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Æterni Patris

Æterni Patris (« du Père éternel »)[1] est une encyclique du pape Léon XIII sur la « philosophie chrétienne ». Datée du , elle a pour but de promouvoir l’étude de la philosophie de saint Thomas d'Aquin et la prescrit pour la formation sacerdotale dans les séminaires. Elle est à l'origine d’un renouveau que l’on appelle le « néo-thomisme ».

Æterni Patris
Blason du pape LĂ©on XIII
Encyclique du pape LĂ©on XIII
Date 4 août 1879
Sujet « Sur la philosophie chrétienne »
Chronologie
La Foi et la Raison, fresque allégorique de Ludovico Seitz surmontée d'une citation d’Æterni Patris : « la splendeur des vérités divines, en pénétrant l'âme, vient en aide à l'intelligence elle-même », Vatican.

Contexte

Au contraire de son prédécesseur, le bienheureux Pie IX, qui n'avait fait que condamner avec force les erreurs et les philosophies modernes, l’attitude de Léon XIII est pro-active: il propose des remèdes[2], au nombre desquels figure le renouveau de l’étude de saint Thomas.

Déjà en 1859, alors qu'il était évêque de Pérouse, le futur Léon XIII avait fondé dans son diocèse une Académie de saint Thomas d’Aquin. L’encyclique poursuit le même but qu'elle. Mais elle cherche en outre à engager toute l’Église catholique romaine dans une entreprise qui vise à renouveler la pensée catholique par un retour à la philosophie de Thomas d'Aquin, et cela pour faire face aux « maux de la société » et aux « fausses opinions » de la société contemporaine.

Le titre

Le titre complet figurant dans la version publiée en ligne par le Vatican est Aeterni Patris. Lettre encyclique de sa Sainteté le Pape Léon XIII sur la philosophie chrétienne[3].

La question du titre est cependant délicate et plus complexe qu'il n'y paraît[4]. Les mots Aeterni Patris sont simplement les deux premiers du texte de l'encyclique et ne sauraient constituer un titre à proprement parler. En outre, à l'époque de Léon XIII ne portaient de loin pas toutes un titre. Et quand titre il y avait, il n'était pas forcément donné par le pape qui était l'auteur de la lettre[4].

Or, comme le montre Georges van Riet, un titre a finalement été donné au texte: « De philosophia Christiana ad mentem Sancti Thomae Aquinaîis Doctoris Angelici in scholis catholicis instauranda », ce que van Riet traduit par « Sur la restauration de la philosophie chrétienne dans les écoles catholiques selon l'esprit du Docteur Angélique saint Thomas d'Aquin ». Or, ce titre est un programme que le pape invite les évêques à appliquer. Van Riet souligne que ces derniers ne peuvent se contenter de lire la lettre. Il leur faut mettre en œuvre ce programme dans les écoles catholiques, car elles sont censées relever de leur autorité, afin de restaurer la philosophie chrétienne selon l'esprit de saint Thomas[5]. À preuve que cela a été compris ainsi, les réponses que le pape a reçues des évêques et dont la presse de l'époque s'est en partie fait l'écho. Ainsi, l'archevêque de Reims lui transmet-il ses « plus respectueuses félicitations au sujet de l'encyclique qu'Elle [sa Sainteté le pape] vient de publier sur la restauration de la philosophie chrétienne »[6].

Contenu

Selon Æterni Patris, « la famille et la société civile (…) jouiraient d'une paix plus parfaite et d'une sécurité plus grande si, dans les académies et les écoles, on donnait une doctrine plus saine et plus conforme à l'enseignement de l'Église, une doctrine telle qu'on la trouve dans les œuvres de Thomas d'Aquin », ce « rempart et gloire de la foi catholique ».

Avec un retour au thomisme, Léon XIII cherche à établir un vocabulaire commun et des principes de base grâce auxquels les catholiques, et en particulier les prêtres, puissent faire face aux problèmes du jour.

À la suite de cette encyclique, Léon XIII crée le l'académie de Saint-Thomas d'Aquin à l'Angelicum et ordonne la publication de l'édition critique — dite léonine — des œuvres complètes du « Doctor angelicus ».

NĂ©o-thomisme

Peu d’encycliques eurent une influence plus grande sur l'évolution de la pensée catholique qu'Æterni Patris. Le mouvement thomiste, d’abord conservateur et restaurateur des valeurs du passé, encouragea de nombreuses études sur les philosophies et théologies qui caractérisaient le Moyen Âge. Une époque vue non plus péjorativement comme « moyenâgeuse », mais bien comme une période de foi chrétienne solide, soutenue par une grande créativité intellectuelle.

Ces recherches apportèrent un renouveau plus riche et moderne qu'espéré. Le néo-thomisme dépassa largement le cadre de saint Thomas d’Aquin et, soutenu par d’autres disciplines modernes, produisit des penseurs et intellectuels de grande qualité et parfaitement à l’aise dans le monde des philosophes du XXe siècle, tels Réginald Garrigou-Lagrange, Étienne Gilson, Jacques Maritain, Joseph Maréchal, Martin Grabmann et d’autres.

Notes et références

  1. En latin, l'expression est au génitif (cas du complément du nom), et en français, la lettre commence par « Le Fils unique du Père éternel, etc. ».
  2. De même, douze ans plus tard, dans Rerum Novarum (1891), il suggère des remèdes aux problèmes sociaux, contrairement à Pie IX qui en était resté à la seule condamnation du socialisme.
  3. « Aeterni Patris. Lettre encyclique de sa Sainteté le Pape Léon XIII sur la philosophie chrétienne. », sur vatican.va (consulté le )
  4. van Riet 2003.
  5. van Riet 2003, p. 48-49.
  6. van Riet 2003, p. 49.

Voir aussi

Bibliographie

  • Serge-Thomas Bonino, « Le fondement doctrinal du projet lĂ©onin : Aeterni Patris et la restauration du thomisme », dans Philippe Levillain et Jean-Marie Ticchi (Dir.), Le pontificat de LĂ©on XIII, Renaissances du Saint-Siège ? (actes du colloque «Le pontificat de LĂ©on XIII : renaissances du Saint-Siège?», organisĂ© Ă  Paris, 16-17 octobre 2003), Rome, École française de Rome (no 368), , 523 p. (ISBN 2-728-30754-7, lire en ligne), p. 267-274
  • Georges Van Riet, « Le titre de l'encyclique «Aeterni Patris». Note historique », Revue Philosophique de Louvain, 4e sĂ©rie, vol. 80, no 45,‎ , p. 35-63 (lire en ligne)

Liens externes

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