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Vie de GĂ©rard Fulmard

Vie de GĂ©rard Fulmard est un roman de Jean Echenoz paru le aux Ă©ditions de Minuit.

Vie de GĂ©rard Fulmard
Auteur Jean Echenoz
Pays France
Genre roman / polar
Éditeur Minuit
Date de parution
Nombre de pages 240
ISBN 9782707345875

Historique du roman

Genèse du roman

Écrivain gĂ©ographique[1], Jean Echenoz dĂ©clare que les bases de l'Ă©criture de ce roman tiennent notamment Ă  son envie d'« aller explorer un quartier de Paris qu’il connaissait mal Â» (le huppĂ© 16e arrondissement de Paris et en particulier les frondaisons des hameaux et villas privĂ©es) Ă  laquelle s'est mĂŞlĂ©e la tentation d'utiliser la tragĂ©die classique en dĂ©tournant l'intrigue de Phèdre de Racine[2] - [3]. S'attachant Ă©galement une nouvelle fois au genre du polar, ce roman et son hĂ©ros font aussi Ă©chos au personnage d'Eugène Tarpon, le dĂ©tective crĂ©Ă© par Jean-Patrick Manchette qu'Echenoz apprĂ©cie tout particulièrement[4].

Selon Jean Echenoz, le titre de son roman est liĂ© Ă  son admiration pour Vies minuscules (1984) de son ami Pierre Michon[3]. Le nom du hĂ©ros principal, GĂ©rard Fulmard, fait rĂ©fĂ©rence – en y adjoignant toutefois un « d Â» – Ă  l'oiseau marin Fulmar qui prĂ©sente tout Ă  la fois la particularitĂ© de vomir sur son agresseur lorsqu'il est en danger[5] et d'avoir dĂ©jĂ  Ă©tĂ© prĂ©sent dans un prĂ©cĂ©dent roman Ă©chenozien, Je m'en vais (1999), mais aussi chez un autre auteur des Ă©ditions de Minuit avec Jean-Philippe Toussaint dans L'Appareil photo (1988)[6] qui en fait le patronyme de l'un des deux moniteurs d'auto-Ă©cole[7] jouant ainsi sur l'intertextualitĂ© de diffĂ©rents romans contemporains.

Ventes et distinctions

Vie de GĂ©rard Fulmard paraĂ®t quatre ans après le dernier roman de l'auteur, et constitue l'un des livres les plus attendus de la rentrĂ©e de [3] - [8] - [9]. Les Éditions de Minuit en font un premier tirage Ă  55 000 exemplaires, soit l'un des plus importants en quantitĂ© de la saison[10]. Le roman entre la semaine de sa parution Ă  la huitième place des meilleures ventes de livres[11].

En , le roman est retenu dans la liste des trois finalistes du prix Alexandre-Vialatte[12], puis, en , il figure dans la liste des dix livres en lice pour le prix du Livre Inter[13].

Résumé

Enseigne de l'agence Duluc, rue du Louvre, Ă  Paris.

Ancien steward et fraichement reconverti en dĂ©tective privĂ©, GĂ©rard Fulmard ouvre un « cabinet d'assistance » sur un coup de tĂŞte, Ă  son domicile de la rue Erlanger Ă  Paris, Ă  l'image de l'agence Duluc qui l'a fait rĂŞver. Il est approchĂ© par des membres de la FĂ©dĂ©ration populaire indĂ©pendante (FPI) pour s'enquĂ©rir des faits et gestes de Louise Tourneur, la belle-fille de Franck Terrail – fondateur et prĂ©sident d'honneur du FPI –, au moment oĂą sa mère et secrĂ©taire gĂ©nĂ©rale du parti, Nicole Tourneur, est enlevĂ©e et possiblement morte. Le parti, dĂ©chirĂ© entre factions concurrentes et ambitions personnelles, peine Ă  trouver un successeur Ă  sa cheffe disparue. Cependant Fulmard est pire qu'un amateur, incapable d'ĂŞtre discret ou mĂ©thodique dans ses enquĂŞtes et techniques d'investigations qu'il improvise allègrement. Il Ă©choue lamentablement dans sa surveillance de Louise Tourneur.

