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Renvoi sur la Motor Vehicle Act (C.-B.)

Le Renvoi sur la Motor Vehicle Act (C.-B.)[1] est un renvoi important de la Cour suprĂȘme du Canada rendu en 1985 concernant la constitutionnalitĂ© de la Motor Vehicle Act[2] de la Colombie-Britannique.

L'arrĂȘt est l'une des premiĂšres dĂ©cisions rendues sur la notion de justice fondamentale prĂ©vue Ă  l'art. 7 de la Charte canadienne des droits et libertĂ©s[3]. La justice fondamentale va au-delĂ  de la simple justice naturelle car elle implique que toutes les infractions ayant des consĂ©quences pĂ©nales doivent prĂ©voir la commission d'une faute. Cette dĂ©cision Ă©tablit la justice fondamentale comme plus qu'un droit procĂ©dural similaire Ă  une procĂ©dure rĂ©guliĂšre, mais protĂšge Ă©galement des droits substantiels mĂȘme si ces droits Ă©taient contraires Ă  l'intention des rĂ©dacteurs initiaux de la Charte[4].

Les faits

L'article 94(2) de la Motor Vehicle Act de la Colombie-Britannique énonçait que conduire un véhicule automobile avec un permis suspendu constitue une infraction de responsabilité absolue. Pour obtenir une condamnation, le ministÚre public n'avait qu'à établir une preuve de la conduite du véhicule automobile, peu importe si le conducteur était au courant de la suspension. Une condamnation réussie est passible d'une peine d'emprisonnement d'au moins sept jours.

La Cour d'appel de la Colombie-Britannique a statué que la Loi violait un principe de justice fondamentale en vertu de l'article 7 de la Charte.

Avis de la Cour

Le juge Lamer, au nom d'un tribunal unanime, a conclu qu'une infraction de responsabilitĂ© absolue, qui rend une personne responsable d'une infraction mĂȘme si elle a pris des mesures pour Ă©viter de commettre une faute, viole les principes de justice fondamentale. Par consĂ©quent, toute possibilitĂ© d'atteinte Ă  la vie, Ă  la libertĂ© ou Ă  la sĂ©curitĂ© de la personne Ă  la suite d'une infraction de responsabilitĂ© absolue contrevient Ă  la Charte. Une loi qui viole l'article 7 ne peut ĂȘtre sauvegardĂ©e par l'article 1 de la Charte, sauf dans des circonstances extrĂȘmes (par exemple, les catastrophes naturelles, les dĂ©clenchements de guerre, les Ă©pidĂ©mies). Les principes de justice fondamentale imposent un test plus strict que l'article 1. Ainsi, toute loi qui viole les principes de justice fondamentale ne sera probablement pas sauvegardĂ©e par l'article 1.

En étudiant les moyens d'interpréter la Constitution, Lamer a rejeté la pratique consistant à se fier au témoignage des rédacteurs originaux de la Constitution comme aide à l'interprétation et a effectivement rejeté l'utilisation d'une approche d'intention originale du constituant pour l'interprétation constitutionnelle. Il a plutÎt fait référence à la doctrine de l'arbre vivant[5].

La Cour a Ă©galement rejetĂ© la dĂ©finition plus restrictive de la justice fondamentale sous l'ancien rĂ©gime de la DĂ©claration canadienne des droits, telle qu'Ă©noncĂ©e dans l'arrĂȘt Duke c. La Reine[6] de 1972.

La Cour a observĂ© que si elle avait adoptĂ© le point de vue alternatif de la justice fondamentale comme Ă©tant Ă©quivalente Ă  la justice naturelle, le gouvernement aurait eu plus de facilitĂ© Ă  satisfaire l'exigence constitutionnelle. Cela limiterait les droits Ă  la vie, Ă  la libertĂ© et Ă  la sĂ©curitĂ© de la personne, ou, comme l'a dit la Cour suprĂȘme, placerait les droits « dans un Ă©tat d'atrophie dĂ©plorable »[7]. La libertĂ© serait alors considĂ©rĂ©e comme un droit moins complet que l'article 9 L.C. 1982[8], qui protĂšge contre les arrestations et dĂ©tentions arbitraires. La sĂ©curitĂ© de la personne serait aussi moins complĂšte que les droits de l'article 8 contre les fouilles, les perquisitions et les saisies abusives[9]. La Cour a dĂ©cidĂ© qu'une telle interprĂ©tation serait incompatible avec la lecture normale de la Charte, dĂ©montrĂ©e dans Law society of Upper Canada c. Skapinker[10] et Hunter et autres c. Southam Inc.[11], qui se voulait gĂ©nĂ©reuse[12]. Lamer a soulignĂ© que les articles 8 Ă  14 de la Charte canadienne devraient ĂȘtre considĂ©rĂ©s comme des exemples de principes de justice fondamentale.

Une autre raison de rejeter l'interprĂ©tation de la justice fondamentale contenue dans l'arrĂȘt Duke c. La Reine est la diffĂ©rence de formulation entre la DĂ©claration des droits et la Charte. En garantissant la justice fondamentale, la DĂ©claration canadienne des droits fait rĂ©fĂ©rence Ă  une « audition Ă©quitable »[13]. L'article 7 de la Charte canadienne[3] ne prĂ©voit pas une audience Ă©quitable, et le seul contexte de la justice fondamentale est celui des « Ă  un droit beaucoup plus fondamental qu'ils modifient, c.‑à‑d. « le droit Ă  la vie, Ă  la libertĂ© et Ă  la sĂ©curitĂ© de sa personne »[14].

Notes et références

  1. [1985] 2 RCS 486,
  2. R.S.B.C. 1979, c. 288
  3. Loi constitutionnelle de 1982, Annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R-U), 1982, c 11, art 7, <https://canlii.ca/t/dfbx#art7>, consulté le 2021-11-20
  4. Cette distinction a par la suite été invoquée dans R c Morgentaler, [1988] 1 RCS 30 et Chaoulli c Québec (PG), 2005 CSC 35
  5. Renvoi sur la Motor Vehicle Act (C.-B.), précité, par. 53
  6. [1972] RCS 917
  7. Renvoi sur la Motor Vehicle Act (C.-B.), précité, par. 26
  8. Loi constitutionnelle de 1982, Annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R-U), 1982, c 11, art 9, <https://canlii.ca/t/dfbx#art9>, consulté le 2021-11-20
  9. Loi constitutionnelle de 1982, Annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R-U), 1982, c 11, art 8, <https://canlii.ca/t/dfbx#art8>, consulté le 2021-11-20
  10. [1984] 1 RCS 357
  11. [1984] 2 RCS 145
  12. Renvoi sur la Motor Vehicle Act (C.-B.), précité, par. 26-28
  13. Déclaration canadienne des droits, SC 1960, c 44, art 2, <https://canlii.ca/t/ckrt#art2>, consulté le 2021-11-20
  14. Renvoi sur la Motor Vehicle Act (C.-B.), précité, par. 57-58

Lien externe

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