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Campagne présidentielle de Barack Obama de 2008

En 2008, Barack Obama se rend pour sa campagne présidentielle en Afghanistan, en Irak, en Israël, en Allemagne, où il prononce devant le Siegessäule et une foule enthousiaste un discours aux accents kennediens et reaganiens, en France et au Royaume-Uni[1]. La presse popularise alors le néologisme d'obamania. John McCain qui, pendant ce temps, a reçu le dalaï-lama, reproche à son concurrent démocrate d'avoir préféré prononcer un discours devant « des foules d'Allemands obséquieux » aux dépens d'une visite au chevet de soldats américains soignés à Landstuhl (base américaine située près de Kaiserslautern)[2].

Dans une lettre adressée le , Barack Obama regrette de n'avoir pu rencontrer le dalaï-lama du fait de ses voyages, et lui réaffirme son soutien, espérant que sa lettre et la rencontre avec le sénateur John McCain démontreront que l'attention et le soutien américain au peuple tibétain transcendent les divisions politiques. Obama se félicite aussi du dialogue entre les représentants du dalaï-lama et du gouvernement de la République populaire de Chine[3].

Obama avec Joe Biden, son colistier.

Le 23 août, Obama choisit le sénateur du Delaware Joseph Biden comme colistier dans la course à la Maison-Blanche. Biden est président de la commission des Affaires étrangères au Sénat et sénateur depuis 1972. Ce choix doit servir à donner l'image de l'expérience politique et plus particulièrement en politique étrangère[4] et, par conséquent, de contrer les attaques sur l'inexpérience d'Obama dans ce dernier domaine (l'argument de l'inexpérience d'Obama, repris par John McCain, avait déjà été exploité lors des primaires par Hillary Clinton et par Joe Biden lui-même). Le choix de Biden présente cependant également des inconvénients : l'association d'Obama à une figure connue du paysage politique fédéral atténue l'idée du « changement » (Change). De plus, le sénateur du Delaware est connu pour ses gaffes, qui peuvent s'avérer dangereuses dans un duel électoral serré.

Barack Obama est le premier métis issu d'une union entre un Afro-Américain et d'une blanche à être président des États-Unis, événement considéré par beaucoup comme historique qui concrétise en partie le rêve de Martin Luther King

Le 28 août, jour du 45e anniversaire du discours I have a dream de Martin Luther King, il est officiellement investi par le Parti démocrate, au stade Invesco à Denver[5].

Deux semaines avant les élections, après être sorti renforcé des débats face à John McCain, Obama reçoit le soutien inattendu de l'ancien Secrétaire d'État républicain Colin Powell et devance largement (de 7 à 10, voire 12 points) son adversaire dans les sondages[6].

Les républicains tentent pourtant de freiner Obama en l'attaquant sur plusieurs points :

  • en déclarant qu'il est soutenu par l'association ACORN, dont le travail d'inscription des citoyens sur les listes électorales est entaché d'erreurs grossières voire de tentatives de fraude avérées ;
  • en affirmant qu'il est proche de l'ancien activiste d'extrême gauche Bill Ayers, membre fondateur des Weathermen, ajoutant que cela faisait de lui un collaborateur avéré de terroristes ;
  • en le présentant, enfin, lors de plusieurs meetings de la colistière conservatrice de McCain, Sarah Palin, comme un « socialiste »[7].

Cette dernière accusation, injurieuse (le terme est synonyme de « communiste » aux États-Unis, pays ennemi de l'URSS pendant la Guerre froide), réagit à une phrase prononcée le 11 octobre par Obama : « Je pense que si nous répartissons (spread around) les richesses, c'est bien pour tout le monde ». Il répondait alors aux questions de Samuel J. Wurzelbacher (présenté par McCain, puis Obama et les médias comme « Joe le plombier »), un employé d'une entreprise de plomberie qui s'inquiétait d'une hausse de ses impôts en cas de victoire du sénateur de l'Illinois.

