Accueil🇫🇷Chercher

Distraction osseuse

La distraction osseuse est un ensemble de techniques chirurgicales permettant, grâce à la mise en place (interne ou externe) d'un appareil (le distracteur), d'allonger ou de créer de l'os[1].

La principale méthode de distraction osseuse s'appelle le callotasis ou callotase.

Avantages

Les méthodes de distraction osseuse présentent plusieurs avantages par rapport à la greffe osseuse classique, notamment :

  • la rĂ©ponse des tissus mous entourant l'os est meilleure ;
  • elles Ă©vitent l'ostĂ©ogenèse spontanĂ©e, imprĂ©visible, associĂ©es aux greffes ;
  • dans la plupart des cas, elles Ă©liminent le besoin de greffe osseuse ;
  • elles permettent de dĂ©passer les limites classiques d'expansion osseuse ;
  • elles permettent un contrĂ´le (relativement) fin du processus d'ostĂ©ogenèse ;
  • il n'y a pas de problème de rĂ©sorption inhĂ©rente Ă  toute greffe osseuse ;
  • leur mise en Ĺ“uvre est moins envahissante qu'une opĂ©ration de chirurgie classique, il n'y a pas de cicatrices au niveau du site donneur ;
  • il n'y a pas de problème de couverture osseuse (tels qu'ils peuvent se prĂ©senter lors des greffes classiques), puisque les tissus mous adjacents sont Ă©tirĂ©s (et de ce fait croissent) en mĂŞme temps que l'os distractĂ©, ce qui diminue le risque d'exposition, d'infection ou de nĂ©crose.

Inconvénients

Mais ces techniques ont aussi plusieurs inconvénients, notamment:

  • les distracteurs osseux sont gĂ©nĂ©ralement chers ;
  • les distracteurs occasionnent des cicatrices aux endroits rĂ©cepteurs ;
  • les distracteurs externes sont peu discrets, ils peuvent gĂŞner ou embarrasser les patients ;
  • une fois l'extension souhaitĂ©e acquise, une seconde sĂ©ance chirurgicale est nĂ©cessaire pour retirer l'appareillage ;
  • la douleur peut ĂŞtre importante lors de l'activation de l'appareil, celle-ci doit alors ĂŞtre prĂ©venue par la prise d'antalgiques ;
  • la mise en place de cette technique s'Ă©tale sur plusieurs semaines, pendant lesquelles le patient doit porter en permanence un appareillage encombrant et inesthĂ©tique.

Complications possibles

Tout acte médical - même conduit dans les meilleures conditions possibles, par les meilleures équipes possibles, - comporte des risques ; pour ce qui concerne les distractions osseuses, peuvent ainsi se présenter :

  • des ostĂ©omyĂ©lites (infections osseuses) liĂ©es Ă  l'Ă©tat gĂ©nĂ©ral du patient ;
  • une pseudarthrose atrophique, qui est une complication osseuse par dĂ©faut de consolidation ;
  • une algodystrophie peut survenir, notamment si la distraction a Ă©tĂ© effectuĂ©e sur les os longs ;
  • un pseudarthrose hypertropique, qui est une complication osseuse (rare) par excès de consolidation ;
  • des complications liĂ©es Ă  l'Ă©tirement excessif des tissus mous adjacents : nerfs, muqueuses ou muscles ;
  • des complications nosocomiales, liĂ©es par exemple Ă  une mauvaise hygiène du personnel d'intervention et/ou Ă  un mauvais entretient du matĂ©riel de distraction ;
  • un cal vicieux (qui est une consolidation en position anormale de l'os distractĂ©) ou d'autres anomalies de position des segments osseux distractĂ©s ; ces problèmes sont souvent liĂ©s Ă  un dĂ©faut d'orientation ou d'alignement du matĂ©riel de distraction.

Historique

En 1889, la probablement première tentative d'ostéogenèse dirigée de l'histoire moderne fut entreprise par les chirurgiens Hopkins et Penrose[2] qui tentèrent d'implanter un bloc osseux, maintenu au moyen de vis d'ivoire, sur la jambe atrophiée d'un patient.

Timbre russe pour le centenaire de Gavriil Ilizarov présenté avec l'appareil qu'il a inventé (2021)

En 1905, d'autres tentatives furent faites par Alessandro Codivilla[3], (un chirurgien, directeur de l'Institut Orthopédique Rizzoli de Bologne,) dans le traitement d'un fémur trop court. Mais sa méthode fut abandonnée en raison de complications.

