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Dobson's Encyclopædia

La Dobson’s Encyclopædia est la première encyclopĂ©die publiĂ©e aux États-Unis d'AmĂ©rique, par l'imprimeur Thomas Dobson de 1789 Ă  1798[1]. Encyclopædia est le titre exact de l'ouvrage, le mot Dobson ne figure pas dans le titre, mais en bas de page. Bien que la Dobson’s Encyclopædia soit un peu plus Ă©laborĂ©e pour certains articles, il s'agit en fait d'une rĂ©impression de la 3e Ă©dition contemporaine de l’Encyclopædia Britannica, publiĂ©e de 1788 Ă  1797. Le terme Britannica a Ă©tĂ© retirĂ© du titre, la dĂ©dicace « au roi George III Â» a Ă©tĂ© remplacĂ©e par « Ă  nos lecteurs Â», et divers Ă©lĂ©ments sur l'histoire, la gĂ©ographie et les peuples amĂ©ricains y ont Ă©tĂ© ajoutĂ©s. Par exemple, la carte de l'AmĂ©rique du Nord utilisĂ©e dans la 3e Ă©dition de Britannica Ă©tait la mĂŞme que dans la 1re et 2e Ă©dition, et donc parfaitement obsolète. Dobson a utilisĂ© une carte plus grande, beaucoup plus dĂ©taillĂ©e et Ă  jour, ainsi qu'une carte lĂ©gèrement amĂ©liorĂ©e de l'AmĂ©rique du Sud. La plupart des gravures de l’Encyclopædia sont l'Ĺ“uvre d'Alexander Lawson, alors employĂ© de Thackara & Vallance, la compagnie de James Thackara (1767-1848) et John Vallance (1770-1823).

Première page de la Dobson’s Encyclopædia (à gauche) et de la 3e édition de l’Encyclopædia Britannica (à droite).

Contexte

La troisième édition de l’Encyclopædia Britannica en dix-huit volumes, publiée à partir de 1788 en Écosse, est généralement bien reçue, étant de loin la meilleure jusqu'alors. Sa publication s'achève en 1797 et est complétée par deux volumes en 1801.

Ă€ cette Ă©poque, d'entreprenants imprimeurs amĂ©ricains s'adaptent Ă  la qualitĂ© et Ă  la quantitĂ© que sont capables de produire leurs homologues britanniques, tout en rĂ©duisant de manière significative le prix des ouvrages. Un maĂ®tre imprimeur renommĂ©, Thomas Dobson, s'indigne de la partialitĂ© britannique sous-jacente du Britannica et dĂ©cide de le rĂ©Ă©diter avec une vision plus amĂ©ricanisĂ©e. Il termine son Encyclopædia en , soit une annĂ©e après ses concurrents britanniques. La Dobson’s encyclopædia se compose de 16 650 pages et de 595 planches gravĂ©es ; ces deux quantitĂ©s sont lĂ©gèrement supĂ©rieures Ă  son pendant britannique. Les planches sont produites par l'atelier dirigĂ© par Robert Scot[2].

Vente par souscription

Carte d’AmĂ©rique du Nord de la Dobson (Volume 1), illustrant l'article « America Â».

Le prix de vente au détail est fixé à cinq dollars de Pennsylvanie par volume, environ quinze pour cent moins cher que le Britannica aux États-Unis, en raison, principalement, des taxes sur l'importation des ouvrages britanniques[3]. Dobson n'est pas partisan de la vente au porte-à-porte, qui est pratiquée par son contemporain Parson Weems, pour la vente du New System of Modern Geography de William Guthrie ou du History of the earth and Animated Nature d'Oliver Goldsmith. La pratique de la technique du porte-à-porte semble également peu adaptée, en raison tout d'abord prix et parce que l'impression va s’étaler sur plusieurs années.

Dobson opte pour une campagne « publicitaire Â» intense, encore jamais pratiquĂ©e en AmĂ©rique du Nord jusqu'alors, pour obtenir des souscriptions. Ses « encarts Â» sont publiĂ©s dans les journaux, sur la pochette des magazines, ou sur des feuillets placĂ©s dans les livres vendus par les principaux libraires de l'Ă©poque. Cette campagne fait largement appel Ă  la fiertĂ© patriotique nĂ©e de la toute rĂ©cente indĂ©pendance amĂ©ricaine. Elle mentionne par exemple que la production ne sera faite que sur du matĂ©riel et par des artisans amĂ©ricains. Elle annonce en outre que le lancement de la première encyclopĂ©die amĂ©ricaine est programmĂ©e pour ĂŞtre concomitante Ă  l'Ă©lection de George Washington en tant que premier prĂ©sident de la nouvelle Constitution. La première annonce paraĂ®t le dans trois journaux: le Pennsylvania Mercury, le Pennsylvania Packet et la Federal Gazette. Afin de soutenir l'initiative patriotique de Dobson, le prĂ©sident George Washington souscrit deux exemplaires de la première encyclopĂ©die amĂ©ricaine. L'un d'entre eux est toujours conservĂ© avec la bibliothèque personnelle de George Washington au Boston Athenæum. Parmi les souscripteurs, on trouve, d'autres figures politiques de l'Ă©poque comme Thomas Jefferson, Aaron Burr ou Alexander Hamilton[4].

