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Tan lontan

Le tan lontan est une expression réunionnaise (littéralement le temps longtemps) qui signifie 'le passé'. Elle désigne la période allant de 1938 (fin de l’engagisme) à 1975 (le baby boom) sur l'île de La Réunion. C’est une période de rupture avec le mode de vie issu de la société de plantation. Elle est marquée à son démarrage par la fin de l'Engagisme (1938), la Seconde Guerre Mondiale et la loi de départementalisation (1946) qui survient après la seconde guerre.

Une période de modernisation

La Réunion connaît alors une modernisation progressive et importante de l'île. Cette période est également marquée par ce que les sociologues réunionnais[1] appellent la Modernité. En 1946, assimiler La Réunion à tout autre département Français était impossible, ne serait-ce que pour des raisons géographiques et climatiques, sans parler de la différence de niveau de vie. La tâche la plus urgente est donc de doter l’île d’une infrastructure économique convenant à un pays moderne. Cette modernisation va passer par plusieurs étapes qui vont transformer radicalement le paysage réunionnais, c’est le passage à la Modernité. Cette modernité s'accompagne de transferts économiques et sociaux importants de la France métropolitaine vers La Réunion.

Une période pour comprendre l'homme réunionnais

Ce schéma amène des ruptures qui pour autant ne défont pas le lien avec la tradition, même si dans une large partie de ces manifestations, cette tradition s’appauvrit. Ce marqueur chronologique est déterminant pour comprendre l’Homme réunionnais, un individu ayant un ancrage à la fois dans la tradition et dans une modernité (choisie ou subie).

