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Théorie du vernis

La théorie du vernis est un terme inventé par le primatologue néerlandais Frans de Waal pour qualifier la vision hobbesienne de la moralité humaine. Bien qu'il critique ce point de vue dans des travaux antérieurs, De Waal introduit ce terme dans son livre de 2005 "Our Inner Ape", pour désigner une conception de la moralité qu'il rejette, à savoir que celle-ci serait "une superposition culturelle, un mince vernis cachant une nature égoïste et brutale"[1]. L'idée de la théorie du vernis remonte à Thomas Henry Huxley et a été plus récemment préconisée par des biologistes comme George C. Williams.

Les partisans de la théorie

Selon de Waal, un des penseurs les plus anciens et les plus influents critiqués par lui pour avoir popularisé ce point de vue est Thomas Hobbes[2].

Quelques siĂšcles plus tard, Thomas Henry Huxley a avancĂ© l'idĂ©e que les tendances morales ne font pas partie de la nature humaine, et ainsi nos ancĂȘtres sont devenus moraux par choix, non par Ă©volution. George C. Williams, en tant qu'autre dĂ©fenseur de la thĂ©orie du vernis, voit la moralitĂ© comme "une capacitĂ© accidentelle produite, dans sa stupiditĂ© sans bornes, par un processus biologique qui s'oppose normalement Ă  l'expression d'une telle capacitĂ©"[3].

Le psychologue Abraham Maslow a soutenu que les humains n'ont plus d'instincts parce que nous avons la capacitĂ© de les ignorer dans certaines situations. Il a estimĂ© que ce qu'on appelle l'instinct est souvent dĂ©fini de maniĂšre imprĂ©cise et Ă©quivaut en rĂ©alitĂ© Ă  de fortes pulsions. Pour Maslow, un instinct est quelque chose qui ne peut pas ĂȘtre ignorĂ©, et par consĂ©quent, bien que le terme ait pu s'appliquer aux humains dans le passĂ©, il ne le fait plus[4].

Richard Dawkins semble endosser la théorie du vernis lorsqu'il écrit que seul l'humain aurait la capacité de se révolter contre la tyrannie des réplicateurs égoïstes[5].

Certains prĂ©tendent que la thĂ©orie du vernis prĂ©sente une fausse dichotomie ; une superposition d'une morale d'origine culturelle et les morales basĂ©es sur la biologie de de Waal pourrait coexister et pourraient toutes deux ĂȘtre avantageuses sur le plan de l'Ă©volution[6].

Critiques de la théorie

De Waal critique la thĂ©orie du vernis et considĂšre notre moralitĂ© comme une consĂ©quence directe des instincts sociaux que les ĂȘtres humains partagent avec d'autres animaux. Il soutient que les partisans de la thĂ©orie du vernis n'ont aucune preuve empirique Ă  l'appui de leur thĂ©orie, et qu'il est hautement improbable que les humains puissent renier leurs gĂšnes et amĂ©liorer la moralitĂ© simplement par choix. À titre d'exemple, il compare la thĂ©orie de Huxley Ă  une Ă©cole de piranhas dĂ©cidant de devenir vĂ©gĂ©tariens.

De Waal fonde son argument contre la thĂ©orie du vernis sur les observations du comportement des ancĂȘtres et cousins des humains dans son long travail de primatologue. Des "Ă©lĂ©ments constitutifs de la moralitĂ©"[1] peuvent dĂ©jĂ  ĂȘtre observĂ©s chez d'autres primates, et, selon lui, par le principe de parcimonie, il est tout Ă  fait possible qu'une sorte de moralitĂ© soit Ă©volutivement ancienne et partagĂ©e avec nos ancĂȘtres.

De Waal suppose que les origines de l'Ă©volution rĂ©sident dans les Ă©motions que nous partageons avec d'autres animaux, par exemple l'empathie[7]. La morale humaine est selon lui un produit de l'Ă©volution sociale, et contrairement Ă  la thĂ©orie de Huxley, ce point de vue — une continuitĂ© entre la morale humaine et les tendances sociales animales — est unitaire et donc plus compatible avec la thĂ©orie de l'Ă©volution.

Parmi les critiques de la théorie du vernis, on trouve également Edward Westermarck et EO Wilson et Rutger Bregman.

Voir aussi

Références

  1. Frans de Waal, Robert Wright, Christine M. Korsgaard, Philip Kitcher et Peter Singer, Primates and philosophers: How morality evolved, Princeton, Princeton University Press, (ISBN 978-0-691-14129-9), p. 6
  2. (en) Frans De Waal, Our Inner Ape : A Leading Primatologist Explains Why We Are Who We Are, Penguin, , 320 p. (ISBN 1594481962), p. 227
  3. Williams, « Reply to comments on "Huxley's Evolution and Ethics in Sociobiological Perspective." », Zygon, vol. 23, no 4,‎ , p. 437–438 (DOI 10.1111/j.1467-9744.1988.tb00857.x)
  4. Abraham H. Maslow, Motivation and Personality, New York, Harper & Row, (lire en ligne Inscription nécessaire), « Instinct Theory Reexamined »
  5. (en) Richard Dawkins, The Selfish Gene, Oxford, (ISBN 0-19-929114-4), p. 201
  6. Dreifort, « of dichotomies and morals », Dirty Rag (consulté le )
  7. de Waal, « Putting the Altruism Back into Altruism: The Evolution of Empathy », Annual Review of Psychology, vol. 59,‎ , p. 279–300 (PMID 17550343, DOI 10.1146/annurev.psych.59.103006.093625)
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