Impression

Tout comme le Britannica, l’Encyclopædia de Dobson est publiĂ©e sous forme de numĂ©ros hebdomadaires susceptibles d'ĂŞtre ensuite reliĂ©s en volumes ou demi-volumes. Le prix de chaque numĂ©ro est fixĂ© Ă  « un quart de dollar Â». Le premier est publiĂ© le , suivi du second une semaine plus tard, comme il se doit. Dobson poursuit avec rĂ©gularitĂ© sa publication jusqu'Ă  ce que son entreprise soit la proie des flammes un dimanche matin, le ; la chaleur de l'incendie est si intense que certaines pièces de ses machines fondent. Imperturbable, Dobson reprend l'impression de son Encyclopædia le mois suivant.

Difficultés éditoriales

Dobson rencontre quelques problèmes Ă©ditoriaux, en particulier pour le quinzième volume dans l'article concernant les quakers qui soulève l’indignation Ă  Philadelphie, oĂą vivent de nombreux « Amis Â». Dobson a simplement reproduit l'article pamphlĂ©taire du Britannica, rĂ©digĂ© par George Gleig, futur Ă©vĂŞque de Brechin (Primus of the Scottish Episcopal Church), sans en vĂ©rifier l'exactitude. Fervent anglican, Gleig y dĂ©nigrait George Fox, le fondateur des quakers. Dobson relève le dĂ©fi en rencontrant les quakers et en imprimant un article dĂ©fendant la personne de George Fox. L'approche Ă©clairĂ©e des quakers vis-Ă -vis des relations inter-raciales et des autres questions sociales sont d'ailleurs souvent notĂ©es et saluĂ©es au sein de l’Encyclopædia.

Comparaison entre Dobson et Britannica

Portrait de Jedidiah Morse par son fils Samuel Finley Breese Morse (vers 1810)

La plus grande partie de l’Encyclopædia de Dobson est une copie de la 3e Ă©dition du Britannica. Les principales exceptions se trouvent dans les articles traitant de la gĂ©ographie amĂ©ricaine, notamment Philadelphie et la Pennsylvanie, ainsi que l'histoire amĂ©ricaine, comme la reddition des britanniques lors de la RĂ©volution amĂ©ricaine. Un compte rendu très dĂ©taillĂ© de cette guerre, Ă  la fois dans Britannica et Dobson, reprĂ©sente a peu près la seconde moitiĂ© de l'article « America Â», qui se trouve dans le tome 1. Dans le Britannica, il va de la page 574 Ă  618, chez Dobson de la 575 Ă  626, soit 7 pages de plus. Fait intĂ©ressant, le tome 1 du Dobson est re-paginĂ©, revenant Ă  la page 619 après cet article, pour s'aligner Ă  nouveau avec le Britannica.

Outre Dobson lui-mĂŞme, Jedidiah Morse, le père de la gĂ©ographie amĂ©ricaine, contribue de manière significative Ă  l'ouvrage. Il y dĂ©fend, par exemple, le statut des femmes au sein des populations amĂ©rindiennes, que les Ă©diteurs du Britannica, probablement James Tytler, qualifient de « slavish Â» (serviles, soumises).

« We may confidently and safely assert that the condition of women among many of the American tribes is as respectable and important as it was among the Germans, in the day of Tacitus, or as it is among many other nations with whom we are acquainted, in a similar stage of improvement[5]. »

— Jedidiah Morse, Dobson's Encyclopædia

Morse conteste Ă©galement le point de vue du Britannica selon lequel la peau et le crânes des Indiens sont « plus Ă©pais que ceux de nombreuses autres nations de l'humanitĂ© Â».

Il est probable que l’Encyclopædia de Dobson ait eu d'autres contributeurs, mais leurs noms sont inconnus.

Supplément

Le physicien Benjamin Thompson, Comte de Rumford

Dobson pense Ă  la publication d'un supplĂ©ment avant mĂŞme que son Encyclopædia ne soit achevĂ©e. Il commence Ă  y travailler avant mĂŞme que Britannica n'annonce son intention d'en produire un. Lorsque le supplĂ©ment Britannica commence Ă  ĂŞtre imprimĂ©, Dobson possède une bonne quantitĂ© de matière supplĂ©mentaire Ă  ajouter. Son supplĂ©ment, datĂ© de 1803, comporte trois volumes, surpassant le supplĂ©ment en deux volumes publiĂ© par Britannica en 1801. Le supplĂ©ment est plus indĂ©pendant et plus prĂ©cis que l'encyclopĂ©die proprement dite, mais les ventes sont relativement maigres. Un article remarquable « Pneumatics Â», dĂ©fend rigoureusement les conclusions du physicien Benjamin Thompson selon lesquelles l'eau est un mĂ©diocre conducteur de la chaleur, avis opposĂ© Ă  celui d'un contributeur important du Britannica, le chimiste Thomas Thomson d'Édimbourg.

