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Angel Alonso

Angel Alonso est un peintre français d'origine espagnole, né le à Laredo en Cantabrie, mort le à Paris 14e[1].

Angel Alonso
une illustration sous licence libre serait bienvenue
Naissance
DĂ©cĂšs
Nom officiel
Angel Julian Casimoro Alonso
Nationalité
Activité
Formation
autodidacte
Lieu de travail
Mouvement
Influencé par
Site web

Son travail s'articule autour d'une rĂ©flexion sur la couleur et la matiĂšre. Alonso se tiendra pendant pratiquement 20 ans Ă  l'Ă©cart du marchĂ© de l'art, entendant ainsi prĂ©server l'intĂ©gritĂ© de son Ɠuvre.

Biographie

Les jeunes années : fuite de l'Espagne franquiste et installation en France

AprĂšs quelques annĂ©es de formation en autodidacte, Angel Alonso quitte l'Espagne. Entre 1938 et 1939, il est arrĂȘtĂ© Ă  seulement 17 ans, incarcĂ©rĂ© et condamnĂ© Ă  mort aprĂšs la prise de Bilbao par les franquistes. Sa famille dĂ©pose un recours en grĂące, acceptĂ© du fait de son jeune Ăąge.

Il retourne chez lui mais, quelques mois plus tard, est de nouveau arrĂȘtĂ© pour dĂ©sertion, n’ayant pas effectuĂ© son service militaire. Il est alors dĂ©portĂ© sur l’üle de Fuerteventura. Il s’évade puis, aprĂšs une pĂ©riode de clandestinitĂ©, gagne, en 1947, la frontiĂšre française.

Il quitte alors dĂ©finitivement l’Espagne pour rejoindre Paris. Ces annĂ©es de prison seront l’un des fondements de son amitiĂ© indĂ©fectible avec MarĂ­a Zambrano, elle-mĂȘme rĂ©fugiĂ©e politique, qu’il connaĂźtra dĂšs le dĂ©but des annĂ©es 1950. Il s'installe Ă  Paris oĂč il rencontre quatre artistes qui orienteront la premiĂšre Ă©tape de son travail, Vieira da Silva, ÁrpĂĄd Szenes et, surtout, Nicolas de StaĂ«l[2] et Pierre Tal Coat, ces derniers se retrouvant souvent dans leurs Ɠuvres respectives[3].

En plus de ces premiÚres influences picturales, il se sent attiré par la couleur et les collages de Matisse.

Les années 1950

En 1950, il se voit menacĂ© d’extradition vers l’Espagne franquiste par les autoritĂ©s françaises. Un comitĂ© de soutien s’organise, constituĂ© entre autres par Michel Leiris, Francis Ponge, Henri Calet ou encore Pierre Descargues. Il n’obtiendra la nationalitĂ© française qu’en 1971 grĂące au soutien de son beau-pĂšre, Roger Rigaud, ancien vice-prĂ©sident du Conseil de Paris.

En 1952, Alonso refuse d'exposer Ă  la prestigieuse galerie Jeanne Bucher par « pudeur Â». En effet, il estime que son jeune Ăąge ne lui permet pas de prĂ©tendre Ă  une telle exposition.

En 1955, il expose Ă  la galerie AndrĂ© SchoĂ«ller, qui Ă  cette Ă©poque reprĂ©sentait des artistes tels que Rebeyrolle, Fautrier, Messagier, Duvillier, Gnoli, Arroyo. À partir de cette exposition ses matĂ©riaux deviennent plus denses.

De 1957-58, il peint une sĂ©rie de toiles inspirĂ©es du tableau de Turner Les FunĂ©railles en mer de Sir David Wilkie. Ce sont les annĂ©es de sa rencontre fraternelle avec MarĂ­a Zambrano, celle-ci mĂȘme qui lui prĂ©sentera Emil Cioran. Ce dernier qualifia en 1987 Alonso comme le « dernier peintre français Â». À la lumiĂšre de ces rencontres, Alonso initie son propre chemin.

