibition aux États-Unis un individu qui cachait de l'alcool dans la partie montante de sa botte (« bootleg » signifie littéralement « jambe de botte »).

Par analogie avec l'usage précédent (illustration du thème de la contrebande), on appelle « bootleg » le trafic d'enregistrements audio ou vidéo de concerts, ou des inédits « échappés » des studios d'enregistrements[1](parfois même avec la complicité de l'artiste). Ces enregistrements sont particulièrement recherchés par les fans et les collectionneurs. Initialement rares et cantonnés à un réseau de ventes parallèle, les bootlegs sont désormais plus faciles à trouver grâce au développement des techniques de copie privée et d'échange de fichiers sur Internet (pair à pair). Ces bootlegs suscitent de nombreux problèmes juridiques.

Historique

Les Rolling Stones Prince, The Who, Bruce Springsteen, Bob Dylan, Led Zeppelin, The Grateful Dead et les Beatles font partie des artistes les plus piratés au monde. Il faut noter, fait rare, que le groupe The Grateful Dead autorisait les enregistrements pirates de leurs concerts. De ce fait, plusieurs fans du groupe avaient organisé un impressionnant système d'échanges d'enregistrements à travers les États-Unis, en lien avec les archivistes du groupe, Dick Latvala et David Lemieux, producteurs successifs des enregistrements live officiels du groupe.

On estime que, depuis l'année 1972, la quasi-totalité des concerts de The Grateful Dead furent enregistrés et diffusés par des fans. Parmi les concerts les plus piratés du groupe, le concert donné à Veneta dans l'Oregon le ou le concert du . A noter que les concerts donnés durant la tournée européenne de 1972 ont été publiés par le groupe, coupant ainsi l'herbe sous le pied des bootleggers. De nos jours, plusieurs sites Internet servent de plateforme d'échange des bootlegs du groupe.

Bob Dylan à l'inverse, outre le fait d'avoir été un des premiers artistes piratés, déteste les bootlegs.

Rejoignant la même politique que celle du Grateful Dead, les groupes américains Phish et Widespread Panic ont également accordé aux fans le droit de pouvoir enregistrer leurs concerts et de se les échanger. De ce fait, l'échange d'enregistrements de concerts de Phish est devenu une véritable institution pour les fans américains du groupe dès la fin des années 1980. Le site Internet Live Phish, appartenant au groupe, met à disposition des enregistrements soundboard de concerts qu'il est possible d'acheter. Le groupe anglais de Rock Progressif Marillion a engagé une démarche similaire avec la possibilité de télécharger, via son site internet, des dizaines d'enregistrements publics (Live from the front row) directement captés à la console de mixage lors de ses concerts, et ce afin d'enrayer la profusion de bootlegs de qualité très inégale.

L'américain Mike Millard est réputé pour avoir été une des grandes figures de l'enregistrement pirate des années 1970 et 1980[2]. Surnommé « Mike The Mic » (« Mike le micro »), sa salle de prédilection était le Los Angeles Forum d'Inglewood. Il commence sa « carrière » en 1974 à l'aide d'un petit enregistreur mono basique qu'il remplace par la suite par un Nakamichi stéréo. Ses enregistrements deviennent très vite réputés pour leur qualité audio. Sa bande du concert de Led Zeppelin du est considéré par beaucoup comme l'un des meilleurs enregistrements pirates jamais réalisé.

Son enregistrement du concert des Rolling Stones du est également très réputé. Pour pouvoir dissimuler son matériel d'enregistrement, Mike Millard mit au point une technique ingénieuse. Il se rendait aux concerts en chaise roulante, prétendant être paraplégique. Le matériel était alors subtilement caché dans la chaise roulante et Millard pouvait entrer dans la salle sans attirer l'attention. Millard ne fut jamais à l'origine des ventes des bootlegs et était ouvertement contre la vente illégale de ses enregistrements, comme beaucoup de tapers aujourd'hui. On estime qu'il a enregistré pratiquement tous les concerts ayant eu lieu au Los Angeles Forum de 1974 à 1980.

