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Responsabilité contractuelle en Belgique

La responsabilité contractuelle est, avec la responsabilité délictuelle, une des deux parties de la responsabilité civile. Elle est engagée en cas de mauvaise exécution ou d'inexécution totale ou partielle des obligations nées d'un contrat.

« Le dĂ©biteur est condamnĂ©, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intĂ©rĂȘts, soit Ă  raison de l'inexĂ©cution de l'obligation, soit Ă  raison du retard dans l'exĂ©cution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexĂ©cution provient d'une cause Ă©trangĂšre qui ne peut lui ĂȘtre imputĂ©e, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part. »

— Article 1147 du Code civil.

Droit commun

Les conditions pour mettre en Ɠuvre la responsabilitĂ© contractuelle sont une mise en demeure, une inexĂ©cution imputable au dĂ©biteur et un dommage direct et prĂ©visible.

La mise en demeure

En principe, une mise en demeure du dĂ©biteur de s'exĂ©cuter en nature est requise avant que ce dernier puisse encourir une sanction contractuelle, en l'occurrence la dĂ©bition de dommages et intĂ©rĂȘts en lieu et place de l'exĂ©cution en nature. NĂ©anmoins, dans certains cas, l'exigence de mise en demeure cesse, c'est notamment le cas lorsque le crĂ©ancier intente une action en justice, auquel cas l'acte introductif d'instance vaut mise en demeure. En cas d'inexĂ©cution dĂ©finitive, la Cour de cassation admet un effet rĂ©troactif de la mise en demeure[1], la mise en demeure n'a alors aucune incidence sur le quantum des dommages et intĂ©rĂȘts compensatoires.

L'exigence de mise en demeure est importante pour l'indemnisation du prĂ©judice dĂ©coulant du retard dans l'exĂ©cution en nature, soit dans l'exĂ©cution de la prestation promise. Lorsque l'exĂ©cution a ou aura finalement lieu en nature mais avec retard, le retard ne peut ĂȘtre indemnisĂ© en principe qu'Ă  dater de la mise en demeure. Ce n'est qu'Ă  dater de la mise en demeure que le dĂ©biteur est juridiquement en retard de s'exĂ©cuter.

Il en rĂ©sulte qu'en droit commun, des dommages et intĂ©rĂȘts moratoires ne peuvent pas ĂȘtre obtenus pour la pĂ©riode antĂ©rieure Ă  la mise en demeure ; les dommages et intĂ©rĂȘts moratoires ne commencent en principe Ă  courir qu'Ă  dater de la mise en demeure[2].

Une inexécution imputable au débiteur

La responsabilité contractuelle est à base de faute. La charge de la preuve dépend de la nature de l'obligation inexécutée. La preuve directe ou indirecte d'une cause étrangÚre libératoire libÚre le débiteur et le décharge de sa responsabilité à l'égard du créancier. Le débiteur ne peut toutefois pas se retrancher derriÚre le fait des personnes qu'il s'est substituées pour l'exécution de ses propres obligations. C'est là ce que l'on nomme la responsabilité contractuelle du fait d'autrui.

Une responsabilité à base de faute

Seule une inexécution contractuelle imputable au débiteur est de nature à engendrer une responsabilité dans son chef. Sa responsabilité n'est engagée que si l'inexécution est due à sa faute. Comme il en va de la responsabilité délictuelle de l'article 1382 du Code civil, la responsabilité contractuelle est également à base de faute. Peu importe la gravité de la faute.

La charge de la preuve

La charge de la preuve dépend de la nature de l'obligation inexécutée :

  • S'il s'agit d'une obligation de rĂ©sultat, le dĂ©biteur sera prĂ©sumĂ© en faute, en Ă©tat d'inexĂ©cution imputable du seul fait de l'inobtention du rĂ©sultat ; il lui appartient de renverser cette prĂ©somption en Ă©tablissant, de maniĂšre directe ou indirecte, une cause Ă©trangĂšre libĂ©ratoire[3].
  • S'il s'agit d'une obligation de moyens, le dĂ©biteur ne sera considĂ©rĂ© en Ă©tat d'inexĂ©cution imputable que si le crĂ©ancier rapporte la preuve d'une faute dans son chef, Ă  savoir que le dĂ©biteur ne s'est pas comportĂ© comme l'aurait fait un bon pĂšre de famille en vue de l'obtention du rĂ©sultat escomptĂ©[4].

La cause étrangÚre libératoire

Si l'inexĂ©cution est due Ă  une cause Ă©trangĂšre libĂ©ratoire, la responsabilitĂ© du dĂ©biteur n'est pas engagĂ©e. S'agissant d'une obligation de rĂ©sultat, c'est lĂ  le seul moyen pour le dĂ©biteur d'Ă©chapper Ă  sa responsabilitĂ©. La cause Ă©trangĂšre libĂ©ratoire se dĂ©finit comme : un Ă©vĂ©nement exempt de toute faute du dĂ©biteur, tant avant, pendant qu'aprĂšs sa survenance et qui a rendu impossible l'exĂ©cution de son obligation par le dĂ©biteur, cette impossibilitĂ© pouvant ĂȘtre soit temporaire, soit dĂ©finitive.