En 1952, il s'installe à Genainvilliers, prÚs de Chartres, qui deviendra, à partir de ce moment son lieu de réflexion et de recherche, centrée principalement sur la couleur. En 1958, il travaille avec les feuilles, les pommes, les troncs, les branches, obsédé par les aspects multiples des sensations végétales. Il parle beaucoup avec Tal-Coat, qui, lui aussi, expérimente constamment.

En 1956, aprĂšs avoir vĂ©cu Ă  Paris, au 49 de la rue de Rennes, Alonso s’installe Ă  La Laurencie, propriĂ©tĂ© familiale de son Ă©pouse Monique Rigaud, dans le Limousin.

Ils y accueilleront nombre de leurs amis, parmi lesquels les poĂštes Yves de Bayser et Jules Supervielle, Suzane TĂ©zenas, cĂ©lĂšbre mĂ©cĂšne, l’homme de lettres et critique Guy Dumur... C’est lĂ  qu’Alonso commence Ă  approfondir le travail sur la matiĂšre et le paysage.

Les annĂ©es 1960–1970 : bravade au marchĂ© de l'art et affirmation d'un langage pictural inĂ©dit

À partir de 1960 et pendant plus de vingt ans, Alonso se tiendra pratiquement Ă©loignĂ© du marchĂ© de l'art. Il se consacre Ă  la peinture comme exigence spirituelle, toujours en contact avec la terre et la nature. Ce sont des annĂ©es intenses marquĂ©es par un retour progressif vers l'essentiel qui se traduit surtout dans la couleur et dans les matĂ©riaux. Il commence la sĂ©rie des grands tableaux noirs composĂ©s Ă  partir de poudre de charbon, de vĂ©gĂ©taux brĂ»lĂ©s, de paille, de feuillage, de terres qui confĂšrent au tableau une consistance et une intensitĂ© unique. SimultanĂ©ment il crĂ©e d'autres Ɠuvres sur bois, carton ou papier oĂč il poursuit son travail de recherche et de rĂ©flexion sur la couleur.  

Un matin trĂšs tĂŽt, presque au point du jour, Alonso est subitement rĂ©veillĂ© par l’odeur de la fumĂ©e venant de champs brĂ»lĂ©s. Il va jusqu’à la grille de la ferme de la Chapelle et voit que le feu avance vers la maison. Au dĂ©but il prend peur, puis rĂ©alisant que ce ne sont que des travaux des champs, il reste jouir du spectacle. Quand le feu s’éteint, c’est la vision absolue : la terre noire, comme un tapis, il n’a jamais rien vu d’aussi beau de sa vie. « Quelle insignifiance, la peinture ! », pense-t-il, et il commence Ă  parcourir les champs noircis et Ă  entasser de l’herbe brĂ»lĂ©e et du charbon. Il prend des sacs et y met des cendres sans y toucher. Les formes — le squelette vĂ©gĂ©tal — sont restĂ©es intactes ; le feu a dĂ©truit les corps sans dĂ©composer leur silhouette. C’est ainsi que tout commence pour Alonso. La pĂ©riode initiale, vers 1963, des grands charbons et des grands espaces de boue ou de terres brĂ»lĂ©es, oĂč toutes les possibilitĂ©s de la couleur noire brillent, vibrent, du sec Ă  l’humide, du plus lumineux Ă  l’obscuritĂ© la plus dense.

Dans les annĂ©es 1970, le Comte de Flers rĂ©unit un groupe de mĂ©cĂšnes autour d’Alonso pour l’aider financiĂšrement, dont les collectionneurs Vivien et Aymar de Gunzburg, BĂ©atrice Rosenberg et le cĂ©lĂšbre tailleur parisien Gilbert FĂ©ruch[4].

