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Vol Air Moorea 1121

Le vol Air Moorea 1121 est une catastrophe aĂ©rienne ayant eu lieu le en PolynĂ©sie française. Un Twin Otter de la compagnie Air Moorea s'Ă©crase peu aprĂšs le dĂ©collage de l’aĂ©rodrome de Temae dans l’üle de Moorea. Les vingt occupants, le pilote et les dix-neuf passagers sont morts. L'avion devait rejoindre l’aĂ©roport de Papeete, situĂ© Ă  18 kilomĂštres du lieu du dĂ©collage[1]. Le procĂšs correctionnel s'ouvre le 8 octobre 2018[2].

Vol Air Moorea 1121
F-OIQI, l'appareil impliqué, ici quelques mois avant l'accident
F-OIQI, l'appareil impliqué, ici quelques mois avant l'accident
Caractéristiques de l'accident
Date
TypeRupture du cĂąble de commande de la gouverne de profondeur
SiteMoorea, Polynésie française
CoordonnĂ©es 17° 29â€Č 18″ sud, 149° 45â€Č 44″ ouest
Caractéristiques de l'appareil
Type d'appareilDHC 6-300 Twin Otter
CompagnieAir Moorea
No d'identificationF-OIQI
Phasemontée initiale
Passagers19
Équipage1
Morts20 (dont 4 disparus)
Blessés0
Survivants0

Géolocalisation sur la carte : Polynésie française
(Voir situation sur carte : Polynésie française)

Appareil

L'avion Ă©tait un DHC 6-300 Twin Otter immatriculĂ© F-OIQI. Il avait effectuĂ© son premier vol le 2 fĂ©vrier 1979, et le 17 novembre 2006 pour la compagnie Air Moorea. Il avait passĂ© un contrĂŽle technique le , soit deux semaines avant l'accident. Il a volĂ© 30 833,51 heures et effectuĂ© 55 044 cycles. Le matin du crash, il avait dĂ©jĂ  effectuĂ© trois allers-retours.

Équipage

Tous les vols d'Air Moorea - sauf en cas de formation - s'effectuent avec un seul membre d'Ă©quipage, le pilote, en accord avec la lĂ©gislation en vigueur. Celui-ci, Michel Santurenne, Ă©tait ĂągĂ© de 53 ans et avait effectuĂ© 3 514,5 heures de vol, dont 110,3 heures pour Air Moorea depuis le 14 mai 2007. Il travaillait pour Air Moorea depuis trois mois. L'autopsie pratiquĂ©e sur son corps n'a pas rĂ©vĂ©lĂ© d'infarctus ou de malaise diabĂ©tique. Le lendemain du drame, Christian Vernaudon, le prĂ©sident-directeur gĂ©nĂ©ral d'Air Tahiti, la maison-mĂšre d'Air Moorea, a annoncĂ© que l'Ă©quipage serait « jusqu'Ă  nouvel ordre » composĂ© d'un pilote et d'un copilote « pour des raisons psychologiques afin de rassurer les passagers, mais Ă©galement pour rĂ©pondre Ă  l'Ă©moi suscitĂ© parmi les autres pilotes ». L'avocat de la compagnie aĂ©rienne mentionne que le rapport de l'autopsie « rĂ©vĂšle un Ă©tat de santĂ© dĂ©ficient du pilote, un certain nombre de certificats mĂ©dicaux qui viennent corroborer le doute sur l’hypothĂšse d’un malaise de l’intĂ©ressĂ© au moment du vol »[3].

DĂ©roulement du vol

  • La mise en route est autorisĂ©e Ă  11 h 53 min 22 s. Le pilote rappelle les consignes de sĂ©curitĂ© aux passagers.
  • Le contrĂŽleur autorise l'avion Ă  rouler vers le point d'arrĂȘt Bravo de la piste 12.
  • L'autorisation de dĂ©coller est donnĂ©e Ă  12 h 00 min 06 s. Le pilote accĂ©lĂšre Ă  12 h 00 min 12 s.
  • L'appareil dĂ©colle Ă  12 h 00 min 35 s.
  • Les volets sont rentrĂ©s Ă  12 h 00 min 58 s.
  • A 12 h 01 min 07 s, la vitesse de rotation des hĂ©lices est rĂ©duite. L'appareil est Ă  350 pieds d'altitude.
  • A 12 h 01 min 09 s, on entend le pilote pousser un juron : "oh putain"[4]. Deux alarmes GPWS se dĂ©clenchent. Le rĂ©gime des hĂ©lices est augmentĂ©, puis il y a quatre autres alarmes GPWS.
  • L'avion percute la surface de l'eau Ă  12 h 01 min 20 s Ă  185 km/h, aprĂšs 1,87 km de vol et Ă  environ 700 mĂštres de la cĂŽte.

