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STS-1

STS-1 est le premier vol de la navette spatiale amĂ©ricaine. Celle-ci, qui comprend l'orbiteur Columbia, est lancĂ©e le et, après avoir bouclĂ© 37 orbites, atterrit le . L'objectif de cette mission, dont l'Ă©quipage est rĂ©duit aux deux pilotes John W. Young et Robert L. Crippen, est de qualifier le fonctionnement de la navette durant toutes les phases du vol. La mission se dĂ©roule sans problème majeur, mĂŞme si elle permet de mettre en Ă©vidence un certain nombre d'anomalies qui auraient pu avoir des consĂ©quences graves. STS-1 marque l'aboutissement du projet de navette, entamĂ© en 1968 et lancĂ© officiellement en . C'est Ă©galement la première mission habitĂ©e amĂ©ricaine depuis le vol Apollo-Soyouz, en .

STS-1
Insigne de la mission
Données de la mission
Vaisseau Navette Columbia
Équipage 2
Date de lancement
Site de lancement Centre spatial Kennedy
Date d'atterrissage
Site d'atterrissage Base Edwards
Durée 2 jours, 6 heures
Orbites 36
Altitude orbitale 307 kilomètres
Inclinaison 40,3 degrés
Photo de l'Ă©quipage
John Young et Robert Crippen
John Young et Robert Crippen
Navigation
La navette Columbia atterrit le au centre spatial Kennedy.

Contexte

Le projet de la navette spatiale américaine

Les premières réflexions sur la navette spatiale remontent à 1968, mais ce n'est qu'en que le projet trouve son financement et est officiellement lancé. La navette spatiale (« Space Shuttle » en anglais) est composée de trois sous-ensembles : l'orbiteur, qui est le seul composant à se placer en orbite, transporte le fret et les astronautes, tandis que le réservoir externe et deux propulseurs d'appoint ne sont utilisés que pour le lancement. Une série de tests du premier orbiteur achevé, l'Enterprise, a lieu à compter du : celui-ci, transporté sur le dos d'un Boeing 747 aménagé, effectue d'abord des vols captifs puis, à compter du , est largué pour effectuer de courts vols planés avant d'atterrir[1]. Le premier vol de la navette complète, planifié en 1979, est repoussé de deux ans car deux des composants majeurs de l'orbiteur, son moteur principal SSME et son bouclier thermique, rencontrent des problèmes de mise au point.

La sélection des astronautes

La NASA choisit pour cette mission un équipage composé d'un vétéran et d'un astronaute n'ayant jamais volé. Le commandant de la mission, John Young, a déjà quatre missions à son actif. Il a réalisé deux vols dans le cadre du programme Gemini et deux missions du programme Apollo : il a fait partie de l'équipage d'Apollo 10 et a été commandant d'Apollo 16. Robert Crippen a été sélectionné pour le projet de station spatiale militaire MOL, qui a été annulé en 1969 ; il est cette année-là passé dans le corps des astronautes de la NASA mais n'a pas eu l'occasion de voler, car les candidats étaient nombreux et le programme spatial habité américain était en pleine décrue. L'équipage de rechange est composé de Joseph H. Engle, commandant de la mission, et Richard H. Truly. Ceux-ci formeront l'équipage de la mission STS-2, chargée de poursuivre les tests entamés par STS-1.

Les objectifs de la mission

STS-1 est le premier vol d'une navette spatiale complète : l'orbiteur, accouplĂ© au rĂ©servoir externe et aux deux propulseurs d'appoint, va se placer en orbite et y sĂ©journer environ deux jours, afin que l'Ă©quipage puisse procĂ©der Ă  diffĂ©rents tests avant d'atterrir. Contrairement aux lanceurs utilisĂ©s jusque-lĂ  pour envoyer en orbite des astronautes, il n'y a pas eu de qualification prĂ©alable sans Ă©quipage. Cette solution a Ă©tĂ© envisagĂ©e, mais la NASA y a renoncĂ©, essentiellement pour des raisons de coĂ»t et de dĂ©lai : il aurait fallu, selon les constructeurs, dĂ©caler de six mois le lancement et dĂ©penser 100 millions de dollars supplĂ©mentaires pour pouvoir effectuer un vol entièrement automatique[2]. Ce vol comporte pourtant des phases rendues particulièrement dangereuses par les nouveautĂ©s introduites par la navette :

  • Le lancement, qui utilise pour la première fois sur un vol spatial habitĂ© des propulseurs Ă  propergol solide qu'on ne peut Ă©teindre une fois allumĂ©s ;
  • La rentrĂ©e atmosphĂ©rique, car l'orbiteur — profilĂ© comme un avion — est beaucoup plus difficile Ă  protĂ©ger de l'Ă©chauffement que les capsules spatiales utilisĂ©es jusqu'alors ;
  • L'atterrissage de l'orbiteur, qui — selon les mots de Young — « vole comme une brique », se fait Ă  une vitesse de 470 km/h, ce qui est une valeur particulièrement Ă©levĂ©e[Note 1].

