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B2-Namous

B2-Namous est une ancienne base militaire secrète de l'armée française située dans le Sahara et qui a été utilisée du temps de l'Algérie française (jusqu'en 1962), mais également du temps de la République algérienne (jusqu'en )[1]. B2-Namous est la dernière base militaire, connue, à avoir été utilisée par la France après l'indépendance de l'Algérie. La présence de cette base a été publiquement divulguée en 1997, soit vingt ans après la fin du premier bail renouvelable accordé à la France par les accords d'Évian de 1962.

B2-Namous
Image illustrative de l’article B2-Namous
B2-Namous en 2008

Lieu Namous
Drapeau de la France Algérie française
Drapeau de l'Algérie Algérie
Type d’ouvrage Base d'expérimentation d'armes chimiques & bactériologiques
Utilisation Base d'essai
Contrôlé par Armée de terre, Sodéteg
Événements Réactivation : 1965
Abandon : 1986[1]
CoordonnĂ©es 31° 50′ 24″ nord, 0° 36′ 35″ ouest
Géolocalisation sur la carte : Algérie
(Voir situation sur carte : Algérie)
B2-Namous

Présentation

Au XXe siècle, le ministère de la Défense installe une base secrète d'essais d'armes chimiques et bactériologiques dans l'oued Namous (« namous » signifie moustique en berbère et en arabe) nommée B2-Namous et située dans un no man's land au sud de Beni Ounif[2] et de la frontière marocaine.

Plusieurs campagnes d'essais de dispersion de toxiques sont menées par l'armée française en Algérie, à partir de 1930. Les premiers essais en grand furent réalisés dans la région de Chegga, puis à partir de 1931, sur le polygone de tir du centre de recherche et d'essais chimiques gigantesque de Béni-Ounif, alors composé de trois sites dénommés B1, B2 et B3. Par la suite, le centre B2 connu sous le nom de B2-Namous fut exclusivement dévolu aux essais des armes chimiques et bactériologiques. En 1935, le centre fut rebaptisé Centre d'expérimentation semi permanent de Béni-Ounif, ou CESP. De nombreuses campagnes de tir de munitions chimiques, d'essais de bombes chimiques d'aviation, d'épandages de vésicants par avions, de création de vagues gazeuses toxiques par dispersion en chandelle, d'essais d'armes chimiques nouvelles, ont lieu jusqu'en 1940[3]. Les forces armées britanniques utiliseront également ce centre jusqu’à l'armistice de 1940 et utiliseront ensuite la base canadienne de Suffield de 1941 à 1946.

RĂ©activation

Le polygone d'essai de B2-Namous couvrant une superficie de 100 Ă— 60 km est alors le second plus vaste centre d'expĂ©rimentation d'armes chimiques au monde après celui de l'Union soviĂ©tique[4]. Il est remis en activitĂ© en 1965 Ă  l'initiative du prĂ©sident Charles de Gaulle, Ă  la suite de la tenue d'un Conseil de dĂ©fense et de sĂ©curitĂ© nationale et dans le cadre du renouvellement du contrat de bail prĂ©alablement Ă©tabli par les accords d'Évian de 1962[5]. La dĂ©lĂ©gation algĂ©rienne accepte la rĂ©ouverture de B2-Namous Ă  condition que les autoritĂ©s d'Alger bĂ©nĂ©ficient d'une couverture civile pour ne pas avoir Ă  traiter avec l'armĂ©e française. Concrètement, le site d'essai doit ĂŞtre officiellement gĂ©rĂ© par une entreprise civile, et c'est la sociĂ©tĂ© industrielle SodĂ©teg (la « SociĂ©tĂ© d'Ă©tudes techniques et d'entreprise gĂ©nĂ©rale », du groupe Thomson) qui obtient ce contrat[5]. La SODETEG postera sur le site des permanents :

  • un responsable de site ;
  • un chef de chantier ;
  • un infirmier ;
  • un contrĂ´leur aĂ©rien ;
  • un Ă©lectricien ;
  • un Ă©lectro-mĂ©canicien ;
  • deux mĂ©caniciens auto ;
  • deux magasiniers ;
  • quatre radio-Ă©lectriciens ;
  • deux administratifs basĂ©s Ă  BĂ©char.

