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Baja California

La péninsule de Basse-Californie, ou Baja California, au nord-ouest du Mexique, rassemble plusieurs centaines de sites préhistoriques, situés dans la sierra de San Francisco, la sierra de San Juan, la sierra de San Borja et dans la sierra de Guadalupe. Certains sont des grottes ornées ou des abris sous roche, d'autres des gisements d'ossements fossiles de différentes époques. La région est très riche en œuvres d'art pariétal et rupestre.

Image satellite de la péninsule de la Basse-Californie mexicaine.

Paléolithique supérieur

Zone archéologique de la caverne de Babisuri, district de La Paz - Baja California.

En 1991, l’archĂ©ologue japonaise Harumi Fujita, chercheuse Ă  l’INAH, travailla sur des sites de Baja California, dans le district sud de La Paz. Elle donna Ă  analyser plusieurs Ă©chantillons d’un site prĂ©historique, la caverne de Babisuri, situĂ© sur l’ile d’EspĂ­ritu Santo, en Basse-Californie du Sud. Le laboratoire de l’INAH, au moyen de quatorze analyses au radiocarbone 14, data ces Ă©lĂ©ments de 40 000 ans.

De 1994 à 1996 les archéologues mirent au jour près de 150 sites préhistoriques sur l’ile d’Espíritu Santo (habitations dans des cavernes, sites en plein air, grottes mortuaires, sites pictographiques, etc.). En 2003, Stefan Lovgen, du National Geographic, émis l’hypothèse que des populations paléoaméricaines d’origine australoïde seraient arrivées en Amérique bien avant la vague migratoire des peuples amérindiens d’origine mongoloïde.

Cette population palĂ©oamĂ©ricaine pourrait inclure la Femme de Peñón dĂ©couverte dans la vallĂ©e de Mexico, près d'une ancienne lagune et dont le squelette, datĂ© de 13 000 ans, comporte un crâne dolichocĂ©phale (prĂ©sumĂ© australoĂŻde).

Art pariétal et rupestre

Depuis le début des années 1990, des spécialistes, sous la conduite de l'archéologue María de la Luz Gutiérrez, de l'Institut National d'Anthropologie et d'Histoire du Mexique (INAH) et sous l'égide de l'INAH et du Conseil national de la science et de la technologie (CONACYT) mexicains, étudient les peintures rupestres de Baja California. Des centaines de représentations ont déjà été répertoriées. Les peintures représentent des humains mais également toute une faune telle que cerfs communs, moutons des montagnes, lapins, oiseaux et poissons. Certains animaux et même des humains sont représentés traversés par des flèches. Les couleurs de base employées sont le noir (charbon de bois), le blanc (cendre volcanique), le rouge (lave écrasée) et parfois même de l'ocre (mélange de rouge-orange-jaune).

Du fait de leur très bon Ă©tat de conservation, les archĂ©ologues estimaient l'âge des peintures Ă  moins de 4 000 ans. Or en 2002, le gĂ©ologue australien Alan Watchman, mondialement reconnu en matière de datation de l'art rupestre, leur communique les rĂ©sultats qu'il vient d'obtenir sur les Ă©chantillons prĂ©levĂ©s dans la sierra de Guadalupe. Les premières datations les Ă©tonnent, car plusieurs d’entre elles atteignent 7 000 ans. D’autres analyses ultĂ©rieures de datation, plus d’une soixantaine en tout, vont rĂ©vĂ©ler des dates allant jusqu’à 9 000 ans. « Cet art, rĂ©alisĂ© par des tribus de chasseurs-cueilleurs et tailleurs de pierre, se caractĂ©rise tout d'abord par une concentration exceptionnelle de sites ornĂ©s, et un très grand nombre de peintures », explique MarĂ­a de la Luz GutiĂ©rrez. Pour le seul massif de la sierra de Guadalupe, plus de 700 sites de peintures ont Ă©tĂ© rĂ©pertoriĂ©s et Ă©tudiĂ©s dans le cadre du projet de l'INAH, la plupart du temps rĂ©alisĂ©es sur de grandes parois situĂ©es au pied de falaises, ou dans des abris sous roche.

En 1992 Justin Hyland, du Département d'Anthropologie de l'Université de Berkeley en Californie, et sa collègue, María de la Luz Gutiérrez de l’INAH, entreprennent un travail sur le terrain dans la Sierra de San Francisco[1]. Leur projet, appelé : "Proyecto Arte Rupestre Baja California Sur", est un programme de recherche et de conservation et constitue un des douze projets spéciaux d'archéologie inauguré par le Président Carlos Salinas de Gortari. C'est le plus grand projet d'archéologie jamais organisé en Basse-Californie et un des plus grands projets archéologiques de tout le Mexique.

Patrimoine mondial de l'UNESCO.