Quelques baigneurs, notamment les clients d'un hÎtel situé en face du lieu du crash, et des plaisanciers ont été témoins du crash. Leurs témoignages sont parfois contradictoires.

  • « Le Twin Otter a dĂ©collĂ©. Il n'Ă©tait pas trĂšs haut. Le temps Ă©tait magnifique, mais, d'un seul coup, les moteurs ont fait un drĂŽle de bruit puis se sont carrĂ©ment coupĂ©s alors que l'avion Ă©tait encore en phase de dĂ©collage. Puis l'avion est tombĂ©, pas comme une pierre mais en suivant sa trajectoire. L'impact n'a pas Ă©tĂ© fort. J'ai vu la queue flotter Ă  la verticale quelques instants puis elle s'est enfoncĂ©e »
  • « L'avion a semble-t-il eu des difficultĂ©s Ă  s'Ă©lever. Puis il a plongĂ© et on a entendu le bruit d'une explosion »

Un mécanicien d'une compagnie d'hélicoptÚre a affirmé de son cÎté avoir vu l'avion chuter net, une trentaine de secondes aprÚs le décollage.

Bilan

StÚle commémorative en mémoire des victimes du crash aérien d'Air Moorea.

Sur les 20 personnes Ă  bord, 14 corps ont Ă©tĂ© repĂȘchĂ©s immĂ©diatement aprĂšs l'accident par des pĂȘcheurs qui se trouvaient dans la zone au moment du crash. Ceux-ci ont attachĂ© certains corps Ă  des bouĂ©es afin Ă©viter qu'ils ne coulent. Six pĂȘcheurs ont reçu, quelques jours aprĂšs le drame, une mĂ©daille des mains du prĂ©sident du Pays, Gaston Tong Sang. Un quinziĂšme corps, celui de FrĂ©dĂ©ric Donzel, a Ă©tĂ© retrouvĂ© par le navire cĂąblier Île de RĂ© prĂšs d'un mois aprĂšs le drame. Parmi les victimes il y a, entre autres, le pilote, cinq membres du ministĂšre polynĂ©sien de l'Environnement, deux hauts fonctionnaires de l'Union europĂ©enne, deux touristes australiens et cinq habitants de Moorea.

RĂ©actions officielles

Le prĂ©sident de la PolynĂ©sie française, Gaston Tong Sang, qui s'est immĂ©diatement rendu sur place et a survolĂ© les lieux de la catastrophe, a Ă©voquĂ© un « deuil cruel pour la PolynĂ©sie comme pour son gouvernement ». MichĂšle Alliot-Marie, ministre de l'IntĂ©rieur, a quant Ă  elle « fait part Ă  toutes les familles touchĂ©es par ce drame de ses sincĂšres condolĂ©ances et de son soutien attristĂ© ». Christian Estrosi, secrĂ©taire d'État chargĂ© de l'Outre-Mer, s'est rendu sur place et a lancĂ© une couronne de fleurs Ă  la mer. Jean-Louis Borloo et Dominique Bussereau, chargĂ© des Transports, ont tenu « Ă  exprimer leur profonde tristesse aux familles touchĂ©es par cette catastrophe » et ont soulignĂ© qu'« une enquĂȘte est en cours afin de dĂ©terminer les causes exactes de l'accident ».

Deux jours de deuil ont été décrétés en Polynésie.

Causes de l'accident

Une enquĂȘte judiciaire, confiĂ©e Ă  la gendarmerie, a Ă©tĂ© lancĂ©e. En parallĂšle, une Ă©quipe du BEA s'est rendu en PolynĂ©sie pour tenter de comprendre les causes de l'accident. Le cockpit voice recorder, un appareil qui enregistre tous les bruits du poste de pilotage a Ă©tĂ© localisĂ©, Ă  une profondeur comprise entre −430 et −600 m. Les opĂ©rations de rĂ©cupĂ©ration de l'appareil ont Ă©tĂ© effectuĂ©es par le navire cĂąblier Île de RĂ©.

