Cardiomyopathie du peripartum
La cardiomyopathie du peripartum est un tableau d'insuffisance cardiaque survenant typiquement un mois avant l'accouchement et jusqu'à cinq mois après[1].
Spécialité | Obstétrique et cardiologie |
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CIM-10 | O90.3 |
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CIM-9 | 674.5 |
DiseasesDB | 29243 |
MedlinePlus | 000188 |
eMedicine | 153153 |
Mise en garde médicale
Historique
La maladie a été décrite en 1849[2], puis en 1937[3] mais l'appellation actuelle date de 1971[4].
Cause
La cause en est inconnue. Il existe probablement une susceptibilité génétique[5] - [6] et le rôle de la mutation de plusieurs gènes est évoquée, dont un locus près du PTHLH[7], celui de la titine[8] ou les gênes FLNC, DSP et BAG3[9]. Le rôle de la prolactine, une hormone, est évoquée, cette dernière pouvant être dégradée en une molécule favorisant la mort (apoptose) des cellules cardiaques[10]. Cette hypothèse ouvre la perspective d'un traitement par les inhibiteurs de la prolactine.
Épidémiologie
L'incidence aux États-Unis serait d'environ un cas pour 3 000 grossesses, avec un risque doublé chez les noires[11] et une incidence qui tend à augmenter[12]. L'incidence semble très supérieure en Haïti, de l'ordre d'un cas pour 300 grossesses[13]. Elle est plus fréquence en cas de grossesse multiple[14].
Plus de la moitié des cas se déroulent chez la femme de plus de 30 ans[15]. Il est retrouvé un taux plus important de pré-éclampsie, d'hypertension artérielle gravidique et de grossesse multiple[16].
Présentation clinique
La cardiomyopathie se manifeste par un tableau d'insuffisance cardiaque sans particularité : essoufflement, œdèmes des membres inférieurs... Ces signes surviennent essentiellement dans la semaine suivant l'accouchement. Plus rarement, ils peuvent apparaître à la fin de la grossesse[15] mais ces symptômes sont alors communs et le diagnostic peut être retardé.
L'électrocardiogramme peut être normal ou montrer des anomalies non spécifiques.
L'Ă©chocardiographie montre une dilatation plus ou moins importante du ventricule gauche avec une fraction d'Ă©jection basse, signant la dysfonction systolique.
L'IRM cardiaque peut montrer une fibrose myocardique[12].
Biologie
Le taux de BNP ou de NT-proBNP dans le sang est élevé, comme dans toute insuffisance cardiaque. Il semble qu'un taux élevé de prolactine et d'interféron gamma soit corrélé avec une forme plus grave[17].
D'autres marqueurs sont en cours d'évaluation. Ainsi le taux de microARN 146a serait augmenté[18].
Traitement
La prise en charge a fait l'objet de recommandations de la Société Européenne de cardiologie, publiées en 2011[19].
Le traitement est celui de l'insuffisance cardiaque, à base de diurétiques, de vaso-dilatateurs et de bêta-bloquants. Toutefois le traitement de la maladie, si elle est découverte en fin de grossesse est plus complexe en raison des contre-indications médicamenteuses chez la femme enceinte. Un accouchement déclenché peut être alors discuté selon le terme[15].
L'utilisation de la dobutamine pourrait être délétère, sans doute en rapport avec une expression diminuée de STAT3 sur les cardiomyocytes, entraînant une sensibilité particulière à cette molécule[20].
La bromocriptine, un inhibiteur de la prolactine semble améliorer significativement l'évolution de la maladie, en particulier les paramètres de la fonction cardiaque[21] - [22].
Évolution
Une fois le cap passé, la fonction systolique s'améliore dans plus de la moitié des cas et peut même se normaliser[23]. Une nouvelle grossesse est toutefois fortement déconseillée car pouvant se manifester par une récidive de la maladie, d'autant plus important en l'absence de normalisation de la fonction systolique[24]. Si la fonction systolique est normalisée, la probabilité de rechute est d'environ 20%, avec parfois des conséquences graves[24].
Les complications thrombo-emboliques sont plus fréquentes que lors des cardiomyopathies d'autres causes, probablement en raison de l'hypercoagubilité de la période du péripartum[15].
Notes et références
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