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Sondergericht

Un Sondergericht, un « tribunal d'exception Â» (pluriel : Sondergerichte) est un tribunal hitlĂ©rien. Ă€ partir de 1933, une variĂ©tĂ© de nouveaux crimes et dĂ©lits instituĂ©s par lois ou dĂ©crets d'exception sont jugĂ©s par des juridictions spĂ©ciales du Troisième Reich.

Le juge Roland Freisler (au centre) au « tribunal du Peuple Â» en 1944.

Avant-guerre

Les Sondergerichte naissent peu après l'incendie du Reichstag, prétexte de la prise totale du pouvoir par les Nazis. Ils constituent la première juridiction créée par le régime national-socialiste le . Ils visent d'abord les opposants politiques puis à partir du les défaitistes et les traitres à la patrie[1]. Le décret sur l'incendie du Reichstag () comprend six articles[2] :

  • L’article 1 suspend la plupart des libertĂ©s civiles – libertĂ© des personnes, libertĂ© d'expression, libertĂ© de la presse, droit Ă  l'association et aux rĂ©unions publiques, confidentialitĂ©s des postes et tĂ©lĂ©phones, protection du domicile et des propriĂ©tĂ©s.
  • Les articles 2 et 3 transmettent au gouvernement du Reich certaines prĂ©rogatives normalement dĂ©volues aux Länder.
  • Les articles 4 et 5 Ă©tablissent des peines très lourdes pour certains dĂ©lits particuliers, notamment la peine de mort pour l'incendie de bâtiments publics.
  • L’article 6 dispose que le dĂ©cret prend effet le jour de sa proclamation.

Ce décret est bientôt complété par d'autres dispositions législatives :

  • dĂ©cret de protection du gouvernement de la rĂ©volution nationale-socialiste (),
  • loi contre les attaques visant l'État et le Parti (),
  • loi sur la garantie de la paix ().

Dès 1933, il y a 26 Sondergerichte[2]. À partir de 1934, une cour spéciale, le Volksgerichtshof, traite les affaires de haute trahison (espionnage et intelligence avec l'ennemi)[2].

Un Sondergericht comprend trois juges qui choisissent l'avocat de la défense. Les verdicts sont exécutables immédiatement, sans possibilité d'appel. Les juges décident de la nécessité et de la suffisance des preuves. L'avocat de la défense n'a pas le droit de contester ces preuves. Les cas les plus bénins sont sanctionnées par des peines à temps, dans une prison ou un camp[2].

Cependant, les lĂ©gislateurs hĂ©sitent Ă  promulguer des lois trop faciles Ă  transgresser qui les obligeraient Ă  s'en prendre aux gens « ordinaires Â» dont ils recherchent le soutien. Sauf cas particulier, les propos tenus en privĂ©, les blagues concernant les dignitaires du rĂ©gime, ne sont pas pris en compte. A contrario les « propos sĂ©ditieux » constituent le dĂ©lit le plus frĂ©quent. Pour la seule annĂ©e 1937 les tribunaux prononcent 17 618 mises en accusation pour ce dĂ©lit[3]. En consĂ©quence les Allemands se mĂ©fient les uns des autres et Ă©vitent de critiquer publiquement le rĂ©gime.

Seconde Guerre mondiale

Ces dispositions sont encore étendues et aggravées, à partir de la déclaration de guerre. En 1942, il y a 74 Sondergerichte dont sont passibles non seulement les sujets allemands, mais encore les millions d'étrangers vivant en Allemagne[2] :

  • prisonniers de guerre,
  • travailleurs requis ou volontaires,
  • rĂ©sistants et politiques dĂ©portĂ©s en vertu du dĂ©cret Nacht und Nebel.

Progressivement, les Sondergerichte traitent de simples délits requalifiés en crimes, évinçant ainsi les tribunaux traditionnels. Les Allemands comparaissent pour vols dans les quartiers bombardés, abattage clandestin, écoute de radios étrangères, propos désabusés rapportés par des mouchards[2]...

Les étrangers sont accusés de correspondance illégale, actes de solidarité, tentatives d’association, complicité d’évasion, propos anti-allemands, graffitis injurieux, petits trafics, maladresses et négligences professionnelles requalifiées en sabotage.

Les politiques et les résistants alliés sont inculpés de haute trahison alors qu'ils ne sont pas sujets allemands et que leur pays est en guerre contre l'Allemagne[2].

Références

  1. Thierry Féral (préf. Laurent Bignolas), Justice et nazisme, Paris Montréal, L'Harmattan, coll. « Allemagne d'hier et d'aujourd'hui », , 108 p. (ISBN 978-2-7384-5980-0, OCLC 38745390, lire en ligne), p. 53
  2. Auteur, Titre de l'ouvrage, année de publication, page ?
  3. Jean-Paul Cahn, Stefan Martens et Bernd Wegner (dir.) (trad. de l'allemand), Le Troisième Reich dans l'historiographie allemande : lieux de pouvoir, rivalités de pouvoirs, Villeneuve-d'Ascq, Presses universitaires du Septentrion, coll. « Histoire et civilisations. » (no 1447), , 399 p. (ISBN 978-2-7574-0581-9, lire en ligne), p. 88

Bibliographie

  • Ian Kershaw (trad. Jacqueline Carnaud), Qu'est-ce que le nazisme ? Problèmes et perspectives d’interprĂ©tation [« The Nazi dictatorship »], Paris, Gallimard, coll. « Folio histoire » (no 83), (1re Ă©d. 1992), 538 p. (ISBN 978-2-07-040351-6, OCLC 997376945).
  • Ian Kershaw (trad. Pierre-Emmanuel Dauzat), L'opinion allemande sous le nazisme, Paris, CNRS Ă©ditions, coll. « Histoire 20e siècle. », , 375 p. (ISBN 978-2-271-05281-0, OCLC 61446476).
  • Ian Kershaw, Hitler, tome 1 : 1889-1936, Flammarion, 1999.
  • Ian Kershaw, Hitler, tome 2 : 1936-1945, Flammarion, 2000.
  • Richard Evans (trad. de l'anglais par Barbara Hochstedt et Paul Chemla), Le Troisième Reich, t. 3 : 1939-1945, Paris, Flammarion, coll. « Au fil de l'histoire », , 1102 p. (ISBN 978-2-08-120955-8).
  • Jörg Friedrich, L'incendie. L'Allemagne sous les bombes 1940-1944, Ă©ditions de Fallois, 2004.
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