Ahmed Ibn Ibrahim Al-Ghazi
Ahmed Ibn Ibrahim Al-Ghazi, dit « le Conquérant »[1], né vers 1506 a Zeilah en Somalie et mort le [2] dans la région d'Amhara, est un dirigeant religieux (imam), politique et militaire du sultanat musulman d'Adal[3] - [4], il est connu pour avoir dirigé la guerre adalo-éthiopienne et avoir bouleversé la géographie politique de la région, avant sa mort et son échec final en 1543[5].
Naissance | |
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DĂ©cĂšs | |
Nom dans la langue maternelle |
Ahmad garaad ibraa hiim |
Surnom | Le Conquérant en somali gourey ou garaad ,Le Gaucher (« Gragne ») |
Allégeance | |
Activités | |
Fratrie |
Umar Din (en) |
Conjoint |
Bati del Wambara (en) |
Conflit |
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Il est considéré comme somali[6] par un grand nombre d'auteurs et est revendiqué comme un héros national par la Somalie, qui a érigé des statues en son honneur.
DĂ©nominations
Son nom dans les langues locales
Ses surnoms
à partir de la fin du XVIe siÚcle, il est appelé :
- « le Gaucher » dans les sources chrĂ©tiennes (en amharique áá«á (grañ))[7]
- Gurey en somali (Axmet gurey),
- mais pas dans les textes musulmans.
Biographie
La guerre adalo-Ă©thiopienne
Vers 1520, le sultan dâHarar, Abou-Bakr b. Mohammed, est confrontĂ© Ă des oppositions internes, religieuses et politiques, qui prennent la forme d'une « guerre civile » ou «jihad interne»[8]. Un groupe d'opposants originaire du Hubat est fondĂ© par le jarad Abun, qui est tuĂ© par Abu Bekr. AprĂšs plusieurs Ă©pisodes, Ahmed al Ghazi, qui a Ă©pousĂ© Dalwanbarah, la fille d'un chef de guerre nommĂ© Mahfouz, prend la tĂȘte de ce groupe, tue le sultan Abu Bakr et le remplace par son frĂšre âUmar din b. Mohammed[9]. Il assure ainsi son autoritĂ© sur le sultanat[10].
Selon un manuscrit éthiopien du XIXe siÚcle[11], en 1527, Ahmed al-Ghazi refuse de payer un tribut à l'empereur Dawit II. Attaqué par une armée éthiopienne dirigée par « Digal » ou « Dagalhan », Ahmed la défait, puis reforme ses troupes avec de nombreux Somalis et entreprend une guerre sainte (djihad) contre l'Empire éthiopien[12].
Ahmed al-Ghazi est victorieux des Ă©thiopiens Ă ChĂ©mbĂ©ra-KouriĂ© en mars 1529, mais ses troupes refusent de pĂ©nĂ©trer plus profondĂ©ment dans le pays. En 1531, il reprend lâoffensive contre lâĂthiopie[12].
Dans le contexte de la guerre navale entre Portugais et Ottomans, il bĂ©nĂ©ficie du soutien de ces derniers. GrĂące aux armes Ă feu turques, il rĂ©ussit, en deux ans, Ă contrĂŽler une grande partie du pays : il occupe le Daouaro et le Choa, lâAmhara et le Lasta, soumet au passage BalĂ©, Hadiya et Sidamo et efface la chrĂ©tientĂ© du Cambata. Il dĂ©vaste les hauts-plateaux, brĂ»le les Ă©glises, pille les villes et les monastĂšres. Seuls le Tigray, le BĂ©gemeder et le Godjam sont Ă©pargnĂ©s. En 1533, Gragn lance toutes ses forces contre les provinces du nord. Il envahit le TigrĂ© et rencontre une rĂ©sistance dans la province de Seraye (en), qui fait partie du royaume du Medri Bahri (en), menĂ©e par AdkamĂ© Melaga qui rĂ©siste jusqu'Ă la fin de la guerre[10].
Il achĂšve la conquĂȘte de lâAbyssinie, Ă lâexception de quelques rĂ©gions montagneuses oĂč se sont rĂ©fugiĂ©s le negus Dawit II et ses partisans. Le pays est dĂ©vastĂ© Ă tel point que les envahisseurs eux-mĂȘmes souffrent de la famine.