En , face Ă  l’importance exceptionnelle des dĂ©couvertes archĂ©ologiques et Ă  l’excellente conservation des Ĺ“uvres pariĂ©tales millĂ©naires, l'UNESCO dĂ©cida de classer au Patrimoine mondial de l'HumanitĂ©, tout le legs culturel prĂ©historique de la Sierra de San Francisco. On Ă©value Ă  près de 100 000 le nombre de reprĂ©sentations picturales dans l’ensemble de la Basse Californie. La plupart d’entre elles, Ă©tant dans un excellent Ă©tat de conservation tout Ă  fait exceptionnel malgrĂ© leur grand âge de près de 10 000 ans pour les plus anciennes.

Les colons espagnols furent les premiers à s'intéresser à la richesse picturale de la région dès le XVIIIe siècle. Les premières explorations scientifiques furent entreprises dès 1893 et en 1895 par l'explorateur français Léon Diguet. Il étudia huit emplacements d'arts pariétaux situés en Basse Californie et publia ses recherches dans plusieurs articles d'anthropologie en 1899. Il prit par ailleurs de nombreux clichés photographiques entre 1893 et 1900, qu'il regroupa dans un recueil, réédité en 1991.

Jean Clottes, Conservateur général du Patrimoine (honoraire) et spécialiste mondial de l'Art rupestre, auteur d’ouvrages spécialisés dans l’art au temps préhistorique, témoigne de la beauté de cet art rupestre millénaire : « J'ai voulu partager mes expériences, mes surprises, mes émotions et mes enthousiasmes dans des domaines aussi différents que les fouilles dans les grottes profondes de l'Ariège, des journées exceptionnelles passées à Lascaux, ou les voyages dans des pays proches (Espagne) ou lointains (Niger, Australie, Baja California au Mexique) à la difficile découverte d'arts rupestres souvent méconnus et pourtant d'une qualité comparable à ceux des cavernes françaises et espagnoles. »

Les PericĂş et leurs ancĂŞtres

Localisation de l'habitat Péricues dans le sud de la péninsule de la Basse-Californie mexicaine.

Les Pericúes sont un groupe ethnique disparu qui a habité à l'extrémité sud de la péninsule de la Californie mexicaine. Ce peuple s'est éteint ethniquement et linguistiquement à la fin du XVIIIe siècle. Selon l'analyse crâniologique, leurs crânes sont de type dolichocéphale, c’est-à-dire non mongoloïde, mais australoïde ou europoïde. L'analyse de l'ADN révèle un marqueur haplotype "B" qui confirmerait l'hypothèse d'une migration par circumnavigation ou circambulation terrestre autour de l'océan Pacifique.

Territoire

Le territoire ethnique des Péricues comprenait la pointe sud de la péninsule californienne, depuis l'Extrémité de San Lucas jusqu'à l'Extrémité de Pulmo, ainsi que les grandes îles du sud du golfe de Californie, comme Cerralvo, Espíritu Santo ou San José.

Langue

Les études sur la langue péricue sont très limitées car il n'en subsiste que quelques mots enregistrés par les missionnaires, plus environ une douzaine de toponymes du Sud de la Basse Californie. Les missionnaires jésuites ont reconnu que cet idiome était une langue différente des autres langues amérindiennes. On suppose que le péricue et le guaicura (langue voisine) ont dû constituer une famille linguistique à part.

Histoire précolombienne

Le territoire des PĂ©ricues fut occupĂ© depuis la fin du PlĂ©istocène et pendant l'Holocène. La prĂ©sence humaine dans la pĂ©ninsule de Baja California remonte Ă  quelques dizaines de milliers d'annĂ©es. Les sites prĂ©historiques de Baja California, riches en peintures pariĂ©tales, ont livrĂ© des ossements humains palĂ©oamĂ©ricains dont les crânes ont rĂ©vĂ©lĂ© une origine mĂ©lanĂ©sienne. La mise au jour, en 1996, de nombreux outils (artefacts, bois brĂ»lĂ©s, coquillages travaillĂ©s) sur le site de la caverne de Babisuri en Basse-Californie a permis d'y dater d'au moins 40 000 ans la prĂ©sence humaine.

