Poutine (Nice)
La poutine (poutina en niçois) est le nom vernaculaire utilisé dans la région niçoise, pour désigner des alevins de poisson, particuliÚrement Sardina pilchardus et Engraulidae encrasicolus.
En 1810, Antoine Risso identifiait un alevin de poisson, pĂȘchĂ© dans les eaux niçoises, comme Ă©tant celui dâAphia minuta et lui donnait le nom de « nonnat ».
La poutine ou nonnat nâest pas non plus le seul format de sardines ou dâanchois pĂȘchĂ©, consommĂ© et vendu sur le littoral maritime. En 1947, le premier lexique bilingue français-niçois[1] traduisait les diffĂ©rentes Ă©tapes de croissance de la sardine depuis sa naissance ; Poutina, rafaneta, pataieta, palaia et sardina.
La pĂȘche Ă la poutine
La pĂȘche Ă la poutine se pratique avec une senne Ă mailles serrĂ©es, technique de pĂȘche appelĂ©e aussi issaugue. C'est une pĂȘche traditionnelle qui se pratique depuis des siĂšcles sur le littoral niçois[2] et la Riviera italienne[3].
Au dĂ©but du XVIIe siĂšcle, les autoritĂ©s locales sâinquiĂ©taient et imputaient la rarĂ©faction du poisson sur le marchĂ© niçois Ă lâĂ©troitesse des filets utilisĂ©s par les pĂȘcheurs Ă la sardine de tout Ăąge : « Depuis quelques annĂ©es[4], disent les consuls le , les pĂȘcheurs ont introduit des filets et engins quâils nâutilisaient pas auparavant, de sorte que lâon ne retire plus de profit habituel de la pĂȘche abondante de lâanchois de fond, mais on prend plus que des petits avec les filets aux mailles de plus en plus serrĂ©es. » AprĂšs avoir informĂ© le gouverneur, les consuls interdisaient lâusage de filets de plus de 18 Ă 20 trous Ă lâempan.
Cependant cette interdiction Ă©tait plus ou moins bien observĂ©e et lâexploitation des ressources de la pĂȘche demeurait trĂšs fluctuante.
Emmanuel FodĂ©rĂ©[5] raconte que la pĂȘche Ă la sardine Ă©tait si abondante en 1787, quâon prit dix mille rups[6] de ces poissons dans une seule matinĂ©e. Et, en 1803 lors de son voyage Ă Nice, il constate de visu, que les Ă©tals de poissonneries sont rĂ©duits souvent Ă des nonats, tous transparents Ă travers desquels on voit tout le systĂšme de circulation.
Actuellement (2007), cette activitĂ© halieutique est rĂ©glementĂ©e par la Commission pĂȘche du Parlement europĂ©en qui autorise cette pĂȘche avec une maille de filet normalisĂ©e et Ă une date de prĂ©lĂšvement bien prĂ©cise, habituellement du au .
Aujourd'hui, le fruit de la pĂȘche est souvent vendu, Ă peine le filet tirĂ© hors de lâeau, plusieurs dizaines dâeuros le kilogramme.
Il y a encore une cinquantaine dâannĂ©es, lâarrivĂ©e de la poutine produisait toujours une certaine effervescence aux carrefours des principales rues niçoises. Les poissonniĂšres avec leur charrette Ă bras emplie de poutine interpellaient le chaland en clamant haut et fort : « A la bella poutina ! A la bella poutina ! »
Et leur gouaille toute méridionale résonnait, bien souvent, au-delà des quartiers du centre ville.
Cuisiner la poutine
La poutine se consomme en soupe (Ă peine blanchie), au lait[7], en beignet, en omelette. Cependant, le moyen le plus simple pour dĂ©couvrir toute sa fragrance et sa saveur est de lâapprĂ©cier crue avec un filet dâhuile dâolive et quelques gouttes de jus de citron. Les anciens confectionnaient aussi du pissalat avec de la poutine fermentĂ©e dans une saumure.
Sources
Notes et références
- Dictionnaire français-niçois de Georges Castellana, Ăditions ludographiques françaises, Nice- 1947.
- Nice historique no 208, p. 34, 1950.
- Sur la Riviera ligure du ponent, lâalevin de sardines et d'anchois se nomme gianchetti ou bianchetti.
- Archives municipales BB 29, fol 180-181.
- Voyage aux Alpes maritimes, d'Emmanuel Fodéré, éditions Levrault, Paris-1821.
- Un rup = 8 kg.
- Poché dans du lait à ébullition le nonat est un mets délicat selon Antoine Risso.
Articles connexes
- Civelle : alevin d'anguille consommé comme la poutine sur les cÎtes Atlantiques de France et d'Espagne.
Galerie
1624 - PĂȘcheurs tirant les filets devant les murailles de la ville de Nice. 1865 - Filets de pĂȘche Ă©tendus sur la plage des ponchettes Ă Nice. 1911 - Halage de filets de senne sur le rivage mentonnais.