Affaire Riggs
L'affaire Riggs est le nom utilisé de manière informelle au Chili pour les poursuites judiciaires menées contre Augusto Pinochet et d'autres sous l'accusation de détournement de fonds publics, en raison de la découverte de comptes bancaires secrets détenus dans la Riggs Bank aux États-Unis. L'affaire est identifiée par le code 1649-2004.
Contexte
Le , le Washington Post révèle que le sous-comité permanent du Sénat des États-Unis chargé des enquêtes a découvert des mouvements suspects à la Riggs Bank, l'une des banques les plus prestigieuses de Washington. Cette enquête, menée dans le cadre du Patriot Act destiné à suivre la piste du financement du terrorisme international, révèle qu'Augusto Pinochet a détenu plusieurs comptes secrets à la Riggs Bank depuis 1994.
Lors de l'enquête préliminaire, 125 comptes bancaires sont découverts, d'un montant estimé à 27 millions de dollars, dont plusieurs ont été ouverts après que le juge espagnol Baltasar Garzon ait ordonné le gel de ses fonds dans le monde entier[1].
Par la suite, de nombreuses enquêtes sont réalisées par la presse nationale chilienne sur divers comptes courants détenus à l'étranger par Pinochet, tous cachés sous divers pseudonymes, et il est également dévoilé que la Riggs aurait aidé Pinochet à créer deux sociétés fantômes dans les Bahamas[2].
L'affaire
Les premières procédures judiciaires
Au vu du contexte, le Conseil de la Défense de l'État, chargé de représenter l'État du Chili dans les procédures judiciaires, dépose une plainte contre Augusto Pinochet le . L'information sur l'affaire Riggs est confiée à Sergio Muñoz, qui s'en occupe jusqu'en lorsqu'il quitte cette fonction pour intégrer la Cour suprême.
Le , le juge Muñoz ordonne l'arrestation de Monica Ananias, ancienne secrétaire d'Augusto Pinochet, et d'Oscar Aitken, son exécuteur testamentaire. Dans le même temps, il demande la levée de l'immunité dont bénéficiait Pinochet en sa qualité d'ancien Président de la République. Les infractions qui lui sont reprochées sont l'évasion fiscale, la négociation avec conflit d'intérêts et la falsification de passeports. Enfin, le , l'immunité de Pinochet lui est retirée pour quatre infractions : fraude fiscale, utilisation de faux passeports, fausses déclaration sous serment et contournement de mesures conservatoires[1].
Désignation du juge Cerda
En , le juge Carlos Cerda se charge de l'affaire. Pablo Rodriguez Grez, l'avocat de la famille Pinochet tente d'interjeter un recours en implication personnelle contre Carlos Cerda[3]. Le lundi , Carlos Munoz émet l'avis qu'il n'y a aucune raison de le déclarer impliqué personnellement. La date limite pour en faire appel était le samedi de la même année. Pablo Rodriguez choisit de ne pas interjeter appel, et donc, la décision étant confirmée, Carlos Cerda prend en charge l'affaire le [4].
Après être resté en dehors de l'affaire Riggs du fait de formalités de procédure, Carlos Cerda ordonne une série de mandats d'arrêt et de perquisitions contre la famille de Pinochet ainsi que plusieurs de leurs collaborateurs. Au total, 23 arrestations dont ordonnées et toutes sont menées à bien, sauf celle contre Oscar Aitken, ancien exécuteur testamentaire de Pinochet, qui était censé être à Viña del Mar et qui n'a pu être localisé[5].
Pablo RodrÃguez Grez, Raúl Tavolari, Hugo Ortiz de Philippi, Luis ValentÃn Ferrada et Luis Pacull[6] déposent en septembre une série de recours judiciaires pour annuler la décision du magistrat. Cependant, peu après, l'avocate Marta Escanilla Meneses[7] et son avoué Adolfo Barrientos Vasquez, représentant Mortimer Jofre Azuaga, sollicitent la liberté sous caution. Bientôt, Carlos Cerda lui-même ordonne la libération provisoire de tous les accusés, y compris Oscar Aitken[8].
Par la suite, le vendredi , suite à recours en amparo et par décision unanime, plusieurs poursuites sont déclarées sans effet par la cinquième chambre de la Cour d'appel de Santiago, les bénéficiaires étant Lucia Hiriart, ses cinq fils (Augusto, LucÃa, Jacqueline, Maria Veronica et Marco Antonio), et une dizaine d'autres accusés, dont M. Patricio Madariaga et le colonel de l'armée Mortimer Jofré Azuaga.
Dans le texte de la décision, il est dit qu'« il n'est pas observé que les défendeurs aient eu sciemment et volontairement l'objectif criminel de s'approprier des fonds publics ». LucÃa Hiriart déclare à la Televisión Nacional de Chile : « Je pense que la justice a prévalu, parce que ce qu'a fait le juge Cerda était quelque chose d'inhabituel ». Alfonso Insulza, avocat de la partie demanderesse, déclare quant à lui faire appel auprès de la Cour suprême du Chili. Deux recours en amparo sont rejetés, ceux présentés par Gustavo Collao et Eduardo Castillo. Ces derniers, Augusto Pinochet Hiriart et Monica Ananias restent poursuivis[9].
Sources
Notes et références
- (es) « CronologÃa del caso Riggs », El Mundo,‎
- (es) « Pinochet: CrÃmenes y mitos », La Nación,‎ , p. 56 (n° spécial)
- L'article 194 du Code de l'organisation des cours chiliennes prévoit qu'un juge peut perdre sa compétence pour implication personnelle déclarée, l'article 195 de la même loi prévoit les motifs d'implication personnelle.
- (es) « Caso Riggs: el arriesgado golpe del juez Cerda », La Tercera,‎ , p. 6 - partie Reportajes.
- Caso Riggs: el arriesgado golpe del juez Cerda, op. cit., p. 6-8.
- El Mercurio, 7 octobre 2007, p. 10
- « La abogada revelación », El Mercurio, 18 novembre 2007, p. 10 : Cela a été la révélation de la journée. Ce mercredi, les procureurs et les avocats de la défense dans l'affaire de détournement de fonds publics concernant 23 ex-collaborateurs de feu le général Augusto Pinochet ont été agréablement surpris après intervention de l'avocate Marta Escanilla Meneses, qui défend le colonel de l'armée Mortimer Jofré.
- (es) « Otorgan la libertad provisional a los familiares de Pinochet que fueron detenidos », El Mundo,‎ (lire en ligne)
- (es) AFP, « Vuelco en caso de familia Pinochet: Corte anula los cargos por malversación » (version du 29 octobre 2007 sur Internet Archive), sur es.noticias.yahoo.com, 26/10/2007