Plusieurs dizaines de squelettes datĂ©s de 13 000 Ă  15 000 ans ont par la suite Ă©tĂ© dĂ©couverts par plusieurs Ă©quipes d'archĂ©ologues mexicains, amĂ©ricains, britanniques, espagnols et japonais, dans la mĂŞme rĂ©gion mexicaine de Baja California. Des spĂ©cialistes internationaux (R. Gonzalès-JosĂ© et M. Hernandez de l’universitĂ© de Barcelone, A. Gonzales-Martin de l’AcadĂ©mie d’Histoire et d’Anthropologie de Pachuca, Mexique, H. Pucciarelli et M. Sardi du dĂ©partement scientifique d’Anthropologie du musĂ©e de La Plata, Argentine, A. Rosales de l’Institut National d’Anthropologie et d’Histoire du centre INAH Baja California, Mexique, et S. Van der Molen de l’UniversitĂ© Autonome de Barcelone) ont longuement Ă©tudiĂ© les crânes de plusieurs dizaines de squelettes. Les analyses craniomĂ©triques ont permis de connaĂ®tre l’origine de ces palĂ©oamĂ©ricains. Les squelettes PĂ©ricues, mis au jour, prĂ©sentent des crânes hyper-dolichocĂ©phaliques suggĂ©rant que les ancĂŞtres des PĂ©ricues Ă©taient peut-ĂŞtre de type australoĂŻde ou de type aĂŻnou et vinrent par migrations trans-pacifiques Ă  partir de la dernière pĂ©riode du PlĂ©istocène.

Femmes péricues, fusain de George Shelvocke, marin anglais, 1726.

Histoire postérieure à la Conquête espagnole

Les premiers contacts entre Européens et Péricues remontent à 1530 environ, quand Fortún Ximénez et une expédition envoyée par Hernán Cortès ont atteint la Basse Californie. Par la suite, des rencontres sporadiques, quelquefois amicales et d'autres fois hostiles, se sont produites entre des explorateurs, des missionnaires ou des marins et ce peuple aux caractéristiques bien différentes de celles des tribus amérindiennes habituellement rencontrées dans tous ces nouveaux et vastes territoires, aussi bien sur le plan physique (physionomie) que culturel (céramiques). Les conflits et les épidémies décimeront ce peuple millénaire. L'explorateur français Léon Diguet prit quelques clichés photographiques de quelques rares survivants, descendants des Guaycuras, peuples voisins des Péricues, aux caractéristiques métissées amérindiennes et péricues[2].

Les jésuites établirent leur première mission permanente à Conchó durant l'année 1697, mais mirent plus de deux décennies à pénétrer à l'extrême Sud de la péninsule. Des missions destinées aux Pericúes furent finalement établies à Airapí (1720), Añiñí (1724), et Añuití (1730).

Martyre de Lorenzo Carranco le .

Un évènement dramatique pour les jésuites survint en 1734, quand commença un conflit avec les Pericúes, qui se transforma en l'un des plus grands défis pour les missionnaires en Californie. Deux d'entre eux furent assassinés—Lorenzo Carranco à Santiago Añiñí, le , et deux jours plus tard, Nicolás Tamaral à San José de Añuití. Pendant deux ans, la région échappa au contrôle jésuite. Mais ce sont les Pericúes qui souffrirent le plus, du fait des décès provoqués par les combats contre les Espagnols et les effets des épidémies apportées d'Europe par les conquérants. À cette époque, la Couronne d'Espagne vint en aide aux Jésuites et chassa ce qui restait de survivants péricues (1768). Ces derniers furent assimilés culturellement, mais leurs gènes survivent dans la population métisse du Sud de la Basse-Californie.

Références

  1. Archaeological Research Facility, University of California, Berkeley, CA
  2. 53. Relatives in South America

Bibliographie

  • Jean Clottes, Passion PrĂ©histoire, Éditions Maison des roches, 2005
  • Crosby H.W. : "The Cave Paintings of Baja California : Discovering the Great Murals of an Unknown People". San Diego : Sunbelt Publications, 1997. (ISBN 0-932653-23-5)
  • GutiĂ©rrez, M. L., E. Hambleton, J. Hyland, and Stanley Price, N.P, "The management of World Heritage sites in remote areas: the Sierra de San Francisco, Baja California, Mexico," Conservation and Management of Archaeological Sites 1:4 (1996), p. 209-225
  • Stanley Price, N.P : "The Great Murals : Conserving the Rock Art of Baja California," Conservation (The GCI Newsletter) 11:2 (1996)
  • Palaeoanthropology : Tracking the first Americans ; Nature 425, 23-24 ;

Ouvrages anciens

  • Clavijero Francisco Javier, Historia de la Antigua o Baja California, Juan Navarro, Mexico, 1789
  • Diguet LĂ©on, Note sur la pictographie de la Basse-Californie, L'Anthropologie 6 (1895), p. 160-75; "Rapport sur une mission scientifique dans la Basse-Californie", p. 1-53 in Nouvelles Archives des Missions Scientifiques 9, Paris, Imprimerie Nationale, 1899
  • LĂ©on Diguet, FotografĂ­as del Nayar y de California, 1893-1900, Ed. CEMCA INI 1991, Barcelona, 108 p., code (ISBN 968-2937-23-X), format 22 Ă— 22

Voir aussi

Articles connexes

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