Constantin Acropolite
Constantin Acropolite (ÎÏÎœÏÏαΜÏÎŻÎœÎżÏ áŒÎșÏÎżÏολίÏηÏ, Konstantinos AkropolitĂȘs en grec), nĂ© vers 1250 et mort entre 1321 et 1324, est un hagiographe byzantin.
Biographie
Constantin Acropolite est le fils de lâhistorien et homme dâĂtat Georges Acropolite (1217-1282). Il a un frĂšre connu sous son nom monastique Melchisedech. Il Ă©voque Ă©galement un autre personnage quâil considĂšre comme son frĂšre spirituel, Georges Iber, qui a le mĂȘme Ăąge que lui et qui est Ă©duquĂ© au cĂŽtĂ© de Constantin.
Constantin reçoit son Ă©ducation de lâempereur Michel VIII PalĂ©ologue (r. 1261-1282).
Il est nommĂ© ministre par l'empereur Michel VIII PalĂ©ologue. En dĂ©saccord avec la politique dâunion des Ăglises romaine et byzantine proposĂ©e par Michel VIII au concile de Lyon en 1274, Constantin sâoppose et tombe en disgrĂące, perdant toutes ses fonctions. Ă la fin du rĂšgne de Michel et au dĂ©but de celui d'Andronic II PalĂ©ologue, Constantin rĂ©intĂšgre la cour, puis, plus tard, accĂšde Ă la fonction de logothĂšte gĂ©nĂ©ral (logothetes tou genikou, chargĂ© des finances et taxation) vers 1282. Une dĂ©cennie aprĂšs, il est nommĂ© Ă la fonction de Grand logothĂšte, entre 1294 et 1321, au cĂŽtĂ© de ThĂ©odore MĂ©tochitĂšs.
Constantin est aussi connu pour sa grande production dâĆuvres hagiographiques et de lettres adressĂ©es au pape et Ă la famille impĂ©riale[1].
Famille
MariĂ© Ă Marie ComnĂšne Tornikina, il a deux filles et un garçon. Lâune de ses filles, ThĂ©odora Acropolite, Ă©pouse en 1294 le pinkernĂšs, neveu de lâempereur Andronic II, Alexis PhilanthropĂ©nos (1283-1335/1340)[2]. Son autre fille Ă©pouse Michel (n. 1285) futur empereur de TrĂ©bizonde et fils de Jean II ComnĂšne. Seule la mort du fils de Constantin est connue 1295[2].
Restauration du monastĂšre dâAnastasia et son Typikon
Constantin Acropolite participe Ă la restauration du monastĂšre dâAnastasia, situĂ© Ă Constantinople, commencĂ© par son pĂšre Georges Acropolite vers 1260/70[3]. Ce monastĂšre fut dĂ©truit lors du sac de Constantinople par les CroisĂ©s. Un siĂšge qui dĂ©bute en 1204 et prend fin en 1261 par le traitĂ© de NymphĂ©e avec les GĂ©nois et lâentrĂ©e de Michel VIII PalĂ©ologue dans Constantinople[4].
Constantin dĂ©bute la rĂ©daction de lâappendix du typikon (livre liturgique oĂč figurent les instructions pour les offices divins et les hymnes de lâoffice divin), en 1295. Ce livre est achevĂ© Ă sa mort en 1324[5]. NĂ©anmoins, la particularitĂ© de son typikon, câest quâil a pris la forme dâun λÏÎłÎżÏ (un discours), lors de la rĂ©novation. Dans ce livre est racontĂ© en plusieurs chapitres lâhistoire du monastĂšre dâAnastasia. Le manuscrit original de ce typikon comporte la cote EEBS 37 [1969â70] 459â65[6].
- Le premier chapitre traite des priĂšres et ce que les hommes peuvent donner Ă Dieu.
- Le deuxiĂšme raconte une histoire sur lâĂąge et lâimportance de lâĂglise de la RĂ©surrection, câest-Ă -dire Anastasia, et sur son fondateur.
- Dans un troisiÚme chapitre, Constantin explique les dépenses que son pÚre et lui ont dû faire pour reconstruire le monastÚre. Il insiste beaucoup plus sur les siennes.
- Chapitre 4, il explique pourquoi il reprend le travail de rénovation de son pÚre.
- Chapitre 5, il explique que son pĂšre lui aurait transmis son adoration pour lâĂglise. Il lui aurait expliquĂ© que son hĂ©ritage se trouve dĂ©sormais dans les murs de lâĂglise.
- Puis, dans un sixiÚme et dernier chapitre, il se désigne comme fondateur et finit sa narration.
Il sâaccorde les crĂ©dits pour la construction de la chapelle de saint Lazare et il y enterre sa femme, Maria Komnene Tornikina, afin de renforcer la lĂ©gitimitĂ© de son statut de fondateur[6].
