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Pauvre Lola

Pauvre Lola est une chanson française écrite et composée par Serge Gainsbourg en 1964.

Pauvre Lola
Description de cette image, également commentée ci-après

Fiche artistique

Commentaire

On sait combien Gainsbourg fut inspiré, voire obsédé par Lolita, le roman de Vladimir Nabokov adapté au cinéma par Stanley Kubrick. À peine sorti de son précédent album, Serge n’a de cesse de répéter que « Non, rien n’aura raison de moi, j’irai t’chercher ma Lolita, chez les yé-yé »[1]. À partir de là, ce thème s’inscrira en filigrane dans toute son œuvre, le paroxysme étant Histoire de Melody Nelson.
Ici, « Lolita-Gall », pour un peu, se donnerait sans retenue dès le début, ce qui n’est pas du goût de « Humbert-Gainsbourg » (en référence au personnage du roman, Humbert Humbert) :

Faut savoir s’étendre
Sans se répandre
Pauvre Lola

Elle réalise alors qu’elle s’est fourvoyée et elle rit. Ce qui est attesté par Jean-François Brieu[2] : « Son rire souligne les contradictions dans lesquelles s’empêtre la Pauvre Lola. » Effectivement, tout de suite après, la voilà très réservée, ce qui excite davantage le beau Humbert-Gainsbourg :

Ne pas la surprendre
Pas l’entreprendre
De but en bas

Et ça la fait glousser un peu plus. Mais on ne saura jamais la fin de l’histoire puisque Humbert-Gainsbourg demande à Lolita-France si elle se rend compte qu’avec ses continuels « p’t-être ben que oui, p’t-être ben que non », on ne peut pas la prendre jusqu’aux calendes grecques… (Elle en rit encore).
Jean-François Brieu émet une hypothèse sur toute cette affaire : « Docteur Serge, dissimulé derrière le visage blond de madame Charlemagne, a trouvé le moyen de propager des propos auxquels il n’a pas envie de renoncer : le désir, le dégoût, la séduction et la sublimation des corps. » Ce que confirmerait Serge Gainsbourg : « J’ai placé mon univers de la chanson dans une sphère de luxe et de névrose. »[3]
Alain Coelho[4] écrit à propos de la versification de Pauvre Lola : « Un attrait particulier pour la sonorité et cette technique du rejet qui vont caractériser Gainsbourg. […] Le texte Pauvre Lola est exemplaire : « Il est des mots tendres / Qu’elle aime entendre / Tendre Lola / Oui quelques mots tendres / Devraient atten- / Drir Lolita. » Dans ces quelques vers laconiques s’énonce aussi le caractère définitif, sans appel, de l’univers singulier qui cherche à s’unifier en Gainsbourg. […] Il semble que la perspective de l’auteur soit enfin trouvée ; de cette adéquation du rejet et d’un « ton distant », Gainsbourg va en faire, avec l’association verbale, la clef de voûte de ses recherches d’écritures. »
Sinon tout est percutant musicalement et techniquement[5] : Alain Goraguer et ses grands jazzmen « jazzhotent » à qui mieux mieux avec une prise de son effectuée par Roger Roche. Et si Lolita-France n’arrête pas de se répandre en éclats de rires, c’est parce que l’élégant et classieux phrasé d’Humbert-Gainsbourg est quand même terriblement séduisant…[6]
Le rire de France Gall fait également partie des percussions. Il est régulé afin d’éviter des pics sonores disgracieux et résonne comme des grelots ou des clochettes. Mais cela contrarie un peu la légende qui prétend qu’on aurait capté son mythique rire en cachette : « La pauvre Lola, celle qui glousse à la fin de la chanson n’est d’ailleurs pas la véritable Lola, mais bien la jouvencelle France Gall dont le rire a été capturé à son insu en studio. »[7]

Pauvre Lola en CD album

  • 2001 : Gainsbourg Percussions (1 CD Mercury/Universal) (RĂ©Ă©dition de l'original de 1964)
  • 2007 : Bonnie and Clyde (1 CD Mercury/Universal) (RĂ©Ă©dition de l'original de 1968)

Autour de Pauvre Lola

  • Version Bourvil-Maillan : parodie des deux acteurs-chanteurs, l’une des dernières chansons enregistrĂ©es par Bourvil le avant son dĂ©cès survenu deux mois et demi après (le ).
  • Pauvre Lola prĂ©sente des similitudes avec la chanson Umqokozo [8](A Children's Game Song About A New Red Dress) de Miriam Makeba, incluse dans son album Many Voices of Miriam Makeba (Kapp KL-1274) 1960, apparemment Ă©crite et composĂ©e par elle-mĂŞme. NĂ©anmoins, Gainsbourg est seul crĂ©ditĂ© Ă  la Sacem pour cette chanson contrairement Ă  trois autres titres (Joanna, New York USA et Marabout) du mĂŞme album Gainsbourg Percussions pour lesquels la Sacem accrĂ©dite Gainsbourg en tant qu'adaptateur de compositions du NigĂ©rian Babatunde Olatunji, comme le spĂ©cifient par ailleurs Yves-Fernand Bouvier et Serge Vincendet dans leur anthologie des Ĺ“uvres de Serge Gainsbourg, L'IntĂ©grale et Cætera[9].
  • La chanson est entendue dans le premier Ă©pisode de la sĂ©rie Legion[10] lors de la scène de rĂŞve suivi de danse de David[11].

Notes et références

  1. in album Gainsbourg Confidentiel paru en décembre 1963
  2. Analyse incluse dans le livret de l’album Gainsbourg Percussions
  3. in Gilles Verlant, Gainsbourg, Éditions Albin Michel, Paris, 2000, (ISBN 2-226-12060-2).
  4. Auteur de la préface Gainsbourg côté texte du recueil Mon propre rôle (volume 1), Folio/Denoël, Paris, 1987-1991 (ISBN 2-07-038445-4).
  5. Voir section « Autour de l'album Gainsbourg Percussions »
  6. Le magazine Music-Hall compare sa voix à un saxophone ténor… Voir section « Autour de l'album Gainsbourg Percussions »
  7. Source : extrait d’Au confort moderne, historique établi par Jean-Éric Perrin pour le livret-compilation Serge Gainsbourg, Mercury Philips Universal 562 757-2 (2000).
  8. Lien Umqokozo youtube
  9. Pages 198, 206, 207, 209 et 210, Éditions Bartillat, 2005 (ISBN 2841003418).
  10. « Legion saison 1 : Les chansons emblématiques du pilote », sur Brain Damaged, (consulté le ).
  11. « Legion Serie (Dance Scene) - Pauvre Lola » [vidéo], sur YouTube (consulté le ).
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