Combat de la Bataillère
Le combat de la Bataillère a lieu le , pendant la Chouannerie.
Date | |
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Lieu | Entre Poilley et Le Châtellier |
Issue | Victoire des Chouans |
RĂ©publicains | Chouans |
Commandant Joré | Aimé Picquet du Boisguy |
inconnues | 900 hommes[1] |
Coordonnées | 48° 26′ 22,5″ nord, 1° 14′ 23,5″ ouest |
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Prélude
Les chouans, maîtres des campagnes, tentent d'imposer un blocus à la ville de Fougères qui bientôt, commence à manquer de vivres. Les Républicains décident de faire partir une colonne d'Avranches pour réquisitionner des grains au bourg du Ferré, puis de les escorter vers Fougères d'où une autre colonne venue de cette ville doit la rejoindre à mi-chemin[1].
Les Chouans sont informés de ce projet et leur chef Aimé Picquet du Boisguy décide de s'emparer du convoi. Il rassembea 900 hommes et se porte au village de La Bataillère, commune du Châtellier. Les Chouans se divisent en deux groupes, le premier commandés par Michel Larchers-Louvières se poste au nord du village, sur la route d'Avranches, le second mené par Boisguy s'embusque au sud, sur la route de Fougères[1].
Le combat
Peu après une heure de l'après-midi, la colonne d'Avranches parait et tombe dans l'embuscade de Larchers-Louvières. Attaqués subitement, sur plusieurs points à la fois, et subissant des décharges à bout portant, les hommes de la colonne d'Avranches, au nombre de 400 selon les mémoires de Toussaint du Breil de Pontbriand, n'opposent presque aucune résistance et s'enfuient, abandonnant les quatre charrettes de vivres[1].
Mais peu de temps après cette attaque, la colonne de Fougères apparaît de l'autre côté de la route. Cette colonne, constituée de carabiniers, est forte selon Pontbriand de 350 soldats d'élite, commandée par le chef de bataillon Joré. Les chouans s'embusquent dans les fossés mais les Républicains découvrent l'embuscade et marchent baïonnette au canon sans ouvrir le feu[1].
Les carabiniers subissent une première décharge, qui leur tue plusieurs hommes, mais ne s'ébranlent pas et chargent les chouans au moment où ceux-ci rechargent leurs armes. Le corps à corps s'engage, au cours duquel 6 chouans et 11 carabiniers sont tués. Larchers-Louvières arrive en renfort avec ses hommes et contourne les républicains pour les attaquer sur leurs flancs. Face à cette menace et au nombre de ses adversaires, Joré ordonne la retraite, mais les carabiniers, attaqués de tous côtés, ne purent le faire en bon ordre et se débandent. Ils sont finalement secourus par une sortie de la garnison de Fougères qui protège leur retraite[1].
Les pertes
Selon Pontbriand, le combat a fait six mort et dix-sept blessés chez les Chouans, et trente-trois chez les Républicains pendant l'affrontement, plus ceux tués dans la déroute[1].
« La ville de Fougères manquait de grains ; une colonne de quatre cents hommes avait été en chercher sur la paroisse du Ferré ; elle venait d’Avranches et était chargée d’escorter ces grains ; une partie de la garnison de Fougères devait venir au-devant d’elle. Du Boisguy, ayant été informé de cette opération, résolut d’enlever le convoi et de battre la garnison de Fougères. Il plaça Louvières, avec une partie de ses troupes, près du village de la Bataillère, où il les fit embusquer, et alla se poster avec le reste de l’autre côté du village. Il avait environ neuf cents hommes.
Vers 1 heure après midi, on lui amena un individu arrêté comme suspect ; il l’interrogea et apprit de lui que l’officier chargé de l’escorte du convoi, qui était fort près, craignant d’être attaqué, l’avait envoyé presser la marche des troupes de Fougères. « Tu resteras avec nous pour voir la danse » lui dit du Boisguy. Elle commença bientôt car, malgré la défiance du commandant, le convoi et l’escorte se trouvèrent au milieu de l’embuscade de Louvières, sans l’avoir aperçue : « Bas les armes ! » s’écria ce chef d’une voix terrible, « ou vous êtes tous morts. » Au même moment, Tuffin et Duval parurent au milieu de la grande route avec les grenadiers de Boismartel, et firent leur décharge à bout portant. Cette attaque subite répandit la terreur parmi les Républicains, qui prirent la fuite, abandonnant quatre voitures chargées de grains. Du Boisguy défendit de les poursuivre ; Louvières détacha seulement une compagnie pour presser leur retraite et reprit sa position.