L'analyse des boites noires ne révÚle rien de particulier. Le pilote prononce peu de paroles, mais on y entend seulement un juron avant que l'appareil ne plonge[4].

Le 7 dĂ©cembre, un rapport d'Ă©tape indique que c'est la rupture d'un cĂąble de la commande de profondeur qui serait Ă  l'origine du crash. D'importantes zones d'usures ont Ă©tĂ© constatĂ©es sur le cĂąble au niveau du guignol arriĂšre, du passage de la cloison arriĂšre et d'un guide cĂąble fixĂ© sur un montant vertical. Par ailleurs cette dĂ©couverte a entraĂźnĂ© la publication d'une recommandation de sĂ©curitĂ© concernant l'inspection de ces cĂąbles sur certains Twin Otter. La rupture du cĂąble aurait pu ĂȘtre entraĂźnĂ©e par la rentrĂ©e de volets qui occasionne un fort couple Ă  piquer et implique une forte rĂ©action du pilote sur la gouverne de profondeur[5].

Le cĂąble avait Ă©tĂ© installĂ© le 11 mars 2005 et devait ĂȘtre remplacĂ© le 2 octobre 2007, par ailleurs la derniĂšre inspection en date de ce cĂąble avait eu lieu le 22 fĂ©vrier 2007[5]. Une enquĂȘte minutieuse a montrĂ© que la rupture de ce cĂąble n’était pas liĂ©e Ă  une seule cause. Le directeur du BEA, Paul Louis Arsalian, dĂ©clare que « les examens et les essais ont montrĂ© que dans l’état d’usure oĂč il Ă©tait, il ne pouvait pas casser sous l"effet des efforts en vol ». Ce constat a amenĂ© les enquĂȘteurs Ă  identifier un troisiĂšme Ă©lĂ©ment : le jet blast.

Le jet blast est le terme anglais qui dĂ©signe le souffle des rĂ©acteurs de gros porteurs lors du roulage. L'enquĂȘte a dĂ©terminĂ© que les nuits prĂ©cĂ©dant l'accident, le Twin Otter Ă©tait parquĂ© non loin des zones de passage d'appareils de type A340. Ce souffle trĂšs puissant a fait bouger les commandes de profondeur de l'appareil, ce qui a fragilisĂ© un peu plus le cĂąble incriminĂ©.

Le BEA a Ă©tabli que l’enchaĂźnement de trois phĂ©nomĂšnes ont conduit Ă  la rupture de la commande de profondeur qui a entraĂźnĂ© l'accident :

  • l'usure importante du cĂąble au droit d'un guide-cĂąble ;
  • phĂ©nomĂšne extĂ©rieur, vraisemblablement du jet blast, provoquant la rupture de plusieurs torons ;
  • rupture du ou des derniers torons sous l’effet des efforts en vol sur la commande de profondeur.

Le rapport cite également des éléments qui auraient pu contribuer à l'accident :

  • l'absence d’information et d’entraĂźnement des pilotes sur une perte de contrĂŽle en tangage ;
  • l'omission des inspections spĂ©ciales par l’exploitant ;
  • la prise en compte incomplĂšte par le constructeur et l’autoritĂ© de navigabilitĂ© du phĂ©nomĂšne d’usure ;
  • la prise en compte incomplĂšte par les autoritĂ©s de navigabilitĂ©, les exploitants aĂ©roportuaires et les exploitants d’aĂ©ronef des risques liĂ©s au souffle des rĂ©acteurs ;
  • les rĂšgles de remplacement des cĂąbles en acier inoxydable sur une base calendaire, sans prise en compte de l’activitĂ© de l’avion au regard de ce type d’exploitation.

Un procÚs en indemnisation commence le 4 décembre 2014[6].

