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ThomaĂŻs de Lesbos

ThomaĂŻs (ΞωΌαΐς) de Lesbos (909/13-947/51) est une sainte de l'Église Byzantine. Elle est nĂ©e Ă  Lesbos vers 909 ou 913 selon les sources et meurt Ă  Constantinople, oĂč elle passe la plus grande partie de sa vie, entre 947 et 951.

Sainte ThomaĂŻs de Lesbos
L'Ăźle de Lesbos, au Nord-Est de la mer ÉgĂ©e
Biographie
Naissance
Entre et
Lesbos
DĂ©cĂšs
Activité
Période d'activité
Xe siĂšcle
Autres informations
Étape de canonisation
Membre de
FĂȘte
January 3 (en)

Son histoire se retrouve principalement dans deux rĂ©cits hagiographiques anonymes. L’un d’entre eux remonte probablement au Xe siĂšcle, mais nous est parvenu sous la forme d’une copie du XIVe siĂšcle, alors que la pĂ©riode de rĂ©daction du second est indĂ©terminĂ©e[1].

Ces récits hagiographiques laissent à penser qu'il s'agit d'une femme de la classe moyenne, puisqu'elle semble pouvoir se déplacer librement dans la métropole constantinopolitaine, ce qui n'est pas le cas pour les femmes des classes supérieures, qui sortent peu.

Mariée tardivement selon l'une de ses vitae (aux alentours de 24 ans[2], alors qu'habituellement les jeunes byzantines se marient entre 12 et 14 ans), elle pourrait avoir gardé sa virginité malgré son mariage (elle n'a pas eu d'enfants), ce qui, combiné à ses noces tardives, semble témoigner d'une foi intense et de son désir de consacrer sa vie à Dieu.

MalgrĂ© une vie qui ne suit pas le tracĂ© habituel des saintes byzantines - elle n'a en effet jamais adoptĂ© l'habit monastique ni pratiquĂ© une vie d'extrĂȘme ascĂšse - ThomaĂŻs de Lesbos fut reconnue comme sainte sur la base de la prĂ©monition de sa propre mort et des miracles qu'elle a opĂ©rĂ©s avant et aprĂšs sa mort, notamment par des exorcismes et par la guĂ©rison de prostituĂ©es. On y peut y ajouter son mode de vie extrĂȘmement vertueux et les mauvais traitements qu’elle subit aux mains de son mari, qui font d’elle une martyr.

Thomaïs ne semble pas avoir fait l'objet d'un culte répandu ; elle est absente du Synaxaire de Constantinople et l'on ne dispose d'aucune iconographie la concernant.

La vita anonyme

Origines

Les parents de ThomaĂŻs, Michel et Kale, sont dĂ©crits en dĂ©tails par le premier des deux rĂ©cits. L’auteur les a jugĂ©s suffisamment importants pour leur accorder le quart du texte environ. La sainte est appelĂ©e « le fruit plus noble encore d’une racine noble »[1] (trad. libre de l'anglais) .

L’auteur de la vita plus ancienne dĂ©crit Michel (ΜÎčÏ‡Î±ÎźÎ»), le pĂšre, comme un homme disposant de « toutes les vertus dignes d’ĂȘtre nommĂ©es et louĂ©es » (trad. libre de l'anglais) et d’une grande sagesse et intelligence tout en restant humble et pieux, frĂ©quentant l’Église et lisant frĂ©quemment les Saintes Écritures. Son train de vie « plaĂźt Ă  Dieu » (trad. libre de l'anglais). La mĂšre, Kale (Îșαλός, « Bien »), partage les qualitĂ©s de son mari. Elle est « belle par son caractĂšre et plus encore par son Ăąme » (trad. libre de l'anglais) en plus d’ĂȘtre intelligente et d’une conduite exemplaire[1].

Ensemble, le couple, rĂ©sident de l’üle de Lesbos, forme « une Ă©quipe trois fois heureuse et bĂ©nie » (trad. libre de l'anglais) mais est incapable d’enfanter et tente de remĂ©dier Ă  ce problĂšme par la priĂšre et la dĂ©votion. L’auteur dĂ©crit avec prĂ©cision leurs troubles : « [La stĂ©rilitĂ©] les agitait fortement, les perturbait profondĂ©ment, et dĂ©chirait leur Ăąmes » (trad. libre de l'anglais). À la suite de longues supplications, Kale reçoit en rĂȘve la visite de la Vierge Marie, qui lui annonce qu’elle donnera naissance Ă  une fille qui « chassera sa consternation » (trad. libre de l'anglais) . Cette vision annonce la naissance de ThomaĂŻs[1].