Ces attaques s'avèrent cependant contreproductives pour le camp McCain, tandis qu'Obama tourne en dérision l'accusation de « socialisme » : « À la fin de la semaine, il (John McCain) finira par m'accuser d'être un communiste masqué parce que je prêtais mes jouets lorsque j'étais à l'école maternelle. Je partageais mes sandwiches au beurre de cacahuète et à la confiture[8]. »

Le 23 et le 24 octobre, Barack Obama suspend brièvement sa campagne, qui est la plus coûteuse de l'histoire des États-Unis (605 millions de dollars contre 150 millions de dollars pour celle de McCain)[9], pour se rendre à Hawaï au chevet de sa grand-mère, Madelyn Dunham (née en 1922), gravement malade.

Déjà soutenu par de grands journaux comme le Washington Post, le Los Angeles Times, le New York Times ou le Financial Times, le sénateur démocrate reçoit l'appui de Scott McClellan, ancien porte-parole de George W. Bush devenu sycophante de la « culture de la désinformation » à Washington, qui annonce, le 24 octobre, qu'il votera pour Obama[10].

Pendant ce temps, McCain remonte dans les sondages en abordant davantage les questions économiques, passées au premier plan dans un contexte de crise financière, et en exploitant une gaffe de Joe Biden. Lors d'une rencontre avec des donateurs de Seattle, ce dernier a en effet déclaré : « Croyez-moi. Il ne se passera pas six mois avant que le monde ne mette à l'épreuve Barack Obama, comme il l'avait fait avec Kennedy (…). Écoutez, nous allons avoir une crise internationale, une crise fabriquée, pour voir de quel bois se chauffe ce gars-là (…). Je vous garantis que cela va arriver. »

Destinée initialement à démontrer la pugnacité et le courage d'Obama en le comparant à John Fitzgerald Kennedy, cette déclaration maladroite est exploitée par McCain qui juge que le pays n'a pas besoin « d'un président qui invite le monde à le tester à un moment où notre économie est en crise, et où les Américains se battent déjà dans deux guerres[11] ! »

Le 29 octobre, Barack Obama diffuse un spot de 30 minutes sur sept chaînes américaines (CBS, NBC, FOX, BET, Univision, MSNBC et TV One). Dans ce spot, qui aura coûté quatre millions de dollars, le candidat annonce un plan en faveur des classes moyennes pour lutter contre la crise économique[12].

Techniques de communication

La campagne de Barack Obama s'est soldée avec sa victoire en 2008 qui a fait de lui le 44e président des États-Unis. Cette campagne où la communication politique a joué son rôle par l'utilisation de la puissance d'internet, des nouvelles technologies d'information et de communication. Cinq points cruciaux ont contribué à la victoire : le recrutement, la motivation, l'information, l'organisation et la récolte de fonds[13]. La campagne d'Obama ne fut pas la seule à utiliser le pouvoir d'internet afin d'obtenir la victoire. Les différences qui ont porté fruit se trouvent dans son utilisation et dans l'efficacité dont l'équipe a fait preuve. Le recrutement de membres et de bénévoles s'est effectué à l'aide de messages ciblés[13]. Les organisateurs sont allés jusqu'à créer un véritable réseau social (my.barackobama.com) qui a permis de réunir plus de 2 millions de membres actifs. Lors de l'inscription à ce réseau social en particulier, les adresses courriel et certaines informations sur le lieu de résidence et secteur de vote de l'utilisateur qui s'inscrivait était automatiquement prises à part et insérées dans une base de données. La motivation des électeurs a été façonnée avec le désir de changement et de renouveau que proposait l'équipe de communication d'Obama, les envies de chaque secteur électoral ont été dégagées afin de mieux cibler les besoins de chacun. Pendant la campagne, l'information a été plus que cruciale. Un milliard de courriels au travers de 13 millions d'adresses ont permis à l'équipe d'éradiquer le risque de déformation[13].

