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Effet Matthieu

L’effet Matthieu (Matthew Effect) dĂ©signe, en sociologie des sciences, les mĂ©canismes par lesquels les scientifiques, les Ă©tablissements d'enseignement supĂ©rieur et les entreprises les plus reconnus tendent Ă  entretenir leur domination dans le monde de la recherche et de l'innovation technologique.

Dans le langage populaire, l'effet Matthieu se traduit par les plus riches deviennent plus riches et les plus pauvres, plus pauvres[1].

Origine

Le terme est dĂ» au sociologue amĂ©ricain Robert King Merton qui, dans un article publiĂ© en 1968[2], cherche Ă  expliquer comment les scientifiques et les universitĂ©s les plus rĂ©putĂ©s maintiennent leur domination dans le domaine de la recherche[3]. Cette appellation fait rĂ©fĂ©rence Ă  une phrase de l'Évangile selon Matthieu : « Car on donnera Ă  celui qui a, et il sera dans l'abondance, mais Ă  celui qui n'a pas on ĂŽtera mĂȘme ce qu'il a »[4].

Domaines d'application

Des chercheurs ont par la suite réutilisé la formule d'effet Matthieu dans d'autres contextes pour décrire les mécanismes par lesquels les plus favorisés tendent à accroßtre leur avantage sur les autres :

  • lors d'un processus d'apprentissage (lecture, dĂ©veloppement de compĂ©tences), les meilleurs tendent Ă  accroĂźtre leur avance, tandis que les moins bons accentuent leur retard[5]
  • en thĂ©orie des rĂ©seaux, les nƓuds antĂ©rieurs dans un rĂ©seau bĂ©nĂ©ficient d'un attachement prĂ©fĂ©rentiel : ils ont tendance Ă  attirer plus de liens dĂšs le dĂ©but, renforçant leur position hĂ©gĂ©monique[6]
  • dans le domaine de l'intelligence artificielle, des ensembles de donnĂ©es biaisĂ©s peuvent conduire Ă  des systĂšmes d'IA biaisĂ©s qui perpĂ©tuent et amplifient les inĂ©galitĂ©s et les biais de reprĂ©sentation[7]
  • dans le monde du sport, les club les plus prestigieux ont tendance Ă  attirer les joueurs les plus talentueux et les meilleurs entraĂźneurs, crĂ©ant un cercle vertueux pour les clubs dominants, tandis que les clubs en difficultĂ© rencontrent des obstacles pour s'amĂ©liorer et rivaliser avec les Ă©quipes de tĂȘte
  • les produits de consommation bien notĂ©s ou qui bĂ©nĂ©ficient d'une certaine notoriĂ©tĂ© ont plus de chances de continuer Ă  ĂȘtre apprĂ©ciĂ©s, empĂȘchant aux autres Ă©lĂ©ments de gagner en popularitĂ© ou d'ĂȘtre reconnus[8] - [9]

Références

  1. « Effet Matthieu : pourquoi aimons nous donner Ă  ceux qui ont au dĂ©triment de ceux qui n’ont pas ? », sur oxemag.blogspot.com, (consultĂ© le )
  2. Robert K. Merton, « The Matthew Effect in Science, II: Cumulative Advantage and the Symbolism of Intellectual Property », Isis, vol. 79, no 4,‎ , p. 606–623 (ISSN 0021-1753 et 1545-6994, DOI 10.1086/354848, lire en ligne, consultĂ© le )
  3. (en) Robert K. Merton, « The Matthew Effect », Science, vol. 159, no 3810, 1968, p. 56-63.
  4. Mt 13:12, traduction de L. Segond.
  5. (en) Camilla Kempe, Anna‐Lena Eriksson‐Gustavsson et Stefan Samuelsson, « Are There any Matthew Effects in Literacy and Cognitive Development? », Scandinavian Journal of Educational Research, vol. 55, no 2,‎ , p. 181–196 (ISSN 0031-3831 et 1470-1170, DOI 10.1080/00313831.2011.554699, lire en ligne, consultĂ© le )
  6. Andres Guadamuz, Networks, complexity and internet regulation: scale-free law, Edward Elgar Publishing, (ISBN 978-1-84844-310-5)
  7. James Bowers, « L’intelligence artificielle : outil de domination ou d’émancipation ? », sur Polytechnique Insights, (consultĂ© le )
  8. Raissa M. D'Souza, « Unlocking the science of success The Formula: The Universal Laws of Success Albert-LĂĄszlĂł BarabĂĄsi Little, Brown, 2018. 316 pp. », Science, vol. 362, no 6420,‎ , p. 1253–1253 (ISSN 0036-8075 et 1095-9203, DOI 10.1126/science.aav7140, lire en ligne, consultĂ© le )
  9. Matthew J. Salganik, Peter Sheridan Dodds et Duncan J. Watts, « Experimental Study of Inequality and Unpredictability in an Artificial Cultural Market », Science, vol. 311, no 5762,‎ , p. 854–856 (ISSN 0036-8075 et 1095-9203, DOI 10.1126/science.1121066, lire en ligne, consultĂ© le )

Voir aussi

Articles connexes

Bibliographie

  • (en) Robert K. Merton, « The Matthew Effect », Science, vol. 159, no 3810, 1968, p. 56-63 [lire en ligne] [PDF].
  • (en) Herbert J. Walberg (de) et Siow-Ling Tsai, « Matthew Effects in Education », American Educational Research Journal (en), vol. 20, no 3, 1983, p. 359-373 [lire en ligne] [PDF].
  • Margaret W. Rossiter, « L’effet Matthieu Mathilda en sciences », Les Cahiers du CEDREF, 11, 2003 [lire en ligne].
  • W. McLaughlin et S. Miller, « FĂ©lix Tisserand et l'effet Matthieu posthume », Pour la science, no 21, - , p. 24-27 [lire en ligne] [PDF].
  • (en) Keith E. Stanovich (en), « Matthew Effects in Reading: Some Consequences of Individual Differences in the Acquisition of Literacy », Reading Research Quarterly (en), 1986, 21 (4), 360–407 [lire en ligne] [PDF].
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