Comma (musicologie)
En musique, un comma est un intervalle trĂšs petit, gĂ©nĂ©ralement entre le dixiĂšme et le cinquiĂšme du ton[1]. Il est dĂ©fini comme Ă©tant lâintervalle entre deux sĂ©quences dâintervalles purs. Le comma peut sĂ©parer deux notes enharmoniques[2]. Il intervient dans l'accordage des instruments en servant de base Ă la construction des tempĂ©raments[1].
L'accordage des instruments utilise trois types de commas[1] :
- le comma pythagoricien ;
- le comma syntonique ;
- le comma enharmonique.
Cet intervalle correspond approximativement à l'écart de fréquence entre un la à 440 Hz et un la à 446 Hz, soit 6 battements par seconde. Des différences de comma ne sont pas facilement décelables dans les intervalles mélodiques. Dans les intervalles harmoniques, elles provoquent dissonances et battements.
Comma pythagoricien
Le comma pythagoricien est l'intervalle entre :
Il a pour rapport acoustique 312â219 = 531441â524288. Il vaut environ 23,46 cents.
La fréquence d'une note est multipliée par 1,5 en la montant d'une quinte pure et par 2 en la montant d'une octave. Au bout de 12 quintes on tombe sur la note enharmonique de celle obtenue au bout de 7 octaves. La formule ci-dessus s'explique donc par l'égalité suivante :
L'intĂ©rĂȘt de ce changement de formule est d'avoir des nombres entiers sur la fraction.
Comma syntonique
Appelé aussi comma zarlinien, c'est l'intervalle entre :
- 4 quintes pures ;
- 2 octaves augmentées d'une tierce majeure pure.
Câest aussi lâintervalle entre un ton mineur et un ton majeur.
C'est aussi l'intervalle entre une tierce majeure pure de Zarlino de rapport 5/4 = 80/64 et entre une tierce majeure pythagoricienne de rapport 9/8 x 9/8 = 81/64.
Il a donc pour rapport acoustique 81â80 et est infĂ©rieur au comma pythagoricien. Il vaut environ 21,51 cents.
Comma enharmonique
Appelé aussi (petit) diésis, c'est l'intervalle entre :
- 3 tierces majeures pures ;
- une octave.
C'est aussi l'intervalle entre le demi-ton chromatique et le demi-ton diatonique de la gamme naturelle Ă tierces pures.
Il a pour rapport acoustique 128â125. Il vaut environ 41,06 cents.
Autres commas
- Le comma de Mercator est l'intervalle entre :
- 31 octaves ;
- 53 quintes.
- Il a pour rapport acoustique 353â284 et vaut environ 3,62 cents. Il sâagit du comma associĂ© au tempĂ©rament de Holder (voir section Comma de Holder ci-dessous).
- Le schisma est l'intervalle compris entre le comma pythagoricien et le comma syntonique. Câest donc Ă©galement lâintervalle entre :
- 8 quintes augmentĂ©es dâune tierce majeure pure ;
- 5 octaves.
- Il a pour rapport acoustique 5x38â215 soit 32805â32768. La meilleure approximation du type (n+1)ân avec n entier est 886â885, valeur parfois utilisĂ©e. Le schisma vaut environ 1,95 cents. De façon approchĂ©e, le comma syntonique vaut 11 schismas et le comma pythagoricien en vaut 12.
- Le grand diĂ©sis intervalle entre lâoctave et quatre tierces mineures pures, de valeur 648â625. Il vaut environ 62,57 cents.
- Le diaschisma, intervalle obtenu en composant (en descendant) 2 tierces pures et 4 quintes pures. Sa valeur est 211â(52x34) soit 2048â2025. Il vaut environ 19,55 cents.
Fractions de comma
- Le comma de Sauveur est le cinquiÚme du comma constituant la différence entre :
- 12 quartes ;
- 12 tierces majeures augmentĂ©es dâune octave ;
- ou, de maniĂšre Ă©quivalente, entre :
- 11 octaves ;
- 12 septiĂšmes majeures.