La responsabilité contractuelle du fait d'autrui

Le fait d'un tiers peut ĂȘtre une cause Ă©trangĂšre libĂ©ratoire Ă  condition que ce tiers soit une personne dont le dĂ©biteur n'est pas responsable, le dĂ©biteur ne peut pas se retrancher derriĂšre le fait d'un tiers dont il est responsable. Aucun texte du Code civil ne consacre de façon gĂ©nĂ©rale la responsabilitĂ© contractuelle du dĂ©biteur pour le fait de quelqu'un d'autre mais la doctrine et la jurisprudence ont dĂ©gagĂ© un principe gĂ©nĂ©ral de responsabilitĂ© du dĂ©biteur vis-Ă -vis de son cocontractant pour les personnes dont il est responsable. C'est le principe gĂ©nĂ©ral dit de la responsabilitĂ© contractuelle du fait d'autrui[5].

Quoiqu'il n'ait pas commis personnellement de faute dans l'exécution du contrat, le débiteur en état d'inexécution est responsable, vis-à-vis de son créancier, des personnes dont il s'entoure ou qu'il se substitue pour l'exécution du contrat.

Un dommage direct et prévisible

Comme il en va en matiÚre de responsabilité délictuelle, le principe est également, en matiÚre de responsabilité contractuelle, celui de la réparation intégrale du dommage subi.

« Les dommages et intĂ©rĂȘts dus au crĂ©ancier sont, en gĂ©nĂ©ral, de la perte qu'il a faite et du gain dont il a Ă©tĂ© privĂ© [...]. »

— Article 1149 du Code civil.

Le créancier, victime d'une inexécution contractuelle imputable à son débiteur, est en droit d'obtenir une indemnisation non seulement pour le préjudice déjà subi, par exemple le dommage causé à l'un de ses biens, mais encore pour le gain manqué du contrat, soit la perte du bénéfice escompté du contrat. Sont réparables tant le dommage passé que le dommage futur, pour autant cependant qu'ils soient certains. Toutes les formes de dommages sont en principe réparable : dommage matériel ou moral, dommages aux biens ou à la personne, etc.

« Le dĂ©biteur n'est tenu que des dommages et intĂ©rĂȘts qui ont Ă©tĂ© prĂ©vus ou qu'on a pu prĂ©voir lors du contrat, lorsque ce n'est point par son dol que l'obligation n'est point exĂ©cutĂ©e. »

— Article 1150 du Code civil.

Aux termes de l'article 1150 du Code civil n'est en principe rĂ©parable que le seul dommage prĂ©visible au moment de la formation du contrat. Il s'agit lĂ  d'un tempĂ©rament au principe de la rĂ©paration intĂ©grale. L'objet 1150 fait cependant l'objet d'une interprĂ©tation stricte, sinon restrictive. Telle qu'elle est interprĂ©tĂ©e par la Cour de cassation, l'exigence de prĂ©visibilitĂ© ne porte que sur la possibilitĂ© de survenance du dommage (sur sa cause ou sur sa nature) et non sur son Ă©tendue (non sur sa quotitĂ©). Il suffit que le dommage ait pu ĂȘtre prĂ©vu en son principe, peu importe son Ă©tendue[6].

En cas de dol du dĂ©biteur, mĂȘme le dommage imprĂ©visible est rĂ©parable. Le dol dont il est question Ă  l'article 1150 du Code civil n'est pas le dol vice de consentement mais bien le dol dans l'exĂ©cution. Le dol dans l'exĂ©cution n'est pas une tromperie mais bien une inexĂ©cution intentionnelle par le dĂ©biteur de ses obligations. La faute lourde n'est pas assimilĂ©e au dol[7].

« Dans le cas mĂȘme oĂč l'inexĂ©cution de la convention rĂ©sulte du dol du dĂ©biteur, les dommages et intĂ©rĂȘts ne doivent comprendre, Ă  l'Ă©gard de la perte Ă©prouvĂ©e par le crĂ©ancier et du gain dont il a Ă©tĂ© privĂ©, que ce qui est une suite immĂ©diate et directe de l'inexĂ©cution de la convention. »

— Article 1151 du Code civil.