Ce contrôle du message a permis à Barack Obama de s'assurer une cohésion dans la stratégie de communication et de maintenir une cohérence au travers des enjeux qu'il abordait. L'objectif était également de créer un lien d'appartenance à un groupe. Avec l'information en primeur, les électeurs pouvaient avoir le sentiment d'être privilégiés. L'organisation de la campagne tourne alors sur une compilation de courriels, de numéros de téléphone, d'adresses de résidence et de plusieurs réunions de quartier afin d'organiser la campagne. La récolte de fonds au moyen d'internet fut bénéfique pour Obama. Les différentes astuces utilisées ont permis de récolter des petits et moyens dons de la classe populaire qui, cumulativement, ont ramené dans les coffres des sommes colossales. Traditionnellement, les entreprises sont les grands bailleurs de fonds des campagnes américaines[13]. Ces 690 millions récolés ont contribué indéniablement à la victoire de la campagne[14].

Information dans l'informatique

L'utilisation des bases de données est majeure dans les campagnes électorales du XXIe siècle. Le parti démocrate investit une somme de 6 millions afin de mettre en place une « data base » qui permettra de dénicher d'importantes informations sur les électeurs des États-Unis[14]. La création d'un fichier électoral national élaboré par le parti démocrate a fait bénéficier à Barack Obama de l'information très importante pour la campagne de 2008. Cette base de données a permis au parti de regrouper les informations des différents secteurs en une seule et unique base[14]. Chacun pouvant la mettre à jour, cela pouvait assurer un minimum de connaissance sur les électeurs. Les bases de données peuvent se résumer ainsi : « se souvenir de qui vous êtes et se souvenir de ce que vous aimez »[14].

L'objectif est de permettre d'effectuer du câblage d'électeur et de s'assurer que chacun se rendre au bon bureau de vote et surtout de connaître son emplacement. Également, l'équipe électorale possédait des milliers de bénévoles qui s'acquittaient aux appels téléphoniques dans lesquels de courtes, moyennes et longues entrevues étaient menées auprès des électeurs[15]. De puissants algorithmes déterminaient les centres d'intérêt de ces derniers afin d'établir des « conversations scriptes » lorsque venait aux bénévoles de cogner aux portes pour faire de la sollicitation téléphonique électorale. Ce type de profilage a donné la chance à l'équipe de Barack Obama de connaître ses électeurs dans chacun des districts. Ainsi, l'internet comme outil pouvant contribuer à la course à l'information est vite devenu nécessaire afin d'espérer avoir une victoire. L'information permet d'accumuler du savoir sur les potentiels électeurs et les raisons personnelles qui pourraient les amener à apposer leur X sur un bulletin de vote.

Notes et références

  1. « Obama finit sa tournée à Londres », Le Soir avec AFP, (consulté le )
  2. « Présidentielle américaine: à peine rentré de l'étranger, Obama critiqué par McCain », AFP, (consulté le )
  3. (en) Bhuchung K. Tsering, Lobsang Choedak, « Obama Reassures US support for His Holiness and Tibetan People », Phayul.com, (consulté le )
  4. Le sénateur du Delaware Joseph Biden désigné comme colistier par Barack Obama, Le Monde, 23 août 2008.
  5. « À Denver, Barack Obama s'empare du rêve américain » - Libération, 29 août 2008
  6. « Les sondages placent Barack Obama sur orbite » - Le Monde.fr, 22 octobre 2008
  7. Dépêche - AFP, 22 octobre 2008
  8. Propos tenus lors d'un meeting, le 29 octobre, et traduits et rapportés par Nouvel Obs.com (avec AP), « "Communiste" : Obama raille les attaques de McCain », 31 octobre, consulté le 4 novembre 2008.
  9. (fr) J - 11 : Obama s'offre une présidentielle à 5 milliards de dollars, Le Point, 24 octobre 2008
  10. L'Express.fr, « L'ancien porte-parole de Bush votera Obama », 24 octobre 2008.
  11. Cyriel Martin, « Joe Biden : "Obama sera mis à l'épreuve dans six mois" », Le Point, 22 octobre 2008, consulté le 26 octobre 2008.
  12. Heindryckx, François. 2011. « Obama 2008 : l’inflexion numérique », Hermès, La revue. (no 59), p. 135-136.
  13. Pène, Clémence, 2013. « La nouvelle « science électorale » américaine », Politique étrangère 2013/2 (Été), p. 127-139.
  14. « how obama used big data to rally voters »
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