Jeunesse et mariage

L’hagiographie donne peu de dĂ©tail sur la vie de ThomaĂŻs jusqu’à ses vingt-quatre ans. Peu aprĂšs sa naissance, sa famille Ă©migre dans la rĂ©gion du Bosphore. Un Ă©loge plus tardif, rĂ©digĂ© par Constantin Acropolite au XIIIe siĂšcle, situe leur rĂ©sidence dans la ville de ChalcĂ©doine[3]. L’éducation de ThomaĂŻs lui apprend la dĂ©votion et les vertus de ses parents, et l’on dit d’elle que sa beautĂ© extĂ©rieure en vient Ă  reflĂ©ter sa beautĂ© intĂ©rieure. Elle devient un modĂšle de vie, Ă  l’image de ses parents, qui l’élĂšvent avec « discipline, comprĂ©hension et de frĂ©quentes rĂ©primandes » (trad. libre de l'anglais)[1].

La ville de Constantinople

À vingt-quatre ans, ThomaĂŻs est forcĂ©e par ses parents Ă  prendre un Ă©poux. L’auteur insiste sur sa volontĂ© de rester vierge afin de se consacrer Ă  sa foi, mais loue Ă©galement son respect de l’institution du mariage. Elle est donc mariĂ©e Ă  StĂ©phane (ÎŁÏ„Î­Ï†Î±ÎœÎżÏ‚) et part vivre Ă  Constantinople. Jusqu’à la fin de sa vie, elle s’y efforcera de nourrir et d’habiller les pauvres en fabriquant elle-mĂȘme des vĂȘtements, tout en continuant de se dĂ©vouer au culte. Elle le fait avec ardeur, dĂ©passant en vertu ses parents et offrant tout son temps et toute son Ă©nergie . StĂ©phane, « qui ne dĂ©sire pas le Christ mais aime le monde et s’attache Ă  ses choses » (trad. libre de l'anglais), est toutefois un tyran cruel : il bat rĂ©guliĂšrement ThomaĂŻs, se moque d’elle et l’insulte pour la dissuader de ses bonnes Ɠuvres. La sainte fait preuve d’une grande rĂ©silience face Ă  ces mauvais traitements et ne cesse pas ses activitĂ©s. L’auteur n’hĂ©site pas Ă  la qualifier de martyr et son mari de Satan[1].

Miracles du vivant de ThomaĂŻs

ThomaĂŻs est l’auteure de nombreux miracles, dont plusieurs posthumes, intĂ©grĂ©s Ă  son hagiographie. La chronologie du rĂ©cit n’étant pas prĂ©cisĂ©e, il est impossible de savoir dans quelle pĂ©riode de sa vie ils se manifestent.

Exorcisme d’un homme

Au cours d’une procession hebdomadaire menant de l’église de Blachernai, au nord des murs thĂ©odosiens, Ă  celle du quartier de ChalkopratĂ©ia, un homme surgit devant ThomaĂŻs et rĂ©clame d’elle qu’elle manifeste la grĂące divine pour le libĂšrer du dĂ©mon qui le harcĂšle. Elle s’exĂ©cute en lui frottant les tempes avec de l’huile, l’exorcisant immĂ©diatement[1].

GuĂ©rison d’un malade

Le second consiste en la guĂ©rison d’un malade atteint de paralysie et d’une infection Ă  la gorge. Cet homme, un eunuque du monastĂšre d’Ankourios , est visitĂ© en rĂȘve par un ĂȘtre qui n’est ni dĂ©crit ni nommĂ©. Celui-ci lui conseille de trouver « ThomaĂŻs la bĂ©nie » et de s’oindre de l’eau avec laquelle elle se sera lavĂ© les mains. Le moine s’exĂ©cute et est immĂ©diatement guĂ©ri[1].