Remise en cause du rapport du BEA

Le rapport du BEA demeure sĂ©vĂšrement contestĂ© par Bernard Dubucq, un expert aĂ©ronautique, qui s'appuie sur les conclusions issues du premier rapport officiel du Centre d'essais des propulseurs (CEPR) de Saclay[4]. Ses travaux d’analyses montrent que la rupture des cĂąbles des gouvernes est post-impact, Ă©cartant ainsi la thĂšse de la rupture du cĂąble en vol[7] sur des constats effectuĂ©s Ă  partir du renflouement de l’appareil. Il apparaĂźt que les dĂ©chirures observĂ©es sur l’appareil au niveau du cadran et au niveau du cadre dans l’empennage, lequel traverse le cĂąble, sont post-impact ; et dĂ©montrent ainsi que le cĂąble Ă©tait nĂ©cessairement encore sous tension. Le cĂąble ne peut ĂȘtre Ă  l’origine de l’accident[3].

Compte-tenu des Ă©lĂ©ments mĂ©dicaux dont dispose l’avocat d’Air Moorea, « Un malaise du pilote n'est pas Ă  exclure »[3].

Le procĂšs du crash d’Air Moorea dĂ©butera le 8 octobre 2018[8].

ProcĂšs

Le procÚs qui s'est déroulé du 8 au 25 octobre a permis aux prévenus comme aux parties civiles de s'exprimer sur l'accident du Twin Otter F-OIQI du 9 aout 2007. Le Procureur de la République a requis de lourdes peines à l'encontre des prévenus puisque les audiences ont mis en lumiÚre des graves dysfonctionnements dans la maintenance de la compagnie Air Moorea. Tous les avocats des prévenus ont demandé une relaxe pour leurs clients.

Le dĂ©libĂ©rĂ© a Ă©tĂ© rendu le 22 janvier 2019. Les peines suivantes ont Ă©tĂ© prononcĂ©es: Freddy Chanseau, ex-directeur gĂ©nĂ©ral d’Air Moorea, 3 ans de prison dont 18 mois avec sursis, Andria Ratzimbasafy, chef du groupement pour la sĂ©curitĂ© de l’aviation civile, Jacques Gobin, directeur technique d’Air Moorea, et StĂ©phane Loisel, 3 ans de prison, dont 2 avec sursis, Jean-Pierre Tinomano et Didier QuĂ©meneur, 2 ans de prison avec sursis. Guy Yeung, directeur de l’aviation civile, a Ă©tĂ© relaxĂ©[9].

Hommage aux victimes du crash lors du procĂšs en octobre 2018 Ă  Papeete

MĂ©dias

L'accident a fait l'objet d'un épisode dans la série télé Air Crash nommé « Terreur au paradis » (saison 13 - épisode 9).

Notes et références

  1. Aviation Safety
  2. « Crash d’Air Moorea : trois semaines d’audience pour un procĂšs hors normes », Radio1 Tahiti,‎ (lire en ligne, consultĂ© le )
  3. TNTV, « Air Moorea : 9 ans aprĂšs le crash, une nouvelle hypothĂšse », Tahiti Nui TĂ©lĂ©vision - Les informations de Tahiti, les vidĂ©os de PolynĂ©sie,‎ (lire en ligne, consultĂ© le )
  4. RaphaĂ«l Pierre, « Crash du Twin Otter d'Air Moorea, neuf ans dĂ©jĂ  », TAHITI INFOS, les informations de Tahiti,‎ (lire en ligne, consultĂ© le )
  5. Guillaume Steuer, « Rapport sur l'accident d'Air Moorea », Air et Cosmos, no 2104,‎ , p. 34 (ISSN 1240-3113)
  6. « Crash d'Air Moorea », Tahiti Infos,‎ (lire en ligne)
  7. « Crash d'Air Moorea: une nouvelle contre-expertise balaye la thĂšse de la rupture du cĂąble en vol - PolynĂ©sie la 1Ăšre », PolynĂ©sie la 1Ăšre,‎ (lire en ligne, consultĂ© le )
  8. « Le procĂšs du crash d’Air Moorea s’ouvre en octobre - PolynĂ©sie la 1Ăšre », PolynĂ©sie la 1Ăšre,‎ (lire en ligne, consultĂ© le )
  9. « Crash d'Air Moorea : des peines allant jusqu’à 3 ans de prison », PolynĂ©sie la 1Ăšre,‎ (lire en ligne, consultĂ© le )

Liens externes

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