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Autocorrection

L'autocorrection (substantif féminin), néologisme créé du grec auto ("soi-même") et du substantif correction, est une figure de style qui se fonde sur la reprise volontaire de paroles que l'on vient d'énoncer afin de les reformuler avec plus de justesse ou plus de force, généralement sous forme interrogative afin d'opérer une rectification. Elle vise des effets d'éloquence et d'insistance. On la définit aussi parfois sous le terme de correction ; elle est proche de l'anthorisme et de la rétractation.

Exemples

  • « Je t'aime, que dis-je... je suis fou de toi, oui fou de toi »

« C'est ce bel œil qui me paist de liesse,
Liesse, non, mais d'un mal dont je vi,
Mal, mais un bien, qui m'a toujours suivy,
Me nourrissant de joye et de tristesse. »

— Pierre de Ronsard, Continuation des Amours, XXXIII

DĂ©finition

DĂ©finition linguistique

L'autocorrection est une figure de transformation sémantique par répétition des arguments énoncés à l'identique ; c'est donc une interrogation qui porte directement sur l'énonciation (le locuteur s'interroge lui-même). En grammaire, le procédé d'autocorrection est un fait de langue permettant des reprises entre syntagmes[1].

Une autocorrection portant sur tout le raisonnement, totale, est une palinodie.

DĂ©finition stylistique

Selon l'intentionnalité du locuteur, l'autocorrection peut déployer un ensemble d'effets :

  • rhĂ©toriques dans une argumentation (rectification de son propos, feinte pour Ă©vacuer un propos dĂ©sobligeant),
  • d'amplification (jeu sur le pathos, notamment au théâtre et dans les tragĂ©dies),
  • ironiques (critique masquĂ©e par une reprise interrogative).

À ce titre, l'autocorrection se fonde souvent sur une amplification ou/et une gradation. Dans les genres littéraires, il est très fréquent que l'autocorrection soit introduite par une expression type : « Que dis-je ? » comme dans la célèbre tirade du nez de Cyrano de Bergerac dans la pièce éponyme de Edmond Rostand :

« C'est un roc !... c'est un pic !... C'est un cap !
Que dis-je, c'est un cap ?... C'est une péninsule ! »

— Edmond Rostand, Cyrano de Bergerac, acte I, scène 4

Cependant la figure peut être initiée à partir de tournures moins codifiées, surtout lorsque la correction entreprise n'a pas pour but d'accentuer une idée mais d'en modifier la portée, voire de la contredire, comme chez Pierre de Ronsard où il y a inversion totale du prédicat du premier vers selon lequel le temps passe :

« Le tems s'en va, le tems s'en va, ma Dame,
Las ! le tems non, mais nous nous en allons, »

— Pierre de Ronsard, Je vous envoye un bouquet que ma main

La publicité et la langue orale utilisent couramment l'autocorrection, dans des expressions auto interrogatives. En dessin d'Art et en peinture, l'autocorrection peut s'apparenter à la rature.

Genres concernés

L'autocorrection est une figure majoritairement employée dans le genre dramatique, tragique (Jean Racine par exemple avec le personnage d'Andromaque : « Étrangère... que dis-je ? esclave dans l'Epire »)et comique (Molière pointant par là la mauvaise assurance argumentative de ses personnages fourbes).

Le roman peut y avoir recours afin de rendre davantage réaliste les dialogues de personnages. En poésie (voir Ronsard), l'autocatégorème permet l'expression lyrique et matérialise la présence du poète dans son œuvre.

Historique de la notion

Dans sa Rhétorique française, Antoine Fouquelin définit l'autocorrection ainsi : « correction est une répréhension et amendement de notre dire, laquelle a grâce comme les autres, quand ce qui avait été auparavant dit est subtilement et ingénieusement repris (...) ».

Figures proches

DĂ©bats

Les deux acceptions de correction et d'autocorrection sont parfois, dans les entrées de dictionnaire, en concurrence ; or la correction vise la reprise d'un propos sans mention du locuteur, par des indices énonciatifs, au contraire de l'autocorrection qui emploie toujours le pronom personnel de première personne.

Domaines transverses

En pédagogie, l'autocorrection est une procédure d'auto contrôle de ses acquisitions par l'élève, au moyen de fiches[2].

Notes et références

Bibliographie

  • Pierre Pellegrin (dir.) et Myriam Hecquet-Devienne, Aristote : Ĺ’uvres complètes, Éditions Flammarion, , 2923 p. (ISBN 978-2081273160), « RĂ©futations sophistiques », p. 457. Ouvrage utilisĂ© pour la rĂ©daction de l'article
  • Quintilien (trad. Jean Cousin), De l'Institution oratoire, t. I, Paris, Les Belles Lettres, coll. « BudĂ© SĂ©rie Latine », , 392 p. (ISBN 2-2510-1202-8).
  • Antoine Fouquelin, La RhĂ©torique françoise, Paris, A. Wechel, (ASIN B001C9C7IQ).
  • CĂ©sar Chesneau Dumarsais, Des tropes ou Des diffĂ©rents sens dans lesquels on peut prendre un mĂŞme mot dans une mĂŞme langue, Impr. de Delalain, (rĂ©impr. Nouvelle Ă©dition augmentĂ©e de la Construction oratoire, par l’abbĂ© Batteux.), 362 p. (ASIN B001CAQJ52, lire en ligne)
  • Pierre Fontanier, Les Figures du discours, Paris, Flammarion, (ISBN 2-0808-1015-4, lire en ligne).
  • Patrick Bacry, Les Figures de style et autres procĂ©dĂ©s stylistiques, Paris, Belin, coll. « Collection Sujets », , 335 p. (ISBN 2-7011-1393-8).
  • Bernard Dupriez, Gradus, les procĂ©dĂ©s littĂ©raires, Paris, 10/18, coll. « Domaine français », , 540 p. (ISBN 2-2640-3709-1).
  • Catherine Fromilhague, Les Figures de style, Paris, Armand Colin, coll. « 128 Lettres », 2010 (1re Ă©d. nathan, 1995), 128 p. (ISBN 978-2-2003-5236-3).
  • Georges MoliniĂ© et Michèle Aquien, Dictionnaire de rhĂ©torique et de poĂ©tique, Paris, LGF - Livre de Poche, coll. « EncyclopĂ©dies d’aujourd’hui », , 350 p. (ISBN 2-2531-3017-6).
  • Michel Pougeoise, Dictionnaire de rhĂ©torique, Paris, Armand Colin, , 228 p., 16 cm Ă— 24 cm (ISBN 978-2-2002-5239-7).
  • Olivier Reboul, Introduction Ă  la rhĂ©torique, Paris, Presses universitaires de France, coll. « Premier cycle », , 256 p., 15 cm Ă— 22 cm (ISBN 2-1304-3917-9).
  • Hendrik Van Gorp, Dirk Delabastita, Georges Legros, Rainier Grutman et al., Dictionnaire des termes littĂ©raires, Paris, HonorĂ© Champion, , 533 p. (ISBN 978-2-7453-1325-6).
  • Groupe µ, RhĂ©torique gĂ©nĂ©rale, Paris, Larousse, coll. « Langue et langage », .
  • Nicole Ricalens-Pourchot, Dictionnaire des figures de style, Paris, Armand Colin, , 218 p. (ISBN 2-200-26457-7).
  • Michel Jarrety (dir.), Lexique des termes littĂ©raires, Paris, Le Livre de poche, , 475 p. (ISBN 978-2-253-06745-0).
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