L'exigence d'un dommage immĂ©diat et direct est interprĂ©tĂ©e comme se rapportant Ă  l'exigence d'un lien de causalitĂ© entre l'inexĂ©ction contractuelle et le dommage dont la rĂ©paration est demandĂ©e. La notion de causalitĂ© Ă  laquelle il est fait rĂ©fĂ©rence est la mĂȘme que celle qui a cours en matiĂšre de responsabilitĂ© dĂ©lictuelle. Il faut mais il suffit que l'inexĂ©cution imputable au dĂ©biteur soit une condition nĂ©cessaire du dommage tel qu'il s'est produit. C'est la thĂ©orie de l'Ă©quivalence des conditions qui est appliquĂ©e. Aussi bien, pour autant qu'il soit en lien causal avec l'inexĂ©cution imputable au dĂ©biteur, pour autant aussi qu'il ait Ă©tĂ© prĂ©visible en son principe, le dommage, mĂȘme indirect, donne lieu Ă  rĂ©paration.

Le principe d'exĂ©cution de bonne foi tempĂšre quelque peu le principe de la rĂ©paration intĂ©grale. Selon la Cour de cassation, il "commande" au crĂ©ancier "de prendre, avec loyautĂ©, les mesures raisonnables, qui permettent de modĂ©rer ou de limiter son prĂ©judice"[8]. Dans la mesure oĂč son prĂ©judice aurait pu ĂȘtre limitĂ© par l'adoption de mesures raisonnables, le crĂ©ancier n'obtiendra pas la rĂ©paration intĂ©grale.

Il appartient au créancier de l'obligation inexécutée de faire la preuve : de l'imputabilité de l'inexécution, avec à cet égard la distinction entre l'obligation de moyens et de résultat ; de l'existence et du montant de son préjudice ; du lien causal entre l'inexécution imputalbe et le préjudice souffert.

Comparaison avec la responsabilité délictuelle

Le parallélisme est grand entre les conditions de la responsabilité contractuelle (imputabilité de l'inexécution, dommage prévisible et lien de causalité) et les conditions de la responsabilité délictuelle (faute, dommage et lien de causalité). Il ne faut cependant jamais perdre de vue qu'au contraire de la responsabilité délictuelle, la responsabilité contractuelle n'est jamais qu'un pis aller, puisque c'est au premier chef à l'exécution en nature de la prestation que le créancier a droit.

Lorsque le créancier poursuit l'exécution en nature, seule l'imputabilité de l'inexécution est exigée; il n'est pas requis en outre, sous réserve de l'abus de droit, que l'inexécution ait causé un dommage. Contrairement à ce qui a lieu pour l'exécution par équivalent, le créancier a droit à l'exécution en nature de la prestation promise, sans devoir rapporter la preuve du préjudice encouru du fait de l'inexécution. L'exécution en nature n'est rien d'autre en effet que l'exécution de la convention telle qu'elle a été voulue par les parties. Elle est de droit eu égard à la force obligatoire reconnue au contrat.

Aménagements conventionnels

Les aménagements aux principes de base de la responsabilité contractuelle peuvent également résulter de la volonté des parties. Il existe des clauses qui précisent, nuancent ou dérogent au régime de droit commun de la responsabilité contractuelle.

Clauses pénales

Les parties fixent Ă  l'avance une prestation forfaitaire accessoire, le plus souvent une somme d'argent, qui sera due par le dĂ©biteur au cas oĂč il serait en Ă©tat d'inexĂ©cution ou en retard d'exĂ©cution. Par lĂ , les parties s'accordent pour que le forfait conventionnel soit allouĂ© au crĂ©ancier sans que celui-ci soit tenu de prouver l'existence du dommage ni l'existence du montant du dommage que l'inexĂ©cution lui a causĂ©.

Clauses exonératoires et limitatives de responsabilité

La clause exonĂ©ratoire de responsabilitĂ© a pour objet d'exonĂ©rer le dĂ©biteur de toute rĂ©paration en cas d'inexĂ©cution de son obligaiton. La clause limitative de responsabilitĂ© a pour objet de restreindre, par rapport Ă  ce qui a lieu en droit commun, la possibilitĂ© pour le crĂ©ancier d'obtenir, Ă  charge de son dĂ©biteur, rĂ©paration du prĂ©judice causĂ© par l'inexĂ©cution de l'obligation. On peut s'exonĂ©rer de n'importe quelle faute, mĂȘme la faute lourde, mais pas de son dol.

Notes et références

  1. Cass., 31 mars 2006, Pas., 2006, p. 733.
  2. Articles 1146 et 1153 du Code civil.
  3. Article 1147 du Code civil.
  4. Article 1137 du Code civil.
  5. Cass., 21 juin 1979, Pas., 1979, I, p. 1226 ; Cass., 5 octobre 1990, Bull. et Pas., 1991, I, p. 115 ; Cass., 27 février 2003, Pas., 2003, p. 422 ; Cass., 29 septembre 2006, R.W., 2006-2007, p. 1717.
  6. Cass., 11 avril 1986, Pas., 1986, I, p. 986, R.J.C.B., 1990, p. 79 ; Cass., 23 octobre 1987, Pas., 1988, I, p. 212.
  7. Cass., 18 mai 1987, Pas., 1987, I, p. 1125.
  8. Cass., 17 mai 2001, Pas., 2001, p. 889.
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