- Il vaut environ 27,90 cents.
Comma de Holder
Par abus de langage, on nomme comma de Holder la 53e partie exacte d'une octave, il vaut donc 1200/53â22,64 cents. Il ne sâagit donc pas dâun comma tel que lâentend sa dĂ©finition (intervalle entre deux sĂ©quences dâintervalles d'un accordage) mais en rĂ©alitĂ© dâun micro-intervalle. Il doit son nom au fait quâil est proche du comma syntonique (qui divise lâoctave en environ 55,80), largement utilisĂ© Ă lâĂ©poque de Holder pour mesurer les accordages.
Le « comma » de Holder étant en fait un micro-intervalle, il permet de définir exactement ou avec une excellente approximation divers intervalles de l'accord pythagoricien ou de l'intonation juste :
- par construction, lâoctave contient 53 « commas » ;
- par construction du tempérament de Holder, la quinte en contient 31 (702 cents) ;
- le ton en contient 9 (204 cents) ;
- le demi-ton diatonique en contient 4 (91 cents au lieu de 90) ;
- le demi-ton chromatique en contient 5 (113 cents au lieu de 114) ;
- la quarte juste en contient 22 (498 cents) ;
- la tierce majeure en contient 17 (385 cents au lieu de 386) ;
- etc.
Perception
Le comma n'est pas la plus petite diffĂ©rence de frĂ©quence qu'une oreille humaine puisse percevoir entre deux sons : en rĂ©alitĂ©, une oreille humaine, mĂȘme non exercĂ©e, peut discerner des diffĂ©rences bien infĂ©rieures, de l'ordre de 1/100 de ton en justesse harmonique (sons entendus simultanĂ©ment), et parfois davantage. Un intervalle trĂšs faible entre deux notes Ă©mises simultanĂ©ment produit un phĂ©nomĂšne de « battement » perceptible utilisĂ© pour accorder les instruments.
Les musiciens considĂšrent gĂ©nĂ©ralement quâun ton vaut 9 commas, sans autre prĂ©cision. Implicitement, il sâagit alors :
- du comma pythagoricien, de Holder ou de Zarlino,
- dâune approximation.
Histoire
à l'époque baroque, la recherche de nouveaux tempéraments était la conséquence de la fausseté des tierces dans la gamme pythagoricienne alors en usage, et, de fait, lorsque l'on répartit le comma pythagoricien sur, par exemple, 4 quintes (do-sol-re-la-mi), alors l'intervalle de tierce do-mi est tronquée d'un comma pythagoricien. Tronquée d'un comma syntonique, cette tierce do-mi serait pure (rapport 5/4)... Mais étant donné la quasi-équivalence entre les deux commas pythagoricien et syntonique, cela fait l'affaire dans les calculs des tempéraments, qui, s'attachant, physiquement, à répartir le comma pythagoricien, s'intéressent en réalité principalement à réduire la fausseté des tierces, liée au comma syntonique.
MĂȘme si les notions et les valeurs sont prĂ©cises, il rĂšgne une certaine confusion dans la terminologie : le mĂȘme mot (et particuliĂšrement diĂ©sis) a parfois des significations diffĂ©rentes selon les auteurs ...
Des diffĂ©rences de commas, bien qu'elles soient rĂ©guliĂšrement peu audibles voire inaudibles, dans certains intervalles, sont, dans d'autres, source de dissonances parfois trĂšs prononcĂ©es (voir quinte du loup). Les commas ont donc causĂ© lâembarras des thĂ©oriciens de la musique, qui ont cherchĂ© Ă rĂ©partir le comma de diffĂ©rentes maniĂšres. Il ne faut donc pas confondre tempĂ©rament et tempĂ©rament Ă©gal. Depuis l'invention du piano c'est la gamme tempĂ©rĂ©e Ă©gale qui a Ă©tĂ© adoptĂ©e oĂč chaque demi-ton a la mĂȘme valeur.
Notes et références
- Asselin 2000, p. 37
- Abromont 2001, p. 335