Des troupes portugaises dĂ©barquent Ă Massaoua, au nord de l'Ăthiopie, en 1541 pour soutenir le negus GelawdĂ©wos, successeur de Dawit II. Ils remportent un premier succĂšs en franchissant lâAmba-SĂ©nĂ©ĂŻti, puis arrivent dĂ©but avril 1542 au sud de Mekele oĂč ils se retranchent devant le gros des troupes de Gragn. En deux batailles au nord de lâAmba Alagi, ils dĂ©bandent les musulmans, et blessent lâiman Ahmed. Mi-avril, ils atteignent la plaine dâOfala, au sud du lac Achangui, alors que la saison des pluies arrive.
Pendant ce temps, Ahmed al Ghazi reconstitue ses troupes et y adjoint 900 mousquetaires et dix canons reçus dâArabie, du pacha des Turcs de ZĂ©bid. Il reprend lâoffensive avant la saison sĂšche et met les Portugais en dĂ©route Ă la bataille de Wofla () : deux cents survivants se replient vers le Simien avec la reine et le prĂȘtre catholique JoĂŁo Bermudes. Leur chef, Dom Christophe de Gama, fils de Vasco de Gama, restĂ© en arriĂšre, est capturĂ© et torturĂ© avant dâĂȘtre dĂ©capitĂ©.
En octobre, le negus Gelawdewos rĂ©ussit Ă joindre ses troupes et les Portugais, tandis qu'Ahmed al Ghazi, sĂ»r de son succĂšs, a congĂ©diĂ© ses alliĂ©s turcs et regagnĂ© ses quartiers prĂšs du lac Tana. L'annĂ©e suivante, les troupes de Harar sont surprises et dĂ©cimĂ©es par le nĂ©gus Gelawdewos Ă OuaĂŻna-Dega, prĂšs du lac Tana, en fĂ©vrier 1543. Ahmed al Ghazi y est tuĂ© dâune balle de mousquet par le Portugais Pero de Lian. PrivĂ©s de leur chef, ses soldats se dispersent et sont taillĂ©s en piĂšces dans leur fuite vers lâAdal.
MalgrĂ© quelques tentatives, les successeurs de Ahmad (vizir âAbbas, emir Nur ibn al-Wazir Mujahid et sultan Muhammad) ne parviennent pas Ă reprendre la guerre et les territoires perdus. Il finirent par abandonner Harar pour s'installer dans l'Awsa[13].
Notes et références
- R. Michael Feener, Islam in World Cultures: Comparative Perspectives, ABC-CLIO, 2004), p. 219.
- Saheed A. Adejumobi, The History of Ethiopia, Greenwood Publishing Group, (lire en ligne), p. 178
- Chekroun [2013].
- EncyclopÊdia Universalis, « AHMED IBN IBRAHIM AL-GHAZI GRAGNE », sur EncyclopÊdia Universalis (consulté le )
- Saheed A. Adejumobi, The History of Ethiopia, Greenwood Press, 2006, p. 178)
- Adejumobi, p. 291.
- Marie-Laure Derat et al., chap. 9 « L'Ăthiopie chrĂ©tienne et islamique », dans François-Xavier Fauvelle (dir.), L'Afrique ancienne : De l'Acacus au Zimbabwe, Belin, coll. « Mondes anciens », , 678 p. (ISBN 978-2-7011-9836-1).
- Chekroun [2013], chapitre 4, p. 169 passim.
- Chekroun [2013], p. 173.
- Jean Doresse, L'empire du PrĂȘtre-Jean : L'Ăthiopie mĂ©diĂ©vale, vol. 2, Plon, (prĂ©sentation en ligne)
- AndrĂ© Caquot, «Histoire Amharique de Grañ et des Galla», Annales d'Ăthiopie, 1957, voir en ligne sur PersĂ©e.
- E. J. van Donzel, Anqasa Amin, Brill Archive, (présentation en ligne).
- Chekroun [2013], p. 129.
Annexes
Bibliographie
- AmĂ©lie Chekroun, Le « Futuh al-Habasa » : Ă©criture de l'histoire, guerre et sociĂ©tĂ© dans le Bar Sa'ad ad-din (Ăthiopie, XVIe siĂšcle) (thĂšse d'histoire sous la direction de Bertrand Hirsch), UniversitĂ© Paris I, , 482 p. (lire en ligne)
- HervĂ© Pennec, Des jĂ©suites au royaume du prĂȘtre Jean (Ăthiopie), Paris, Centre culturel Calouste Gulbenkian, , 372 p.
Articles connexes
- Syndrome de Gragne
- Guerre adalo-Ă©thiopienne (1527-1543)
- JoĂŁo Bermudes (1500-1575)