Exorcisme d’une femme

Le troisiĂšme miracle est trĂšs similaire au premier. Alors que ThomaĂŻs priait au MonastĂšre des HodĂšges, une femme possĂ©dĂ©e par un dĂ©mon se jette Ă  ses pieds et la supplie de la dĂ©livrer. Encore une fois, c’est par l’usage d’huile que la sainte s’exĂ©cute et exorcise la victime[1].

Guérison de prostituées

Le quatriĂšme et le cinquiĂšme miracle sont d’un autre type. ThomaĂŻs recommande Ă  une prostituĂ©e souffrant d’une hĂ©morragie de cesser ses activitĂ©s, lui expliquant que son problĂšme est en fait un signe divin. AprĂšs avoir obtenu la promesse de la victime, ThomaĂŻs la soigne. La mĂ©thode par laquelle elle le fait n’est pas prĂ©cisĂ©e . Cette histoire diffĂšre notamment des prĂ©cĂ©dentes en ce que c’est ThomaĂŻs qui approche la miraculĂ©e et non l’inverse. La guĂ©rison suivante est assez similaire, mais s’opĂšre sur une femme qui, ayant entendu parler de la prĂ©cĂ©dente, visite ThomaĂŻs pour ĂȘtre libĂ©rĂ©e d’un cancer du sein[1].

Mort

Les mauvais traitements de StĂ©phane, attribuĂ©s Ă  son opposition aux bonnes Ɠuvres de ThomaĂŻs, auront Ă©ventuellement raison d’elle. Elle s’éteint le premier janvier, jour auquel elle est fĂȘtĂ©e. Le texte lui attribue la prĂ©monition de sa propre mort. Elle aurait dit Ă  son mari : « Frappe ce corps qui bientĂŽt pĂ©rira et retournera Ă  la terre » lors de l’un de ses Ă©pisodes de violence.

ThomaĂŻs avait pour volontĂ© d’ĂȘtre enterrĂ©e Ă  l’extĂ©rieur de l’église du monastĂšre de Ta Mikra Romaiou (΀α ΜÎčÎșÏÎŹ ÎĄÏ‰ÎŒÎ±ÎŻÎżÏ…, « Les Petits Romains ») jusqu’à ce que se produisent des miracles aux alentours de sa tombe, aprĂšs quoi son corps pourra ĂȘtre dĂ©placĂ© Ă  l’intĂ©rieur. Selon l’auteur, ceux-ci se manifestent avant que quarante jours ne passent[1].

La localisation du monastÚre de Ta Mikra Romaiou nous est aujourd'hui inconnue, mais il devait se situer au Sud-Ouest de Constantinople. C'est également là que se retire Kale, la mÚre de Thomaïs, à la suite de la mort de Michel[1]. Le témoignage d'un pÚlerin russe, au quatorziÚme siÚcle, y atteste la présence d'une tombe associée au nom de Sainte Thomaïs, mais lui attribue une biographie différente (voir Dans la description anonyme de Constantinople)[4].

Exorcisme d’un homme

Un homme originaire de Nicomédie, harcelé par un démon, est libéré aprÚs avoir prié et passé un peu de temps aux alentours du cercueil de Thomaïs[1].

Exorcisme d’une femme

Une femme pieuse, tourmentĂ©e par un dĂ©mon, est libĂ©rĂ©e aprĂšs avoir pleurĂ© sur la tombe de ThomaĂŻs et s’ĂȘtre frappĂ© la tĂȘte contre elle.

Exorcisme d’Eutychianos

Un homme originaire de Constantinople, Eutychianos, est victime de magiciens et de dĂ©mons, qui l’affligent de paralysie. AprĂšs avoir constatĂ© l’impuissance de ses physiciens, il prie et se lamente sur la tombe de ThomaĂŻs, ce qui mĂšne Ă  sa guĂ©rison complĂšte[1].

GuĂ©rison d’un Ă©pileptique

AprĂšs avoir entendu parler des nombreux miracles opĂ©rĂ©s autour de la tombe de ThomaĂŻs, un homme atteint d’épilepsie s’y rend et se retrouve guĂ©ri[1].

Divinations portant sur des objets égarés

Un pĂȘcheur, ayant perdu ses filets dans une violente tempĂȘte, visite la tombe de ThomaĂŻs et la supplie de venir Ă  son secours. La sainte lui apparaĂźt et lui indique que ses filets, maintenant emplis d’énormes poissons, se trouvent dans le faubourg de l’Hebdomon.