Pour réduire le risque inhérent à cette phase de mise au point, la navette comporte pour ses vols de qualification (STS-1 et les trois missions suivantes) des sièges éjectables. Ces sièges seront supprimés une fois la navette déclarée opérationnelle, car il n'est pas possible d'installer un siège éjectable pour chaque passager, notamment pour ceux dont le siège se situe dans le pont inférieur.

Les préparatifs

L'orbiteur Columbia est transfĂ©rĂ© depuis le site de son constructeur jusqu'au hall de prĂ©paration l'Orbiter Processing Facility (en) du centre spatial Kennedy, le , alors que les tuiles qui forment le bouclier thermique ne sont pas encore toutes posĂ©es. L'orbiteur, dont la masse au dĂ©collage est de 99 453 kg (88 662 kg Ă  l'atterrissage) transporte dans sa soute la palette ACIP (Aerodynamic Coefficient Identifications Package), qui regroupe des Ă©quipements permettant de suivre les performances aĂ©rodynamiques de l'orbiteur, ainsi que la palette DFI (Developmental Flight Instrumentation), qui comprend des Ă©quipements surveillant les performances de la navette et les efforts subis par sa structure pendant toutes les phases du vol. Le tout reprĂ©sente une masse de 4 900 kg. Le rĂ©servoir externe pour le vol STS-1 est recouvert d'une couche de peinture blanche qui ne sera pas appliquĂ©e pour les missions suivantes, car cela permet de diminuer la masse de l'ensemble de 272 kg[3]. Le rĂ©servoir externe des vols suivants arbore une couleur orangĂ©e due Ă  la couche d'isolant appliquĂ©[3]. L'assemblage de l'orbiteur avec le rĂ©servoir extĂ©rieur et les propulseurs d'appoint dĂ©bute le dans le Bâtiment d'assemblage. Le , la navette spatiale est transfĂ©rĂ©e sur le pas de tir 39-A.

DĂ©roulement du vol

DĂ©collage de la navette Columbia pour la mission STS-1.
Baie cargo photographiée durant le vol STS-1.

Le lancement de Columbia est reportĂ© de deux jours Ă  la suite de dĂ©tections d'anomalies sur les ordinateurs de bord de la navette[4]. Finalement, la navette dĂ©colle le Ă  12 h 0 TU. La date de dĂ©collage de la navette coĂŻncide avec le jour du vingtième anniversaire du premier vol spatial habitĂ© par un ĂŞtre humain, Youri Gagarine. L'orbiteur est placĂ© en orbite sans qu'aucune anomalie grave se produise durant la phase propulsĂ©e. L'orbite atteinte n'est toutefois pas exactement celle prĂ©vue : les ailes ont en effet crĂ©Ă© plus de portance que celle calculĂ©e par les ordinateurs[2], ce qui a lĂ©gèrement dĂ©calĂ© la trajectoire de l'ensemble pendant la phase d'ascension. La navette se trouve sur une orbite circulaire Ă  251 km d'altitude avec une inclinaison de 40.3°, qu'elle parcourt en 89,4 minutes. Les premières images retransmises après la mise en orbite montrent au public les astronautes Ă©voluant dans un intĂ©rieur très diffĂ©rent de celui auquel les avaient habituĂ©es les missions prĂ©cĂ©dentes. La cabine oĂą se tiennent les pilotes ressemble Ă  un poste de pilotage d'avion de ligne, tandis que l'Ă©tage au-dessous, avec ses rangĂ©es de tiroirs blancs, ressemble Ă  l'environnement stĂ©rilisĂ© d'un hĂ´pital. La soute cargo, avec ses deux portes ouvertes, constitue Ă©galement une des images les plus fortes et les plus souvent reproduites par la suite dans les journaux et les magazines. Durant deux jours, les pilotes effectuent diffĂ©rents tests : ils utilisent les moteurs de la navette pour modifier l'orientation de celle-ci, changer d'orbite, ils ouvrent puis referment les portes de la soute cargo...

