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Élisabeth Bouissonade

Élisabeth Bouissonade, ou Boissonnade (autre forme du nom plus usité en Languedoc), surnommée "la Branlaïre" est connue pour avoir été à la tête d'une sédition de femmes à Montpellier au XVIIe siècle[1] - [2]. Elle est morte pendue en place publique le .

Élisabeth Bouissonade
Biographie
Naissance
Date inconnue
Décès
SĂ©pulture
Surnom
La BranlaĂŻre
Activité

Contexte

Les causes de la révolte qui s'est déroulée à Montpellier de fin juin à sont incertaines. La raison la plus souvent mise en avant est un impôt extraordinaire levé en 1643 à l'occasion du couronnement de Louis XIV. Pourtant s'il s'agit d'une taxe supplémentaire pour les habitants de la ville, cela ne suffit pas à expliquer un mouvement de révolte de la population. C'est avant tout l'importance de la somme à prélever qui aurait indigné les habitants, et son injustice puisqu'elle visait plus particulièrement artisans et domestiques. C'est dans le caractère injuste de cet impôt qu'il faut trouver les raisons de la révolte. Par ailleurs, les femmes furent la cible de rumeurs autour de cet impôt. Un bruit, lancé par les artisans, courut dans la population que la taxe serait proportionnelle au nombre d'enfants, et qu'on la rendrait permanente[3]. L'historien Jean-Luc Laffont avance l'hypothèse que les femmes, encouragées par leurs maris artisans, et connaissant l'hésitation des magistrats à intervenir lors des révoltes populaires, pensaient s'en tirer avec des peines moins sévères que les hommes[4]. La colère face à la levée de plus en plus importante de taxes se cristallisa autour de la figure des fermiers généraux[3] - [5].

RĂ©volte

Ă€ Montpellier, le 29 juin 1645, autour de la figure d'Élisabeth Bouissonade, 400 Ă  500 femmes de "basse condition" s’émeuvent. Elles pourchassent Ă  travers la ville les très impopulaires «partisans » ou fermiers gĂ©nĂ©raux chargĂ©s de collecter l’impĂ´t, brĂ»lant leurs papiers et leurs maisons[6]. Le , la rĂ©volte prend un tournant dĂ©cisif avec la mort de deux passants dans la rue oĂą habitent Eudes Massia, trĂ©sorier de la bourse et père du receveur gĂ©nĂ©ral des finances, et Jean Dupuy, commis au "recouvrement des taxes faites pour l'heureux Ă©vènement de Sa MajestĂ© Ă  la couronne"[7]. La troupe tire sur la foule ; mais les hommes rallient leurs Ă©pouses et devant la dĂ©termination des manifestants, les soldats se replient dans la citadelle. 3 000 personnes barricadent les ruelles de la citĂ©. L’émeute dure 4 jours ; on relève une vingtaine de morts. Louis XIV encore mineur Ă  l'Ă©poque, s’est Ă©mu de l’affaire[8]. En 1647, le roi accorde son pardon, qui ne s’étend pas Ă  Élisabeth Bouissonade : elle est pendue en place publique le 9 mars en compagnie d'une nommĂ©e Marie Chassarde. Ayant demandĂ© Ă  ĂŞtre enterrĂ©es en sĂ©pulture chrĂ©tienne, toutes deux sont inhumĂ©es dans les ruines de l'Ă©glise Saint-Firmin[1]. L’exĂ©cution de coupables pour l'exemple fut imposĂ©e par les officiers royaux aux magistrats montpelliĂ©rains. En tant qu'inconnue, Ă©trangère Ă  la ville, cĂ©libataire, "La BranlaĂŻre" Ă©tait la victime idĂ©ale : sa condamnation devait inspirer la crainte tout en Ă©vitant le risque de raviver la rĂ©volte chez les MontpelliĂ©rains[3].

Même si son identité et ses origines restent à approfondir, l'historienne Maguelone Nouvel-Kirschléger la considère comme une "incarnation de l'héroïsme populaire au féminin"[9]. Elle reste un symbole des luttes de femmes[3].

Hommage et notoriété

Courageuse occitane qui s’est battue jusqu’à la mort pour vivre dignement, Élisabeth Bouissonade a acquis la dimension d’un symbole des luttes féminines. Un centre d'accueil pour les femmes victimes de violences conjugales a reçu en 1979 le nom de Foyer Elisabeth Bouissonnade à Montpellier[3]. Celui-ci porte aujourd'hui le nom exact de Centre d'hébergement et de réinsertion sociale (CHRS) pour femmes seules ou avec enfants, victimes de violences conjugales[10].

