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Plan Yinon

L’expression « plan Yinon Â» se rĂ©fère Ă  un article paru en fĂ©vrier 1982 dans la revue Kivounim (« orientations Â» en hĂ©breu), publiĂ©e par l’Organisation sioniste mondiale, domiciliĂ©e Ă  JĂ©rusalem. L’article, intitulĂ© Une stratĂ©gie pour IsraĂ«l dans les annĂ©es 80, est signĂ© par Oded Yinon, qui se prĂ©sente comme journaliste et ancien fonctionnaire du ministère israĂ©lien des Affaires Ă©trangères. La thèse de l'existence du « plan Yinon Â» est controversĂ©e : elle est utilisĂ©e par des militants antisionistes pour critiquer la politique israĂ©lienne au Proche et au Moyen-Orient mais d'autres auteurs jugent que l'article est restĂ© anecdotique (voire largement ignorĂ©) et qu'il ne faut pas le confondre avec un « plan » ou une « feuille de route » qui aurait Ă©tĂ© suivie par les dirigeants d'IsraĂ«l.

Contenu

L'article estime que l’intĂ©rĂŞt de l’État hĂ©breu est de favoriser la crĂ©ation, dans le monde arabe, de mini-États antagonistes trop faibles et trop divisĂ©s pour s’opposer efficacement Ă  lui : « L’éclatement de la Syrie et de l’Irak en rĂ©gions dĂ©terminĂ©es sur la base de critères ethniques ou religieux doit ĂŞtre, Ă  long terme, un but prioritaire pour IsraĂ«l, la première Ă©tape Ă©tant la destruction de la puissance militaire de ces États. […] Riche en pĂ©trole, et en proie Ă  des luttes intestines, l’Irak est dans la ligne de mire israĂ©lienne. Sa dissolution serait, pour nous, plus importante que celle de la Syrie, car c’est lui qui reprĂ©sente, Ă  court terme, la plus sĂ©rieuse menace pour IsraĂ«l. »

Historique

Huit mois après sa publication initiale dans Kivounim, l’article est republiĂ© en octobre 1982 par la toute jeune Revue d’études palestiniennes (1982-2008), par l’entremise d’IsraĂ«l Shahak (1933-2001)[1], ancien prĂ©sident de la Ligue israĂ©lienne pour les droits humains et civils (1970-1990) et militant antisioniste. Cette deuxième publication intervient alors que vient de s’achever l’intervention militaire israĂ©lienne au Liban (juin-septembre 1982), dite « OpĂ©ration Paix en GalilĂ©e Â», marquĂ©e notamment par les massacres commis, par les phalanges chrĂ©tiennes libanaises, dans les camps de rĂ©fugiĂ©s palestiniens de Sabra et Chatila (16-).

Des idĂ©es similaires Ă  celles de Yinon sont dĂ©fendues en 1996 dans un rapport remis au Premier ministre israĂ©lien Benyamin Netanyahu. IntitulĂ© A Clean Break: A New Strategy for Securing the Realm, il suggère « une coupure nette Â» avec la philosophie des accords d’Oslo, le renversement de Saddam Hussein et une guerre par procuration avec la Syrie. Il a Ă©tĂ© rĂ©digĂ© par un groupe d’études issu de l’Institute for Advanced Strategic and Political Studies, un think tank nĂ©oconservateur israĂ©lo-amĂ©ricain. Le groupe d’études Ă©tait dirigĂ© par une figure du mouvement nĂ©oconservateur et ancien haut fonctionnaire du DĂ©partement de la DĂ©fense amĂ©ricain, Richard Perle. Les conclusions du rapport ont Ă©tĂ© rejetĂ©es par Netanyahu.

L’article de Yinon a été publié également en 2007 par la revue Confluences Méditerranée (n°61), sous le titre Une stratégie persévérante de dislocation du monde arabe et avec l’introduction écrite par Shahak pour la Revue d’études palestiniennes vingt-cinq ans plus tôt.

Influence

La portée de cet article fait l’objet de débats.

Pour certains, les idĂ©es dĂ©fendues par Yinon auraient Ă©tĂ© en grande partie reprises par les gouvernements israĂ©liens successifs depuis 1982. Elles auraient ainsi largement contribuĂ© Ă  forger la doctrine gĂ©opolitique de l’État hĂ©breu depuis les annĂ©es 80. L’invasion amĂ©ricaine de l’Irak en 2003, la chute de Saddam Hussein, la guerre civile en Syrie (depuis 2011), l’éclatement de ce pays, la balkanisation du Proche- et du Moyen-Orient ou encore l’essor de l’État islamique seraient ainsi autant de preuves que le « plan Yinon Â» a bien Ă©tĂ© suivi par IsraĂ«l. Cette thèse est dĂ©fendue par plusieurs militants antisionistes comme IsraĂ«l Shahak, le prĂ©dicateur suisse Hani Ramadan[2], le nĂ©gationniste Roger Garaudy (qui fait rĂ©fĂ©rence au « plan Yinon Â» dans son livre L’Affaire IsraĂ«l. Le sionisme politique en 1983), la journaliste italienne Silvia Cattori, etc.

D’autres estiment au contraire que les idĂ©es de Yinon n’ont eu aucune influence sur les dĂ©cisions stratĂ©giques d’IsraĂ«l. L’identitĂ© mĂŞme de ce journaliste (inconnu en IsraĂ«l) reste mystĂ©rieuse : on ne sait pas ainsi quelles Ă©taient ses fonctions exactes au ministère des Affaires Ă©trangères de son pays. Pour MichaĂ«l Prazan et Adrien Minard, biographes de Roger Garaudy, « rien n’indique que cet article […] dĂ©signe un plan de travail concret validĂ© par les autoritĂ©s. […] Il s’agit d’une position personnelle parmi d’autres, exprimĂ©e par un simple journaliste ». L’importance prĂŞtĂ©e au « plan Yinon Â» relèverait d’une thĂ©orie du complot similaire Ă  celle entourant le faux connu sous le nom de Protocoles des Sages de Sion[3].

Notes et références

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