Dans la mĂȘme veine, un livre Ă©garĂ© du monastĂšre de Ta Mikra Romaiou est retrouvĂ© dans la tombe de ThomaĂŻs Ă  la suite d’une vision dans laquelle la sainte est apparue aux SƓurs pour le leur annoncer[1].

GuĂ©rison d’une femme

Une femme originaire de Constantinople, souffrant de crampes, est guĂ©rie aprĂšs plusieurs jours de priĂšre sur la tombe de ThomaĂŻs. Pour la remercier de ce miracle, elle Ă©rige une arche au-dessus de la sĂ©pulture. Selon l’auteur, cette arche est toujours prĂ©sente au moment oĂč il rĂ©dige son texte[1].

GuĂ©rison d’un amnĂ©sique

Un moine du nom de Symeon, ayant prĂȘtĂ© un tabouret de priĂšre Ă  l’un de ses amis, Jean, est victime de celui-ci : Ă  l’aide du Diable, il fait oublier au moine le tabouret et Ă  qui il l’a prĂȘtĂ©. ThomaĂŻs lui rĂ©vĂšle cette information dans un rĂȘve[1].

Exorcisme de Stéphane

Le dernier miracle attribuĂ© Ă  ThomaĂŻs ne concerne nul autre que son ancien mari. Celui rencontre un dĂ©mon puissant que l’auteur dĂ©crit comme un chĂątiment pour ses actions. TourmentĂ©, il se rend Ă  la tombe de ThomaĂŻs, « pleurant de maniĂšre incontrĂŽlable » (trad. libre de l'anglais), pour y prier et est Ă©ventuellement exorcisĂ©. Le rĂ©cit se termine en expliquant que les miracles de ThomaĂŻs sont trop nombreux pour ĂȘtre rĂ©citĂ©s et avec une priĂšre adressĂ©e Ă  l’empereur actuel, le nommant seulement « Romanos »[1].

Chronologie

La vita anonyme du Xe siĂšcle fut probablement rĂ©digĂ© sous Romain II. Le texte le dit porphyrogĂ©nĂšte, « nĂ© dans la pourpre », c’est-Ă -dire qu’il est nĂ© au cours du rĂšgne de l’empereur prĂ©cĂ©dent . Romain II est le seul empereur de son nom correspondant Ă  ce critĂšre. Son rĂšgne s’étendant de 959 Ă  963 et l’auteur du rĂ©cit mentionnant que les miracles de ThomaĂŻs perdurent « pendant une pĂ©riode de douze ans [et] jusqu’à ce jour », la sainte pourrait ĂȘtre nĂ©e dans l’intervalle de 909 Ă  913 et ĂȘtre morte dans celui de 947 Ă  951. Le sens du passage n’est toutefois pas certain et cette interprĂ©tation ne reste qu’une hypothĂšse[1].

Alexander Kazhdan a suggĂ©rĂ© que le texte fait rĂ©fĂ©rence Ă  Romain IV DiogĂšne, qui rĂ©gna de 1068 Ă  1071 mais n’est pas porphyrogĂ©nĂšte, en s’appuyant sur l’absence de ThomaĂŻs du Synaxaire de Constantinople, rĂ©digĂ© Ă  la fin du Xe siĂšcle, donc bien aprĂšs la mort de la sainte dans l’hypothĂšse prĂ©cĂ©dente[1].

Un dĂ©tail de la vita anonyme suggĂšre un amendement postĂ©rieur Ă  sa rĂ©daction originale : ThomaĂŻs, une fois mariĂ©e, s’adonne Ă  des jeux enfantins. Elle est alors censĂ©e avoir vingt-quatre ans, un Ăąge d’ailleurs tardif pour le mariage Ă  l’époque[2].

Dans le reste de l’hagiographie

Selon Constantin Acropolite

Constantin Acropolite a rĂ©digĂ© un Ă©loge Ă  ThomaĂŻs, mais reprend les Ă©vĂšnements du rĂ©cit anonyme prĂ©sentĂ© plus haut, en y enlevant et ajoutant quelques dĂ©tails tels que la mention du lieu d’émigration des parents de la sainte (voir Jeunesse et mariage)[5].