Lâhistorien Jonas J.H. Christensen analyse lâargumentation de Constantin et, pour lui, sa narration est bien rodĂ©e pour laisser une image de fondateur. Il fait une sorte dâautobiographie narrative[5]. Constantin minimise grandement le rĂŽle de son pĂšre dans les travaux de rĂ©novation du monastĂšre, notamment en changeant les mots dĂ©signant lâĂ©glise dans le typikon. Il parle de reconstruction au lieu de rĂ©novation et de monastĂšre au lieu dâĂ©glise. Puis, il combine les dĂ©penses de la rĂ©novation et de la construction de la chapelle pour saint Lazare, afin de lui donner de lâimportance quant Ă ses dĂ©penses effectuĂ©es. La reconstruction aurait coĂ»tĂ© la somme de 16 000 nomismata[7]. Le dernier argument de Christensen, minimisant la participation de Constantin dans la rĂ©novation, concerne le fait que dans le chapitre 3, Constantin dit Ă propos de la rĂ©novation « For I was still a child when the [project] was completed. »[5]. Il se contredit puisquâil avait dit auparavant avoir participĂ© Ă la rĂ©novation, ce qui ne semble pas ĂȘtre le cas.
Politique matrimoniale autour des Paléologues
Ă partir de la reprise de Constantinople et du couronnement de Michel VIII palĂ©ologue en 1261, une politique matrimoniale se met en place. Michel veut se constituer un important rĂ©seau afin dâĂ©tendre son clan familial dâaristocrate. Câest ce que lâhistorien Niels Gaul a appelĂ© la Networking Strategies[1]. Ce rĂ©seau commence Ă prendre rĂ©ellement forme sous Andronikos II PalĂ©ologue. Les cinq familles importantes liĂ©es Ă la famille impĂ©riale sont les Mouzalon, Choumnos, Metochites, Akropolites, Neokaisareites. Dans son article, Niels Gaul propose un schĂ©ma trĂšs intĂ©ressant permettant de mieux saisir les enjeux de cette networking strategies[1].
Dans ce network, Constantin Acropolite fait partie de la middling-class, mais par le biais de ses deux filles, il se rattache Ă la famille impĂ©riale[1]. Sa premiĂšre fille, ThĂ©odora se marie en 1294 avec le neveu et pinkernĂšs de Andronikos II, Alexios Philanthropenos. Cela permet Ă sa fille dâintĂ©grer la sphĂšre de la famille impĂ©riale. Puis sa deuxiĂšme fille, dont le nom nâest pas connu des sources, se marie avec Michel Komnenos, empereur de TrĂ©bizonde et neveu de Andronikos II[1]. Câest donc par ces liens que Constantin et ses deux filles se raccrochent Ă la sphĂšre de la famille impĂ©riale.
Cette networking strategies autorisait les acteurs principaux, câest-Ă -dire les cinq familles Ă©voquĂ©es prĂ©cĂ©demment, Ă marier une fille Ă un homme du clan des PalĂ©ologues. Il pouvait sâagir soit des fils de lâempereur ou des neveux au troisiĂšme degrĂ©[1]. Pour Constantin Acropolite, tout ne se passe pas comme prĂ©vu puisque son fils par alliance, Alexios, fomente un coup dâĂtat contre Andronikos. Son projet Ă©choue en 1295 et il est aveuglĂ© pour trahison en 1296. Cet Ă©vĂ©nement vient mettre en pĂ©ril le statut de Constantin qui, avec cette affaire, perd son commandement et est exilĂ© de Constantinople. Le mariage de la deuxiĂšme fille de Constantin avec lâempereur de TrĂ©bizonde, Michel, permet dâeffacer le mariage de ThĂ©odora et Alexios. Cela lui permet de rapprocher les Acropolites et les PalĂ©ologues et ainsi, rĂ©cupĂ©rer la confiance de lâempereur ainsi que ses fonctions.
Ćuvres hagiographiques
Constantin Acropolite a beaucoup Ă©crit sur les saints, dont les reliques Ă©taient disposĂ©es dans les Ă©glises de Constantinople. Nous allons Ă©voquer trois de ces Ćuvres hagiographiques sur lesquelles un travail contemporain a Ă©tĂ© effectuĂ©. Constantin a rĂ©digĂ© lâĂ©loge de Saint Eudocime dans un manuscrit dont la cote est BHG 606 en 31 chapitres. Cet Ă©loge est Ă©crit dans un but Ă©difiant et didactique. Nous possĂ©dons deux autres codices de la vie de saint Eudocime, le Hierosolymitanus Sancti Sepulcri 40 datant du XIIIe siĂšcle, et le codex 228 du monastĂšre Dionysiou sur le mont Athos Ă©crit entre 1420 et 1421[8]. Ce qui frappe les modernes et les contemporains, par rapport aux deux manuscrits Ă©voquĂ©s prĂ©cĂ©demment, câest lâhabiletĂ© rhĂ©torique dont Constantin fait preuve.