Parmi les compagnies les plus actives et cĂ©lèbres dans le milieu de la commercialisation des enregistrements illĂ©gaux figuraient Trade Mark Quality. CrĂ©Ă©e en 1969 Ă  Los Angeles par Dub Taylor et Ken Douglas, Trade Made Quality fut responsable de la mise en circulation d'une centaine d'albums bootlegs tout au long des annĂ©es 70. Perfectionnistes, Taylor et Douglas accordaient beaucoup d'importance Ă  la pochette ainsi qu'Ă  la qualitĂ© du vinyle sur lequel Ă©taient pressĂ©s leurs albums. Ils furent les deux personnes derrière The Great White Wonder, le premier album bootleg de Bob Dylan sorti en 1969.

Il existe une radio (The Mashup Radio) sur Internet depuis qui s'est fait une spĂ©cialitĂ© du bootleg et du mashup. Celle-ci a Ă©tĂ© crĂ©Ă©e par Ludovic Dazin et François Rabanel et a rĂ©ussi Ă  attirer sur 24 mois Ă  plus d'un million d'auditeurs.

DJ's

Le terme « bootleg » est aussi employé par le milieu des DJ pour désigner l'art de mixer deux morceaux pour en faire un troisième. Le morceau ainsi obtenu (bootleg) sera désigné par les noms des deux artistes ayant servi de source, séparés par le signe vs ou, de plus en plus couramment, réunis, avec les deux titres des musiques utilisés, en un ou deux mots-valises. Le terme « bootleg » est alors utilisé car la plupart du temps ces morceaux circulent sur Internet de façon illégale (sans l'accord des créateurs des œuvres originales). Cette technique peut aussi être appelée « mashup » ou « medley ».

