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Triggerman

Le Triggerman est un échantillon fréquemment utilisé dans le hip-hop du sud des États-Unis, issu du morceau Drag Rap du groupe de hip-hop The Showboys.

Contexte

En 1986, le groupe de hip-hop The Showboys, originaire de Hollis, dans le Queens, et composé d'amis d'enfance de Run–DMC, sort la chanson Drag Rap. Le morceau relate, sous la forme d'un narratif ultraviolent construit comme un épisode de série télévisée, une guerre que se mènent deux chefs de gang à l'époque de la prohibition, avant de se faire arrêter[1] - [2] - [3].

La production de Drag Rap est caractéristique du style electro de l'époque[4]. Son refrain au xylophone, que les Showboys qualifient de « bones » (l'ossature du morceau), est joué par l'ingénieur du son Brian Perkins à la main, puisque la boîte à rythmes LinnDrum avec laquelle le groupe travaille n'arrive pas à supporter le nombre de données du beat 34 pistes qu'ils ont composé[2].

Si la chanson n'obtient pas un franc succès dans sa région d'origine (elle se vend à moins de 5 000 exemplaires), elle devient très populaire dans le sud des États-Unis, particulièrement à La Nouvelle-Orléans et à Memphis[1] - [2] - [3], où elle est distribuée par Select-O-Hits[5].

Description

Le Triggerman sample la chanson Drag Rap des Showboys. Plusieurs parties du morceau sont samplées : ses séquences de roulement de batterie au Roland TR-808, son sample du générique de la série Badge 714, ses sons de xylophone, sa scansion du mot « alright » et son interpolation du pont sifflé issu du thème d'une publicité pour le déodorant Old Spice[1] - [6].

Le nom du Triggerman vient du pseudonyme de l'un des rappeurs des Showboys, Triggerman[7].

Histoire

À Memphis

À Memphis, le premier DJ à ramener le Triggerman dans le sud des États-Unis est DJ Spanish Fly[2]. Ce sample influence considérablement la buck music de Memphis[8]. Il est notamment utilisé par Three 6 Mafia[1]. Dans les années 1990, les danseurs de hip-hop dansent couramment le gangsta walk et le buck-jumping sur le Triggerman[2] - [8].

À La Nouvelle-Orléans

Le Triggerman est utilisé de manière récurrente dans le rap de La Nouvelle-Orléans, notamment dans la bounce music, et est régulièrement considéré comme la « colonne vertébrale » du rap de La Nouvelle-Orléans[1] - [6] - [9]. Les néo-orléanais dansent le pussy pop (un ancêtre du twerk) sur le Triggerman, ainsi que le twerk[2] - [8]. Le producteur néo-orléanais Mannie Fresh l'utilise dans plus de 30 morceaux[10].

Selon le rappeur et DJ néo-orléanais Ice Mike, avant d'apparaître dans la musique enregistrée, le Triggerman aurait été utilisé pour la première fois à La Nouvelle-Orléans par les disc jockeys DJ Lowdown et DJ Irv, et le rappeur T. Tucker aurait été le premier à rapper par-dessus[3]. Lors de son apparition dans les boîtes de nuits néo-orléanaises, les DJ bouclent le refrain au xylophone du Triggerman et scratchent par-dessus, tandis que les fêtards s'emparent du micro pour chanter sur le beat[8].

Une des premières utilisations enregistrées du Triggerman à La Nouvelle-Orléans est la chanson Where Dey At? d'MC T. Tucker et DJ Irv, sortie en 1991. La chanson récolte un vrai succès local[3]. Le Triggerman est également utilisé sur la chanson Ask Them Hoes du 39 Posse, et un débat existe au sujet duquel de ces deux morceaux l'a utilisé en premier[8]. Durant les années 1990, les producteurs de hip-hop néo-orléanais additionnent au Triggerman une boucle du breakbeat Brown Beats de Cameron Paul, sorti en 1987, ce qui donne le dat beat, régulièrement utilisé dans la bounce music[7].

Au milieu des années 1990, le Triggerman commence à être moins utilisé, mais continue tout de même à apparaître fréquemment, notamment chez des artistes et des labels de La Nouvelle-Orléans cherchant une audience locale[3].

Le Triggerman et les Showboys

Les Showboys n'apprennent la popularité de leur chanson qu'en 1992, six ans après sa sortie, quand un organisateur de concerts les appelle pour venir jouer à Memphis. Après un concert à Memphis, ils entament une tournée dans le sud des États-Unis, à Memphis, La Nouvelle-Orléans et Houston. Malgré cette popularité, ils ne perçoivent que peu d'argent de cette chanson et ne perçoivent aucun droit d'auteur des chansons qui échantillonnent leur morceau[8]. D'après l'Abcdr du son, ils intentent plusieurs procès qui ne leur rapportent pas grand chose[1].

