PapelĂłgrafo
En espagnol, un papelĂłgrafo est un synonyme de paperboard. Au Chili, le papelĂłgrafo est aussi une forme particuliĂšre dâaffiche revendicative, qui consiste en un rouleau de papier de plusieurs mĂštres de long et dâun mĂštre de haut environ, portant un slogan, parfois ornĂ©e dâune peinture, et collĂ©e clandestinement sur un mur bordant une rue ou un espace public.
Origine du papelĂłgrafo
L'origine du papelĂłgrafo s'inscrit dans l'histoire de l'expression murale au Chili. Les expressions murales apparaissent au Chili Ă la fin des annĂ©es 1960, afin de contester le monopole de lâexpression de lâopinion publique par les mĂ©dias[1] - [2]. Il s'agit alors d'une continuitĂ© avec le muralisme mexicain. Les messages sont alors peints directement sur les murs des rues, par des groupes organisĂ©s dâune dizaine de personnes nommĂ©s brigade, en quelques minutes pour Ă©chapper Ă la police[2]. Les deux principales brigades, qui se font concurrence, sont la Brigada Ramona Parra, dont les membres sont en gĂ©nĂ©ral Ă©galement membres des jeunesses du PC (sans que le PC ne dirige la brigade) et la Brigade Elmo Catalan (proche du PS). Ils rivalisent dâimagination dans les slogans, et lâaspect artistique des muraux[2]. Le gouvernement dâUnitĂ© populaire encourage cette forme dâexpression (1970-1973) : de vĂ©ritables fresques sont crĂ©Ă©es, comme celle racontant lâhistoire du mouvement ouvrier chilien sur les rives du Mapocho[2].
Les brigades sont interdites aprĂšs le coup d'Ătat de Pinochet, le ; les peintures existantes sont effacĂ©es ou recouvertes[2]. Mais dans les annĂ©es 1980, les peintures renaissent pour raconter lâhistoire de la dictature, du coup dâĂtat et les crimes du rĂ©gime. Les visages des disparus sont Ă©galement une source dâinspiration[2]. De nombreuses brigades sont alors crĂ©Ă©es[2]. La technique a changĂ© depuis les annĂ©es 1970 : les lettres des messages sont peintes sur une bande de papier dans un atelier, puis la bande de papier est roulĂ©e, transportĂ©e jusquâau lieu oĂč elle doit ĂȘtre collĂ©e. Pendant que quelques membres de la brigade font le guet, le mur est nettoyĂ©, et dĂšs quâil est encollĂ© sur quelques mĂštres, le collage du papelografo commence[2]. Les supports choisis sont les murs des chantiers ou des rues passantes (dont lâAlameda, principale avenue de Santiago, ou la panamĂ©ricaine)[2] - [1]. Les brigades Ă©taient alors exclusivement de gauche ; les partis de droite en font un usage limitĂ© depuis les annĂ©es 1990.
Brigades utilisant le papelĂłgrafo
La plus connue des brigades actuelles rĂ©alisant des papelĂłgrafo est la brigade Juan ChacĂłn Corona, qui a choisi de revenir aux peintures de slogans et dâabandonner les peintures figuratives[2]. Elle est crĂ©Ă©e Ă la fin des annĂ©es 1980, au moment de lâaffaire de fruits chiliens contenant du cyanure. Le ministre Caceres accusant le PC dâĂȘtre responsable, la brigade affiche son premier message : « Caceres ment »[1].
Un des fondateurs de la ChacĂłn, Danilo Bahamondes, ancien membre de la Brigade Ramona Parra, est chargĂ© de 1989 Ă 1997 de la ChacĂłn au sein du PC. Quand il quitte le PC, il crĂ©e une ChacĂłn alternative[2] - [1]. La ChacĂłn signe dâune Ă©toile noire et du nom de la brigade. Elle utilise une typographie garantissant une lisibilitĂ© maximale Ă grande distance[1].
Sources
- Le Tigre, « Les brigades Chacón », Le Tigre, mis en ligne le 29 janvier 2008 , consulté le 12 décembre 2009
- Antonia Garcia Castro, « Les murs comme support du politique : la brigade Chacón au Chili (1989-1997) », Cultures et conflits no 57, printemps 2005, ISSN 1157-996X, article sous licence Creatives Commons, p 259-275