bootlegs célèbres

  • Bob Dylan: Great White Wonder : Mis sur le marchĂ© en juillet 1969, Great White Wonder est considĂ©rĂ© comme Ă©tant le premier bootleg publiĂ©[3]. Bien que cette affirmation soit parfois contestĂ©e, il n'empĂŞche que c'est en tout cas un des bootlegs les plus cĂ©lèbres. Il contient des bandes de Bob Dylan, enregistrĂ©es entre 1961 et 1967, alors totalement inĂ©dites. Le nom « Great White Wonder » lui a Ă©tĂ© attribuĂ© Ă  cause de sa pochette artisanale, blanche et ne contenant pas d'informations. Les radios californiennes l'ont diffusĂ© Ă  maintes reprises sur les ondes dès sa sortie.
  • The Rolling Stones : LIVEr Than You'll Ever Be : Mis sur le marchĂ© en , ce bootleg contient l'enregistrement du concert du donnĂ© par les Rolling Stones Ă  Oakland. Il a Ă©tĂ© enregistrĂ© par un membre du public Ă  l'aide d'un petit enregistreur Ă  bandes. Il est considĂ©rĂ© comme Ă©tant le meilleur document disponible sur la tournĂ©e amĂ©ricaine 1969 des Rolling Stones. Du jour au lendemain, les ventes de ce bootleg se sont mises Ă  augmenter de manière vertigineuse. Pour contrer les bootleggers, la maison de disques des Rolling Stones a activĂ© la sortie de l'album live Get Yer Ya-Ya's Out!, enregistrĂ© pendant la mĂŞme tournĂ©e.
  • The Beatles - Get Back : Ce bootleg des « Fab Four » est constituĂ© de versions alternatives et de chansons du projet avortĂ© Get Back (qui donna naissance Ă  l'album Let It Be) en 1969.
  • The Velvet Underground - The Quine Tapes : Le musicien Robert Quine Ă©tait un fan inconditionnel du Velvet Underground. Il a passĂ© la majeure partie de l'annĂ©e 1969 Ă  suivre la tournĂ©e de soixante-dix concerts de son groupe fĂ©tiche. Ă€ l'aide d'enregistreurs cassettes ou Ă  bandes, il a enregistrĂ© une grande partie de ces concerts. MalgrĂ© leur qualitĂ© parfois limite, les bandes de Quine (surnommĂ©es The Quine Tapes) sont devenues cĂ©lèbres parmi les fans du Velvet Underground. Certains titres que jouait alors le groupe sur scène Ă©taient inĂ©dits, ce qui a favorisĂ© la renommĂ©e des bandes. En 2010, la maison de disques Polydor va publier officiellement une partie des bandes de Quine sur le triple album The Bootleg Series Volume 1: The Quine Tapes.
  • Led Zeppelin - Live On Blueberry Hill : EnregistrĂ© par un spectateur au Los Angeles Forum le , Live On Blueberry Hill est le premier bootleg de Led Zeppelin Ă  avoir Ă©tĂ© mis sur le marchĂ©. Certains fans et disquaires pensaient qu'il s'agissait d'un album officiel Ă  cause de sa grande popularitĂ© et de son incroyable rentabilitĂ©.
  • The Grateful Dead - Veneta : Contient l'intĂ©gralitĂ© (plus de 3 heures) du concert donnĂ© par The Grateful Dead le au Old Renaissance Fairegrounds de Veneta (Oregon). Ce concert est rĂ©putĂ© parmi les fans comme Ă©tant le meilleur jamais donnĂ© par le groupe.
  • The Who: Tales From The Who : Double bootleg contenant le concert du au Spectrum de Philadelphie. Contrairement Ă  beaucoup de bootlegs, il ne s'agit pas d'un enregistrement amateur effectuĂ© par un membre du public mais des bandes de la radio qui couvrait le concert. Trademark Of Quality, le label ayant produit ce bootleg, est Ă©galement celui qui a sorti Great White Wonder.
  • Patti Smith - Let's Deodorized The Night : enregistrement radiophonique du concert au Bottom Line de New York du . Let's Deodorized The Night est aujourd'hui considĂ©rĂ© comme un des meilleurs tĂ©moignages des dĂ©buts de Patti Smith.
  • Phish - Madison Square Garden 12/31/95 : Concert donnĂ© le au Madison Square Garden de New York par le groupe Phish. Il est considĂ©rĂ© comme l'un des meilleurs concerts du groupe. Il a Ă©tĂ© Ă©ditĂ© officiellement en par le label JEMP Records.
  • Sex Pistols - Spunk : premier bootleg du groupe, sorti quelques semaines avant l'album officiel Never Mind The Bollocks here's the Sex Pistols. Il contient des dĂ©mos studio enregistrĂ©es par l'ingĂ©nieur du son Dave Goodman en juillet et et en . Ce disque aux origines douteuses a Ă©tĂ© officialisĂ© en 2006, après des annĂ©es de succès et de repressage sous diverses formes (avec ou sans pochette, avec des pochettes diffĂ©rentes, avec des titres en plus, rebaptisĂ© No Future UK?, etc.). Certains affirment que c'est Dave Goodman lui-mĂŞme qui le fit fabriquer, d'autres en revanche voient plutĂ´t son origine du cĂ´tĂ© du management du groupe. Quoi qu'il en soit, ce disque a tellement Ă©tĂ© repressĂ© qu'il a fini par attirer l'attention d'une maison de disque qui l'a officialisĂ© en 2006, sous format 33 tours et CD.
  • Sex Pistols - Gun Control : enregistrĂ© (et aussi filmĂ©) de façon professionnelle au Winterland Ballroom de San Francisco le , ce bootleg LP fabriquĂ© Ă  l'origine Ă  1000 copies, a fait le tour du monde, et a Ă©tĂ© repressĂ© maintes fois. Il s'agit du dernier concert donnĂ© par le groupe avant sa reformation de 1996, annĂ©e au cours de laquelle la bande audio du concert et la vidĂ©o ont finalement Ă©tĂ© officialisĂ©es.
  • Nirvana - Reading Festival '92 : enregistrĂ© le au festival de Reading en Angleterre. RĂ©putĂ© pour ĂŞtre l'un des meilleurs concerts du groupe, cet enregistrement est finalement sorti officiellement en CD et DVD en .
  • Hole - Unplugged (Live 1995) : enregistrĂ© le 14 fĂ©vrier 1995 sur MTV, l'audio de cette performance live fera l'objet d'une sortie digitale sur les plateformes de streaming en 2020 Ă  l'occasion du 25e anniversaire de cette soirĂ©e. L'album live est Ă©galement disponible au format vinyle, pressĂ© par le label Parachute Recording Compagny. Une captation vidĂ©o professionnelle du concert est Ă©galement en circulation sur internet mais il reste difficile de la trouver en bonne qualitĂ©.

Notes et références

  1. « Influence des baladeurs audio sur les bootlegs - Cassette Player Culture », sur www.wearerewind.fr (consulté le )
  2. « Mike Millard », sur Discogs (consulté le ).
  3. Eric Harvey, « Bob Dylan's Great White Wonder : The Story of the World's First Album Leak », sur pitchfork.com, (consulté le ).

Article connexe

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