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Boris Godounov

Boris Ier de Russie, né Boris Fiodorovitch Godounov (en russe : Бори́с Фёдорович Годуно́в), né à Viazma vers 1551 et mort à Moscou le , est une des figures politiques et culturelles les plus emblématiques de la période de l'histoire russe nommée « temps des troubles »[1]. Il est chef du gouvernement russe à partir de 1594 à la place de Fédor Ier, puis tsar de Russie de 1598 à sa mort subite en avril 1605.

Boris Ier de Russie
Illustration.
Titre
Tsar de Russie

(7 ans, 1 mois et 27 jours)
Couronnement
Prédécesseur Irina Godounova
Successeur Fédor II
Biographie
Dynastie Maison Godounov
Nom de naissance Boris Fedorovitch Godounov
Date de naissance
Lieu de naissance Viazma (Russie)
Date de décès (à 55 ans)
Lieu de décès Moscou (Russie)
Père Feodor Ivanovitch Godounov
Mère Stepanida Ivanovna
Conjoint Maria Malyouta-Skouratov
Enfants Fédor II
Xénia
Religion Chrétien orthodoxe russe

Boris Godounov
Monarques de Russie

Biographie

On sait peu de choses sur la famille Godounov : les rares documents conservés indiquent que Boris était de lointaine ascendance tatare. Un de ses lointains ancêtres, en ligne patrilinéaire, est le prince tatar Tchet, un mourza qui fit construire au XIVe siècle le monastère orthodoxe Saint-Hypatius (ou Monastère Ipatiev)[2]. Le nom de famille signifierait « irréfléchi » en tatar[3].

Une affaire judiciaire secoue la famille au moment de la mort de Fédor Ier en 1598. Son frère, Dimitri Ivanovitch, alors exilé à Ouglitch, y meurt mystérieusement. Alors que la cloche de l'église annonce la mort de Dimitri, la population se soulève, persuadée qu’il s'agit d’un assassinat perpétré sur ordre de Godounov. Celui-ci envoie des troupes qui ont tôt fait de ramener le calme. Ensuite, il ordonne que la cloche soit fouettée en public, que son battant (sa « langue ») soit arraché et qu’elle soit exilée en Sibérie avec les habitants qui n’ont pas été exécutés[4]. Godounov nomme une commission qui conclut à un accident. Dimitri se serait tué avec un couteau, au cours d'une crise d'épilepsie. Les historiens sont encore partagés sur la culpabilité éventuelle de Godounov.

En ce qui concerne Boris Godounov lui-même, il est le fils du boyard Fyodor "Krivoy" Ivanovitch Godounov[5] et le neveu du voïvode Ivan "Chermny" Ivanovitch Godounov[2]. Sa sœur, Irina Godounova, deviendra l'épouse du tsar Fédor Ier. Il épouse Maria Malyouta-Skouratov (1551-1605), fille de Maliouta Skouratov, l'un des plus puissants favoris d'Ivan le Terrible. Le fils né de cette union, Fédor Borissovitch Goudonov (1589-1605), lui succède sur le trône de Russie en 1605 sous le nom de Fédor II.

Régence

Boris Godounov commence par être chambellan d'Ivan le Terrible, commandant de la garde du palais puis, à partir de 1588 exerce la régence pour Fédor Ier, ce dernier étant son beau-frère.

Il mène alors une politique protectionniste visant l'indépendance et la souveraineté de la Russie, alors régulièrement menacée par ses puissants voisins suédois et polonais. Il oeuvre dans trois directions : indépendance religieuse, politique et territoriale. Ainsi, en 1589, Godounov appuie l'indépendance du patriarche orthodoxe de Moscou, permettant à l'Église orthodoxe russe de s’émanciper de la tutelle de Constantinople et de devenir autocéphale. Entre 1590 et 1595, il ouvre les hostilités conduisant à la deuxième guerre russo-suédoise dont il sort victorieux et qui permet la restitution des territoires russes perdus lors de la guerre de Livonie. Entre 1588 et 1598, il intensifie également l'expansion territoriale du tsarat au-delà de l'Oural et organise la colonisation de la Sibérie.

Une nouvelle maison royale

Le , Fédor Ier meurt sans héritier, mettant ainsi fin à la longue dynastie des Riourikides. À la mort du tsar, plusieurs grandes familles (Galitzine, Romanov) peuvent prétendre au trône, mais aucune ne fait acte de candidature, car l'aristocratie a été affaiblie par le pouvoir tsariste, sous le règne d'Ivan IV le Terrible, puis sous celui de Fédor Ier, son fils.

Beau-frère du tsar défunt, et Premier ministre, Boris Godounov jouit d'un bilan militaire et politique spectaculaire et ne trouve aucune difficulté à se faire élire tsar par un zemski sobor, assemblée comprenant les boyards, le clergé et les communes. Rencontrant une résistance au sein de la Douma des boyards, dont il est pourtant l'un des pairs, Godounov s'appuie sur la noblesse et sur le peuple ; présidé par le patriarche orthodoxe Job, Boris est élu tsar, mais exige qu'on lui prête serment non pas au palais, comme le voulait l'usage, mais dans la cathédrale de la Dormition à Moscou.

Il est couronné dans cette même église en .