Il a Ă©galement Ă©crit sur Jean le Jeune MisĂ©ricordieux, un saint personnage du XIVe siĂšcle. La particularitĂ© de cet Ă©crit, câest quâau lieu de rĂ©diger une vie (ÎČÎŻÎżÏ), il a rĂ©digĂ© lâĆuvre de saint Jean sous la forme dâun discours (λÏγοÏ). Il a basĂ© son Ćuvre sur deux ou trois miracles que cet homme a accomplis. Câest surtout lâintĂ©rĂȘt que le professeur de Constantin, un contemporain de Jean, portait pour lui, qui a pressĂ© Constantin Ă Ă©crire sa vie[9]. Cette Ćuvre lui a valu la reconnaissance de son statut dâhagiographe talentueux. Nous en apprenons beaucoup sur la vie de Constantin et sur la situation de lâEmpire dans ce discours. Notamment avec, Ă la fin du discours, une invocation de saint Jean pour soulager la pression des Turcs sur lâEmpire byzantin[9]. Nous y apprenons Ă©galement que son pĂšre, Georges, a servi la famille des PalĂ©ologues et quâil a soutenu le coup dâĂtat de Michel VIII PalĂ©ologue contre la dynastie des Batatzes[9]. Le miracle accompli par saint Jean, dâaprĂšs Constantin, est dâavoir redonnĂ© la vue Ă la fille dâun paysan. Ce dernier devait ramener ses reliques Ă NicĂ©e afin de voir sa fille recouvrer la vue. Comme dit prĂ©cĂ©demment, ce qui a poussĂ© Constantin Ă Ă©crire sur lui, câest son professeur. Ce dernier, dans sa jeunesse, Ă©tait atteint dâune maladie menaçant de le rendre aveugle. Câest Jean le Jeune MisĂ©ricordieux qui lâaurait soignĂ© en accomplissant un miracle.
Dans sa lĂ©gende de saint Zotique, nous en apprenons sur la situation de lâEmpire byzantin au IVe siĂšcle et sur la façon dont les lĂ©preux Ă©taient traitĂ©s. En effet, saint Zotique avait la particularitĂ© de sâoccuper des lĂ©preux et de les amener hors de la ville pour empĂȘcher la contamination et espĂ©rer soigner ces derniers. Nous en apprenons Ă©galement sur la rĂ©daction, par Constantin Acropolite, dâune Akropolites Vita qui aurait Ă©tĂ© dĂ©butĂ©e vers 1270 et terminĂ©e Ă la fin de sa vie, vers 1324[10]. Elle apparaĂźt dans le codex Ambrosianus H.81 Suppl. (folios 1-11). Dans cette lĂ©gende de saint Zotique, Constantin nous en apprend sur le rĂšgne de Constance II (r. 337-361), sur lâaugmentation rapide de la population au IVe siĂšcle, et sur le systĂšme « dâaumĂŽne de grain » pour 80 000 citoyens natifs[10].
Références
- Gaul 2016.
- Nicol 1965.
- Talbot 1993.
- Kaplan 2007.
- Christensen 2007.
- Talbot 2005.
- (en) Georgios Akropolites et al., George Akropolites: The History: Introduction, Translation and Commentary, Oxford, Oxford University Press, , 463 p., p. 18.
- Taxidis 2013.
- Polemis 1973.
- Miller 1994.
Voir aussi
Bibliographie
- (en) Donald M. Nicol, « Constantine Akropolites: A Prosopographical Note », Dumbarton Oaks Papers, vol. 19,â , p. 249â256
- (en) Demetrios I. Polemis, « The speech of Constantine Akropolites on St. John Merciful The Young », Analecta Bollandiana, vol. 91,â , p. 31â54
- (en) Alice-Mary Talbot, « The Restoration of Constantinople under Michael VIII », Dumbarton Oaks Papers, vol. 47,â , p. 243â261
- (en) Timothy S. Miller, « The legend of Saint Zotikos according to Constantine Akropolites », Analecta Bollandiana, vol. 112,â , p. 339â376
- (en) Alice-Mary Talbot, « Akropolites, Constantine », dans The Oxford Dictionary of Byzantium, Oxford University Press,
- (en) Jonas J. H. Christensen, « I was there. Constantine Akropolitesâ Typikon », Scandinavian Journal of Byzantine and Moderne Greek Studies, vol. 3,â , p. 5â81â94
- Michel Kaplan, Byzance, Paris, Les Belles Lettres, , 304 p. (ISBN 978-2-251-41035-7)
- Ilias Taxidis, « LâĂ©loge de Saint Eudocime par Constantin Acropolite (BHG 606) », Parekbolai. An Electronic Journal for Byzantine Literature, vol. 3,â , p. 5â44
- (en) Niels Gaul, « All the Emperorâs Men (and His Nephews): Paideia and Networking Strategies at the Court of Andronikos II Palaiologos, 1290â1320 », Dumbarton Oaks Papers, vol. 70,â , p. 245â270