Le , les moteurs de manĹ“uvre orbitale (OMS) de Columbia sont allumĂ©s pendant environ 2 minutes et 40 secondes pour que la navette quitte son orbite. Elle entame ensuite la rentrĂ©e atmosphĂ©rique ; lorsque la tempĂ©rature atteint 3 000 °C au niveau des parties les plus exposĂ©es de la navette, les pilotes rapportent derrière le pare-brise avoir l'impression de voler Ă  l'intĂ©rieur d'un tube nĂ©on. L'orbiteur atterrit comme prĂ©vu sur la base Edwards de l'ArmĂ©e de l'Air en Californie, avec seulement quelques secondes de retard sur le plan de vol. L'orbiteur touche la piste un kilomètre au-delĂ  du point prĂ©vu, le calcul de la trajectoire ayant sous-estimĂ© la portance de la navette dans cette phase[5]. Tous les objectifs de la mission ont Ă©tĂ© remplis. Peu après, la navette est hissĂ©e sur le Boeing 747 porteur et rapatriĂ©e au Centre spatial Kennedy en Floride, en deux jours, oĂą elle arrive le .

Anomalies durant la mission

Les analyses et les inspections réalisées après le vol ont mis en évidence plusieurs problèmes importants :

  • Sur le pas de tir du Kennedy Space Center, lorsque les moteurs de l'orbiteur ont Ă©tĂ© mis Ă  feu, le trop-plein d'hydrogène Ă©vacuĂ© par des Ă©vents du rĂ©servoir externe qui s'Ă©tait accumulĂ© sous la navette a explosĂ©, repoussant la gouverne centrale au-delĂ  de son angle de braquage maximal. Durant la phase de rentrĂ©e, la gouverne a fonctionnĂ© normalement mais Young affirmera que, s'il avait disposĂ© de l'information avant d'entamer la phase finale d'atterrissage, il aurait dĂ©cidĂ© de s'Ă©jecter de la navette plutĂ´t que de tenter de poser celle-ci. Pour le vol suivant, le système d'inondation du pas de tir sera perfectionnĂ© pour Ă©viter l'accumulation d'hydrogène ;
  • 14 tuiles de protection thermique se sont dĂ©collĂ©es et 148 ont Ă©tĂ© endommagĂ©es Ă  la suite de surpressions gĂ©nĂ©rĂ©es par les propulseurs Ă  poudre qui n'avaient pas Ă©tĂ© anticipĂ©es, ce qui aurait pu avoir des consĂ©quences graves lors de la rentrĂ©e dans l'atmosphère ;
  • On apprendra des annĂ©es plus tard que le train d'atterrissage avait Ă©tĂ© endommagĂ©, sans consĂ©quence, par une arrivĂ©e de gaz brulant durant la rentrĂ©e atmosphĂ©rique, Ă  la suite d'un dĂ©faut dans le bouclier thermique qui protĂ©geait la trappe sous laquelle se situait le train.

Trois autres missions destinées à tester la navette vont succéder au vol STS-1 avant que celle-ci soit déclarée opérationnelle.

  • Les deux pilotes enfilent leur combinaison avant le lancement.
    Les deux pilotes enfilent leur combinaison avant le lancement.
  • La navette sur le pas de tir.
    La navette sur le pas de tir.
  • La navette sur le pas de tir.
    La navette sur le pas de tir.
  • DĂ©collage.
    DĂ©collage.
  • Film de l'atterrissage.
  • Crippen sort de la navette après l'atterrissage.
    Crippen sort de la navette après l'atterrissage.

Notes et références

Notes

  1. Pour exemple, la vitesse d'atterrissage d'un MiG-21, dĂ©jĂ  considĂ©rĂ©e comme plutĂ´t Ă©levĂ©e, n'est « que » de 340 Ă  360 km/h.

Références

  1. Dennis R. Jenkins p. 187-248
  2. Pat Duggins p. 50
  3. Didier Capdevila, « Chronologie Space Shuttle : 1981 », Capcom Espace (consulté le ).
  4. (de) Lennart Johansson, « STS-1 Columbia Launch Delay », .
  5. Pat Duggins p. 58-59

Voir aussi

Bibliographie

Document utilisé pour la rédaction de l’article : document utilisé comme source pour la rédaction de cet article.

  • (en) Dennis R. Jenkins, Space Shuttle : The History of the National Space Transportation System – the first 100 missions, Midland Publishing, , 3e Ă©d., 524 p. (ISBN 1-85780-116-4 et 978-1-85780-116-3). Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • (en) Pat Duggins, Final Countdown : NASA and the End of the Space Shuttle Program, University Press of Florida, , 264 p. (ISBN 978-0-8130-3384-6 et 0-8130-3384-5). Document utilisĂ© pour la rĂ©daction de l’article
  • (en) Rowland White, Into the Black : The electrifying true story of how the first flight of the Space Shuttle nearly ended in disaster, Corgi, , 608 p. (ISBN 978-0-552-16022-3).

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