« Je l’ai vu, des annĂ©es durant, Ă©tudier les textes les plus anciens de la technique pictu- rale pour retrouver des secrets perdus (...). Charbon ou herbes brĂ»lĂ©es, la couleur y accĂ©dait Ă  une profondeur qu’elle n’a jamais connue ailleurs. Ses noirs sont les plus noirs, les plus denses de toute la peinture, ses blancs plus serrĂ©s, plus Ă©clatants que ceux d’une maison grecque sous le soleil, ses jaunes plus intenses que celui d’un champ de colza en juillet... »

— Jeannine Worms (1923-2006) femme de lettres et collectionneuse des Ɠuvres d’Alonso

« [
] La source unique d’inspiration d’Angel Alonso a toujours Ă©tĂ© le paysage. Il Ă©tait au centre des discussions journaliĂšres qui unissaient le jeune peintre Ă  Pierre Tal Coat, son ami, son pĂšre spirituel. Ils ont parcouru des fois et des fois l’altiĂšre forĂȘt des Lions, s’arrĂȘtant tous les quarts d’heure pour dessiner et Ă©changer leurs points de vue sur la maniĂšre de voir un paysage. Depuis la mort de Tal Coat, l’univers sensible d’Alonso s’est polarisĂ© sur l’immensitĂ© des champs qui entourent sa demeure de Genainvilliers dans l’Eure. Pour Alonso, la terre est le plus beau des paysages. Aussi en est-il arrivĂ© Ă  travailler la terre elle-mĂȘme. Écho de ces surfaces de terre, la couleur doit ĂȘtre une Ă©tendue, la couleur est paysage. On comprend donc pourquoi Alonso refuse tout artifice visant Ă  crĂ©er la profondeur, refuse tout dĂ©gradĂ© de ton. Il cherche la couleur telle qu’elle est et non telle qu’elle nous apparaĂźt, une couleur d’une telle vĂ©ritĂ© qu’elle s’affranchit des strictes limites du cadre. [...] »

— Françoise Magny

Les annĂ©es 1980 : L'Ă©laboration d'une Ɠuvre dĂ©finitive.

En 1982, il retourne Ă  Paris, Ă  l'ancien atelier de Tal-Coat que ce dernier met Ă  sa disposition. Il alternera longtemps les sĂ©jours Ă  Genainvilliers et rue BrĂ©zin. Cette annĂ©e-lĂ , il expose Ă  la galerie Cahiers d'Art. Dans ces travaux, la couleur constitue le paysage mĂȘme. Avec une maĂźtrise exceptionnelle des matĂ©riaux, il n'hĂ©site pas Ă  inventer ses rouges, verts, jaunes, orange... qui jaillissent de la surface poreuse de ses tableaux.

Entre 1986 et 1989 il effectue plusieurs expositions Ă  la Galerie Barbier. Les rouges, les blancs et les jaunes, s'Ă©tendent sur la toile, jalonnĂ©s d'interruptions d'espaces, poussant la couleur jusqu'aux extrĂȘmes mĂȘmes du tableau. Dans ces travaux il a laissĂ© de cĂŽtĂ© les bonnes relations et les influences de son ami Tal-Coat ainsi que la voie ouverte par Matisse. Il prend parti pour une exigence plus radicale qui subordonne son langage pictural Ă  une Ă©criture essentielle dans laquelle la matiĂšre et la couleur se rĂ©unissent dĂ©finitivement.

« Il domine la matiĂšre et la technique dont il s’est dotĂ© lui-mĂȘme et Ă  travers lesquelles il rĂ©ussit Ă  donner corps aux couleurs qui l’obsĂšdent le plus. Dans l’application de la couleur, Alonso joue avec la duretĂ© et la texture de la matiĂšre ; il introduit des Ă©lĂ©ments qui font rĂ©fĂ©rence au paysage de Genainvilliers, au travail des paysans ou au geste de l’artiste fixant la couleur sur la toile. De lĂ , que parfois il laisse sur la toile la spatule ou le petit morceau de bois qu’il a employĂ© pour Ă©tendre la couleur. »

— Juan Carlos Marset

En 1987, Juan Carlos Marset, intellectuel et universitaire espagnol, proche de Maria Zambrano, rencontre Angel Alonso Ă  l’occasion de ses recherches sur la philosophe et prend la mesure de l’importance capitale du travail d’Alonso. Une grande rĂ©trospective est alors mise en Ɠuvre en Espagne, oĂč l’intĂ©gralitĂ© de l’atelier d’Alonso est transportĂ© pour l’organiser.