Son nom figure également sur les tramways montpelliérains

Tramway de la ville de Montpellier (Ligne 2), figurant un hommage Ă  Elisabeth Bouissonnade

Sources

  • Minute de la lettre des consuls adressĂ©e au Parlement de Toulouse,
  • MĂ©morial consulaire de Pierre Sabatier, greffier et notaire communal
  • Charles d'Aigrefeuille, Histoire de la ville de Montpellier, 1739
  • Dom Vic & Dom Vaissette, Histoire GĂ©nĂ©rale du Languedoc, 1840-1846
  • Alexandre Germain, Les commencements du règne de Louis XIV et la Fronde Ă  Montpellier, AcadĂ©mie des Sciences et Lettres de Montpellier. MĂ©moires de la section des lettres. 1re sĂ©rie, tome III, 1853-1863, p. 579-602
  • AndrĂ© Delort, MĂ©moires inĂ©dits d’sur la Ville de Montpellier au XVIIe Siècle (1621-1693), Montpellier, SociĂ©tĂ© des bibliophiles de Montpellier, 1876, p. 129
  • Pierre Coquelle, La sĂ©dition de Montpellier en 1645, d'après des documents inĂ©dits des Archives des Affaires Ă©trangères, Annales du Midi, no 20, 1908, p. 66-78
  • Jean Baumel, Montpellier au cours des XVIe et XVIIe siècles. Les guerres de Religion (1510-1685), Montpellier, Ă©ditions Causse, 1976
  • Nicolas Jean, La rĂ©bellion française. Mouvements populaires et conscience sociale (1661-1789), Paris, Éditions du Seuil, 2002
  • Maguelone Nouvel-Kirschleger, « De Marie de Montpellier Ă  HĂ©lène Mandroux, une histoire de Montpellier au fĂ©minin », dans Christian Amalvi et RĂ©my Pech (dir.), Histoire de Montpellier, Toulouse, Privat, 2016, p. 797-820.
  • Maguelone Nouvel-Kirschleger, Montpellier. CitĂ© des belles dames, Toulouse, Privat, 2016, 180 p.
  • Jeanine Redon, "Les femmes et la rĂ©volution Ă  Montpellier", dans Le bulletin historique de la ville de Montpellier, no 40, , p. 68-81

Notes et références

  1. Jeannine Redon, « Les femmes et la révolution à Montpellier », Bulletin historique de la Ville de Montpellier, vol. 40,‎ , p. 66-81 (ISSN 0758-332X)
  2. « Languedoc-Roussillon, terre courage », sur LExpress.fr, (consulté le )
  3. Isabelle Bostedt, « Elisabeth Bouissonade et la révolte populaire de 1645 à Montpellier », Bulletin historique de la Ville de Montpellier, vol. 40,‎ , p. 38-51 (ISSN 0758-332X)
  4. Jean-Luc Laffont, « Les femmes dans les révoltes populaires en France à l'époque moderne », Académie des Sciences et Belles Lettres de Toulouse,‎
  5. Alexandre Germain, Jean-Baptiste Giroud, « Les commencements du règne de Louis XIV et la Fronde à Montpellier », Académie des Sciences et Lettres de Montpellier., 1ère série, vol. tome III « Mémoires de la section des lettres. »,‎ 1853-1863, p.579-602
  6. Beik, William, 1941-, Absolutism and society in seventeenth-century France : state power and provincial aristocracy in Languedoc, Cambridge University Press, (ISBN 0-521-26309-3, 9780521263092 et 0521367824, OCLC 10780791, lire en ligne)
  7. Sous-fonds : Affaire Dupuy, extrait des registres du conseil du roi (6 septembre 1653). Fonds : FF non coté. Archives municipales de Montpellier.
  8. Barthes, Marie. et Impr. Mondial livre), Décider de vivre : lutte contre la violence familiale : genèse du centre d'hébergement Élizabeth Bouissonnade, Nîmes, Champ social éd, dl 2008, 147 p. (ISBN 978-2-35371-023-2, OCLC 470973279, lire en ligne), p. 121-127
  9. Cholvy, GĂ©rard., Histoire de Montpellier, Privat, (ISBN 2-7089-4728-1 et 9782708947283, OCLC 12187333, lire en ligne)
  10. « CHRS Elisabeth Bouissonnade », sur www.montpellier.fr (consulté le )
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