La guerre de succession fait rage et la faction Mozzigonacci doit s'organiser pour écarter la jeune Louise Tourneur de l'accession au pouvoir que son beau-père, éperdument amoureux, lui promet au sein de ce parti endogamique. Pour cela, ils décident d'éliminer Terrail et par un jeu de chantage qu'il ne peut refuser, à la suite d'un lourd dossier compromettant, chargent Gérard Fulmard de tuer du président d'honneur du parti. Fulmard concocte donc un plan d'assassinat profitant d'un examen IRM que doit passer Franck Terrail dans les prochains jours.

Dans l'intervalle, Louise Tourneur s'est envolée avec son nouvel amant sur l'île de Sulawesi en Indonésie pour s'éloigner du panier de crabes de son parti mais finir dans la gueule d'un grand requin blanc. La donne politique au sein du FPI bascule alors brusquement et Terrail apparait désormais, dans ce nouveau contexte, comme un point d'équilibre pour les conspirateurs regroupés autour de Mozzigonacci. Surtout que Nicole Tourneur réapparait, bien vivante, après qu'elle a organisé son propre enlèvement pour faire, en vain, parler d'elle dans les médias et remonter sa courbe de popularité. C'est en fait l'indifférence qui l'accueille à son retour, de ses proches (mari inclus) et de l'opinion. La faction Mozzigonacci place alors un homme de main auprès de Terrail afin de le protéger de l'assassinat qu'ils ont eux-mêmes fomenté, ne pouvant joindre Fulmard, disparu dans la nature.

Gérard Fulmard, son plan d'action établi, s'introduit dans le cabinet médical lors de l'examen de Franck Terrail, mais au moment de l'abattre oublie le cran de sécurité de son pistolet, laissant le temps au garde du corps de lui tirer dessus. Fuyant, il finit par s'écrouler, une balle dans le corps, sur le pont Mirabeau sous lequel coule la Seine.

RĂ©ception critique

Pour Livres Hebdo, le roman de Jean Echenoz est « plus sarcastique et noir que jamais Â»[14]. JĂ©rĂ´me Garcin, dans Le Nouvel Obs, considère que dans ce roman « Jean Echenoz broie du noir avec un plaisir contagieux, un humour mĂ©thodique et un sĂ©rieux exhilarant Â» dans ce que le critique littĂ©raire qualifie d'invention d'un nouveau style : le « polar marabout (bout d’ficelle, selle de cheval…) Â»[15]. Selon Nathalie Crom, dans TĂ©lĂ©rama, « Jean Échenoz crĂ©e un homme sans qualitĂ©s mais hĂ©ros de notre temps Â» dans un roman conçu avec « une prĂ©cision virtuose[16] Â». Pierre Vavasseur du Parisien juge que le roman est Ă©crit avec « l'encre de malice Â» par « l'un de nos plus grands Ă©crivains Â», retenant Vie de GĂ©rard Fulmard dans la liste des huit romans de la rentrĂ©e de janvier[17]. Enfin, Thierry Gandillot dans Les Échos voit dans le dernier livre du romancier un « polar parodique et ludique, un pur concentrĂ© du gĂ©nie Ă©chenozien qu'on quitte trop tĂ´t, trop vite et Ă  regret[5] ».

L'ensemble de la tribune littĂ©raire du Masque et la Plume Ă©met des avis très positifs sur le roman considĂ©rant que l'auteur s'autorise de grandes libertĂ©s narratives « dev[enant] totalement punk Â» selon Nelly Kaprièlian, avec « Ă©criture romanesque et comique exemplaire Â» pour Arnaud Viviant qui souligne aussi la parentĂ© (ancienne) avec les romans de Jean-Patrick Manchette (et en particulier le personnage d'Eugène Tarpon), « une langue gĂ©niale [et] poĂ©tique » mettant de cĂ´tĂ© l'intĂ©rĂŞt pour l'intrigue et les personnages pour Olivia de Lamberterie avec « un cĂ´tĂ© SAS, dans le mode exĂ©cutoire Â» selon Jean-Claude Raspiengeas[18].