Du Boisguy put se féliciter d’avoir conservé toutes ses troupes, car bientôt il eut sur les bras un ennemi plus redoutable ; c’était le chef de bataillon Joré, qui était arrivé la veille avec sept cents carabiniers. S’il eût amené sa troupe entière, il eût probablement battu complètement la colonne Royaliste, mais il pensa que la moitié seulement lui suffirait, et il n’avait pris que trois cent cinquante hommes. Aussitôt que Joré eut reconnu l’embuscade, il ordonna l’attaque à la baïonnette, sans tirer ; ses carabiniers, qui étaient tous soldats d’élite, reçurent la première décharge sans s’ébranler et franchirent si rapidement les fossés qui les séparaient des Royalistes, qu’un très petit nombre avaient eu le temps de recharger leurs armes. On se battit au corps à corps ; ces braves soldats se faisaient tuer plutôt que de reculer d’un pas ; du Boisguy en saisit un qu’il somma de se rendre, mais cet homme, doué d’une force extraordinaire, le prit lui-même d’un seul bras, par le milieu du corps, et l’emportait ainsi au milieu des carabiniers ; il était perdu sans le courage de Jean Tréhel, de Laignelet, qui, voyant le danger de son général, se précipite sur le carabinier, le renverse d’un coup de baïonnette, au milieu des siens, et délivre ainsi du Boisguy d’un des plus grands dangers qu’il ait courus. Cependant le combat continuait avec acharnement, et les Royalistes, quoique les plus nombreux, auraient peut-être succombé, sans l'arrivée de Louvières, qui, avec toute sa troupe, menaçait d’envelopper les carabiniers. Joré, voyant la partie si inégale, ordonna la retraite ; mais il était trop tard pour la faire en bon ordre. Ses soldats, pressés de tous côtés, ne purent reprendre leurs rangs et furent obligés de fuir en désordre ; leur intrépide chef les suivit en frémissant, et la troupe entière eût peut-être été détruite, sans l’arrivée du reste des carabiniers et d’une partie de la garnison de Fougères, qui reçurent cette troupe fugitive aux buttes de la Houlettes, où du Boisguy n’osa recommencer le combat.
La lutte avait duré deux heures. Joré avait perdu vingt-deux hommes à la première décharge, onze seulement furent tués pendant l’action, où l’on se battait au corps à corps ; un assez grand nombre périt dans la déroute. La perte des Royalistes fut de six hommes tués et dix-sept blessés, parmi lesquels Julien Coquelin, du Loroux, Julien Evaux et Noël Clossais de Parigné ; Pierre Roulaux, de La Chapelle-Saint-Aubert, et Jean Chénais, de Fougères, le furent grièvement.
Le commandant Joré et ses carabiniers rendirent justice aux Royalistes, mais ils disaient que, sans l’arrivée de Louvières, ils auraient pris du Boisguy et détruit sa troupe entière. Les combattants étaient si près les uns des autres et si mêlés pendant l’action, qu’ils ne pouvaient faire usage de leurs armes, ce qui fut cause qu’il n’y en eut que peu à périr dans ce moment[1]. »
— Mémoires de Toussaint du Breil de Pontbriand
Bibliographie
- Toussaint Du Breil de Pontbriand, Mémoire du colonel de Pontbriand sur les guerres de la Chouannerie, édition Plon, Paris, (réimpr. Y. Salmon, 1988), p. 196-199.
- Christian Le Boutellier, La Révolution dans le Pays de Fougères, Société archéologique et historique de l'arrondissement de Fougères, , p. 451-452.
- Marie-Paul du Breil de Pontbriand, Un chouan, le général du Boisguy, édition Honoré Champion, Paris, (réimpr. La Découvrance, 1994), p.169-173.