Dans Vie et conduite et récit partiel de miracles de la sainte et glorieuse thaumaturge Thomaïs

Ce texte, lui aussi anonyme, se retrouve dans un manuscrit du XIVe siĂšcle, l’Atheniensis. Il correspond plutĂŽt Ă  un Ă©loge qu’à une biographie, mais prĂ©sente quelques variations par rapport Ă  la vita prĂ©sentĂ©e plus haut. Dans cette version, ThomaĂŻs est une enfant solitaire qui Ă©vite ses camarades, s’attirant ainsi la colĂšre de ses parents et l’imposition du mariage. Le tout prend une allure de tragĂ©die, dans laquelle ThomaĂŻs progresse vers la saintetĂ© malgrĂ© les obstacles qui se dressent sur son chemin[6].

Dans La description anonyme de Constantinople

Le tĂ©moignage d'un pĂšlerin russe anonyme, au quatorziĂšme siĂšcle, fait mention du monastĂšre de Ta Mikra Romaiou et y confirme la prĂ©sente d'une tombe portant le nom de Sainte ThomaĂŻs. Il semble toutefois la confondre avec ThomaĂŻs d'Alexandrie, puisque c'est Ă  la biographie de cette derniĂšre qu'il fait rĂ©fĂ©rence : il raconte que la sainte est dĂ©cĂ©dĂ©e Ă  la suite d'une agression violente par le pĂšre de son mari, un pĂȘcheur parti en mer, et lui attribue le pouvoir de calmer les passions charnelles[4].

La localisation du monastĂšre de Ta Mikra Romaiou nous est aujourd'hui inconnue, mais il devait se situer au Sud-Ouest de Constantinople. C'est lĂ  que se retire Kale, la mĂšre de ThomaĂŻs, Ă  la suite de la mort de Michel[1].

Construction de la sainteté

ThomaĂŻs reprĂ©sente un cas rare en ce qu’elle a atteint le statut de sainte sans avoir intĂ©grĂ© une institution religieuse et sans vivre dans l’ascĂ©tisme. L’auteur de la vita anonyme insiste par consĂ©quent sur des notions associĂ©es Ă  la saintetĂ© : la piĂ©tĂ© et la rĂ©silience face Ă  l’adversitĂ©, incarnĂ©e en la personne de StĂ©phane[1]. Les saints laĂŻcs de l’hagiographie byzantine sont rares, mais pas inexistants. Ils sont gĂ©nĂ©ralement dĂ©finis par la piĂ©tĂ© et le don. ThomaĂŻs rejoint dans ces deux aspects le cas de Marie la Jeune, une autre femme sainte faisant preuve d’une grande gĂ©nĂ©rositĂ© et victime de mauvais traitements qui mĂšneront Ă  sa mort de la part de son mari, qui la croit coupable de diffamation et d’adultĂšre. On peut Ă©galement mentionner Saint Philateros, un homme qui partage ses richesses avec joie malgrĂ© les rĂ©primandes de sa femme. En tant qu'homme et chef de sa maisonnĂ©e, il ne s’expose toutefois Ă  aucun chĂątiment plus terrible que des railleries[7], une diffĂ©rence notable entre les saints laĂŻques et leurs homologues fĂ©minines.

Les trois saints sont caractĂ©risĂ©s par le don, mais ThomaĂŻs et Marie la Jeune y ajoutent une grande douleur physique aux mains de leur mari respectif. C’est aussi ce qui distingue ThomaĂŻs de sa mĂšre, elle aussi trĂšs pieuse sans pour autant ĂȘtre sanctifiĂ©e[1]. L’endurance face Ă  la souffrance de la violence conjugale pourrait constituer un mĂ©rite de plus pour ces personnages dans l’esprit des hagiographes. Il a d’ailleurs Ă©tĂ© suggĂ©rĂ© qu’elle puisse qualifier un personnage pour le rang de saint en raison de sa reprĂ©sentation dans les hagiographies fĂ©minines laĂŻques. En insistant sur la volontĂ© de la sainte de rester cĂ©libataire, les rĂ©cits changent le mariage en Ă©preuve Ă  surmonter[8].

Dans le cas de ThomaĂŻs, le comportement violent de son mari fait d’elle une martyr aux yeux de l’hagiographe anonyme, en plus de constituer un obstacle Ă  ses activitĂ©s charitables, donc Ă  sa pratique de la chrĂ©tientĂ©[8].