En mai 2019, les Showboys reçoivent chacun un Pop Music Award pour les samples utilisés par Drake sur ses chansons Nice for What et In My Feelings[10].

En mars 2021, le duo accuse la société d'édition musicale Protoons de ne pas avoir respecté leur contrat en ne leur reversant pas 50 % des profits de l'exploitation de leur musique, et dépose une plainte réclamant à Protoons 1 000 000 $[11].

En mai 2021, les droits d'auteur de Drag Rap reviennent intégralement aux Showboys[11].

Utilisations notables

Le Triggerman est utilisé notablement dans les morceaux suivants :

D'après AllHipHop, en 2021, Drag Rap a été échantillonné dans plus de 175 morceaux[11].

Dans la culture populaire

Dans la chanson Roll With ‘Em, Mannie Fresh fait référence au Triggerman[6].

En 1998, dans la chanson Big Ballin', Big Tymers font référence au Triggerman[8].

Références

  1. David, « Triggerman, retour sur un classique du Sud » Accès libre, sur Abcdr du Son, (consulté le )
  2. (en) Benjamin Meadows-Ingram, « Loop History: The Showboys “Drag Rap,” AKA Triggerman » Accès libre, sur Red Bull Music Academy Daily, (consulté le )
  3. Matt Miller, Bounce : rap music and local identity in New Orleans, (ISBN 978-1-61376-199-1 et 1-61376-199-6, OCLC 877012357, lire en ligne)
  4. Sylvain Bertot, Rap, hip-hop : trente années en 150 albums de Kurtis Blow à Odd Future, (ISBN 978-2-36054-051-8, 2-36054-051-3 et 978-2-36054-105-8, OCLC 885017160, lire en ligne)
  5. Bill C. Malone, Charles Reagan Wilson, James G., Jr. Thomas et Ann J. Abadie, The new encyclopedia of Southern culture. Volume 12, Music, (ISBN 978-1-4696-1666-7, 1-4696-1666-1 et 978-1-4696-1667-4, OCLC 864900201, lire en ligne)
  6. (en) Andrew Noz, « The 50 Best New Orleans Rap Songs » Accès libre, sur Complex, (consulté le )
  7. (en) Lauron J. Kehrer, Queer Voices in Hip Hop: Cultures, Communities, and Contemporary Performance, University of Michigan Press, (ISBN 978-0-472-07568-3, DOI 10.3998/mpub.11306619, lire en ligne)
  8. Roni Sarig, Third coast : OutKast, Timbaland, and how hip-hop became a southern thing, Da Capo Press, (ISBN 978-0-306-81430-3 et 0-306-81430-7, OCLC 83609447, lire en ligne)
  9. (en) Naomi Zeichner, « “Black and Yellow” Sounds an Awful Lot Like The Triggerman Beat » Accès libre, sur The Fader, (consulté le )
  10. (en-US) Tiana Kennell, « Drake, New Orleans Bounce: The Shreveport resident, rapper behind it all » Accès libre, sur Shreveport Times, (consulté le )
  11. (en-US) « The Showboys In $1 Million Legal War Over "Drag Rap" Song That Spawned Hits For Drake, Chris Brown & Young Thug » Accès libre, sur AllHipHop, (consulté le )
  12. (en) « MySpace de DJ Spanish Fly » Accès libre, sur MySpace
  13. (en-US) Michael Stroneski, « Classic Hip Hop Samples: The Showboys Drag Rap » Accès libre, sur mvsicthovght (consulté le )
  14. (en) « D.J. Jimi's 'Bitches (Reply)' sample of The Showboy's 'Drag Rap' » Accès libre, sur WhoSampled
  15. Jean-Pierre, ... Labarthe et Impr. Cogetefi), Gangsta gumbo : une anthologie du rap sudiste via Houston, Memphis, Atlanta, Miami, Jackson & La Nouvelle-Orléans, Camion blanc, impr. 2012 (ISBN 978-2-35779-173-2 et 2-35779-173-X, OCLC 816549618, lire en ligne)
  16. « Black Menace – Ghetoasnigga (EP) » Accès libre, sur Discogs
  17. (en) « Bounce! Baby, Bounce! by Everlasting Hitman » Accès libre, sur WhoSampled
  18. « 2 Blakk – The Game » Accès libre, sur Discogs
  19. (en) « U.N.L.V. - Drag ’Em “N” Tha River Lyrics » Accès libre, sur Genius
  20. (en) Rob Markman, « Chris Brown, Meek Mill Crash Travis Porter's 'Ayy Ladies' Video » Accès libre, sur MTV, (consulté le )
  21. « Pourquoi "Go Crazy" de Chris Brown et Young Thug est le plus gros hit de Breezy depuis 2008 ? » Accès libre, sur Mouv', (consulté le )
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