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Doryphore (PolyclĂšte)

Le Doryphore (ou « Porte-lance ») est une statue cĂ©lĂšbre du sculpteur grec PolyclĂšte, qui reprĂ©sentait un jeune guerrier armĂ© d'une lance (sculptĂ©e vers 440 av. J.-C.). L'original en bronze est perdu, mais plusieurs copies antiques nous sont parvenues dont un marbre romain qui se trouve au musĂ©e archĂ©ologique de Naples, en Italie. Un doryphore — qui signifie « porte-lance » — est le nom d'un soldat chargĂ© de transporter le butin au moyen de bois de lance (en grec ancien Ύόρυ) et Ï†ÏŒÏÎżÏ‚, « qui porte » ; XĂ©nophon fait mention de cette fonction au chapitre II de son Anabase. Selon l'auteur romain Pline l’Ancien, des copies du Doryphore Ă©taient souvent exposĂ©es dans les gymnases, oĂč les athlĂštes pratiquaient des activitĂ©s physiques et sportives nus[1].

Copie du Doryphore de PolyclÚte, exemplaire provenant de Pompéi (av. 79 AEC). Marbre, H. 2 m.
Musée archéologique national de Naples

Le travail de PolyclĂšte

PolyclĂšte avait entrepris de dĂ©montrer, par une « statue dont toutes les parties seraient entre elles dans une proportion parfaite », quels sont les rapports de grandeur dans lesquels la nature a placĂ© la perfection des formes humaines. Il atteignit si bien son but que la statue qu'il donna comme exemple et comme modĂšle fut considĂ©rĂ©e comme un chef-d'Ɠuvre incontestable. La tĂȘte entre au total sept fois dans le corps: trois fois dans le buste et trois fois entre le bassin et les pieds.

Selon Cicéron[2], comme on demandait à Lysippe comment il avait appris son art, il répondit « En étudiant le Doryphore de PolyclÚte ». Cette statue, qui semble vouloir résumer et formuler l'art de la vieille école d'Argos a fourni le sujet de maintes dissertations esthétiques. Elles ont toutes le point de départ dans le type d'adolescent viril qu'a voulu réaliser PolyclÚte, et dans la discussion de l'idée du « canon » en sculpture. Pline l'Ancien (Histoire naturelle, XXXIV, 55) explique ainsi :

« Il rĂ©alisa aussi un enfant sous forme d'homme, le Doryphore, que les artistes appellent Canon, parce qu'ils y cherchent, comme dans une loi, les principes de leur art, et que seul parmi les hommes, il est considĂ©rĂ© comme ayant rĂ©alisĂ© l'art lui-mĂȘme dans une Ɠuvre d'art[3]. »

Description

ModĂšle 3D du Doryphore de PolyclĂšte.

Ainsi, le Doryphore incarne le mieux les thĂ©ories du traitĂ© de PolyclĂšte. La copie la mieux conservĂ©e de son Ɠuvre est la copie romaine du musĂ©e archĂ©ologique national de Naples.

La figure est animĂ©e par un contrapposto (l'inclinaison des hanches rĂ©pondant inversement Ă  l'inclinaison des Ă©paules). Cette position a des rĂ©percussions sur toute la composition du corps de l'homme au repos. La jambe libre est dĂ©gagĂ©e d'un cĂŽtĂ©, la tĂȘte est tournĂ©e de l'autre. Une jambe est portante, et de l'autre cĂŽtĂ©, la main portait la lance. Cependant, la statue reste bidimensionnelle et frontale. De plus, le niveau d'idĂ©alisation est trĂšs poussĂ©, et l'Ă©quilibre de l'attitude n'a rien de naturel. Si la musculature et le rĂ©seau de veines sont entiĂšrement maĂźtrisĂ©s, compris, l'anatomie entre dans un schĂ©ma idĂ©al. La ligne des pectoraux rĂ©pond Ă  celle des hanches, l'arc thoracique rĂ©pond Ă  celui du bas-ventre, la hauteur de la tĂȘte Ă©quivaut Ă  celle du pied. Le visage lui-mĂȘme est particuliĂšrement serein et rĂ©gulier dans ses traits. L'ovale du visage est parfait, les mĂšches de la chevelure rayonnent de maniĂšre rĂ©guliĂšre, les arcades sourciliĂšres sont nettes.

Le corps humain est observé à partir de la nature, mais cette observation est idéalisée pour proposer une formule plus idéale et équilibrée.