Notes et références

  1. (en) Alice-Mary Talbot, Holy Women of Byzantium : Ten Saints' Lives in English Translation, Washington, Dumberton Oaks, , 380 p. (ISBN 978-0-88402-248-0, lire en ligne), p. 291-322
  2. D'aprĂšs A. Laឯou, citĂ©e par Talbot, l'Ăąge aurait pu ĂȘtre modifiĂ© par un hagiographe tardif, ainsi qu'un passage traitant des jeux enfantins de la sainte aprĂšs son mariage le laisserait penser.
  3. Vassilis Katsaros, StĂ©phanos Efthymiadis, CharĂĄlambos Messis et Paolo Odorico, Pour une poĂ©tique de Byzance : hommage Ă  Vassilis Katsaros, Centre d'Études Byzantines, NĂ©o-HellĂ©nistiques et Sud-Est EuropĂ©ennes, École des Hautes Études en Sciences Sociales, (ISBN 978-2-9530655-8-9 et 2-9530655-8-X, OCLC 915328106, lire en ligne), p. 115
  4. (en) George P. Majeska, Russian Travelers to Constantinople in the Fourteenth and Fifteenth Centuries, Washington, DC, Dumbarton Oaks, , 463 p. (ISBN 978-0-88402-101-8, lire en ligne), p. 321-324
  5. Stephanos Euthymiadēs, Une hagiographie classicisante et son auteur : La Vie longue de sainte Thomaïs de Lesbos (BHG 2455), Paris, Diffusion de Boccard, 320 p., p. 113-131
  6. (en) Anthony Kaldellis et Stephanos Euthymiadēs, The prosopography of Byzantine Lesbos, 284-1355 A.D. : a contribution to the social history of the Byzantine province, Vienne, Verlag der Österreichischen Akademie der Wissenschaften, , 204 p. (ISBN 978-3-7001-4005-4 et 3-7001-4005-3, lire en ligne), p. 117-118
  7. Stavroula Constantinou, « Performing gender in lay saints' Lives », Byzantine and Modern Greek Studies, vol. 38, no 1,‎ , p. 24–32 (ISSN 0307-0131, DOI 10.1179/0307013113Z.00000000034, lire en ligne)
  8. (en) Angel Narro, « Domestic violence against women as a reason to sanctification in Byzantine hagiography », Studia Philologica Valentia, vol. 20, no 17,‎ , p. 111-140

Bibliographie

  • (en) Alice-Mary Talbot, Holy Women of Byzantium : Ten Saint's Lives in English translation, Dumberton Oaks, (lire en ligne)
  • (en) Angel Narro, « Domestic violence against women as a reason to sanctification in Byzantine hagiography », Studia Philologica Valentia, vol. 20, no 17,‎ , p. 111-140 (ISSN 1135-9560)
  • (en) Anthony Kaldellis et Stephanos Efthymiadis, The Prosopography of Byzantine Lesbos, 284-1355 A.D. : A Contribution to the Social History of the Byzantine Province, Verlag der Österreichischen Akademie der Wissenschaften, , 204 p. (ISBN 978-3-7001-4005-4 et 3-7001-4005-3)
  • (en) George P. Majeska, Russian Travelers to Constantinople in the Fourteenth and Fifteenth Centuries, Dumbarton Oaks, , 463 p. (ISBN 978-0-88402-101-8, lire en ligne)
  • Sophie MĂ©tivier, Économie et sociĂ©tĂ© Ă  Byzance, VIIIe – XIIe siĂšcle, vol. 1, Paris, Publication de la Sorbonne, , 303 p. (ISBN 978-2-85944-571-3, lire en ligne)
  • (en) Stavroula Constantinou, « Performing gender in lay saints' Lives », Byzantine and Modern Greek Studies, vol. 38, no 1,‎ , p. 24-32
  • Stephanos Euthymiadēs, « Une hagiographie classicisante et son auteur : La Vie longue de sainte ThomaĂŻs de Lesbos (BHG 2455) » dans Dossier Byzantins – 16 "Pour une poĂ©tique de Byzance" Hommage Ă  Vassilis Katsaros, 2015, p. 113-131 (ISSN 1637-8350)


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