Manquant de légitimité historique (il n'est qu'un tsar élu)[6], Boris tente d'unir sa famille aux Maisons royales européennes. Il chercha ainsi à marier sa fille Xénia au prince Gustave de Suède, fils exilé d'Erik XIV : la tentative échoua devant le refus du prince de se convertir à l'orthodoxie ; le prince Jean, fils du roi de Danemark Frédéric II accepta, lui, toutes les conditions requises, mais mourut subitement, foudroyé par une maladie.

Règne

Selon les historiens, son règne est une période paisible après l'ère d'Ivan le Terrible.

Il tente de rapprocher le pays de l'Occident et de renforcer le pouvoir du tsar aux dépens des boyards. C'est ainsi qu'il envoie en Occident, à des fins d'instruction, un groupe de jeunes garçons nobles : six en Angleterre, six en France et six en Prusse ; l'expérience fut un échec puisque tous, à l'exception de deux d'entre eux, refusèrent de rentrer en Russie.

Boris ne peut cependant faire face aux troubles qui demeurent latents depuis la mort d'Ivan IV. Ceux-ci trouvèrent un catalyseur dans la grande famine, qui éclate en 1601 et dure trois ans. En 1602, plusieurs milliers de morts sont dénombrés à Moscou et, si le gouvernement tente d'abord de remédier à la situation, il doit bientôt y renoncer à cause de l'immensité du territoire, attitude qui favorisera les désordres et les pillages.

Le , Grégori Otrepiev (Gricha Otrepjov) — moine défroqué ayant réussi à se faire reconnaître par le roi de Pologne comme le tsarévitch Dimitri, qui aurait survécu à son assassinat— entre en Russie à la tête d'une armée de mercenaires polonais et lituaniens. Boris Godounov décrète alors la mobilisation générale, mais ses troupes sont défaites par celles d'Otrepiev, le à Novgorod-Severski ; le , en revanche, le sort des armes est favorable aux troupes du tsar et Otrepiev doit fuir.

Rendus mécontents par la famine, les paysans rallient le camp d'Otrepiev.

Boris Godounov meurt, subitement, le à Moscou : on parla alors d'empoisonnement ou de suicide. Il est inhumé au monastère de Serguiev Possad, près de Moscou. Il laisse pour successeur son fils, Fédor II, et son épouse Maria Grigorievna Skouratova-Belskaya (fille de Maliouta Skouratov, un des chefs de l'Opritchnina d'Ivan le Terrible), qui seront assassinés quelques mois plus tard.

Personnalité

Jerome Horsey décrit ainsi le tsar Godounov : « Il est d’apparence agréable, beau, affable, porté sur la magie noire (sic), âgé de quarante-cinq ans ; il manque d'instruction mais a l'esprit vif, il a des dons d’éloquence et maîtrise bien sa voix ; il est rusé, très impulsif, rancunier, peu enclin au luxe, modéré dans ses habitudes alimentaires mais il a le goût des cérémonies ; il offre de somptueuses réceptions aux étrangers, adresse de riches présents aux souverains des autres contrées ».

Selon l'historien russe Nicolas Kostomarov : « Toute son action visait à favoriser son intérêt personnel, son propre enrichissement, le renforcement de son pouvoir, l’élévation de sa lignée… Cet homme était prêt à faire le bien, pour peu que cela ne gênât point ses visées mais les servît au contraire ; de la même façon, aucun mal, aucun forfait ne pouvait l’arrêter s’il l’estimait utile à ses intérêts. »

Postérité culturelle

La vie de Boris Godounov a inspiré :

Références

  1. Michel Heller : Histoire de la Russie et de son Empire, chap.4-1; 2015, Éd. Tempus Perrin, (ISBN 978-2262051631)
  2. (en) « Les familles Saburov et Godunov sur le site genealogy.euweb.cz ».
  3. (ru) Iouri Fedosiouk. Юрий Федосюк. Русские фамилии. (Noms de familles russes), Moscou, 1981.
  4. (en) Anthony Haywood, Siberia : A Cultural History, Oxford, Signal Books Ltd, , 288 p. (ISBN 978-1-904955-68-9), p. 80.
  5. Voir Liste des monarques de Russie.
  6. Colin Thubron (trad. de l'anglais par Katia Holmes), En Sibérie, Paris, Éditions Gallimard, , 471 p. (ISBN 978-2-07-044616-2), chap. 1 (« L'obsédante présence du passé »).

Voir aussi

Bibliographie

  • Catherine Durand-Cheynet, Boris Godounov et le mystère Dimitri, Perrin, Paris, 1986, 693 p. , (ISBN 2-262-00396-3).
  • J. Gorsey, Notes sur la Russie 1573-1591.
  • Hélène Carrère d'Encausse : Le Malheur russe.
  • Michel Heller (trad. du russe par Anne Coldefy-Faucard), Histoire de la Russie et de son empire, Paris, Flammarion, coll. « Champs Histoire », (1re éd. 1997), 985 p. [détail de l’édition] (ISBN 2081235331)
  • N. Kostomarov : Histoire de la Russie par ceux qui l'ont faite.
  • S. Platonov : Boris Godounov Prague 1
  • L'écrivain français d'origine russe Vladimir Volkoff a consacré une trilogie romanesque à cette époque troublée de l'histoire de la Russie, Les Hommes du Tsar, Éditions de Fallois/L'Âge d'Homme :
  1. Hommes du tsar
  2. Les Faux Tsars
  3. Le Grand Tsar blanc

Liens externes

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