Les différences entre les textes du Britannica et de la Dobson se trouvent principalement dans leurs suppléments. Celui de 1803 pour Britannica (deuxième édition, la première édition étant en 1801), comporte deux volumes de 810 et 812 pages. Celui de la Dobson se compose de 704, 734 et 566 pages. Cela ajoute 1622 pages pour le Britannica et 2004 pour le Dobson. Le supplément de 1803 du Britannica comporte 50 gravures contre 53 pour le Dobson.

En examinant les deux ouvrages, on remarque que les pages supplĂ©mentaires de la Dobson se concentrent sur les principaux intĂ©rĂŞts des AmĂ©ricains, comme une descriptions dĂ©taillĂ©e des États, de New York, de Boston, de centaines de villes et de lieux ajoutĂ©s, des descriptions de tribus indiennes, de leurs localisation et de leurs coutumes, l'ajout de nombreux dirigeants politiques de l'AmĂ©rique, un article complĂ©tĂ© sur le premier prĂ©sident, et un tout nouvel article sur Benjamin Franklin[6]. Il est intĂ©ressant de constater que Franklin possède son propre article dans la troisième Ă©dition du Britannica et est mentionnĂ© Ă  plusieurs reprises dans le reste de l'ouvrage, remontant Ă  la première Ă©dition, mais n'a aucun article dans le supplĂ©ment. L'article sur Franklin dans le supplĂ©ment de la Dobson est de 4 pages. Washington n'a pas son propre article dans la troisième du Britannica, mais un de 4 pages dans son supplĂ©ment. Le supplĂ©ment de la Dobson copie ces 4 pages et Ă©largit l'article Ă  8 pages. Le plus intĂ©ressant est l'article « The United States of America Â» paru dans le supplĂ©ment de la Dobson qui fait 30 pages, et pour lequel il n'y a pas de correspondant dans le supplĂ©ment du Britannica.

Le supplément n'est pas imprimé par Dobson, mais par Budd and Bartram de Philadelphie.

Concurrence

Le tirage original de deux-mille exemplaires de la Dobson est épuisé en 1818, et une réimpression est effectuée par Budd and Bartram de Philadelphie. L’Encyclopædia se heurte cependant à une concurrence sérieuse de la part de l'imprimeur Samuel F. Bradford de Philadelphie, qui lance l'idée, en 1805, d'une réimpression de la New Cyclopaedia d'Abraham Rees, complétée d'ajouts purement américains. Les 44 volumes de l'édition britannique originale ont commencé à paraître à Londres en , mais l'impression ne s'achève pas avant 1820 et les 47 volumes de la version américanisée, pas avant 1822. Ce projet ne conduit pas seulement Bradford à la faillite, mais également son successeur, la société Murray, Draper, Fairman & Company (très vite recapitalisée par John Draper). À cette époque, la Dobson devient néanmoins de plus en plus vulnérable à la concurrence en raison de deux facteurs: l'encyclopédie commence à être sérieusement vieillotte et ne contient en somme que très peu de biographies d'Américains. Dobson et son fils Judah se retirent des affaires en 1822. Dobson lui-même meurt le .

Une encyclopédie bien plus populaire va alors succéder à la Dobson. L’Encyclopedia Americana en 13 volumes, publiée de 1829 à 1833 par Francis Lieber, un Américain né en Allemagne. Elle est basée sur la Brockhaus Enzyklopädie de Friedrich Arnold Brockhaus, mais est complétée par de très importants ajouts, en particulier concernant l'Amérique. Compte tenu de la relative indigence des ajouts de Dobson au Britannica, il semble correct de dire que l’Americana fut en fait la première encyclopédie vraiment américaine.

Notes et références

  1. Arner, 1991
  2. (en) J. Jefferson Looney (direction), The Papers of Thomas Jefferson, Retirement Series, Princeton University Press, 2018, tome V, lettre du 25 février 1813, p. 654.
  3. Richard B. Sher, The Enlightenment & the book: Scottish authors & their publishers in…
  4. James M. Wells, The Circle of Knowledge: Encyclopaedias Past and Present, Chicago, The Newberry Library, .
  5. Traduction: « Nous pouvons en toute confiance et certitude affirmer que la condition des femmes parmi de nombreuses tribus amĂ©ricaines est aussi respectable et importante, qu'elle ne le fut parmi les Germains, du temps de Tacite, ou comparable Ă  celui de nombreux autres pays que nous connaissons, dans un stade similaire de dĂ©veloppement. Â»
  6. Encyclopedia Britannica 1803 supplement et Dobson's 1803 supplement.

Bibliographie

Document utilisé pour la rédaction de l’article : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

  • Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article Robert D. Arner, Dobson's Encyclopaedia: The Publisher, Text, and Publication of America's First Britannica, 1789-1803, Philadelphia, University of Pennsylvania Press, .
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