Le véritable « grand-ancêtre » de ces techniques est le professeur (en)Gavriil Abramovich Ilizarov[4] (fondateur et premier directeur du Centre d'orthopédie et de traumatologie réparatrice de Kurgan, en Russie ; qui actuellement porte son nom), dont les travaux sur ce sujet s'échelonnèrent entre 1951 et 1992. Ilizarov découvrit notamment que si l'on sectionnait précautionneusement un os, sans abîmer le périoste, cet os se mettait à repousser; le taux de repousse était alors uniforme, indépendamment des circonstances et des origines ethniques du patient. Ilizarov effectua également une série d'études sur la biomécanique des os longs, ce qui lui permit de définir les conditions optimales pour les opérations de distraction[5]. Il mit au point le fixateur externe et le distracteur circulaire qui portent son nom.

Perspectives d’avenir

Ultrasons

On savait depuis le début des années 1960, que des ultrasons pulsés de basse énergie augmentaient significativement le callotasis, sans que l’on comprenne bien ce mécanisme. Mais les systèmes de génération ultrasonore furent longtemps difficiles à manier et à mettre en œuvre « in vivo » sur les patients, car peu pratiques et encombrants. En outre, ces systèmes occasionnaient une prolifération cellulaire générale difficile à canaliser, pouvant faire craindre des risques de cancer.

Aujourd’hui, l’ergonomie et la maniabilité des générateurs d’ultrasons se sont grandement améliorées. De nombreuses recherches peuvent maintenant être entreprises en ce domaine. On emploie alors généralement des signaux d’une fréquence de 1,5 MHz, d’une durée de 200 μs, avec un taux de répétition de 1 kHz et une intensité de 30 mW/cm2.

Thérapie génique

Actuellement, la protéine EMP2 (Epithelial Membrane Protein) est considérée avec le plus grand intérêt par les spécialistes. Il semble en effet que cette protéine engendre la sécrétion de plusieurs facteurs de croissance osseux, tels les facteurs BMP (Bone Morphogenetic Proteins), IGF (Insulin-like Growth Factors) et TGF-β (Transforming Growth Factors β).

Ainsi, l'activation locale (à l'intérieur de cellules situées dans des zones osseuses à rallonger) du gène codant EMP2 permet l'allongement des os in vitro et sans chirurgie. Mais cette protéine a toutefois de nombreux effets secondaires ; notamment :

  • il est assez difficile de cibler uniquement les cellules Ă  activer, qui doivent ĂŞtre des cellules saines (car Ă©videmment, l'activation de cellules cancĂ©reuses ou prĂ©cancĂ©reuses pourrait avoir des consĂ©quences dramatiques) et situĂ©es dans la zone Ă  faire croĂ®tre (il ne s'agit pas de faire pousser les os « de travers ») ;
  • il semble Ă©galement qu'EMP2 soit une nourriture de choix pour certaines chlamydias, puisque lorsqu'on bloque l'expression de son gène-codant sur des groupes de cellules infectĂ©es par ce type de bactĂ©ries, celles-ci se mettent Ă  dĂ©pĂ©rir.

L'idéal serait donc de trouver une protéine identique à EMP2 pour ce qui est de l'aptitude à faire croître les os, mais sans ses inconvénients.

Notes et références

  1. Cliniques universitaires Saint-Luc - Hospitalisation - DĂ©partements et services: Stomatologie et chirurgie maxillo-faciale
  2. Cit. n. P.B. Magnuson, « Lengthening shortened bones of the leg by operation. Ivory screws with removable heads as a means of holding the two bone fragments », SGO: Surgery Gynecology & Obstetrics, no 17,‎ , p. 63-71
  3. Alessandro Codivilla, « On the means of lengthening in the lower limbs, the muscles, and tissues which are shortened through deformity », American Journal of Orthopedics Surgery, vol. 2,‎ , p. 353
  4. Rainer Baumgart, « A Fully Implantable Motorized Intramedullary Nail for Limb Lengthening and Bone Transport », Clinical Orthopaedics & Related Research, vol. 343,‎ , p. 135–143 (lire en ligne, consulté le )
  5. (en) Ilizarov GA, « The principles of the Ilizarov method », Bull Hosp Jt Dis Orthop Inst, vol. 48, no 1,‎ , p. 1-11. (PMID 2840141)
Cet article est issu de wikipedia. Text licence: CC BY-SA 4.0, Des conditions supplémentaires peuvent s’appliquer aux fichiers multimédias.