Fin du secret militaire

La divulgation de ce secret militaire et diplomatique est le fait du journaliste français Vincent Jauvert du magazine Le Nouvel Observateur qui en a fait la une de son no 1720 d' « Exclusif : Quand la France testait des armes chimiques en Algérie »[4] - [5]. Le , interpellé à ce propos par Hervé Brusini, journaliste de la chaîne télévisée France 2, le ministre de la Défense d'alors (1960-1969), Pierre Messmer, déclare[6] :

« Tous les pays, qui avaient une certaine forme d'évolution industrielle et scientifique, s'efforçaient de mettre au point des types d'armes et en particulier, les armes incapacitantes, c'est-à-dire des armes qui, en quelque sorte, paralysent celui qui respire ou reçoit sur la peau le produit chimique en question. »

Officiellement, la base sert de champ d'expérimentation à la défense passive dans le sens de l'élaboration de nouveaux matériels de protection face à une agression chimique[5]. La réactivation de B2-Namous intervient dans les contextes particuliers de la course aux armements inhérente à la guerre froide, et celui de la guerre du Viêt Nam au cours de laquelle les services de renseignement américains font part à leurs alliés français de leurs recherches dans ce domaine et également de l'avancée de leur ennemi commun soviétique[4]. En 1972, le gouvernement français fait adopter une loi interdisant tous travaux sur les armes bactériologiques. À partir de cette date les travaux de B2-Namous ne portent donc officiellement plus que sur de l'armement chimique[5]. Répondant à la question d'Hervé Brusini « Alors pourquoi l'Algérie indépendante acceptait-elle des expérimentations sur son sol ? », l'ex-ministre déclare[7] :

« Mais B2-Namous c'est au Sahara, et au Sahara, comme on le sait, il n'y a pas beaucoup d'habitants et les expérimentations de la France à B2-Namous ne gênaient pas du tout l'Algérie, au contraire, je dirais au contraire parce que ça apportait autour de B2-Namous une certaine activité qui a disparu complètement quand nous avons fermé le centre. »

En , le général à la retraite Rachid Benyellès dans son ouvrage Dans les arcanes du pouvoir (1962-1999)[8], soutient que la France a bien continué à tester ses armes chimiques et bactériologiques en Algérie jusqu’à l’ère Chadli Bendjedid, soit jusqu'en 1986[1].

DĂ©pollution du site

En décembre 2012, un accord est conclu entre le gouvernement français et le gouvernement algérien lors de la visite de François Hollande à Alger, pour que la France entreprenne la dépollution chimique du site sous le contrôle de la DGA et plus particulièrement des experts du Centre d'étude du Bouchet à Vert-le-Petit[9].

Notes et références

  1. Yacine K., « La France a poursuivi ses essais militaires en Algérie jusqu’à 1986 », Le Matin d'Algérie,‎ (lire en ligne, consulté le )
  2. Essais chimiques français en Algérie, MIDI 2 - 22/10/1997, INA
  3. Les services chimiques français dans l'entre-deux guerre - Un bref aperçu de la question des gaz de combat pendant la campagne de 1939 - 1940
  4. Exclusif. Jusqu'en 1978, seize ans après l'indépendance, les essais ont continué sur une base secrète dans le Sahara: Quand la France testait des armes chimiques en Algérie, nouvelobs.com
  5. Un témoignage inédit de l'ancien ministre de la Défense : B2-Namous, c'était vraiment très secret, nouvelobs.com
  6. Essais chimiques en Algérie, JA2 20H - 21/10/1997, INA
  7. Essais chimiques français en Algérie, MIDI 2 - 22/10/1997 - INA
  8. Rachid Benyellès, Dans les arcanes du pouvoir (1962-1999), Alger, Barzakh éditions, , 413 p. (ISBN 9931040319)
  9. Exclusif : la France va dépolluer un ancien site d'essais d'armes chimiques en Algérie sur le blog Secret Défense de Jean-Dominique Merchet, le 25 février 2013.

Annexes

Articles connexes

Dossier du Nouvel Observateur d'octobre 1997 (en 5 parties)

Actualités télévisées France 2 d'octobre 1997

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