Vers la fin des années 1980, Alonso est accablé par de sérieux soucis de santé et se voit contraint de s'installer définitivement Rue Brézin. En mai 89, à l'hÎpital Lannec, il écrira le poÚme Beauté Cadavre.

Les derniÚres années

La sĂ©rie DĂ©sastres, exposĂ©e en 1992 Ă  la galerie Sapone de Nice, constitue l'aboutissement de sa derniĂšre recherche. Il abandonne Ă  nouveau ses jaunes, verts, terres pour retourner au noir et au blanc comme dernier refuge dans lequel il se sent sĂ»r. Ses derniers tableaux, des petits formats — esquisses possibles pour un temps qui ne viendra jamais — bouclent le voyage de son Ɠuvre et de sa vie.

La mort brutale d’Angel Alonso Ă  Paris, le , transforme la rĂ©trospective en hommage sous la forme d’une exposition. Elle aura lieu en France, Ă  l’Institut Cervantes (Paris, 1996), et en Espagne Ă  la Fundacion Marcelino Botin (Santander, aoĂ»t-), Circulo de Bellas Artes (Madrid, ).

Famille

Il est le pÚre de Thierry Alonso Gravleur, également peintre, de Jean-Jacques Alonso (décédé) et de Stéphanie Alonso

Postérité

En 2003 et 2005, deux expositions se tiennent Ă  la Galerie Guislain -Etats d'Art Ă  Paris

En 2009, le musĂ©e Reina SofĂ­a (Madrid) achĂšte un nombre important de ses Ɠuvres tandis que l’État espagnol reçoit ses archives (Ă©crits, correspondances, documents), avec en perspective la crĂ©ation d’une fondation Ă  Santander[5].

En 2013 se dĂ©roule Ă  l'Artsenal de Dreux l'exposition Àngel Alonso qui rassemble les Ɠuvres du peintre pour la premiĂšre fois depuis pratiquement 20 ans[6].

En 2014[7], vingt ans aprĂšs la disparition de Angel Alonso, la galerie Michel Soskine Inc. (Madrid-New York) rend hommage Ă  l'artiste par la premiĂšre exposition dans une galerie de Madrid[8].

Notes et références

  1. Insee, « Extrait de l'acte de décÚs d'Angel Julian Casimoro Alonso », sur MatchID
  2. Guy Dumur, dans Nicolas de StaĂ«l, le combat avec l’ange, Ă©voque : « Il [de StaĂ«l] se lie avec des gens connus. Georges Braque, en premier, qu’il voit rĂ©guliĂšrement, AndrĂ© Lanskoy, dĂ©jĂ  nommĂ©, un jeune peintre espagnol, Angel Alonso. »
  3. « Angel Alonso (1923-1994) », sur jpmgemmes.com (consulté le ).
  4. Ader, « Angel Alonso », sur Ader (consulté le )
  5. (es) « Alonso, Ángel », sur www.museoreinasofia.es (consulté le )
  6. Centre France, « Angel Alonso, peintre hors normes », sur www.lechorepublicain.fr, (consulté le )
  7. Du 10 septembre au 8 novembre.
  8. (en) « ÁNGEL ALONSO - EXHIBITIONS - MICHEL SOSKINE INC. », sur www.soskine.com (consulté le )

Voir aussi

Bibliographie

  • Ángel Alonso, catalogue par Jean-Marc Providence, Pascal Bonafoux, Juan Carlos Marset, et al., Somogy Ă©ditions (ISBN 978-2-7572-0754-3)

Liens externes

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