David de Boudry
David Marat, plus tard David de Boudry[2], en russe : Давид Иванович де Будри, né à Boudry (principauté de Neuchâtel) en 1756 et mort à Saint-Pétersbourg (Russie) le , est un précepteur et grammairien d'expression française qui fit carrière en Russie.
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Il est le frère cadet du révolutionnaire Jean-Paul Marat.
Biographie
Après de brillantes études à l'Académie des Belles-Lettres de Genève, il est candidat malchanceux au poste de ministre calviniste à Neuchâtel, et participe activement aux revendications égalitaristes de Genève en 1781.
Précepteur, comme le furent naguère son père Jean-Baptiste Marat et son illustre frère, il s'installe à Saint-Pétersbourg en 1784, pour s'occuper de l'éducation française des enfants du chambellan comte Vassili Pétrovitch Saltikov, puis devient (1795) le tuteur des enfants d'Athanase Abramovitch Gontcharoff (1693-1784), richissime manufacturier russe et grand-père de Nathalie Nikolaïevna Gontcharova, épouse du célèbre poète Alexandre Pouchkine. Selon des témoignages de contemporains, il aurait aussi été l'amant de Babette, la maîtresse française de son employeur.
Entreprenant et tenté par l'aventure industrielle[3], il rachète en 1803 avec un associé, Pichot, aux Gontcharoff, une fabrique d'indiennes et de brocards d'or et d'argent, attirant en Russie des ouvriers spécialisés de Lyon.
Mis en faillite à cause de la nouvelle réglementation russe en la matière[4], il revient à l'enseignement pour être nommé professeur de langue française, successivement à l'Institut des jeunes filles nobles de Sainte-Catherine (1803), au Gymnase de Saint-Pétersbourg (1806)[5], puis, dès sa création (1811), au Lycée impérial, où il a justement pour élève le jeune Pouchkine[6].
Professeur de langue française et d'art oratoire, il écrivit en russe, sous le nom de David (Marat) de Boudry[7], deux grammaires françaises qui firent longtemps autorité (vid. inf. Œuvres).
Selon les différents témoignages de ses contemporains, le professeur de Boudry, doté d'un esprit des plus vifs, d'une grande culture et de manières très raffinées, d'une courtoisie exquise tempérant une laideur et une crasse légendaires[8], toujours vêtu de gris à la jacobine, remarquable pédagogue, sut enthousiasmer ses jeunes élèves par ses cours de civilisation française truffés d'anecdotes divertissantes et respectueuses quant à son illustre frère[9], imprégnant ainsi d'idéaux démocratiques, voire révolutionnaires, la fine fleur de l'aristocratie russe.
Fonctionnaire impérial[10], particulièrement apprécié à la cour, il finit sa brillante carrière de linguiste au 8e rang, avec le titre d'Assesseur de collège, donnant la noblesse personnelle (1819).
On lui connaît deux épouses : Maria Timoféïeva Labkova, fille d'un officier russe et d'une émigrée française, qui lui donna sa première fille Marie (née le ), et Anna Semionova Kilimtchina, fille d'un traducteur, dont il eut Olympiade, née le et décédée en 1858[11].
Distinctions
- Ordre de Sainte-Anne, 2e classe (1817)
- Ordre de Saint-Vladimir, 4e classe (1814)
Œuvres
- Premiers principes de la Langue Françoise, ou Nouvelle Grammaire à l'usage de la Jeunesse Russe - Первые основания французского языка, или Новая грамматика в пользу российского юношества, Imprimerie du Sénat, 1811
- Abrégé de la grammaire françoise, par le professeur D. de Boudri - Сокращение французской грамматики, Joseph Iohannessof, Saint-Pétersbourg, 1819
Notes et références
- Condisciple de Pouchkine au Lycée impérial et, lui-aussi, grand admirateur de Boudry
- On trouve aussi l'ancienne orthographe Boudri.
- La fabrique qu'il reprit à Saint-Pétersbourg fut la première du genre en Russie.
- Les besoins en galons et en brocarts de l'Empire variant rapidement au gré des sautes d'humeur de l'empereur Paul, qui décida finalement de modifier l'uniforme des courtisans.
- Il intégra en 1808 dans la fonction publique au 9e rang.
- On pourrait même considérer le jeune poète comme son disciple, puisque Pouchkine maniait alors le français aussi bien que le russe ; ses camarades l'appelaient régulièrement Frantsouz (Француз « Le Français »), et lui-même avait d'abord envisagé de devenir écrivain dans cette langue.
- La mauvaise réputation de son patronyme dans les milieux aristocratiques russes l'amena rapidement à lui préférer celui du bourg de sa naissance, sous lequel il est désormais connu ; il aurait fait usage de ce nom dès son arrivée en Russie, usage qui lui fut définitivement accordé par l'impératrice Catherine II, qui l'appréciait beaucoup. L'habitude d'accoler à son patronyme le nom d'un bourg (généralement celui de la naissance) est assez commune à la fin de XVIIIe siècle, notamment chez ceux qui portent un nom assez répandu : de nombreux révolutionnaires (Dupont de l'Étang, Dupont de l'Eure, Girod de l'Ain, Merlin de Douai, etc.) prennent ainsi une particule d'extraction… Boudry semble avoir suivi cette coutume.
- Parmi ses élèves et ses collègues du Lycée. Sa réputation en la matière était telle que d'aucuns le soupçonnaient de ne changer de (sous) vêtements qu'une fois par mois…
- Avec lequel il ne cessa de correspondre jusqu'à la mort tragique du conventionnel ; aux dires de leurs contemporains, les deux frères se ressemblaient beaucoup physiquement
- Il avait prêté serment à l'Empereur en 1806
- Elle aurait épousé un français, Pierre Jacquemont, dont postérité.
Sources
- A. A. Половцовъ, Русский Биографический Словарь, Де Будри ;
- I. A. Grot, Pouchkine, ses condisciples et leurs professeurs au Lycée, 1887 ;
- J.-P. Brissot, Mémoires, vol. 1, p. 281 et suivantes ;