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Colonne de Justinien

La colonne de Justinien est une colonne triomphale érigée à Constantinople par l'empereur byzantin Justinien Ier en l'honneur de ses victoires en 543-545. Elle s’élevait sur le côté ouest de la grande place Augustaion, entre l'église Sainte-Sophie et le Grand Palais. Elle a été détruite par les Ottomans au début du XVIe siècle.

Restitution de la colonne et de sa statue équestre d'après Cornelius Gurlitt, 1912. La présence d'une frise narrative hélicoïdale autour de la colonne, sur le modèle de la colonne Trajane, est erronée.

Description

La colonne est faite de brique, recouverte de plaques de bronze, et s’élevant sur un piédestal de marbre à sept marches[1]. À son sommet, elle est coiffée d'une colossale statue équestre en bronze de l'empereur en habit impérial (la « tenue d'Achille » selon l'historien Procope de Césarée), portant une cuirasse musculaire de style antique, un casque à plume de paon (la toupha), une orbe dans sa main gauche et étirant la main droite vers l'Est[2]. Certains éléments inscrits sur la statue laissent à penser qu'elle ait pu être précédemment dédiée à Théodose Ier ou Théodose II[1] - [3].

La colonne elle-mĂŞme est dĂ©crite comme particulièrement haute : 70 m d'après le voyageur florentin Cristoforo Buondelmonti. Visible depuis la mer, sa restauration, d'après l'historien byzantin NicĂ©phore GrĂ©goras, après une chute de la toupha nĂ©cessite les services d'un acrobate qui utilise une corde tirĂ©e depuis le toit de l'Ă©glise Sainte-Sophie[4] - [5]. Pierre Gilles, lettrĂ© français vivant dans la ville dans les annĂ©es 1540, Ă©voque quant Ă  lui des fragments restants de la statue au palais de Topkapı, avant qu'ils soient fondus pour fabriquer des canons[6] :

« Parmi les fragments, il y avait la jambe de Justinien, qui dépassait ma hauteur, et son nez, qui mesurait plus de 9 pouces. Je n'osais pas mesurer les jambes du cheval […] mais je mesurais intérieurement l'un des sabots, et l'estimais à 9 pouces de hauteur. »

L'apparence de la statue et ses inscriptions est préservée dans un dessin des années 1430 fait pour Cyriaque d'Ancône.

Historique

Dessin contemporain de la statue de Justinien (années 1430). L'inscription THEO DOSI montre sa probable réutilisation d'un monument plus ancien.

La colonne est construite en 543-545 à Constantinople sur l'Augustaion en l'honneur des victoires de l'empereur contre les barbares[7]. La colonne est toujours en place au XIVe siècle lorsqu'elle est décrite par l'historien byzantin Nicéphore Grégoras[8]. Plusieurs pèlerins mentionnent aussi l'existence, devant la colonne, d'un groupe de trois statues de bronze représentant « des empereurs païens (ou Sarrasins) », placées sur des colonnes plus petites ou de simples piédestaux, s'agenouillant en signe de soumission. Elles sont toujours présentes à la fin des années 1420, mais sont retirées vers 1433[9].

Au XVe siècle, la statue, à cause de sa position importante, est attribuée au fondateur de la ville, Constantin Ier[3]. Le marchand italien Cyriaque d'Ancône apprend quant à lui qu'elle représente l'empereur Héraclius[3]. La colonne, et plus particulièrement l'orbe, appelée « pomme » par le peuple, est alors considérée comme étant le genius loci ou « esprit du lieu » de la ville[6]. Par conséquent, la chute de l'orbe entre 1422 et 1427 est interprétée comme un signe de la ruine imminente de la ville[10]. Peu après la prise de la ville en 1453, les Ottomans retirent et démantèlent complètement la statue, comme symbole de leur nouvelle domination, alors que la colonne elle-même est abattue vers 1515[6].

Notes et références

  1. Kazhdan 1991, p. 232
  2. Procope de Césarée, De Aedificiis, I.2.1–11
  3. Majeska 1984, p. 239
  4. Majeska 1984, p. 238
  5. Kazhdan 1991, p. 2100
  6. Finkel 2006, p. 53
  7. Croke et Maas 2005, p. 66
  8. Nicephorus Gregoras, Histoire Romaine, I.7.12.
  9. Majeska 1984, p. 237, 240
  10. Majeska 1984, p. 240

Annexes

Bibliographie

Document utilisé pour la rédaction de l’article : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

  • (en) Brian Croke et Michael Maas (dir.), The Cambridge Companion to the Age of Justinian, Cambridge University Press, , « Justinian's Constantinople »Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • (en) Caroline Finkel, Osman's Dream : The Story of the Ottoman Empire 1300–1923, Londres, John Murray, , 674 p. (ISBN 978-0-7195-6112-2)Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • Rodolphe Guilland, Études de topographie de Constantinople byzantine, Tomes I & II, Berlin, Akademie-Verlag,
  • (en) Alexander Kazhdan (dir.), Oxford Dictionary of Byzantium, New York et Oxford, Oxford University Press, , 1re Ă©d., 3 tom. (ISBN 978-0-19-504652-6 et 0-19-504652-8, LCCN 90023208) Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • (en) George P. Majeska, Russian Travelers to Constantinople in the Fourteenth and Fifteenth Centuries, Dumbarton Oaks, , 463 p. (ISBN 978-0-88402-101-8, lire en ligne)Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • (en) J. Raby, « Mehmed the Conqueror and the Equestrian Statue of the Augustaion. », Illinois Classical Studies, vol. 12, no 2,‎ , p. 305–313 (lire en ligne)

Liens externes

  • Colonne de Justinien, reconstruction en 3D sur le projet Byzantium 1200.
  • Carol Mattusch, compte-rendu de Elena N. Boeck, The bronze horseman of Justinian in Constantinople: the cross-cultural biography of a Mediterranean monument (Cambridge University Press, 2021), BMCR 2022.02.42
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