Plus rĂ©servĂ©, Philippe Lançon de LibĂ©ration, mĂŞme s'il note la « virtuositĂ© descriptive Â» de certaines scènes, souligne toutefois « la double tentation de l’auteur : l’abus de procĂ©dĂ©s linguistiques, faisant du roman une vĂ©ritable petite encyclopĂ©die du genre, et ce mĂ©lange de raffinement et de familiaritĂ© Â» propre au roman Ă©chenozien dans lequel « la vie et l’émotion ont de plus en plus de mal Ă  passer [... avec] aucune place pour la foi dans le rĂ©cit » provoquant dĂ©sormais chez le lecteur un phĂ©nomène de saturation, de satiĂ©tĂ©[19]. Sur la mĂŞme ligne, Nelly Kaprièlian dans Les Inrocks juge, malgrĂ© certains moments « jubilatoires Â» du roman, le « refus punk [d'Echenoz] de se prendre au sĂ©rieux aussi admirable qu'un brin lassant[20] » tout comme la critique du journal littĂ©raire En attendant Nadeau qui considère qu'« Ă  force de jouer avec son lecteur, d’entretenir cette lecture dĂ©ceptive qui fait aussi le sel du rĂ©cit et qui fait son talent, Jean Echenoz entretient une distance qui finit par rendre la lecture elle aussi parfois distante » regrettant in fine « une certaine amertume Â», nouvelle chez le romancier[7].

Éditions

Notes et références

  1. Petit atlas de la géographique echenozienne, dossier Jean Echenoz, in Balise–Bibliothèque publique d'information, 7 décembre 2017.
  2. Florence Bouchy, « Jean Echenoz : "J’ai fini par avoir une vĂ©ritable affection pour mon hĂ©ros GĂ©rard Fulmard" Â», Le Monde, 1er janvier 2020.
  3. [vidĂ©o] d'HĂ©lène Roussel, « Jean Echenoz : "Un livre, c'est chaque fois relancer les dĂ©s, on ne sait pas ce qui va sortir" Â», grand entretien du 7/9, France Inter, 3 janvier 2020.
  4. « Echenoz, biographe de l’ordinaire », La Grande Table présenté par Olivia Gesbert, France Culture, 15 janvier 2020.
  5. Thierry Gandillot, « Jean Echenoz : un cauchemar nommĂ© Fulmard Â», Les Échos, 15 janvier 2020.
  6. Jean-Philippe Toussaint, L'Appareil photo, Les Éditions de Minuit, coll. « Double Â» no 45, 2007 (ISBN 9782707320056), p. 43.
  7. Gabriella Napoli, « Echenoz Ă  distance Â», En attendant Nadeau, no 94, 2 janvier 2020.
  8. Thomas Vincy, « La Fnac choisit 20 romans de la rentrĂ©e d'hiver 2020 Â», Livres Hebdo, 26 dĂ©cembre 2019.
  9. « RentrĂ©e littĂ©raire de janvier 2020 : voici notre sĂ©lection de romans Â», TĂ©lĂ©rama, 11 janvier 2020.
  10. Thomas Vincy, « 481 romans pour la rentrĂ©e d'hiver 2020 Â», Livres Hebdo, 6 dĂ©cembre 2019.
  11. « Classement des ventes de livres : Fin de règne pour Astérix et Obélix », La Dépêche, 10 janvier 2020.
  12. Isabelle Contreras, « Les finalistes du prix Alexandre-Vialatte 2020 Â», Livres Hebdo, 12 mars 2020.
  13. « DĂ©couvrez les romans en compĂ©tition pour le Prix du Livre Inter 2020 Â», France Inter, 7 avril 2020.
  14. Olivier Mony, « Le poisson rouge et les piranhas Â» Livres Hebdo, 13 dĂ©cembre 2019.
  15. JĂ©rĂ´me Garcin, « Echenoz s’explose : comment broyer du noir avec plaisir Â», Le Nouvel Obs, 2 janvier 2020.
  16. Nathalie Crom, « Dans Vie de GĂ©rard Fulmard, Jean Échenoz crĂ©e un homme sans qualitĂ©s mais hĂ©ros de notre temps Â», TĂ©lĂ©rama, 1er janvier 2020.
  17. Pierre Vavasseur, « LemaĂ®tre, Pennac, Reza… nos 8 coups de cĹ“ur de la rentrĂ©e littĂ©raire Â», Le Parisien, 12 janvier 2020.
  18. « Vie de GĂ©rard Fulmard de Jean Echenoz : un polar "romanesque" et "comique" d'après Le Masque Â», verbatim de l'Ă©mission Le Masque et la Plume, France Inter, 12 janvier 2020.
  19. Philippe Lançon, « Vie de gĂ©rard Fulmard, polar au rayon loser Â», LibĂ©ration, 3 janvier 2020.
  20. Nelly Kaprièlian, « Vie de GĂ©rard Fulmard : Jean Echenoz, Ă©crivain en toute libertĂ© Â», Les Inrocks, 3 janvier 2020.

Liens externes

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