Carpentum
Le carpentum (pluriel carpenta) est un chariot couvert de l'antiquité romaine, généralement destiné au transport de dames de rang élevé.
Origine linguistique
Livius Andronicus, auteur du IVe siècle av. J.-C., donne dans sa traduction de l'Odyssée la plus ancienne attestation latine du mot carpentum[1]. Tite-Live[2] et Florus[3] rattachent ce mot aux Gaulois[4]. Le celtiste français Joseph Vendryes (1875-1960) identifie dans les Langues brittoniques le gallois cerbyd (char, voiture) et le vieux-breton cerpit, qui dérivent de viel-irlandais carpat, que Vendreyes fait plutôt dériver du latin carpentum que d'une forme celtique reconstituée *karbento- ou *karbanto-, car le groupe vocal -nt se conserve en brittonique alors qu'il est absent de carpat[5].
Description
Généralement à deux roues, rarement à quatre, il était trainé par deux mules ou deux chevaux. Il était utilisé par les matrones aux vestales puis, après Auguste, par les impératrices[6].
Histoire
Son usage a été attesté chez les Gaulois[7], les Bretons, les Cimbres, les Allobroges, les Helvètes et les Romains parmi d'autres nations.
Tite-Live rapporte que lors de la consécration à Apollon d'une partie du butin provenant de la prise de Véies en 396 av. J.-C., les matrones romaines complétèrent la quantité d'or promise au dieu en offrant spontanément leurs bijoux. En retour, le Sénat leur accorda le droit honorifique de circuler en carpentum[8].
Ce droit fut restreint aux seuls déplacements pour assister aux sacrifices par la loi Oppia durant la deuxième guerre punique pour limiter les dépenses de luxe, puis rétabli en 195 av. J.-C.[9].
Pour améliorer quelque peu la circulation dans une Rome aux rues étroites et encombrées, Jules César interdit la circulation de jour à tout véhicule à roue, à l’exception des carpenta lors des cérémonies et des charrettes d’entrepreneurs. La loi est promulgué après sa mort, et reste en vigueur durant plusieurs siècles[10]. Cette restriction réserve l'usage du carpentum aux seules vestales.
Durant la période impériale, l'usage du carpentum d'apparat est aussi accordé aux dames de la famille impériale, comme aux impératrices Livie et Messaline[11]. Pour les processions des jeux du cirque, Caligula fait défiler l'image de sa mère Agrippine l'Aînée sur un carpentum[12]. Messaline suit le cortège triomphal de son mari Claude[13]. Des monnaies commémoratives sont émises à l'occasion de ces circonstances.
- Sesterce émis en 37 pour l'acheminement en carpentum des cendres d'Agrippine l'Aînée, mère de Caligula
- Sesterce émis en l'honneur d'Agrippine l'Aînée
Le droit honorifique de circuler en carpentum s'étend au IIIe siècle aux hauts dignitaires et à l'empereur lui-même, comme en 353 pour l'entrée triomphale à Rome de Constance II, figé sur un carpentum doré[14].
Notes et références
- Granucci 2013, p. 218.
- « Carpentis gallicis » chez Tite-Live, Histoire romaine, XLI, 21
- « Carpenta gallorum » chez Florus, Épitre I, 18, 27
- Granucci 2013, p. 213 et 217.
- Granucci 2013, p. 217-218.
- Aubin L. Millin, Dictionnaire de beaux-arts, vol.1, 1806, p.198
- Florus, I, 18
- Tite-Live, Histoire romaine, V, 25, 10.
- Tite-Live, Histoire Romaine, livre XXXIV, 1
- Jérôme Carcopino, La vie quotidienne à Rome à l’apogée de l’Empire, Hachette, 1939, réédition 2002, (ISBN 978-2-01-279078-0), chapitre I, II
- Dion Cassius, Histoire romaine, LX, 22
- Suétone, Vie de Caius, 15
- Suétone, Vie de Claude, 17
- Ammien Marcellin, Histoire romaine, XVI, 10
Bibliographie
- « Carpentum », dans Charles Victor Daremberg et Edmond Saglio (dir.), Dictionnaire des Antiquités grecques et romaines, 1877-1919 [détail de l’édition] (lire en ligne) (« quelques transcriptions d'articles », sur mediterranees.net)
- Daniel Ramée, La locomotion: Histoire des chars, carrosses, omnibus et voitures de tous genres, 1856, p.23-23
- Dezobry et Bachelet, Dictionnaire de biographie, t.1, Ch.Delagrave, 1876, p.470
- Fiorenza Granucci, « Les emprunts gaulois dans la littérature latine archaïque », Etudes Celtiques, vol. 39,‎ , p. 211-247 (lire en ligne)