Éléments de chronologique de la période

  • 1938, La fin de l'engagisme : l’entre-deux guerres verra une rĂ©forme fondamentale en termes d’attributions de compĂ©tences du Service de l’Immigration. Le Service de l’Immigration, prĂ©cĂ©demment confiĂ© au Service de l’Enregistrement, des Domaines et du timbre, a Ă©tĂ© transfĂ©rĂ© Ă  la suite d’un rapport de la mission d’inspection des Colonies de 1937 Ă  l’inspection du Travail. Ce service comprend Ă  ce jour, en dehors de son chef, 9 syndics; un interprète malgache qui s’occupe Ă©galement des matricules gĂ©nĂ©rales oĂą sont notĂ©es les mutations survenues dans les syndicats et concernant les immigrants et une dactylo auxiliaire. Cette rĂ©forme permet d’avoir un Ă©tat des lieux des derniers migrants prĂ©sents Ă  La RĂ©union. Le nouveau service ne s’occupera alors que de ces groupes, citĂ©s dans le document : « 1° - Des immigrants malgaches de race Antandroy introduits Ă  la RĂ©union de 1922 Ă  1927 et qui se sont rengagĂ©s dans le pays. Ils sont au nombre de 648 et leur rĂ©gime de travail est fixĂ© par le dĂ©cret du . 2° - Des immigrants soumis au dĂ©cret de 1887 comprenant 35 somalis et arabes du Yemen et 146 indiens, comoriens et cafres. 3° - Des immigrants rodriguais en très petit nombre. La majeure partie de ces immigrants, dĂ©cimĂ©s par le paludisme et le bĂ©ribĂ©ri, est retournĂ©e Ă  Rodrigues. Le Service de l’Immigration n’a en principe qu’à passer les contrats avec les employeurs et Ă  s’occuper des rapatriements. Il s’occupe activement d’arbitrer et d’apaiser autant que possible les conflits qui peuvent s’élever entre engagistes et engagĂ©s ». Cette rĂ©forme marque la fin de l’engagisme tel que fondĂ© au XIXe siècle. Le dĂ©clenchement de la Seconde Guerre mondiale coupe par la suite La RĂ©union des relations avec les autres pays de la zone et achève cet Ă©pisode majeur du peuplement[2].
  • , La DĂ©partementalisation : le , le ComitĂ© rĂ©publicain d’actions dĂ©mocratiques et sociales, le CRADS, est crĂ©Ă©, rassemblant la classe ouvrière, la petite bourgeoisie de service - autrement dit les fonctionnaires - et les planteurs[3]. On retrouve par ailleurs toutes les tendances politiques. Des RĂ©unionnais connus pour leur appartenance Ă  la droite, tels que Roger Payet, Fernand Collardeau et Roger Serveaux, mènent la lutte aux cĂ´tĂ©s de Raymond Vergès, LĂ©on de LĂ©pervanche et Evenor Lucas. Tous veulent mettre Ă  bas "la misère coloniale". Le CRADS s’investit en politique, enlève 12 communes aux municipales du , obtient 22 sièges sur 36 au Conseil gĂ©nĂ©ral, le de la mĂŞme annĂ©e. Le , Raymond Vergès et LĂ©on LĂ©pervanche gagnent les lĂ©gislatives, et leurs sièges Ă  l’AssemblĂ©e constituante. Ils font voter le la loi de dĂ©partementalisation qui transforme les quatre vieilles colonies en dĂ©partements français.
  • 1951 : Introduction du SMIC Ă  La RĂ©union. Il ne reprĂ©sentait encore en 1991 que 83 % de celui de la mĂ©tropole. La rĂ©Ă©valuation du SMIC a lieu chaque annĂ©e au mois de juillet de façon que l’accroissement du pouvoir d’achat ne soit pas infĂ©rieur Ă  la moitiĂ© du gain du pouvoir d’achat du salaire horaire ouvrier. Scherrer annonce que le rattrapage devrait trouver son terme le .
  • Autour de 1952 : au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la majeure partie de la population est illettrĂ©e et seuls quelques privilĂ©giĂ©s ont accès Ă  l’enseignement du second degrĂ©. La poussĂ©e dĂ©mographique participe Ă  la dĂ©cision de l’administration de porter son effort sur la scolarisation au primaire. En 1952, dĂ©butent les premières constructions scolaires, certaines communes optent aussi pour l’installation d’écoles dans de vieilles maisons. Ă€ partir de 1958, on commence Ă  construire des Ă©coles dans des locaux prĂ©fabriquĂ©s. On passe de 30 500 Ă©lèves scolarisĂ©s en 1947 Ă  188 000 en 1988[5].
  • : la modernisation Ă©conomique passe par la fermeture des usines ce qui change radicalement le paysage de certaine ville. Le dĂ©cret du exonère d’impĂ´ts les bĂ©nĂ©fices consacrĂ©s aux investissements utiles, ce qui permet aux industries sucrières d’investir des sommes importantes dans la modernisation des usines et aux simples particulier de se lancer dans la construction de logements. Ainsi de 14 usines encore en fonctionnement Ă  la fin de la seconde guerre mondiale, 7 Ă©taient encore en activitĂ© en 1979. Ă€ partir de cette annĂ©e, un plan de restructuration est mis en place pour concentrer les lieux de productions en deux sociĂ©tĂ©s que l’on connaĂ®t aujourd’hui sous le nom de Quartier Français (dont le centre de production est au Gol) et Eurocanne / Sucreries de Bourbon (dont le centre de production est Ă  Bois-Rouge). En 1924 LĂ©onus BĂ©nard, fils de petits planteurs de la Rivière Saint-Louis, crĂ©e la sociĂ©tĂ© L. BĂ©nard. Il Ă©tend peu Ă  peu son domaine agricole dans cette rĂ©gion de l'Ă®le et achète bientĂ´t l'usine sucrière du GOL. Un quart de siècle plus tard, il monte une nouvelle sociĂ©tĂ© baptisĂ©e "Les Établissements L. BĂ©nard", qui dĂ©tiennent 4 300 hectares de terres et trois usines : Pierrefonds, Les Casernes Ă  Saint-Pierre et bien sĂ»r le GOL. Le GOL Ă©tait devenu la propriĂ©tĂ© de plusieurs familles avant que M. BĂ©nard ne l'achète. Entre 1960 et 1970 interviennent un certain nombre de transformations, parmi lesquelles, une opĂ©ration de concentration des trois sucreries en une seule implantĂ©e au GOL. La sociĂ©tĂ© L. BĂ©nard Sucrerie-Distillerie du GOL est alors crĂ©Ă©e pour exploiter l'usine du GOL.
  • 17 et : La fĂ©dĂ©ration de La RĂ©union du Parti Communiste français, championne de la dĂ©partementalisation en 1946, change son fusil d’épaule au cours de la VIème confĂ©rence fĂ©dĂ©rale du Port les 17 et . Elle dĂ©cide de se constituer en Parti communiste rĂ©unionnais « et de mettre Ă  son programme la revendication de l’autonomie ».
  • 1972 : CrĂ©ation du centre universitaire de La RĂ©union au Moufia. Ce centre ne deviendra UniversitĂ© de La RĂ©union qu'en 1982.

Notes et références

  1. Emmanuel Souffrin, Michel Watin
  2. ADR, 12M1 : Rapport au gouverneur par l’inspecteur du travail, chef du Service de l’Immigration du 19 décembre 1938 sur la réforme du Service de l’Immigration.
  3. Robert Deville et Nicolas George, Les Départements d'Outre-Mer, l'autre décolonisation, N°296,1996, découverte Gallimard, page 69. (ISBN 2070534014)
  4. La Réunion des électriciens, histoire de la lampe Bobèche aux Centrales, collectif, Azalées Édition, 1996, (ISBN 2-908127-70-9)
  5. La Réunion, André Scherer, PUF, collection Que-sais-je ?, 1994
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