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Ponce-Denis Écouchard-Lebrun

Ponce-Denis Écouchard-Lebrun, dit Lebrun Pindare, né le à Paris et mort le dans la même ville, est un poète français.

Ponce-Denis Écouchard-Lebrun
Portrait par Jean-Bernard Restout de Lebrun, intitulé le Poète inspiré.
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Biographie

Fils d'un valet de chambre du prince de Conti, Lebrun fut inscrit par ce dernier au collège Mazarin, où il eut pour camarade d'école un fils de Louis Racine, dont il devint l'élève. Il fit de brillantes études et montra des dispositions précoces pour la poésie, composant ses premiers vers à 12 ans. En 1755, il publia une Ode sur les désastres de Lisbonne. En 1759, il épousa Marie Anne de Surcourt, qui apparaît dans ses médiocres Élégies sous le nom de Fanny. Sa femme eut à subir son tempérament emporté et violent et quand, en 1774, elle demanda la séparation de corps, elle fut appuyée par la propre mère de Lebrun et par sa sœur. La séparation fut prononcée en 1781.

En 1760, Lebrun rencontra une nièce de Corneille, qui traversait une situation difficile, et écrivit une ode pour la recommander à Voltaire qui adopta la jeune fille[1]. Lebrun publia son ode et la correspondance qu'il avait eue avec Voltaire à cette occasion pour se glorifier de sa bonne action ce qui lui valut les moqueries de Fréron à qui il riposta par deux violents pamphlets : La Wasprie (1761) et L'Âne littéraire (1761), qu'on attribue aussi à son frère, Jean-Étienne Écouchard-Lebrun de Granville.

Ă€ la mort du prince de Conti, il perdit sa place de SecrĂ©taire des commandements de ce prince et il perdit Ă©galement une grande part de sa fortune dans la banqueroute du prince de GuĂ©mĂ©nĂ©[2] en 1783 et dut s'installer dans une petite chambre de la rue Montmartre dont Chateaubriand a dĂ©crit la misère : « Son Parnasse, chambre haute dans la rue Montmartre, offrait pour tout meuble des livres entassĂ©s pĂŞle-mĂŞle sur le plancher, un lit de sangle dont les rideaux, formĂ©s de deux serviettes sales, pendillaient sur une tringle de fer rouillĂ©, et la moitiĂ© d'un pot Ă  l'eau accotĂ©e contre un fauteuil dĂ©paillĂ©[3] Â». C'est Ă  cette Ă©poque qu'il composa un long poème restĂ© inachevĂ©, Les VeillĂ©es des Muses, et son Ode Ă  Georges-Louis Leclerc, Comte de Buffon, considĂ©rĂ©e comme l'un de ses meilleurs ouvrages. Ami du poète Pierre-Louis GuinguenĂ© qui le protĂ©geait, Lebrun « Ă  son tour, rĂ©pandait ses rayons sur les hauteurs de GuinguenĂ©[4]. Â»

Écouchard-Lebrun devait désormais mendier les pensions du gouvernement pour survivre, et dut flatter tour à tour les puissants du jour. Il compara Calonne à Sully et Louis XVI à Henri IV avant de se faire le poète officiel de la Révolution française, logé au Louvre et criblant de ses traits le roi et la reine déchus.

Reine que nous donna la colère céleste,
Que la foudre n’a-t-elle embrasé ton berceau !

La veine rĂ©volutionnaire lui inspira l'un de ses meilleurs poèmes, sa remarquable Ode sur le vaisseau "Le Vengeur". Il termina en chantant les louanges de NapolĂ©on dans son Ode nationale contre l'Angleterre, après avoir Ă©tĂ© pourtant un opposant Ă  Bonaparte, contre qui il Ă©crivit « des vers sanglants Â», aux dires de Chateaubriand.

Le Directoire le nomma membre de l'Institut dans la section de poĂ©sie (3e classe) le . Ă€ cette Ă©poque, il Ă©pousa sa servante qui, dit Sainte-Beuve, « le trompait et le maĂ®trisait Â» et devint aveugle. Le gouvernement le logea dans un grenier du Louvre, puis au Palais-Royal. En 1803, il fut placĂ© dans la deuxième classe (Ă©quivalant Ă  l'AcadĂ©mie française) oĂą il occupa le fauteuil de Louis-Georges de BrĂ©quigny.

Postérité littéraire

La versatilité politique d'Écouchard-Lebrun a durablement terni sa réputation jusqu'à faire oublier son œuvre poétique, dont les mérites sont pourtant réels, surtout dans un siècle peu doué pour la poésie. Il fut l'un des rares poètes lyriques de son époque, méritant le surnom un peu ridicule de « Pindare français » qui lui fut donné peut-être avec un peu de malice. Avec ses défauts et son mauvais caractère, il avait certes une haute idée de lui-même, mais elle était inséparable d'une haute idée de la poésie.