Claude Rolley prĂ©cise que « tout est calculĂ© pour la vue de face » ; et ailleurs: « le Doryphore ne marche pas ; il exprime la disponibilitĂ© pour tout mouvement, sans ĂȘtre en mouvement »[4].

Copies romaines dans le monde

Copie du Doryphore de PolyclÚte (époque d'Auguste, 27 AEC - 68 EC). Marbre pentélique. H. 198,12 cm.
Minneapolis Institute of Art[5]

Si l'original en bronze de PolyclÚte a disparu, environ 70 copies sont conservées aujourd'hui[1]. La plus belle copie est celle qui est conservée au musée archéologique de Naples.

En 1986, le Minneapolis Institute of Art (MIA) a acquis un exemplaire relativement bien conservĂ© de la statue du Doryphore : elle est sculptĂ©e dans un bloc de marbre pentĂ©lique. Elle est complĂšte Ă  l’exception du bras gauche infĂ©rieur[6] et des doigts de la main droite. DatĂ©e entre 27 avant J.-C. et 68 aprĂšs J.-C., elle mesure 1,98 mĂštre de hauteur[7]. Le musĂ©e affirme que cette copie a Ă©tĂ© trouvĂ©e dans les eaux italiennes au cours des annĂ©es 1930 et a passĂ© plusieurs dĂ©cennies dans des collections privĂ©es italiennes, suisses et canadiennes avant de refaire surface sur le marchĂ© de l’art vers 1980. Elle a Ă©tĂ© achetĂ©e par le MIA pour 2,5 millions de dollars[6]. À l’inverse, le tribunal de Torre Annunziata affirme que la statue a Ă©tĂ© retrouvĂ©e illĂ©galement en 1976 sur la colline de Verano Ă  Castellammare di Stabia, prĂšs de Naples et demande la restitution de l'oeuvre. Selon l’Italie, la statue aurait Ă©tĂ© mise au jour par des pilleurs qui l'ont vendu ensuite vendue pour environ 1,2 million de dollars Ă  l’antiquaire bĂąlois Elie Borowski, connu pour le trafic d’Ɠuvres d’art volĂ©es[6]. Puis, au dĂ©but des annĂ©es 1980, le Doryphore aurait Ă©tĂ© exposĂ©e Ă  la GlyptothĂšque de Munich : le parquet de Naples a rĂ©clamĂ© l'oeuvre mais s'est heurtĂ©e Ă  la dĂ©cision de la Cour d’appel de BaviĂšre en 1984[6].

Une copie du Doryphore a Ă©tĂ© retrouvĂ©e en 2012, dans les ruines d’un ancien bain romain dans le sud de l’Espagne[6]. Un torse partiel se trouve dans la Galerie des Offices Ă  Florence[6].

Le musée du Louvre conserve un moulage en plùtre du Doryphore, issu d'un atelier italien, réalisé sur l'original conservé à Naples au musée national archéologique (N° inv. 6011)[8]. Ses dimensions sont 213 cm de hauteur sur 70 cm de largeur et 75 cm de profondeur. Il n'est pas exposé au public.

Références

  1. Les Amis du Musée Adolf Michaelis, « Le Doryphore de PolyclÚte » (consulté le )
  2. Brutus (86, 296)
  3. Traduction : (grc + la + fr) Marion Muller-Dufeu, Ă©dition Ă©tablie et prĂ©sentĂ©e [d'aprĂšs l'ouvrage de Johannes Overbeck, avec une mise Ă  jour complĂšte], La sculpure grecque : sources littĂ©raires et Ă©pigraphiques, Paris, École nationale supĂ©rieure des beaux-arts, , 1079 p., 24 cm (ISBN 2-84056-115-8, SUDOC 060969261), p. 397.
  4. Claude Rolley, La sculpture grecque : 2, La période classique, Picard, , 439 p., 29 cm (ISBN 2-7084-0506-3, SUDOC 048980072).
  5. Minneapolis Institute of Art : collection
  6. (en) Sarah Cascone, « An Italian Court Demands the Restitution of an Ancient Roman Lance Bearer From the Minneapolis Institute of Art », sur artnet news, (consulté le )
  7. (en) « The Doryphoros (after Polykleitos) », sur MIA (consulté le )
  8. « Statue ; Tirage du Doryphore de PolyclÚte », sur Musée du Louvre (consulté le )

Voir aussi

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