Il ne trouva pas toujours les sujets les plus propres Ă  l'inspirer, mais l’Ode sur le vaisseau "le Vengeur" oĂą, selon le mot d’Alexandre Vinet, il fait assister ses lecteurs « en compagnie d'OrphĂ©e aux exploits des rĂ©publicains de l'an II Â», trouve les mots justes pour cĂ©lĂ©brer les idĂ©aux de la RĂ©volution et l'hĂ©roĂŻsme de ses enfants, avec des accents qui font penser Ă  Victor Hugo :

Voyez ce drapeau tricolore,
Qu’élève en périssant leur courage indompté.
Sous le flot qui les couvre, entendez-vous encore
Ce cri : « Vive la liberté » ?
Ce cri !... c’est en vain qu’il expire,
Étouffé par la mort et par les flots jaloux.
Sans cesse il revivra, répété par ma lyre ;
Siècles, il planera sur vous !

L'inspiration se soutient rarement d'un bout Ă  l'autre d'un poème — La Harpe, qu'il n'a pas Ă©pargnĂ©, dit qu'il a Ă©crit beaucoup de bonnes strophes et pas une seule bonne ode ; Chateaubriand se montre lui aussi sĂ©vère pour ses Ă©lĂ©gies qui, dit-il, « sortent de sa tĂŞte, rarement de son âme ; il a l'originalitĂ© recherchĂ©e, non l'originalitĂ© naturelle[5] Â» — mais beaucoup de vers montrent un vĂ©ritable sens de la poĂ©sie, de la langue et des images :

Mortel superbe, folle argile,
Cherche tes destins éclipsés.

Ou encore ce passage sur Homère :

Trente siècles roulant sur les faibles mortels,
Entraînant les États, les trônes, les autels,
Loin d'engloutir Homère en leur course profonde,
N'ont fait que l'élever sur les débris du monde.

Ou encore ces vers de son ouvrage le plus célèbre, l’Ode à Monsieur de Buffon sur ses détracteurs :

Ainsi l'active chrysalide
Fuyant le jour et le plaisir,
Va filer son trésor liquide
Dans un mystérieux loisir.
La nymphe s'enferme avec joie
Dans ce tombeau d'or et de soie
Qui la voile aux profanes yeux,
Certaine que ses nobles veilles
Enrichiront de leurs merveilles
Les rois, les belles, et les dieux.

Écouchard-Lebrun avait, en outre, un talent remarquable pour l'épigramme, et Chateaubriand loue son talent pour la satire et en particulier son épître sur la bonne et la mauvaise plaisanterie. Il en a composé plus de 600 (Pierre-Louis Guinguené, éditeur de ses œuvres, en a recueilli 636, en omettant notamment celles qui lui étaient consacrées), n'épargnant pas ses collègues de l'Institut de France, qui accueillirent sa mort en 1807 avec un certain soulagement. Ainsi, il prit pour cible le paisible Andrieux :

Dans ces contes, pleins de bons mots,
Qu'Andrieux lestement compose,
La rime vient mal Ă  propos
Gâter les charmes de la prose.

Il attaqua Ă©galement La Harpe, Baour-Lormian, Neufchâteau (qu'il appelle « le nouveau Pibrac Â»), etc.

Notes et références

  1. Dr Hœfer, Nouvelle biographie générale depuis les temps les plus reculés jusqu'à nos jours, vol. 30, Paris, Firmin Didot, , « Lebrun », p. 146
  2. Armand Louis de Gontaut-Biron et Louis Lacour, Mémoires du duc de Lauzun (1747-1783), Paris, Poulet-Malassis et de Broise, , « Nouvelles de Mme de Coigny », p. 313
  3. Chateaubriand, MĂ©moires d'Outre-tombe, Livre IV, chap. 12.
  4. Chateaubriand, MĂ©moires d'Outre-tombe, ibid.
  5. Chateaubriand, op. cit.

Bibliographie

  • Maurice Allem, « Ă‰couchard-Lebrun Â», Anthologie poĂ©tique française XVIIIe siècle, Paris, Garnier-Flammarion, 1966.
  • Robert Sabatier, La poĂ©sie du dix-huitième siècle, Paris, Albin Michel, 1975, p. 247-251.
  • Gustave Vapereau, Dictionnaire universel des littĂ©ratures, Paris, Hachette, 1876, article "Lebrun".

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